Chroniques



MUSIC FROM AROUND THE WORLD (USA)
THIERRY ZABOITZEFF - LE PASSAGE
Par Archie Patterson 20/03/2024

En 1976, Thierry Zaboitzeff était l'un des premiers membres de la première incarnation de l'ensemble français Art Zoyd 3. Leur premier album intitulé SYMPHONIE POUR LE JOUR OU BRULLERONT LE CITIES (Symphony for The Day Cities Will Burn) a révolutionné la scène du jazz et de la musique expérimentale française.
Thierry a quitté le groupe pour poursuivre ses propres projets musicaux après l'album HAXAN en 1997. Depuis, il n'a cessé d'enregistrer des albums explorant un large éventail de styles et de sons musicaux.
Aujourd'hui, Thierry continue d'écrire et d'interpréter de la musique pour la danse, le théâtre, les événements multimédias, les bandes originales de films, ainsi que de la musique pour ses propres projets et performances. En 2023, Thierry a sorti un single intitulé REMINIEMISCENCES et un Ep intitulé LUVOS MIGRATIONS. Récemment, j'ai reçu son tout nouvel album intitulé LE PASSAGE dans lequel on retrouve un ancien membre de l'incarnation originale d'Art Zoyd, Jean Pierre Soarez, qui joue de la trompette sur 3 des titres de l'album.
LE PASSAGE pourrait bien être le meilleur album de Thierry. Musicalement, il rappelle parfois la SYMPHONIE POUR LE JOUR OU BRULLERONT LE CITIES d'Art Zoyd 3, avec trois chansons où Jean Pierre Soarez joue d'incroyables solos de trompette sur les titres 1, 3 et 5. Les compositions de Thierry présentent un large éventail de mélodies puissantes utilisant le violoncelle, la voix, la guitare basse, les claviers, les traitements vocaux, les échantillonneurs, la programmation, ainsi que divers instruments acoustiques.
La piste 1 s'intitule "A la Poursuite du Zoyd - Extended" et commence par une incroyable double piste de basse, une voix gutturale et des chants, avec la trompette de Jean Pierre qui improvise par-dessus.
La piste 2, "La Foret", contient une lamentation écrite par François-René de Chateaubriand. Je ne parle pas français, donc je peux seulement dire qu'en écoutant la musique, il m'a semblé qu'il s'agissait peut-être d'une réflexion métaphorique sur l'assaut de l'humanité et son impact sur la planète aujourd'hui, la planète étant profanée et ses habitants étant éviscérés pour ne laisser qu'un désert. C'est le morceau le plus long de l'album et peut-être la composition la plus puissante que Thierry ait jamais faite.
Il joue des claviers, du violon, de la basse, de divers effets vocaux, de samples et d'effets électroacoustiques. À un moment donné, il grogne, chante, utilise des échantillons sonores et du violoncelle. L'effet de la musique m'a ramené à la fin du film APOCYLYPSE NOW d'Oliver Stone et au colonel Kurtz de Marlon Brando dans sa hutte dans la jungle, et aux visions de folie qu'il avait dans la tête à la fin du film.
La piste 3 "Poster Boy" est en revanche beaucoup plus légère sur le plan musical. La trompette de Jean Pierre joue une fantastique ligne de tête qui accentue le "Strum und Drang" musical plus tempéré des arrangements néo-classiques de Thierry, avec basse, cordes, incantations et effets vocaux.
La piste 4 "Twisted Zoydian Song" commence par d'incroyables vagues sonores réverbérées, suivies par le piano et les voix gutturales de Thierry, agrémentées d'échantillons synthétiques et de violoncelle.
Le titre LE PASSAGE conclut l'album. Cette fois, la trompette de Jean Pierre ajoute des accents subtils et efficaces qui servent de complément parfait à la chanson mélodique de Thierry qui semble se lamenter sur la perte de la vie telle que nous la connaissons aujourd'hui. Sa durée de 5:27 est courte, et s'achève brusquement dans un silence de mort...
LE PASSAGE est en fait un album conceptuel. La citation ci-dessous est tirée du début des notes de pochette écrites pour l'album par Denis Desassis. Elle définit très clairement le concept de l'album en illustrant la vie sur la planète que nous habitons.
NOTRE MONDE EST AUJOURD'HUI EN PLEINE TOURMENTE. LA FOLIE DES HOMMES OBLIGE LA TERRE À SE DÉFENDRE PAR DE VIOLENTES RÉPLIQUES, COMME AUTANT DE SIGNAUX DE DÉTRESSE... 



NIGHTFALL - FORCES PARALLÈLES
Thierry ZABOÏTZEFF - Luvos Migrations (2023)

Par NANAR le 28 Décembre 2023
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Nous – c’est-à-dire mes danseurs spécialisés et moi-même – créons des êtres qui oscillent entre animaux et plantes avec des corps féminins extrêmement mobiles et enlacés, pour la plupart nus. Les corps complètement dépersonnalisés des danseurs (le visage et la poitrine ne sont jamais visibles) nous font oublier qu’il s’agit ici d’êtres humains. L’illusion est ainsi créée d’évoluer dans un monde unique, un univers nommé LUVOS. Editta Braun

Editta Braun et Thierry ZABOÏTZEFF ont déjà accompli de nombreuses collaborations interartistiques, dont certaines bandes originales furent publiées en CD par Atonal Records (Heartbeat en 1997, India en 1998, Miniaturen en 1999, Nebensonnen en 2000), soit par Thierry Zaboïtzeff lui-même (LoSt en 2016, Layaz en 2019, NaYmA en 2022, etc).

Luvos Migrations succède à Luvos, Vol. 2 (2001) et Planet Luvos (2012) dans une série d’œuvres chorégraphiques consacrées à la métamorphose des corps humains. Ces pièces exigent des aptitudes physiques particulières, à tel point que Luvos est également devenu une école (au sens spirituel du terme) chorégraphique à part entière, dirigée par Editta Braun elle-même. Thierry ZABOÏTZEFF affirme avoir composé la musique de Luvos Migrations sur les images finales du film, sur les suggestions d’Editta Braun.*

À l’opposé de la plupart des autres projets directement performés sur scène, Luvos Migrations est un court-métrage de 19 minutes, dévoilé en première mondiale le 22 novembre 2022 à la cinémathèque Das Kino à Salzburg, en Autriche. Plutôt qu’une simple facilité technique, le médium film permet à Editta Braun d’inscrire ses figures dans de nouveaux environnements naturels, luxuriants ou industrieux, désaffectés. N’ayant pas accès au film dans son intégralité, j’orienterai ma chronique avant tout sur la musique.

La musique de Luvos Migrations se présente sous la forme d’un E.P d’une unique piste de près de 17 minutes. Là où Luvos Vol. 2 (disponible sur l'album Iva Lirma: Archives 02-07) était plutôt minimaliste et Planet Luvos enchaînait plusieurs atmosphères à dominante électronique, Luvos Migrations se fait plus organique, dominé par le violoncelle et le piano, sous la forme de plusieurs thèmes enchaînés entre eux par divers bruits d’ambiance. Les éléments électro-acoustiques demeurent sans pour autant s'arroger la part du lion.

Le premier thème est construit sur le contraste entre l'ostinato de piano piqué et les cordes souples : on distingue plusieurs séquences récurrentes. Une exposition conséquente suivie d'une mosaïque plus fracturée : une douce phrase de piano dodécaphonique perturbée par des nappes dissonantes, un autre thème très expressif, peut-être le plus proche du versant mélodique de ART ZOYD, un autre fait d'un puissant empilement de chœurs éthérés qui rappellent avec délice "Épreuves D'Acier" (1995, 1997), le tout avec diverses réexpositions, souvent amenées en porte-à-faux - comme le premier retour du thème initial surgissant après une transition sur une tonalité différente.

"Luvos Migrations" est davantage un environnement sonore et musical qu'une partition montée d'un seul tenant. Les thèmes sont bien distincts mais on passe de l'un à l'autre en toute fluidité, comme dans les différentes pièces d'un musée. Une analogie sans doute complètement foireuse vis-à-vis du projet filmique, mais qui a le mérite de caresser mon égo avec une conclusion bien coolos.

* Source: https://rythmes-croises.org/luvos-migrations-deditta-braun-et-thierry-zaboitzeffmetaphore-dune-humanite-resiliente-de-sa-propre-civilisation-devastatrice/

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NIGHTFALL - FORCES PARALLÈLES
Thierry ZABOÏTZEFF - Réminiscences (2023)

Par NANAR le 27 Mai 2023 
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Parallèlement à ses activités au sein du groupe ART ZOYD, le multi-instumentiste Thierry ZABOÏTZEFF mène depuis bientôt quarante ans une carrière solo des plus singulières. Ses deux premiers albums, Prométhée en 1984 et Dr. Zab And His Robotic Strings Orchestra en 1992, ne dépareillent pas tant avec ses contributions à ART ZOYD. Suite à son départ du groupe en 1997, il publia en quatre ans une demi-douzaine d’albums à son nom chez le label Atonal Records, des travaux pour la scène ou des œuvres personnelles. Ces albums-ci ont pour défaut de recycler beaucoup d’objets sonores et musicaux déjà présents chez ART ZOYD. Par la suite, de nombreux projets suivirent, ciné-concerts, bandes originales ou collaborations diverses. La majorité de ces œuvres sont répertoriées sur le compte Bandcamp de l’artiste, ainsi que quelques parutions exclusivement digitales.

Le single Réminiscences fait suite aux EP Le Lac Des Signes / Komba (2021) et Pagan Dances (2021). Au contraire de projets comme Aria Primitiva - Sleep No More (2019) montrant une musique éclectique et exubérante, Réminiscences se place dans un registre intimiste. Le tempo est large, le violoncelle, la trompette et la guitare tissent une harmonie très émouvante et familière au grand amateur d’ART ZOYD que je suis. Le mobile en couverture illustre bien le tempérament non pas apathique, mais mélancolique et introspectif de "Réminiscences". Délesté des arrangements électroniques de beaucoup d’albums précédents, cette composition expose le versant acoustique de Thierry ZABOÏTZEFF ; si émulation informatique il y a, alors c’est bien amené et ça ne détonne pas. "Réminiscences" rappelle sans forcer les compositions de la période acoustique de la formation maubeugeoise, et en particulier l’album Génération Sans Futur.

"Réminiscences" laisse présager le meilleur pour la suite des événements.

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NIGHTFALL - FORCES PARALLÈLES
Thierry ZABOÏTZEFF - Dr. Zab & His Robotic Strings Orchestra (1992)

Par NANAR le 7 Février 2024 
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ART ZOYD a publié trois albums (Les Espaces Inquiets, Le Mariage Du Ciel Et De L’Enfer et Berlin) chez Cryonic Inc. et un (Nosferatu) chez le label allemand Ear-Rational. Mantra a édité les deux compilations des premiers albums, mais n’a publié aucun album original du groupe. À l’exception, en 1992, du deuxième album solo de Thierry ZABOÏTZEFF. Il s’agit d’un recueil de vingt-trois pièces d’une à sept minutes, très proches de ce que proposait Thierry chez ART ZOYD, en particulier avec le projet Marathonnerre (1992), à tel point qu’on peut se demander si certaines pièces de Dr. Zab n’ont pas été interprétées au cours des représentations de l’œuvre théâtrale de Serge Noyelle, ou au contraire s’il s’agit de pièces composées à la même époque mais écartées du projet ou bien tout simplement trop personnelles. Au vu de l’éclectisme du résultat, je dirais que c’est un peu de tout ça. On peut se poser les mêmes questions au sujet de Procession, le premier album solo de Patricia DALLIO sorti la même année.

Toujours est-il que nous avons affaire à un album de qualité. L’électronique limpide sert des compositions légères et ingénieuses, avec des samples, notamment des voix modifiées comme on en trouve beaucoup chez ART ZOYD à cette époque. On retrouve les samples de chants Pygmées ou même le saxophone d’André Mergenthaler, ayant entretemps quitté le groupe, samplé sur "City" et "Childrens Corner". D’autres éléments sonores sont réemployés mais n’entachent nullement l’ensemble et assurent une continuité avec l’œuvre de ART ZOYD.

Les nombreuses compositions, parfois fort différentes, s’enchaînent parfois en fondus-enchaînés, ce qui mine de rien donne un aspect très cinématographique à cette musique, même si elle n’a pas de thème précis. J’apprécie particulièrement les numéros rythmés "Circus", "Chant Profane", "Overlap Processing" presque jazz par endroits, et les plus posés "Séduction", "L’Envol", "Li Quinzaho", "Pavane (EB 108)". "Le Temps Qu’Il Fait" et son extension "Le Retour" rappellent sympathiquement les passages les plus légers de Marathonnerre tels que "Konzo Bélé". Les pièces majeures de ce disque sont aussi les plus longues, celles développant le plus les mélodies. Le morceau-titre met du temps à décoller mais déroule un fort beau thème, enrichi d’un canon et d’un contrepoint. "Childrens Corner" est une superbe composition sereine, aux vrais-faux atours pop comme aime à en tisser Thierry ZABOÏTZEFF. Impossible bien sûr de passer à côté "Migration II", placé en introduction et qui développe le dernier thème de "Migrations", des Espaces Inquiets (1983), sur un mode plus mouvementé, et ma foi fort délectable.

Dr. Zab & His Robotic Strings Orchestra préfigure largement les albums solo suivants de Thierry ZABOÏTZEFF, dans l’enchaînement de pièces hétéroclites à dominante électronique. Ni simple récréation ni crise d’égo, cet album, longtemps difficile à dénicher avant sa récente réédition digitale, n’est pas à négliger et forme un très bon complément aux albums de ART ZOYD. Les arrangements, certes synthétiques, ont relativement bien vieilli. Sans bouleverser la face du monde, cet album est très beau et égrène quelques moments forts. Et la pochette est magnifique.

3 ½ sur 5

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NIGHTFALL - FORCES PARALLÈLES
Thierry ZABOÏTZEFF - Promethee (1984)

Par NANAR le 26 Janvier 2024 
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Premier album solo de Thierry ZABOÏTZEFF, Prométhée est une commande du Collectif Théâtral du Hainault, compagnie valenciennoise alors dirigée par Philippe Asselin, pour la pièce "Aeschylus’ Prometheus", inspiré de Prométhée Enchaîné, tragédie du dramaturge grec Eschyle. Avec Prométhée, Thierry ZABOÏTZEFF saisit pour la première fois l’occasion de travailler hors du groupe ART ZOYD et d’expérimenter de nouveaux horizons musicaux. L’unique membre de ART ZOYD à épauler Thierry dans son projet solo est le saxophoniste Didier Pietton, participant à tous les albums du groupe de 1982 à 1985. Carole Grave (qui a réalisé la pochette de Génération Sans Futur) et Francine Auger officient aux chœurs mais n’apparaissent nulle part ailleurs que sur ce disque.
Dans sa version vinyle originelle (superbe pochette de Raymond Majchrzac) Prométhée est présenté en deux longues pistes sans titre d’environ vingt minutes, mais il ne s’agit pas réellement d’une longue suite épique puisque chaque face est subdivisée en sept pistes distinctes, qui vont de l’interlude de vingt secondes à la longue plage de plusieurs minutes – l’édition CD suit par ailleurs ce découpage, à juste titre.

Quand on découvre cet album après les œuvres de ART ZOYD de la même époque, il est impossible de ne pas être frappé par un détail particulier. Plusieurs passages de Prométhée partagent des thèmes en commun avec les Espaces Inquiets (1983) et Le Mariage Du Ciel Et De L’Enfer (1985). Ainsi la sixième partie de la première face est-elle une version alternative du "Bruit Du Fer" où la trompette de Jean-Pierre Soarez est remplacée par le violoncelle de Thierry.
Plusieurs autres passages sont des thèmes originaux de Prométhée qui seront ensuite refondus pour l’album de 1985 sous le titre "Io", en partie réenregistrés avec le groupe, en une production plus ample. Le motif électronique de "Io 2" prend sa source en deuxième partie de la première face de Prométhée, quand la quatrième partie de la seconde face deviendra "Io 1". Les trois premières parties de la seconde face seront quant à elles reprises plus fidèlement sur "Io 3". Enfin, l’avant-dernière partie est une combinaison libre du second thème de "Cérémonie" (1983) et de celui de "Io 2". Pour autant, ces retours de thème ne nuisent pas à la cohérence de Prométhée, ni d’ailleurs du Mariage Du Ciel Et De L’Enfer.

L’album est hétérogène mais les contrastes sont pertinents. La première face est de loin la plus calme, à commencer par le splendide thème introductif, long mantra lunaire et enchanteur. N’oublions pas la divagation brumeuse de la troisième partie, réitérée sur la seconde face, marquant ainsi une respiration entre deux passages plus vifs, ni la tournerie boisée de la cinquième. Le seul passage véritablement violent est la quatrième partie, une violence lancinante et crue, différente de celle, préméditée, de ART ZOYD.
La seconde face est donc plus électronique et versatile, les mélodies sont davantage détourées, plus proches de ce que l’on peut trouver chez ART ZOYD à la même époque – indépendamment du fait qu’on les retrouvera sur l’album suivant. Les thèmes des quatre premières parties, sans casser des briques, cultivent un goût de l’étrange à l’esthétique toute singulière, mais c’est bien la sixième qui emporte mon adhésion; cette fuite en avant complètement déglinguée, unique en son genre, est tout à fait saisissante et, à sa manière, fabuleuse. L’atmosphère de l’album en est chamboulée; la conclusion, si elle rappelle les ambiances paisibles de la première face, est plus amère, habitée d’une tension sous-jacente.

Cet album ne se limite pas au cercle zoydien ; il est de ceux qui font de l’exploration des musiques underground françaises une quête passionnante.




CLAIR & OBSCUR (F)
Thierry Zaboitzeff – Le Passage
1 mars 2024 Clair et Obscur. Auteur: Thierry Zaboitzeff / Éditeur: Monstre Sonore/WTPL-Music/PIAS
Date de sortie: 2024

Chronique de: Thierry Folcher

Thierry Zaboitzeff Le Passage

Si vous connaissez Art Zoyd, je crois qu’il est inutile de vous présenter Thierry Zaboitzeff, membre fondateur du groupe au début des années 70. Et pour vous, ce nouvel album solo viendra tout naturellement s’ajouter à votre précieuse collection personnelle. Pour les autres, je pose simplement ces deux questions : « Voulez-vous arpenter des chemins fréquentés par des créateurs facétieux ? », « Voulez-vous visiter des contrées reculées où Can, Neu!, Magma, Gong, Univers Zéro, Zappa et même King Crimson ont déposé leurs bagages et leurs étranges créations ? ». Si cela vous tente, alors je vous invite à découvrir Le Passage et ses cinq mouvements dédiés à la sagesse des hommes et à la sauvegarde de notre planète meurtrie. Le propos n’est pas nouveau, c’est sûr, mais les artistes sont aujourd’hui en première ligne pour donner l’alerte et faire prendre conscience des dangers qui menacent notre avenir. La Terre se défend, mais à quel prix ! Au-delà des conflits que je qualifierais (hélas) de « traditionnels », c’est une lutte commune qui doit nous unir pour un combat essentiel et d’une extrême urgence. Pour l’instant, nous sommes loin du compte, mais les choses semblent bouger et motiver de plus en plus de personnes. La lutte sera malgré tout farouche et pas gagnée d’avance. Maintenant, il est temps de revenir à cet album extraordinaire qui demandera de vous investir un peu plus qu’à l’accoutumée. Je ne vais pas vous mentir, entrer dans l’univers d’Art Zoyd ou de Thierry Zaboitzeff n’est pas chose facile. Il faut s’attendre à perdre ses repères et à ne compter que sur le désir fou de découvrir l’insoupçonnable, voire l’impossible. En matière de musique, le plaisir peut revêtir toutes sortes de formes. Ici, la mélodie rassurante est souvent cachée, enfouie sous des couches de bruits, d’éléments percussifs, de tensions et de répétitions. Mais lorsqu’elle pointe le bout de son nez, elle éclaire de toute sa splendeur des zones restées, jusque-là, froides et parfois inhospitalières. Du clair-obscur musical, ni plus ni moins.

Par ailleurs, il est important que votre démarche soit sincère et loin de toute considération élitiste. Comme je le disais, c’est du plaisir et rien d’autre. L’album commence en forme de clin d’œil par « A La Poursuite Du Zoyd – Extended », un premier morceau sombre, étrange et dérangeant. L’électro, la trompette du fidèle Jean-Pierre Soarez et les boucles rythmiques vont servir de support à une drôle de panoplie, quasi hystérique, de sons, de coups d’archet et de haka triomphant. Tout un arsenal démoniaque surgi des tréfonds de la maison Zoydienne. Une entrée coup de poing qui sort instantanément l’auditeur de sa zone de confort. Il y a des chances que celui qui découvre le monde de Thierry Zaboitzeff pour la première fois soit surpris, pour ne pas dire perdu. Pas de panique, « La Forêt » qui enchaîne juste après va rassurer et même séduire. Ce long morceau de presque quinze minutes nous conduit au creux d’une forêt, à la fois belle et martyrisée. Les bruitages sont sans équivoque et par-dessus, la musique s’adapte. Le piano est à l’affût et les cordes amènent un douloureux sentiment de panique. Seulement voilà, au-dessus du cloaque, flotte cette fameuse mélodie qu’on attend, qui nous éclaire et nous transporte dans des contrées beaucoup plus accueillantes. La partition se fabrique doucement et les alternances entre douceur et tension, se révèlent au bon endroit. À aucun moment, la construction donne l’impression d’être mal foutue et de ressembler à un collage hétéroclite. L’auditeur suit le fil des événements et se retrouve figé au milieu des arbres abattus à constater l’étendue des dégâts. Pas ou peu de mots (ceux de Chateaubriand, au début, sont d’une force incroyable), mais une manifestation sonore qui vaut tous les discours et toutes les attitudes de circonstance.

On poursuit avec l’électro-jazz de « Poster Boy », une jolie respiration qui soulage des pressions précédentes. La trompette de Jean-Pierre Soarez se distingue à nouveau et assume son rôle cinématographique sur cette courte séquence pleine d’allant. Le bon équilibre est respecté et la diversité des climats s’impose habilement. Surtout que juste après, la tornade « Twisted Zoydian Song » relance la puissante machine destructrice. On est entraîné dans une course folle où les percussions et le piano foncent à toute allure pour servir un chant crépusculaire digne des meilleurs hurleurs de death growl. La tension est montée d’un cran et l’auditeur malmené attend l’embellie (ou pas). La fameuse dualité existe aussi en musique. Le fait d’exprimer avec force la colère et l’impétuosité est un bienfait pour glorifier la sagesse et la pondération. Tout ça pour donner au morceau titre « Le Passage », le soin de réparer et d’illuminer un tableau devenu bien sombre. Mais alors, quel coup d’éclat pour finir le disque ! Ce dernier titre est tout bonnement exceptionnel. Le chant me rappelle les grandes heures de Magma (le magnifique « Téhä » sur Felicité Thösz par exemple) et ses irrésistibles envolées vocales et rythmiques. En découvrant cet ultime voyage, le spectateur charmé a le sentiment d’ouvrir une porte vers la félicité et l’espoir. Le rythme est doux, la trompette soyeuse et les arrangements opportuns. Le passage se dessine et nous amène enfin vers le bon sens et la compréhension. Cependant, on aurait aimé le suivre un peu plus loin et bien au-delà des six petites minutes proposées. Alors, pourquoi un arrêt aussi abrupt ? N’était-ce qu’un mirage ? Thierry Zaboitzeff doit avoir les réponses.

Pour conclure, je dirais que cet album m’a fait un bien fou. En matière de sortie musicale, je désespérais de découvrir quelque chose de vraiment différent. Quelque chose qui ne soit pas dévoilé dès les premières mesures. Ici, pas de problème, à chaque minute, il se passe un truc et l’attention ne faiblit jamais. Par ailleurs, Le passage va beaucoup plus loin que son message affiché. Il revêt ce que l’homme est capable de créer dans ses meilleurs moments et donne confiance en sa destinée. Pour finir, si vous voulez en savoir plus sur l’univers de Thierry Zaboitzeff et plutôt que de vous perdre dans son abondante production, je vous conseille son recueil 50 Ans De Musique (s) sorti en 2022. Un triple CD absolument génial à déguster tranquillement, entouré (ou pas) de personnes averties et consentantes. Croyez-moi, à la fin du voyage, elles vous remercieront.

Coup-de-Coeur

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AUTOPOIETICAN - Apuntes de Musica Progresiva Contemporanea (PER)
THIERRY ZABOITZEFF : un nouveau passage sur un long chemin
BONJOUR, AMIS D'AUTOPOIETICAN, CÉSAR INCA VOUS SALUE.

Mercredi 06 mars 2024 par Cesar Inca



Aujourd'hui nous avons l'heureuse occasion de vous présenter la nouvelle œuvre phonographique du maître français THIERRY ZABOITZEFF, qui en plus d'avoir une longue carrière solo en tant que compositeur et multi-instrumentiste, est connu pour avoir fait partie du collectif ART ZOYD pendant longtemps. "La Passage" est le titre de l'album sur lequel nous nous concentrons aujourd'hui, qui est sorti le 9 février avec la coopération des labels WTPL Music et Monstre Sonore. Le maître ZABOITZEFF a fait partie de ce groupe bastion de la RIO francophone dont nous avons parlé plus haut, jouant principalement de la basse et du violoncelle, mais il a également contribué aux percussions, aux synthétiseurs, à la guitare et aux effets sonores tout au long de son appartenance au groupe, qui a duré de son premier album "Symphonie Pour Le Jour Où Brûleront Les Cités" (1976) à "Häxan" (1997), c'est-à-dire qu'il était présent à la fois dans la période initiale où l'on se concentrait sur les instruments de chambre avec des idées surréalistes et dans la phase ultérieure de prédominance du futurisme machiniste. Sur son premier album solo "Prométhée" en 1984, ZABOITZEFF s'empare de tous les instruments pour développer à sa manière la phase futuriste qui s'ouvre dans l'univers d'ART ZOYD, et ce n'est qu'en 1992 que ce maître retrouve ses lettres de noblesse avec son deuxième album solo "Dr. Zab & His Robotic Strings Orchestra". Au début des années 80, il a collaboré à un titre sur un album du légendaire groupe belge UNIVERS ZÉRO. Pour en revenir à l'album "La Passage", le bon THIERRY, compositeur de tous les titres, joue de la basse, des claviers, du violoncelle, de la programmation et des traitements électro-acoustiques, tout en faisant quelques vocalises. Le seul autre musicien est le trompettiste invité Jean-Pierre Soarez. Après l'enregistrement, ZABOITZEFF s'est chargé du mixage et du remastering. Malgré sa relative brièveté (moins de 35 minutes), "La Passage" est une excellente œuvre qui sait donner un coup de jeune à l'idéal immortel d'une musique progressive qui vise les extrêmes les plus avant-gardistes.

Et pourquoi disons-nous qu'il s'agit d'un excellent travail ? Passons en revue les détails de l'album pour clarifier notre position. À La Poursuite Du Zoyd' commence par une présentation en couches d'un son sinistre où l'ornementation orchestrale et un riff de basse perçant donnent le ton au motif central bien défini. Au fur et à mesure que les claviers, la guitare, les monologues spectraux et les effets sonores se joignent à l'œuvre, la vitalité essentielle du morceau est constamment renforcée par les vibrations tendues qui jaillissent de son sein. Les contributions de la trompette ajoutent un élément somptueux à l'affaire. Le disque a commencé par un zénith convaincant. Vient ensuite "La Forêt" qui, avec une durée de plus de 14 ½ minutes, est la pièce la plus longue de ce disque. Un soliloque calme (dont l'auteur est François-René de Chateaubriand) nous introduit dans un beau et sobre passage de piano qui est bientôt accompagné par de gracieuses harmonies de synthétiseurs, bien qu'il s'agisse d'un bref mirage, car nous sommes bientôt introduits dans un lieu surréaliste où l'aura reposante extérieure ne peut nier le fait qu'elle cache quelque chose d'inquiétant derrière son rideau égocentrique. Les claviers continuent de mener la danse sur le plan thématique, mais leur parcimonie grisâtre a quelque chose de nouveau, qui est exploré à travers les bruits des gens qui organisent des mesures de mobilisation. Et c'est peu après la troisième minute que les orchestrations de violoncelles rejoignent le piano pour établir le premier corps central. D'un impressionnisme obscurantiste qui laisse parfois quelques espaces éphémères de chaleur, la pièce s'écoule dans des canaux expressifs marqués par une atmosphère cinématographique et une aura d'attente. Le deuxième corps central gagne en densité en suivant le chemin tracé par le premier, tandis que le troisième se situera dans un secteur intermédiaire. L'apothéose finale apporte une fraîcheur vibrante tout en complétant les ressources plus majestueuses qui se sont manifestées dans les moments précédents. Les bruits de la nature, avec les grillons qui jouent le rôle principal, constituent l'épilogue parfait. Un autre point fort de l'album.

Poster Boy' nous offre enfin une atmosphère douce où le lyrique prédomine avec une élégance cristalline dans une enclave sonore où l'électronique et l'acoustique interagissent dans un enchevêtrement bien articulé.* Le quatrième morceau du répertoire porte le titre particulier de 'Twisted Zoydian Song'.

Une partie de la douceur expressive de la pièce précédente persiste ici, mais on remarque que ce qui prédomine est un retour à des climax obsédants (capitalisés par les arrangements choraux inquiétants). Étant donné qu'il y a plusieurs passages marqués par un groove cybernétique saisissant, le propos n'est pas aussi sombre et lugubre que dans les deux premières pièces de l'album ; il y a cependant un vitalisme désincarné qui, lorsqu'il est revêtu de majesté, projette une étrange lueur. Toco se termine par la pièce éponyme, qui dure près de 5 minutes et demie. Le Passage' est une exploration des convergences entre le rock de chambre et l'électronique d'inspiration kraut, qui confère à la fin de l'album un aspect cosmique. La douceur des lignes de trompette, des arrangements choraux et des phrasés simples de guitare accompagnant les bases synthétiques méticuleuses s'ouvre vers les cieux comme source d'un véritable rayonnement contemplatif. C'est tout cela que le vétéran et incombustible crack de l'avant-garde progressive radicale THIERRY ZABOITZEFF nous offre avec "La Passage", un nouveau passage dans un long voyage d'aventures et d'investigations sur les terrains les plus complexes et les plus audacieux de la musique contemporaine. Totalement recommandable !!!!

Traduit automatiquement de l'Espagnol.

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PROGJAZZ (CL)
Chronique de l'album
LE PASSAGE - THIERRY ZABOITZEFF

Par Rodrigo Oyarce 09/02/2024

Site web

Le contexte

La musique de Thierry Zaboitzeff est radicale, nuancée, en rupture avec les règles, l'expression d'un musicien qui transmet sans cérémonie la densité de l'esprit. Avec une carrière qui s'étend sur cinq décennies et après avoir fait partie d'un des groupes les plus emblématiques du Rock d'opposition et d'avant-garde, Art Zoyd, Zaboitzeff nous a offert, au fil des années, une musique vibrante, exceptionnelle et innovante, où l'expérimentation fait partie du quotidien du musicien français.

En 2022, Thierry a sorti une anthologie musicale sur ses 50 ans de musique, où l'on peut entendre des bribes de ses multiples projets tant en solo qu'avec son groupe mère, Aria Primitiva et Zaboitzeff and Crew. Aujourd'hui, c'est au tour d'un nouvel album intitulé "Le Passage", composé, interprété, mixé et remasterisé par Zaboitzeff lui-même, et auquel participe le trompettiste français et ancien membre d'Art Zoyd, Jean-Pierre Soarez, sur trois titres.

L'album

Dès les premières notes de "À La Poursuite Du Zoyd", le voyage auquel Zaboitzeff nous convie devient clair, le début asphyxiant nous met très tôt en alerte, une basse au riff répétitif, presque comme un mantra, nous projette dans les profondeurs abyssales. La voix du musicien, issue de lieux ancestraux, nous met en transe et nous fait souvent nous demander si nous sommes encore " présents " dans cette réalité et la trompette de Soarez dessine un paysage mélodique parfait dans cette descente éthérée vers le primordial. Le nom du morceau n'est pas un hasard, si tant est qu'il existe, car on y retrouve tout l'enrichissement sonore que Thierry a apporté pendant des années à cette école initiatique qu'était Art Zoyd.

Après cette attaque furieuse contre la conscience, Zaboitzeff nous présente la chanson "La Forêt" qui, en près de 15 minutes, recrée merveilleusement un film que le subconscient s'efforce de développer dans nos rêves. "Les forêts présentes les hommes, les déserts les suivent", ce qui se traduit par "Les forêts précèdent les hommes, les déserts les suivent" et qui est également dit en allemand, est une citation de l'écrivain, diplomate et historien français François-René de Chateaubriand, l'un des représentants les plus remarquables de la littérature française du XIXe siècle, que Zaboitzeff récite d'une voix qui sert d'introduction à la vision viscérale d'un musicien sans contemplation. Le "calme" présumé que nous entendons ne fait qu'effleurer nos sens, car dans les recoins de la raison se cache le son déchirant, presque un cri intempestif de toutes les fibres du musicien qui, tel un vent d'ouragan, nous laisse peu d'espace pour respirer, mais qui est totalement nécessaire si nous voulons survivre face à un tel cadeau dantesque pour les sens. L'instrumentation de Thierry, qui joue de manière fascinante des claviers, du violoncelle et d'une variété d'effets électro-acoustiques, fait de cette pièce un tourbillon d'émotions.

Le troisième moment du voyage s'intitule "Poster Boy", écrit à l'origine par Thierry pour le film "Fang Den Haider" de la réalisatrice belge Nathalie Borgers, et que l'on retrouve sur cet album avec un nouvel arrangement. Nous retrouvons ici Jean-Pierre, avec ses coups de pinceau instrumentaux qui dessinent magistralement toute l'atmosphère, presque en noir et blanc, qui nous rappelle la mélodie. On y retrouve des éléments d'un jazz moderne qui, avec tant de mélanges et d'évolutions, est presque indiscernable parmi toute la variété de sons que nous offre Zaboitzeff. Je voudrais prendre une petite licence, et j'espère que l'hypothétique lecteur de ces paroles et Thierry lui-même me pardonneront, mais je n'ai pas pu m'empêcher de me souvenir et peut-être dans mon esprit enfiévré d'associer certains passages sonores de ce thème au "Waiting Man" de King Crimson. Ce n'est qu'une appréciation d'un homme absorbé par l'alchimie de cet album.

"Twisted Zoydian Song" est, comme son nom l'indique, essentiellement un tourbillon de sons intrinsèques au passé de Zaboitzeff mais toujours avec un pied de plus dans le présent, et surtout dans le futur. On avait déjà entendu cette mélodie, ou une partie, dans le teaser que le musicien nous avait montré et maintenant qu'on peut en écouter le développement, on se rend compte que l'expression artistique de Thierry ne peut être contenue, car elle nous montre un musicien totalement déraciné de toute norme de catalogage, un musicien qu'on ne peut définir, un artiste qui trouve dans chaque labyrinthe neuronal, un moyen de nous transmettre, à nous simples mortels, ses étincelles créatives à partir de ses entrailles. Presque au terme de cette ode sensorielle, je glisse librement dans l'esprit d'un poète sonore.

Ce voyage initiatique s'achève avec le thème homonyme qui nous dépouille sans vergogne de la raison pour nous abandonner totalement à la "magie" cosmique d'un musicien qui s'est incarné avec bonheur sur ce plan de la réalité. Dans la main de Zaboitzeff, Soarez est une fois de plus l'accompagnateur parfait pour dessiner les mélodies astrales qui nous conduisent vers les intensités du cosmos. La contemplation de l'existence humaine nous fait prendre conscience que notre existence est liée à une énergie incompréhensible. Cette fin mélodique est le triomphe de la lumière sur les ténèbres.

Une lumière dans l'obscurité

Nous sommes désemparés devant un album qui n'est pas fait pour être écouté, mais pour être vécu par tous les pores de notre corps et qui est un baume pour notre existence endeuillée. Une lumière pour l'esprit.

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PROGJAZZ (CL)
ProgJazz se viste de etiqueta: Entrevistamos a Thierry Zaboitzeff
ProgJazz : Entretien avec Thierry Zaboitzeff

par Rodrigo Oyarce - 06/12/2022
site web

1) Qu'est-ce que vous pouvez nous dire sur "50 ans de Musique (s)" et sur le processus de compilation de l'énorme héritage artistique que vous avez fait pendant toutes ces années ?
J’aurais bientôt 70 ans… A cette occasion, je pense que tout humain, par réflexe et honnêteté se retourne et retrace une sorte de bilan de sa vie, de son travail ; c’est ce que j’ai voulu faire tout simplement en célébrant ces cinquante années d’activités musicale avec la sortie de cette anthologie. J’y ai travaillé plus d’une année à lister, écouter, re-masteriser, remixer, ré-enregistrer certaines pièces puis jeter, recommencer jusqu’à trouver un itinéraire de (Voyage) idéal sur mes chemins de musique(s) selon moi et quelques proches. Dans ce travail, j’ai voulu éviter toute chronologie, ce qui donne une sorte de légèreté pour entrer sans se rendre compte dans différentes époques de ma carrière. Toutes époques confondues, on peut voyager entre mes projets solos, certaines de mes créations avec Art Zoyd - Zaboitzeff & Crew - Aria Primitiva…

2) Comment est le processus créatif quand vous commencez avec une pièce ou projet artistique ? Quel sont les types d'endroits conceptuels ou de subconscient que vous visitez pour donner vie à votre art ? Ou est-ce que cela est quelque chose de plus tangible ?
A mon sens, il y a différentes façons de démarrer une composition ou un projet, j’ai souvent essayé de ne pas avoir de règles… Mais j’ai constaté justement en me retournant un peu sur mon passé, que j’avais finalement quelques « trucs » pour me forcer à être différent à chaque composition, comme combattre une routine.
Lorsque je compose pour moi même, je me permets absolument tout, comme me raconter une histoire ou pseudo légende pour installer une atmosphère et ces histoires sont vite oubliées dès que mon décor est planté. Le reste n’est que sons, rythmes arrangements, déroulement, développements, fantaisie, liberté…
Une composition peut naître d’une simple suite d’accords de basse, piano ou violoncelle ou d’un son que j’ai en tête mais qui me semble ne pas exister, alors je creuse, je sculpte, j’examine, je me recule, je re-sculpte aussi dans le studio sur mes samplers et éditeurs de sons et cela devient aussi souvent très physique même si le morceau est en apparence parfois cérébral. Dans tous les cas, je cherche une émotion non verbale.
Comme de plus, je suis autodidacte, je ne m’embarrasse jamais de préceptes en ce domaine.
A mon sens, la musique et les sons ont cet avantage de proposer des espaces totalement ouverts contrairement aux mots, aux images concrètes et reste à chacun de se laisser emporter, y compris moi…

3) Vous avez collaboré avec la choréographiste Editta Braun, avec les réalisateurs Stéphane Vérité et Beda Percht. Qu'est-ce que vous pouvez nous raconter sur les projets que vous avez eu avec eux et si le processus créatif a été différent à vos projets musicaux personnels ?
- Je travaille avec Editta Braun depuis 1997, nous avons démarré par un projet live commun « Heartbeat « Théâtralisé, où danse et musique se mêlaient très étroitement, je vous renvoie ici pour les détails https://en.zaboitzeff.org/en-heartbeat.html
Nous collaborons sans cesse depuis. et nous avons fini par nous marier en 2020, c’est vous dire si notre relation artistique et humaine est profonde.

Sur chaque projet pour sa compagnie de danse, Editta me demande souvent de travailler sur un matériau sonore et conceptuel différent, ce que j’adore faire et expérimenter. Par exemple sur son projet INDIA, j’ai travaillé sur des sons et ambiances qu’elle ma ramené de son voyage en Inde lors des premières sessions de travail sur place, puis elle m’a donné quelques éléments de dramaturgie, le côté nostalgique et « TechnoWorld » se sont invités en cours de travail à mesure de l’élaboration des scènes.
Idem pour le projet « Nebenesonnen », tout devait être écrit autour du piano. Pour Miniaturen, la musique devait être live avec un groupe à la Art Zoyd : Zaboitzeff & Crew. Sur le projet Luvos, cela devait sonner majoritairement électronique et ainsi de suite…

Stéphane Vérité (Metteur en scène) je l’ai connu lorsque j’étais encore dans Art Zoyd. Par lui, nous avions eu la commande d’une bande son pour un spectacle évènementiel : L’inauguration de la la plus grande salle d’Europe « Le Globe Arena » à Stockholm (s) . Le public pouvait voir le spectacle de lumières et de projections diffusées sur le bâtiment en forme de globe d’un peu partout autour de la ville et le public recevait le son diffusé par la radio dans la voiture.
Par la suite, j’ai collaboré avec Stéphane sur le projet de Théâtre « Alice » pour lequel j’étais présent sur scène en live, puis d’autres évènementiels assez importants.

Avec Beda Percht, c’était aussi du théâtre et de l’évènementiel, le dernier parmi les plus importants remonte à 2011 pour un spectacle uniquement pyrotechnique devant 100 000 spectateur à Linz (A) sur les rives du Danube avec la compagnie « Pyrovision » : 2011 – Feuerwelt. Eine Science Fiction - LINZER KLANGWOLKE 2011

En général tous ces projets sont à la base des commandes mais que cela soit avec Editta, Stéphane et Beda, comme nous avions beaucoup plus que de l’estime l’un pour l’autre, une confiance et un respect mutuel contribuaient à de belles collaborations.

4) Comment est-ce que le développement pour la création de votre premier disque en solo, "Prométhée" en 1984, a-t-il eu lieu ? Qu'est-ce que vous pouvez nous dire sur votre évolution comme artiste propre, et non pas seulement comme musicien de Art Zoyd ?

En 1984 donc, avec Art Zoyd, nous étions sur le point d’enregistrer notre Album « Les Espaces Inquiets » et parallèlement, j’étais contacté par une toute jeune compagnie de théâtre de Valenciennes (F) la ville dans laquelle je vivais à cette époque. Le directeur Philippe Asselin et l’administrateur Thierry Dupont me proposèrent de composer et d’enregistrer la bande son d’une de leur première création « Prométhée enchainé » d’après Eschyle. Au regard de la tâche à accomplir, seul à la base et hors du cadre Art Zoyd, je rassemblais tout ce qui pouvait sortir un son inhabituel en plus de mes instruments de prédilection (Violoncelle, basse, un peu de guitare…) et j’improvisais un studio dans la toute petite maison que j’occupais avec mon épouse d’alors.
Pour ce projet, j’avais complètement décidé d’oublier la façon dont je composais pour et avec Art Zoyd. Je me mettais à expérimenter beaucoup avec les bandes magnétiques et les sons concrets que je reversais et saturais et j’utilisais aussi sans vergogne le re-recording parfois pour doubler des instruments ou pour salir et dégrader le son encore et encore afin obtenir la pâte dont je rêvais. Je prenais un énorme plaisir à m’étaler, m’étendre, prendre mon temps… Ce moment de remise en question fût très important par la suite dans mon travail y compris dans le reste de mes années Art Zoyd. Ce n’était pas une fin en soi mais une étape, un moment très fin, si particulier et unique dans toute ma démarche. C’est quelques mois plus tard que je déciderais d’en faire un album en concentrant tous ces sons sur deux fois 19 minutes environ, vinyle oblige.


5) Quelles sont vos mémoires et la vision que vouz avez donné aux projets tels comme "Missa Furiosa", "Dr. Zab", "Llibre Vermell" ou "Aria Primitiva" ?

Missa Furiosa.
Longtemps dans Art Zoyd, je me moquais du fait que nous composions souvent des choses très puissantes et solennelles appuyées d’accords d’orgues qui au fil du temps m’évoquaient des ouvertures ou temps forts pour les offices. De plus, lorsque j’étais enfant, j’accompagnais mon grand-père maternel qui était organiste, il m’emmenait avec lui dans la tribune… J’étais fasciné et emporté par les sonorités puissantes de ces tuyaux d’orgue soutenant ce Rituel Catholique qu’est la Messe… Ces images et sons de l’enfance sont encore imprimées en moi aujourd’hui.
Bien plus tard, vers 2001-2002, j’étais en quête de quelque chose de différent sur une base « Technoïde » mais façon ancien Art Zoyd avec de la voix, du chant omniprésent, de la puissance. Je retrouvais alors dans mes archives récentes quelques thèmes que j’allais développer dans cette direction, je crois que ma première tentative, sans savoir que j’écrirais ensuite une messe fût Agnus Dei, je trouvais là toutes les clés d’un projet qui s’appellerait MISSA FURIOSA j’ai d’abord improvisé quelques grooves, assemblé, dramatisé, ajouter des overdubs d’orgue, puis très vite, j’ai improvisé des voix mais je n’étais pas très satisfait car j’utilisais toujours mon pseudo language « zaboitzeffien-zoydien » jusqu’au moment où je décidais d’essayer avec n’importe quel texte et complètement par hasard, par défaut, l’idée m’est venue de faire un bout d’essai avec des bribes de texte en Latin du rituel liturgique Catholique sans me préoccuper du sens profond et de la représentation que cela pouvait avoir. Je tentais différents style de voix et le plus intéressant était le chant Lyrique qui allait devenir une des bases de ce projet. J’allais constituer un groupe de base « Zaboitzeff & Crew » pour la partie instrumentale, puis j’invitais quelques chanteurs classiques à participer à cette Missa Furiosa.
Avec cette Messe, je ne suis pas devenu subitement Chrétien, ce qui m’intéressait, c’était le rituel, la pompe, d’une certaine manière, la manipulation des esprits dans ces rituels fastes, grandiloquents.

En toute conscience, j’ai bien pris garde de ne pas être blasphématoire ni outrancièrement critique. là n’était pas mon but (même si…)
Lors de la première, dans le public, il y avait un Moine qui je crois, a acheté le CD et cela m’a touché et questionné.

Dr. Zab.
Bien des années auparavant, (90’s) je passais beaucoup de temps dans notre studio (Art Zoyd), j’expérimentais tout ce qu’il était possible de faire avec les samplers et sequencers de l’époque.
Je me revois tel un savant fou dans toutes sortes de manipulations electro… Je me faisais appeler alors Dr. Zab par dérision…
C’était un moment un peu vide dans le parcours d’Art Zoyd et fier de toutes mes expériences, je décidais d’en produire un Album solo « Dr. Zab & His Robotic Strings Orcherstra « puis un spectacle solo dans lequel j’étais mis en scène dans le rôle d’un manipulateur de sons, d’instruments véritables ou virtuels, à la façon d’un montreur de marionnettes. la scène était mon laboratoire caricatural et je sautais sans vergogne d’un instrument à l’autre, d’un style à l’autre, c’était très jouissif pour moi…

LIibre Vermell (2004)
Depuis des décennies, je rêvais d’une adaptation électronique et libre de chants et danses de pèlerins qui se rendaient au monastère de Montserrat près de Barcelone à la fin du Moyen Age pour y vénérer une vierge noire. Ces chants composés par des anonymes furent collectés et notés par les moines dans un livre à la couverture de velours rouge qui porte donc ce titre : “Llibre Vermell de Montserrat” le plus célèbre recueil de chants de cette époque.
Je trouvais ces chant magnifiques, prenants, direct et en un mois, je reconstituai chaque pièce et je les orchestrais dans un mode qui m’était personnel de manière à pouvoir les interpréter en duo et en live. J’invitais la chanteuse Sandrine Rohrmoser à créer ce duo avec moi, ce qu’elle fit brillamment en moins d’une semaine. Malheureusement pour diverses raisons, nous avons très peu joué ce répertoire que l’on pouvait qualifier de « In Progress » Beaucoup de temps a passé mais ce projet est toujours au fond de notre coeur et nous pensons le retravailler, l’améliorer et l’enregistrer enfin (2023 ?)

Aria Primitiva
De nouveau en groupe, j’ai eu le sentiment de reconstruire et revivre de manière un peu différente
le concept « Art Zoyd » des années 80-90 : un groupe avec une originalité, une personnalité forte, unique. Chaque fois que j’ai retravaillé avec d’autres musiciens, c’est ce que j’ai toujours recherché. Ce fût encore le cas. Aria Primitiva me donnait un nouveau souffle dans cette direction.
Je vous engage à relire ici comment s’est formé ce groupe
A trois Musiciennes -ciens, nous étions un commando rompu parfaitement à la technologie et d’une grande maîtrise instrumentale. J’en étais le seul compositeur mais nous avions prévu et aménagé de belles plages d’improvisation. J’avais mis beaucoup d’espoir dans cette formation puis devant les difficultés de management et l’atténuation de l’engagement de mes collègues sur ce projet, je décidai de dissoudre ce groupe pour un temps puis le Covid est arrivé et il me fût impossible de remonter Aria Primitiva dans de bonnes conditions et je décidais donc de passer à autre chose. Je reste très fier de ce projet et je remercie encore vivement toutes les personnes qui m’ont aidé à le réaliser (Nadia Ratsimandresy - Cécile Thévenot - Editta Braun - Iva Lirma - Xavier Collin et Monstre Sonore)


6) À propos de l'adaptation musicale en direct de "Das Cabinet des Dr. Caligari", Comment a-t-elle eu votre expérience à recréer, avec vos qualités de compositeur, l'ambiance lugubre donnée à tel chef-d'oeuvre de l'expressionnisme allemand ?
En rapport avec le précédent, et en prenant compte la personnalité cinématographique de votre style, Est-ce qu'il y a un film dans lequel vous voudriez bien "faire accompagnement" musical en direct à l'avenir ?

Lorsque j’ai quitté Art Zoyd en 1997 après trois projets de ciné-concert sur près d’une décennie,
je m’étais dit : » Plus jamais de ciné-concerts !!! ». J’avais souffert sur la fin de cette période de toujours rester coincé au pied d’un écran à balancer des boucles et rejouer par dessus dans ce contexte devenu peu à peu un espace réservé à une certaine élite banchée « expressionnisme Allemand « dans ce cas… J’ai le souvenir que dans certains lieux où nous étions invités à nous produire certains organisateur n’avaient absolument aucun regard sur notre performance…
J’étais impatient de sortir de cette routine culturelle et d’initier d’autres projets en plus des ciné-concerts, ce ne fût malheureusement pas possible au sein de Art Zoyd à ce moment là. Alors vous connaissez la suite et les conséquences…

13 années plus tard, Claus Löser qui co-dirigeait le ERSTES INTERNATIONALES CALIGARI - FESTIVAL IN BERLIN m’invitait à composer une musique originale et accompagner en live LE CABINET DU DOCTEUR CALIGARI pour l’ouverture de ce festival, secrètement, j’étais assez réticent mais tout était réuni pour en faire un évènement : La gentillesse des organisateurs de la Brotfabrik - Berlin - Weissensee - Caligari Platz - Delphi, sur les lieux même où ont été créés ces films dans le Berlin des années vingt. Alors j’allais relever ce défi en quelques mois…
J’ai visionné le film de très nombreuses fois avant de comprendre vraiment ce qu’il s’y passait, quelles étaient les lignes de force, le caractère des personnages et aussi surtout le rôle que je pourrais tenir sur scène musicalement dans tout cet imbroglio quasi psychiatrique.
Je me suis empêché au départ toute retenue en exagérant le côté « foire » pour mieux devenir radicalement plus sombre et obscur quand je le jugeais bon. De mon point de vue, je me sentais comme un acteur sonore sorti de la pellicule et qui allait parfois comme diriger l’action ou à d’autres moment réagir à l’action. Là encore ce fût une expérience sur scène en solo, en solitaire,
très étonnante. J’avais décidé que la musique rigoureusement écrite et en place devait avoir sa propre vie, ses propres cheminements mais qu’avec le film elle engage d’autres pistes de lecture, d’autres émotions et non sans humour.
Je n’ai aujourd’hui en 2022 plus l’idée de travailler sur un tel projet de ciné-concert mais plutôt sur des créations d’images actuelles… en voici un exemple « LUVOS migrations « dont voici un teaser.

7) Selon votre vision, comment est-ce que vous voyez le présent de la musique par rapport à l'avant-garde, l'expérimentation, l'innovation et comment cela pourra affecter la musique à l'avenir ?

Vous savez, je ne suis pas un théoricien, je prémédite très rarement en profondeur mes intentions et comme musicien et compositeur autodidacte, je me réjouis de cette situation me mettant en état de liberté totale dans l’instant. L’avant-garde ne me préoccupe guère, l’expérimentation, je la vis chaque jour et je n’aurais pas la prétention de dire que je suis innovant, je me sens un peu aux confins de tout cela et embarrassé pour répondre à votre question. Je pense que de plus en plus de courants vont se rencontrer en dehors de ces vieilles idées de rivalités entre les anciens et les modernes, des classiques, et des contemporains. depuis longtemps déjà, le Jazz, le Rock, la musique électro sont venus jouer les troublions dans l’espace musical et nombre d’hybridations heureuses me semblent de bonne augure. Dans cette ère de modernité, je reste relativement méfiant vis à vis de toutes ces technologies invasives qui sont trop mises en avant selon moi et qui nuisent ou détruisent parfois tout propos artistique… Je reste ouvert et j’avance !

8) On ne peux pas éviter de vous demander sur Art Zoyd. Ils ont été 26 ans dans cet ensemble sonore, un voyage qui a commencé avec "Symphonie pour le jour où brûleront les cités". Quels moments uniques de création artistique avez-vous eu au cours des années avec le groupe ?
Il y aurait énormément à raconter et ne ne relaterais que les évènements les plus importants.
Les moments uniques furent notre premier album « Symphonie pour le jour où brûleront les cités « composé, préparé, répété, expérimenté collectivement, instruments en main dans des conditions de vie difficile alors pour les musiciens débutants mais acharnés que nous étions.
Ce moment d’une rare intensité fût suivi d’une tournée française en première partie de MAGMA dont une semaine au Théâtre de la Renaissance à Paris. (1976)

- Réalisation de l’album Phase IV, moment clé dans la démarche artistique du groupe Art Zoyd qui sera filmé pour la télévision par Daniel Poteau. De nombreuses tournées en Europe et Europe de l’est suivront… (1982)

La création du « Mariage du ciel et de l’enfer » de Roland Petit puis tournée avec LE BALLET NATIONAL DE MARSEILLE ROLAND PETIT (Scala de Milano - Théâtre des Champs Elysées - Opéra de Marseille et Bordeaux. (1984-85)

L’album « Berlin « puis les tournées partout en Europe avec ce répertoire. (1986-87)

La création du ciné-concert Nosferatu (1988-89)

La rencontre avec la compagnie de danse Autrichienne « Vorgänge Bewegungs Theater »Rencontre décisive. (1986)

Marathonnerre, ce projet complètement fou de théâtre-performance imaginé par le metteur en scène français Serge Noyelle avec sa compagnie et Art Zoyd en live sur scène durant douze heures de midi à minuit sur un rythme endiablé et incessant couronné par une standing ovation de 25 minutes… fantastique souvenir !

9) Et pour finir, la question finale que nous posons à tous nos interviewés, Un disque que vous voudriez recommander d'après votre écoute récemment ?
A cause de mes récentes et multiples activités, le temps m’a manqué pour écouter réellement quelque chose de nouveau en profondeur, alors, je ne voudrais pas vous donner de mauvaises pistes… Mais je vous citerais bien volontiers un artiste très éloigné de mon travail en général que j’écoute et affectionne depuis 40 ans déjà sans jamais être lassé : Jon Hassel disparu aujourd’hui, particulièrement deux albums : « Fourth World, Vol 1 » et « Flash of the Spirit »




SALZBURGER NACHRICHTEN (A)
Bernhard Flieher 22/04/2021

Chronique de l'album
PROFESSIONAL STRANGER
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Thierry Zaboitzeff mit neuem Album: Aus der Stille ins Offene sehen
Ungewohnte Nähe erzeugt Thierry Zaboitzeff auf seinem neuen Album.

Stille fällt einem nicht als Erstes ein, wenn einem das Werk von Thierry Zaboitzeff begegnet. Der Multiinstrumentalist stürzt sich oft in wilde Universen, lotet mit unbändiger Wucht Klangwelten aus. Nun aber kommt sein neues Album, wenn schon nicht still, so doch ruhiger daher als frühere Werke. "Professionell Stranger" heißt es. Und der Titel steht durchaus für ein grundsätzliches Lebensgefühl des in Hallein ansässigen Komponisten. Er sei mit seiner Musik immer "zwischen den Stühlen" gesessen, sagt er. Nirgends daheim, aber überall zu Hause und stets von Neugier getrieben.

Zaboitzeff war mit den 60er-Jahre-Rockhelden aufgewachsen - und wollte in ersten Bands "auch so einer werden". Aber vom Rockerbild hat er sich Anfang der 1970er schnell entfernt. Stattdessen stürzte er sich mit der Band Art Zoyd in klangliche Grenzüberschreitungen. 35 Jahre lang war er - mit enormem internationalen Echo - Teil der französischen

Avantgarde-Band. Dann hatten ihn die "langen Entscheidungsprozesse innerhalb so einer Gruppe müde gemacht". Seit 1996 arbeitet er an Solowerken, schreibt für Tanz, Theater und Kino auch Soundtracks. Und seit 1996 arbeitet er auch mit der Salzburger Tänzerin und Choreografin Editta Braun.

"Professional Stranger" ist auch wieder der Soundtrack für die neue Inszenierung von Braun, die im Mai zunächst als Stream Premiere haben wird.

Das Stück heißt "Long Life" und erzählt vom Älterwerden. "Das beschäftigt einen freilich", sagt Zaboitzeff. Und eben weil dieser Umgang mit dem Älterwerden eine sehr persönliche Sache ist, lässt sich dieses Album auch ohne Bühnenperformance hören. Es steht für sich allein, kreist um große Lebensfragen, lässt sich Zeit und schafft es, diese in feingesponnenen Melodien und Klängen spürbar zu machen. Selten war Zaboitzeff in seiner Musik, die sonst mit Brüchen und Abgründen spielt, so offen, zugänglich, ja sogar poppig.

Eine Art der "Altersmilde" erkennt Zaboitzeff in den neuen Kompositionen dennoch nicht. Aber wichtig sei ihm, dass er gelernt habe, in seiner Musik "auch eine Leere herstellen zu können". Nicht aber eine Leere, die ein Nichts ist, meint er damit. Es geht um jenen Raum in der Musik, in dem die Fantasie angeregt und aufgestachelt wird. Und freilich habe auch die Pandemie mitgespielt. "Der erzwungene Rückzug macht einen nachdenklicher", sagt Zaboitzeff, der sonst weltweit auf Bühnen steht. Dieser Rückzug schuf auch Zeit, "um zu ordnen, aufzuarbeiten und auch neue Welten aufzustoßen ».

Daher gehe es bei der Stille, die ihn beschäftigt und einem auf "Professional Stranger" begegnet, auch nicht um den Klang. Es geht eher um die Stille als Ausgangspunkt für Inspiration. Diese Stille sei etwas Ähnliches wie das Schließen der Augen. "Wenn man die Augen dann aber wieder öffnet, gelingen neue Blicke, sieht man manches anders", sagt Zaboitzeff. Dann stelle sich so etwas ein wie eine "poetische Sensibilität, ein Raum für Träume". Das Album endet mit einer Verbeugung vor dieser Kraft der Stille und des Träumens. Zaboitzeff covert eindrücklich zartfühlend "Enjoy the Silence" von Depeche Mode.

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SALZBURGER NACHRICHTEN (A)
par Clemens Panagl, 17/12/2005
VOYAGE AU CENTRE DE LA TERRE


Singen im Vulkan
Im Pariser Stade de France wird Jules Vernes 100.Todestag mit einem Riesenspektakel gefeiert. Die Musik steuert der Wahlsalzburger Thierry Zaboitzeff bei.

SALZBURG, PARIS (SN). „Noch klingen wir wie eine richtige Garagenband. Aber Sie sollten hören, wie das Ganze über die Soundanlage im Stadion wirkt“, sagt Thierry Zaboitzeff mit einem Augenzwinkern. Im Tanzstudio der Salzburger ARGEkultur hat der Komponist und Musiker mit seinem sechsköpfigen Ensemble soeben die letzte musikalische Durchlaufprobe absolviert - in Filzpantoffeln, um den empfindlichen Boden zu schonen. „In Paris wird
die Band Teil eines riesigen Spektakels mit Projektionen, Musik und Feuerwerk sein“, sagt Zaboitzeff.
„Gesungen wird mitten im Vulkan.“ Der Vulkan, das ist am heutigen Samstag und am kommenden Montag das ganze Stade de France im Pariser Vorort
St. Denis. Das größte Fußballstadion Europas begeht den100. Todestag des französischen Schriftstellers und Visionärs Jules Verne mit einer gigantischen Show. Regisseur Stephane Verite und Dramaturg Philippe Corbin inszenieren Vernes „Reise zum Mittelpunkt der Erde“ als multimediales Großer-
eignis. „Ein Abenteuer in der Dimension des Stade de France“, heißt es in der Vorankündigung, „das mit den Ausmaßen des Stadions spielt und seine Kurven füllt.“ Die ganze Arena nutzt Verité als 360-Grad-Projektionsfläche für seine Jules-Verne-Fantasien. Die Zuschauer, die angehalten sind, in Weiß zu erscheinen, werden ebenfalls zur Projektionsfläche und so mit zum Teil des Ganzen — ebenso wie zwei bewegliche Bühnen, auf denen die Akteure und Musiker durch das Rund bewegt werden. 30.000 Zuschauer passen in das mit reichlich Technik ausgestattete Stadion (80.000 sind es bei Fußball spielen). 120.000 Besucher werden zu den vier Shows am Samstag und Montag erwartet. Für den Wahlsalzburger Zaboitzeff, der unter anderem mit der Choreografin Editta Braun zusammenarbeitet, lag die Herausforderung jedoch nicht darin, für so viel Publikum zu komponieren. „Herausfordernd war, Musik wie für einen Film zu schreiben - Stimmungen aufdie Sekunde entstehen zu lassen.“
Die Partitur, in die der einstige Experimentalrocker Stilelemente zwischen Rock und in Fantasiesprache gesungenen Chorälen einfließen ließ, setzt Zaboitzeff live mit Peter Angerer (Schlagwerk), Sandrine Rohrmoser (Mezzosopran), Gerda Rippel (Sopran), Christian Wirth (Violine) und Thomas Mandel (Sax)
in Klang um. Auch ein Laptop gehört zum Ensemble. Die Computersounds geben dem Bassisten und Ensemblechef „die Freiheit, auch mit einer kleinen Besetzung jede Klangnuance realisieren zu können“. Die ursprüngliche Idee, ein ganzes Orchester ins Stade de France zu lotsen, erwies sich als
organisatorisch nicht durchführbar. Dafür feilt Zaboitzeff schon an seiner nächsten Idee: Musik für ein philharmonisches Orchester von 25 Elektrogitarristen.

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SALZBURGER NACHRICHTEN (A)
par CM, 30/09/2002
à propos du spectacle MISSA FURIOSA
à Linz et Salzburg


Pfefferminz als Gottes Brot

Thierry Zaboitzeffs „Missa Furiosa“ feierte Premiere beim BrucknerfestLinz - Samstag in Salzburg

Beim Eintritt in den Posthof-Saal bekam das Publikum zum Naschen Pfefferminzplättchen. Wer sie sich auf der Zunge zergehen ließ, konnte sich schwerlich der Assoziation mit einer Hostie erwehren.
Dies war der kokettere Teil des Spiels mit der christlichen Messe. Thierry Zaboitzeff dekonstruiert nicht. Die Komposition ist eigenständig und kompakt und lässt die Zuhörerschaft erleben, dass Konsequenz auch jenseits von Strenge möglich ist. Oder humanistisch betrachtet: Nicht Religion ist die Antwort auf Sinnsuche und die Fragilität der conditio humana, sondern Religiosität. Und Religiosität benötigt keine Kathedralen. Ihre Kathedrale kann die Stille eines Waldes genauso sein wie der Klangraum von Musik. Sinnentleerte Zeremonien stellt sie als verlogen bloß. Zaboitzeffs „Missa Furiosa“, die am kommenden Samstag im Rahmen den „Langen Nacht der Museen“ im republic aufgeführt wird, ist eine Hommage an die menschliche Vitalität. Seine philosophischen
Wurzeln liegen in den 60ern und 70ern, als vielen Menschen ein Neuentwurf der Welt nahe schien.
Wer einen solchen Background hat, bewegt sich leichtfüßig in den Fußstapfen der Tradition.
„Ich habe gefunden, dass keine Sprache besser zu meiner Musik passt als die lateinische“, lautet Zaboitzeffs Antwort auf die Fragen
nach seiner Motivation, eine Messe zu schreiben. „Am Anfang war es wie ein Spiel.“
Der Musiker mit Wohnsitz in Rif bei Hallein wurde 1953 als Sproß russischer, spanischer und französischer Vorfahren in Nordfrankreich geboren. Als Kind saß er oft bei seinem Großvater, einem Kirchenorganisten, im Chorgestühl. Dort ließ Zaboitzeff sich beeindrucken vom Pomp der Musik, vom Pathos, vom Gestus der Messe, den Glocken. Das alles hat seinen emotionalen Zugang zu und sein emotionales Verständnis von Musik geprägt.
So ist denn auch die „Missa Furiosa“ ein Werk großer Gesten am Rande des Pomp.
Rock’n’ Roll, Jazz, Bands wie King Crimson, das Mahavishnu Orchestra, die erotischen Chansons von Serge Gainsbourgh haben Zaboitzeff beeinflusst. „Gloria“, „Sanctus“ oder „Kyrie“ ertönen als Sound- und Rhythmusstrukturen zwischen Klassik und Techno, Ethno und Jazz. Die Bühnenshow unter Regie des Parisers Stephane Verité spielt teils ironisch, teils poetisch mit Elementen des christlichen Ritus — seinen Symbolen, der Segnung, der Predigt, der Prozession. Wie die Musik oszilliert auch die theatralische
Darstellung zwischen Sehnsucht und Provokation. Zu den besonders berührenden Momenten zählt, wenn das Jonglieren mit bekannten Bildern am symbolhaftesten wird im Spiel mit einer hölzernen Puppe, das an die Kreuzabnahme verweist. Im Schlussstück „Libera me“ bleibt schließlich offen, an wen der Appell des Chores, die Bitte um Befreiung, sich wendet: An. einen Gott? Oder vielmehr an etwas in einem selbst Verborgenes?
An die Sehnsucht des Menschen nach etwas Großem jedenfalls, das über allem Bekannten stehen könnte, doch allein in der menschlichen Fantasie begründet ist.
Das Konzept, synthetische Sounds, Geiger, Rockdrummer und klassischen Gesang auf eine Bühne zu bringen, war wohl riskant und hätte leicht zu Konkur-
renz und Auflösung führen können. Es ist der Dichte der Komposition und der Rolle Zaboitzeffs als Bass spielender pontifex maximus auf der Bühne zu danken, dass das Staunen über ein Werk großer Intensität und großer Emotionen nachwirkt.
Weil sich die Szene Salzburg nicht dazu durchringen’konnte, die „Missa Furiosa“ als Gesamtproduktion mit Bühnenhandlung zu übernehmen, sondern nur in theatralisch reduzierter Form, wird bei der Vorstellung in Salzburg am 5. Oktober Wesentliches fehlen. Doch sind Komposition und Darbietung
so stark, dass sich ein Besuch allemal lohnt.

CM
Montag, 30. September 2002



NOTES VAGABONDES (F)
Par Denis Desassis 24/11/2020

Chronique de l'album
PROFESSIONAL STRANGER
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Thierry Zaboitzeff : Professional Stranger
2020 24/11

Au mois de juin 2019, j’ai rendu hommage au travail entrepris depuis une cinquantaine d’années maintenant par Thierry Zaboitzeff. La publication de Sleep No More par son groupe Aria Primitiva avait été pour moi le prétexte à une chronique dans le magazine Citizen Jazz. Par conséquent, je ne reviendrai pas ici en détail sur son parcours qui va de Art Zoyd (dont il fut le co-fondateur en 1971 avec le regretté Gérard Hourbette) jusqu’à un nouveau disque en 2020, Professional Stranger, en passant par de multiples expériences en groupe ou en solo, sans oublier la composition de bandes-son pour des spectacles de théâtre, de danse ou pour des films. Ma chronique se présente comme un rapide tour d’horizon de sa carrière si singulière, vous en saurez donc plus si vous le souhaitez. Avant toute chose, je définissais en quelques mots ce musicien pas comme les autres (bassiste, violoncelliste, compositeur, chanteur, etc.) en essayant d’expliquer la difficulté à cerner son univers « aux confins de la musique électronique, de la musique contemporaine et du rock symphonique ».

Les temps sont durs et pour l’heure – en attendant d’autres qu’on espère meilleures et une publication sous une forme physique – Professional Stranger n’est disponible à la vente que sous forme numérique, ou à l’écoute sur les principales plateformes de streaming, comme on dit de nos jours.

Les compositions de ce nouvel enregistrement sont issues du projet chorégraphique Long Life qui sera prochainement créé à Salzbourg par la compagnie de la chorégraphe Editta Braun.

On connaît le côté souvent ténébreux de la musique de Thierry Zaboitzeff, tous ces « espaces inquiets » dans lesquels il inscrit la plupart de ses compostions, leur pulsion profonde qui semble émaner d’une pénombre dont on perçoit les mystères sans jamais les cerner vraiment. Mais cette fois, le multi-instrumentiste laisse entrevoir plus de lumière et ses paysages paraissent apaisés (à l’image de « L’insouciance de Vénus », par exemple), même si en ouverture le climat de « Neoklassicos Le Grand » n’est pas sans évoquer celui d'Art Zoyd. Et puis il y a cet accordéon omniprésent, tissant de nouvelles textures mêlées à celles des cordes et de l’électronique, capable d’entamer une petite valse (« Mali Valcer ») ou une samba arythmique (« El Caos »), de dessiner dans la douceur du soir un arbre (« Дерево »), de peindre la musique en bleu (« So Etwas Wie Blau »), de raviver les couleurs du célèbre « Venus » de Shocking Blue (souvenez-vous, en 1969…), ici chanté par Sandrine Rohrmoser. Sans oublier un étonnant final avec une reprise aux allures de cérémonie de « Enjoy The Silence » de Depeche Mode (et cette fois, c’est Thierry Zaboitzeff qui en est le chanteur).

Dans un récent échange, je faisais remarquer à Thierry Zaboitzeff que Professional Stranger me paraissait plus facile d’accès que ses autres productions et sa réponse m’a laissé entendre qu’il n’y avait pas de calcul de sa part. Les circonstances du projet Long Life l’ont guidé naturellement vers des atmosphères plus limpides et mélodiques. Une raison de plus pour vous suggérer de découvrir sans attendre son univers pas comme les autres, si vous ne l’avez déjà fait bien entendu.

Musiciens : Thierry Zaboitzeff (tous les instruments) ; Sandrine Rohrmoser (chant).
Les titres : Neoklassicos le Grand | L’insouciance de Vénus | Venus | Mali Valcer | El Caos | Дерево | So Etwas Wie Blau | Overlap Processing | Enjoy The Silence.
Label : iMD-ZABMUSIC

Denis Desassis

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NOTES VAGABONDES (F)
par Denis Desassis 15/12/2021
Chronique du EP
PAGAN DANCES

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En vingt minutes seulement, Thierry Zaboitzeff plante à nouveau avec Pagan Dances le décor de ses mondes nocturnes dont il dessine les contours inquiets depuis plus de quarante-cinq ans maintenant. Souvenons-nous des premiers enregistrements du groupe Art Zoyd et de sa Symphonie pour le jour où brûleront les cités. Soit la chronique d’un effondrement annoncé qu’on rapprochera de Génération sans futur ou des Espaces inquiets quelque temps plus tard. On frissonne rien qu’à les lire, on est gagné par la fièvre en les écoutant. Dans tous les cas, la vibration est forte, presque tellurique.

Le multi-instrumentiste (mais d’abord bassiste et violoncelliste) semble particulièrement actif depuis quelque temps. Pour preuve Aria Primitiva en 2019 ou Professional Stranger il y a un tout juste un an, deux albums dont j’ai eu l’occasion de rendre compte au moment de leur publication. D’indispensables évocations dans la mesure où ce musicien me paraît être de ceux qui ont réussi à inventer leur propre univers. On peut sans prendre trop de risque penser qu’il existe bien quelque part, tout près de nous, une « Planète Zaboitzeff ».

Vingt minutes, oui, soit une fraction de seconde à l’échelle d’une vie, pour exprimer l’essentiel d’un musicien habité comme aux premiers jours, par le biais d’un idiome paré des couleurs d’une musique dont les tourments seraient ceux d’un voyage en direction du grand mystère, un périple initiatique ponctué de rencontres dont vous ignorez si elles doivent vous imposer l’éloignement sous l’emprise d’une peur subite ou bien susciter votre curiosité. Parce que cette musique est humaine, soyez-en certains, elle est le fruit mûr du cœur et de l’âme. Cérébrale certainement, mais charnelle aussi, pour ne pas dire sensuelle. Ces « danses païennes » ne sont pas joyeuses, il est vrai. Elles interrogent notre monde dont on sait le caractère trop souvent glaçant et implacable. Pourtant, elles prennent bien en réalité la forme de danses, enivrantes et irrésistibles, dans une chorégraphie hantée dont les mouvements sont portés par un piano aux accents bartokiens et une guitare qui ne reniera pas son esthétisme frippien. La composition titre – au sujet de laquelle je m’autorise à penser que certains passages rappellent le travail d’un groupe frère d’Art Zoyd, Univers Zéro – s’étire durant un quart d’heure, multipliant les embuscades, les changements de trajectoires et d’altitude, combinant les sonorités. On pourrait parler de musique de chambre contemporaine électro-acoustique ou de rock technoïde où s’épanouissent samples et cordes synthétiques. Ce n’est là que l’esquisse d’une mise en mots de ce qui se reçoit, en premier lieu. Elle est avant tout un voyage au sujet duquel l’ami Thierry Moreau (qui signe une fois encore le visuel de l’album, bravo à lui) dit avec beaucoup d’acuité qu’il y entend : « une musique d’un film imaginaire, un ballet de Danses Polovtsiennes post-dystopie ».

La conclusion de ce disque envoûtant (et forcément trop court) se présente sous la forme d’une énigmatique ballade tout aussi nocturne que « Pagan Dances », « La légende de NaYmA ». On peut y entendre un piano et un violoncelle par-dessus lesquels une voix vient déclamer des mots dont le sens nous échappe, mais qu’il suffit de ressentir pour les comprendre. Derrière cet apparent mystère se cache sans doute la définition d’un langage organique, ce que m’expliquait Thierry Zaboitzeff lui-même dans un récent échange : « J'ai construit toute cette ambiance sombre entre percussion, violoncelle et piano pour ensuite y improviser avec ma voix en me laissant guider par mon orchestre, si je puis dire, et trouver différentes articulations, différents sons, différentes émotions, onomatopées... Enregistrement après enregistrement, je collecte les sons qui me touchent le plus et je finis par prendre un bout de telle ou telle piste et j'en réécris un texte qui me convient émotionnellement dans la situation... Et je fixe le tout, puis je le refais proprement, ce n'est pas une langue, mais j'aime à penser qu’elle est peut-être une langue oubliée très intimement liée aux sons produits dans ma composition ».

Tout est dit, la vie est là.
Denis Desassis

Musicien : Thierry Zaboitzeff (violoncelle, basse, claviers, percussions, programmation, voix, composition).
Titres : Pagan Dances (14:46) | La légende de NaYmA (4:50).
Label : imd zab-music (24 septembre 2021)




EXPOSÉ (USA)
Chronique
Thierry Zaboitzeff - Le Passage
 - Monstre Sonore - WTPL-Music - PIAS, 2024, CD / DL
by Peter Thelen, publication du 14/02/2024
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Les cinq titres présentés ici sont probablement ce qui se rapproche le plus d'un album complet que Thierry Zaboitzeff, membre fondateur d'Art Zoyd, a sorti depuis un certain temps. Avec pour inspiration un thème qui cherche la sagesse dans le futur à partir d'un présent morose, il ne fait aucun doute que TZ rassemble ici plusieurs de ses influences ; en fait, deux des morceaux font explicitement référence à son ancien groupe dans leurs titres, bien que dans l'ensemble cette collection d'œuvres soit très tournée vers l'avenir. En plus de ses nombreuses années en tant que compositeur, Zaboitzeff était généralement connu comme violoncelliste et bassiste, bien que ces dernières années il soit devenu un maître de nombreux instruments, et ici il joue de presque tout, y compris des claviers, des échantillonneurs, de la programmation, et divers traitements électro-acoustiques, plus des voix, bien qu'il n'y ait pas beaucoup de voix ici, principalement des grognements bas et des morceaux parlés. Sur les morceaux impairs, il est rejoint par son ancien camarade de groupe Jean-Pierre Soarez à la trompette, ce qui souligne encore la connexion avec Zoydian. Le morceau "La Forêt", d'une durée de plus de quatorze minutes, sert de pièce maîtresse, un étrange morceau apocalyptique basé sur le piano et les cordes avec des sons trouvés en abondance, des rythmes bas et stridents brisent les parties les plus pastorales, avec des voix allemandes à voix basse et d'autres vocalisations mystérieuses qui mystifient l’auditeur.
Le set s'ouvre sur "À la Poursuite du Zoyd - Extended", un morceau qui a pu ou non apparaître auparavant sous une autre forme, qui souffle comme un ouragan pendant les premières minutes, mais qui trouve rapidement un groove entraînant sur lequel les claviers, la trompette et les voix sombres occupent une place prépondérante dans un chaos déformé et fracturé. De même, "Twisted Zoydian Song" est un morceau au rythme rapide, au groove entraînant, où les voix macabres abondent. "Poster Boy" présente un style rythmique inhabituel avec la trompette au premier plan, tandis que le morceau-titre clôt le set, mêlant trompette et électronique sur une séquence au rythme lent avec des voix douces et ce qui ressemble à un dobro à coulisse, accélérant le rythme au milieu des cinq minutes que dure le morceau. Ce morceau ne ressemble à rien de ce qu'il a fait auparavant, mais il rappelle certainement des éléments de ses œuvres précédentes. Dans l'ensemble, Le Passage marque un pas en avant audacieux tout en saluant le passé.

Retrouvez l'article original

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EXPOSE ONLINE (USA)
Reviews | Thierry Zaboitzeff - Luvos Migrations
by Peter Thelen, Published 2023-08-13

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Zab a été très occupé ces derniers temps, ne se contentant jamais de répéter ses succès, allant toujours de l'avant vers de nouveaux univers sonores, bien que son travail avec la compagnie de danse de la chorégraphe Editta Braun se poursuive, tout comme le concept de Luvos, qui a fait sa première apparition en 2012 avec Planet Luvos, une suite de 33 minutes en sept parties (il manque curieusement l'acte 1), que nous avions chroniqué ici dans Exposé à l'époque. Qu'est-ce que LUVOS ? Le site web de Braun l'explique ainsi : "Mes danseurs spécialisés et moi-même créons des êtres qui oscillent entre les animaux et les plantes avec des corps féminins extrêmement mobiles et entrelacés, la plupart du temps nus. Les corps des danseuses, complètement dépersonnalisés (le visage et les seins ne sont jamais visibles), nous font oublier qu'il s'agit d'êtres humains. L'illusion est créée d'être dans un monde qui nous est propre : un univers LUVOS". Luvos Migrations est la bande originale du film de danse d'Editta Braun et Menie Weissbacher, en 2022. Il s'agit essentiellement d'un single de dix-sept minutes, composé par Zaboitzeff, qui joue de tous les instruments, y compris du violoncelle, de la guitare basse, des claviers, des échantillonneurs, des sons trouvés et peut-être aussi des instruments logiciels. La pièce commence par le son de l'eau qui ondule et des oiseaux, suivi d'une cadence de cordes, soudainement interrompue par l'électronique, qui finit par former une pulsation puissante sur laquelle flotte une voix céleste. La pièce se poursuit dans un état d'évolution constante à travers plusieurs sections distinctes, le violoncelle omniprésent guidant la pièce au fur et à mesure de son développement, un paysage de rêve mélodique doux et subtil jusqu'à la neuvième minute environ, lorsqu'un fracas brutal vient tout écraser et emmène l'auditeur à travers le portail suivant, où le concept est reconstruit en quelque chose d'entièrement nouveau, et ainsi de suite. L'auditeur peut imaginer les mouvements de danse qui suivent la musique au fur et à mesure qu'elle progresse. En fin de compte, nous nous retrouvons non loin de l'endroit où tout a commencé, avec des cordes et des mélodies aventureuses sur fond de sons environnementaux échantillonnés. À l'heure où j'écris ces lignes, Luvos Migrations est disponible uniquement en téléchargement sur le lien ci-dessous.

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EXPOSE ONLINE (USA)
Reviews | Thierry Zaboitzeff - Réminiscences (Single)
par Peter Thelen 31/03/2023

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La pièce instrumentale dont il est question ici est la première nouvelle œuvre de Thierry Zaboitzeff publiée depuis l'énorme rétrospective en trois disques de sa carrière, 50 Ans de Musique, parue l'année dernière. On pourrait être tenté de rejeter Réminiscences parce que, après tout, ce n'est qu'un single de cinq minutes sans face B, et un téléchargement de surcroît, mais il est certainement agréable à écouter, plein d'introspection et d'émotion, né d'un endroit calme, peut-être au bord d'une rivière, alors que les dernières lueurs du jour commencent à disparaître, et que l'esprit dérive vers de lointains souvenirs d'autrefois. L'approche douce permet un examen naturel des expériences passées que l'on peut trouver dans les moments les plus calmes de la conscience de soi. Le morceau commence par une douce figure de guitare acoustique à douze cordes, avec peut-être un accompagnement discret de piano préparé et de guitare basse. Une demi-minute plus tard, un violoncelle triste se joint au défilé des pensées, puis d'autres cordes (violon, alto), une trompette et un saxophone alto, alors que le morceau développe des sentiments plus forts et des ambiances kaléidiscopiques. La nature douce du morceau pourrait être comparée à quelque chose des premières œuvres de Mike Oldfield ou même du regretté Pekka Pohjola dans ses moments les plus introspectifs, puis, après un peu plus de cinq minutes, il s'achève soudainement sans avertissement. Apparemment, TZ joue tous les instruments, sans qu'aucun autre musicien ne soit crédité.

Réminiscences semble être le mouvement d'ouverture d'une suite beaucoup plus longue composée de plusieurs parties, mais là encore, ce n'est peut-être qu'un vœu pieux. Quoi qu'il en soit, on y trouve une abondance de chaleur et d'émotion immersives.

Peter Thelen

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EXPOSE ONLINE (USA)
Reviews | Thierry Zaboitzeff - 50 Ans de Musique
Thierry Zaboitzeff — 50 Ans de Musique (Woof Music WPTL, 2022, 3CD)
par Peter Thelen (12/12/2022)

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Pendant plus de 50 ans, Thierry Zaboitzeff (TZ à partir de maintenant) a été un musicien actif en France, et plus récemment dans d'autres pays (Suisse, Autriche, etc.), perfectionnant son art, d'abord en tant que guitariste, puis bassiste, violoncelliste, et enfin compositeur et multi-instrumentiste à part entière, de sorte qu'il a produit suffisamment de matériel enregistré pour sortir ce coffret rétrospectif de trois disques, 50 Ans de Musique. TZ et son ami Gérard Hourbette ont commencé à jouer ensemble à l'adolescence dans le nord de la France, TZ à la guitare douze cordes et Hourbette au violon et aux percussions, rejoints par un bassiste, le trio prenant le nom de Rêve 1. Ils rencontrent le guitariste Rocco Fernandez, qui a son propre groupe, Art Zoyd, qui vient d'enregistrer et de sortir son premier single, "Sangria". TZ et Hourbette rejoignent Art Zoyd en 71, faisant du groupe un quintet, mais avec les musiciens qui quittent et rejoignent le groupe avec régularité, le jour arrive où le bassiste du groupe part, et en conséquence TZ passe à la basse. Les années suivantes ne sont pas faciles - le groupe joue beaucoup en concert, dans toute la France en fait, mais survit à peine, vivant dans des camps et des tentes entre les concerts, mais tout en développant leur propre style de musique rock expérimentale. En 75, sans aucune autre sortie, Fernandez - qui était jusqu'alors le seul compositeur du groupe - se retire du groupe et laisse sa direction à TZ et Hourbette. Plus tard, le batteur du groupe a quitté le groupe, et ils ont décidé d'aller de l'avant sans batterie, et de sortir leur premier long-player Symphonie pour le jour où brûleront les cités, sorti en 1976. À cette époque, Art Zoyd commençait à se faire connaître, jouant dans des festivals, faisant des tournées avec Magma, et développant un public. De la fin des années 70 à 1997, date à laquelle ils se sont séparés, TZ a enregistré une autre douzaine d'albums avec Art Zoyd, avant de se mettre à son compte pour enregistrer des bandes sonores, des pièces commandées pour la danse moderne et bien d'autres choses encore, ainsi que pour former les groupes Zaboitzeff & Crew et Aria Primitiva.

Les trois disques sont remplis à ras bord de morceaux de sa longue carrière, la plupart tirés des quelque 18 albums sortis après 1997, y compris des versions live qui ne sont disponibles nulle part ailleurs, mais aussi des morceaux de ses deux albums solo sortis alors qu'il était encore membre d'Art Zoyd, plusieurs morceaux classiques d'Art Zoyd, une poignée de morceaux de Zaboitzeff et Crew, quelques splendides exemples d'Aria Primitiva, et même la version personnelle de TZ du premier single d'Art Zoyd de 1971, en hommage au fondateur du groupe, Rocco Fernandez. Tout au long de l'album, vous entendrez une variété de styles allant du néo-classique aux bandes sonores, en passant par des pièces d'avant-garde et des rencontres sauvages avec l'électronique, le tout provenant de tous les horizons musicaux. Le premier disque contient l'intégralité des quinze minutes de "Pagan Dances" de 2021, le remarquable "Epreuves d'acier - Fragments d'une Forge", enregistré avec des membres d'Art Zoyd en 1995, et "Mein Augenstern" de la version réenregistrée de Nebensonnen, parmi de nombreuses autres surprises. Sur le deuxième disque, on trouvera un extrait de la bande originale du film muet classique de TZ, Le Cabinet du docteur Caligari, la spacy et hypnotique "Mariée à la nuit" enregistrée avec Erik Baron / d-zAkord avec six guitares électriques et trois basses, tirée de son album Sixteenth (2012), et le groove électronique "Die Maschine" tiré de son CD Multiple Distortions. Le troisième disque commence par l'aventureuse "Sleep No More", tirée du premier album de son trio Aria Primitiva, une chanson qui trouve son origine dans l'album Nosferatu d'Art Zoyd ; quelques pistes plus loin, nous avons la version intégrale de quatorze minutes de "Aria Primitiva", tirée du même album. "Children's Corner" est un beau morceau mélodique qui date de son album solo du début des années 90, Dr. Zab and his Robotic Strings Orchestra. Bien qu'une grande partie de la musique présentée ici soit instrumentale, TZ comprend quelques morceaux vocaux étonnants, dont "Introitus", tiré de l'album Missa Furiosa (2004) de Zaboitzeff & Crew, qui rappelle un peu les débuts de Magma, mais avec une touche plus électronique. Même si un auditeur ne connaît que peu ou pas du tout le travail de TZ, ou même seulement ses premiers travaux avec Art Zoyd, les 43 titres de 50 Ans de Musique constituent une introduction remarquable à sa longue et variée carrière, que je recommande vivement.

Peter Thelen

Classé sous : Archives, 2022 sorties
Artiste(s) associé(s) : Thierry Zaboitzeff, Art Zoyd, Aria Primitiva
Plus d'infos sur http://thierryzaboitzeff.bandcamp.com/album/thierryzaboitzeff-50-ans-de-musique-s

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EXPOSE ONLINE (USA)
par Peter Thelen 10/12/2021
Chronique du EP
PAGAN DANCES

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In the year or so since Professional Stranger, Dr. Zab has been very busy with this, his latest and certainly appropriately titled blast of angular and emotional contemporary music, sometimes electro-acoustic, sometimes modern classical, and sometimes ambient, all converging in one dark form or another. Usually with Zaboitzeff’s releases we get a little more information regarding what it was created for — usually a modern dance project or somesuch — but here little information is given, the music simply speaks for itself as it goes forward, though it does shift around with regularity, bits and pieces all fused together in an interesting and irregular start-stop sequences. There are two parts — the first (and main) part is the fifteen-minute instrumental piece “Pagan Dances” (okay, there are some mysterious voice samples in there), and then a shorter five-minute piece titled “La Legende de NaYma” that is more uniformly dark and creepy, where spoken word parts abound, a bit more subtle and subdued than the first piece. There you have it, ostensibly a single, fifteen minutes with a fiveminute B-side. Zaboitzeff plays all of the instrumentation here, which includes bass guitar, electric cello, guitar, keyboards, sampler, electronic percussion, as well as virtual acoustic instruments (which seem to include strings, horns, and more), and is also responsible for the composition, recording, and mixing. The longer piece does sound like it could have been written for some choreographed project, although that is merely speculation on my part; while the piece is occasionally very reminiscent of Zab’s work with Art Zoyd circa Berlin, discerning listeners will definitely hear a bit more avantgarde electronica in the soundworld of Pagan Dances.

Peter Thelen
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EXPOSE (USA)
par Peter Thelen, 07/04/2021

Chronique de l'album
PROFESSIONAL STRANGER
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Thierry Zaboitzeff — Professional Stranger (IMD-ZABMUSIC 003/1, 2021, DL / CD)

Thierry Zaboitzeff should need no introduction to longtime readers of Exposé, having been the bassist and cellist of Art Zoyd from 1971 to 1997, after which he branched out into solo work, having now produced over two dozen solo recordings (a couple while he was still working with Art Zoyd) and also a couple releases with three-piece group Aria Primitiva. Many of his recent projects are pieces commisioned by the Editta Braun dance company in Salzburg, Austria, Professional Stranger being the latest, the result of the choreographic project "long life", which will be premiered in May 2021. The album contains seven instrumental tracks and two vocal pieces, the former mostly inhabiting a dark, crepuscular, and mysterious sound that might well lend themselves to soundtrack work, seeming to be on a course of ever-changing ideas. On all of the tracks, TZ plays all of the instruments, which include bass, cello, piano, keyboards, accordion, and programming, as well as various found sounds like creeky doors opening, muted thunder, and much more, including incidental vocals and voices. The main thrust of the music here is melodic, emotional, and filled with the unexpected, often shifting gears with little notice, but always savoring the beauty and eloquence of sound, be it classical, folk, or rock derived. Then there are the exceptions to those general rules. Anyone who was alive in 1969 will certainly remember The Shocking Blue’s worldwide hit song “Venus,” and here Zab offers a faithful rendition of that song, playing all of the instruments himself, with guest singer Sandrine Rohrmoser handling the vocal parts. The closing track is a very dark and foreboding version of Depeche Mode’s “Enjoy the Silence,” sung by Zaboitzeff with ominous vocal effects. So as much as this is accompaniment for a dance production, it also stands strong on its own in the unusual music category. One more thing: If you get it from Bandcamp you won’t get the two cover tunes (some licensing issue), so for the full album one will need to go to Apple Music, Spotify, or direct from TZ’s website, where you can buy it as a CD.

Peter Thelen

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EXPOSE (USA)
par Peter Thelen, 26/11/2020
Chronique des albums 
LAYAZ - SHORT LIVE EXPRESS - LOST UNCUT

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Collected here are a trio of Thierry Zaboitzeff download releases from late 2019 that pretty much flew under our radar until now. Zaboitzeff was the long-time bassist and cellist of the band Art Zoyd who left that band in the late 90s to follow his own solo muse, and has released a couple dozen (or more) solo albums since that time. First up is Layaz, which is in many ways reminiscent of his trio Aria Primitiva (which released an EP in 2017 and a full length release in 2019) in that the sound is heavily electronic, beat intensive, and powered by odd and effected vocals. This very much falls within the vocabulary of urban dance and hip-hop styles, not at all the usual fare for Zab, composed as the soundtrack fror a choreographic performance by the Editta Braun dance company. Some of the most interesting pieces here are the brisk and powerful “Twins,” the title track that closes the set, “Schizo 1” that opens the set with an electronic opus with whispered vocals and strange voices, and the longer “Schizo 2” that seems to pick up at a point where the opener leaves off. “The Lost Beat” wanders through several portals, from ambient to intense hip-hop beats as it develops across its six minute duration, while “Iophey Yma Zeia” underscores the urban beat connections even further with sampled voice loops pushing the piece forward. In all, these eight cuts represent something very different for Zaboitzeff.

For the five solo live tracks of Short Live Express, recorded at Salzburg earlier last year, Zaboitzeff surrounded himself with a number of instruments — electric bass, cello, and keyboards, supported by loop stations, samplers, and prepared personal sequencers, vocals, and voice samples. The powerful six-and-a-half minute “El Amor Brujo” is a particularly interesting offering, morphing as it moves along its duration with strange and angular melodies. “Kijé” is Zab’s dark and mysterious take on Serge Prokofiev's "La Romance du Lieutenant Kijé." “Crash” is the most lively and energized piece among the five, pushing the limits at a brisk pace. He also offers a solo version of “Sleep No More,” previously performed by his trio Aria Primitiva. It’s only around twenty minutes altogether, but certainly underscores what he can do in a live solo performance.

Finally there is the single track “LoSt Uncut,” another solo piece originally composed as a choreographed piece for the Editta Braun company. The 18-minute piece is a wandering dreamy sequence of interesting sounds as it proceeds, shifting gears frequently as it elaborates on more dark imagery as it goes. Several parts of the piece find a powerful flowing groove, comparable to some very dark elements of Magma, while others embark on more ambient excursions. It’s over all too soon, so you’ll need to play it twice to get the effect of a full LP. Of all the pieces reviewed here, LoSt Uncut is the most engaging from my perspective.

Peter Thelen

Filed under: New releases, 2019 releases

Related artist(s): Thierry Zaboitzeff

More info
http://thierryzaboitzeff.bandcamp.com/album/short-live-express
http://thierryzaboitzeff.bandcamp.com/album/layaz
http://thierryzaboitzeff.bandcamp.com/track/lost-uncut

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EXPOSE (USA)
par Peter Thelen, 17/05/2020
Chronique de l'album 
NEBENSONNEN REMAKE

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In the late 90s, after being an integral member of Art Zoyd for over twenty years (as well as releasing a couple solo albums on the side), Zaboitzeff began to distance himself from his former band, post Haxan, with a series of comissioned solo recordings released on the Atonal records label, the first of these being Heartbeat in 1997, followed by India and Alice, each approximately one year apart, then in 2000 he released the original version of Nebensonnen, which was the commisioned music for a dance piece by the Editta Braun Dance Company. Almost an hour in length, it was composed and performed, with the exception of one track where his former band members join him, entirely by Zaboitzeff using the tools he had available at the time: cello, bass, electric keyboards, and synths – nineteen inventive tracks of mostly soft and subtle compositions, precisely what was required by the dance troupe. But through all the years, Zaboitzeff was never entirely happy with the results, and beginning last year he pulled the trigger on the project of remaking it from scratch, the same compositions but entirely new arrangements – acoustic piano, real orchestration and almost no synths. Listening to the Nebensonnen (Remake), the compositions are all familiar but the way the pieces are arranged is far more meticulous and precise, building a whole new levels of warmth and character that weren’t entirely there on the original recording. The new arrangements entail a full compliment of strings, but the acoustic piano is probably the most effective agent of change. The same standout tracks that made the original so special, like “Alles in Ordnung,” “Rondo,” “Zorn,” “Seehaus,” and many others are even more beautiful here, now brought up to a whole new level that makes the originals pale in comparison. A back-to-back listen confirms the power of the newer version. As of this writing, Nebensonnen (Remake) is only available as a download, but that certainly could change in the future.

Peter Thelen

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EXPOSE (USA)
par Peter Thelen, 25/04/2019
Chronique de l'album 
ARIA PRIMITIVA - SLEEP NO MORE

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It wasn’t that long ago that we reviewed the three song teaser Work in Progress, which was a preview of sorts to this, Aria Primitiva’s first full-length foray into their unique soundworld, a hypnotic avant-garde soundtrack seemingly suspended in a nightmare, offering many bizarre and curious twists as it proceeds, as well as deep forays into unexpected new territories. The band is led by one-time (long, long ago) Art Zoyd cellist and bassist Thierry Zaboitzeff, here adding sampler, programming, and vocals to that list, as well as responsibility for most of the compositions, save one Eno / Bowie composition (“Helden,” which they do a splendid job on) and a couple group impovisations. Nadia Ratsimandresy plays keyboards and the ondes Martenot, and Cécile Thévenot plays keyboards and sampler. There are no drums per se, but programmed beats which, along with the keys, ondes martentot, and samplers often give these works a very aggressive electronic feel, almost other-worldly at times. Three of the pieces here were presented on the EP, including the fourteen-minute centerpiece of the album “Aria Primitiva” and the title track, both perhaps remixed with a bit more punch, and the six-minute “Maidaykali” is about a minute longer with additional improv added to the beginning. The growling vocals on the latter will certainly recall Magma in their Üdü Ẁüdü and Attahk period, and they also seem to be in some mysterious language. The opener, “Endayi Endesi,” pits a powerful and eerie melody against the chattering bottom end, with some vocals only appearing in the last half-minute, like an introduction. “Kletka” is one of two live group improvisations (the other being “Hystamack”), both relatively short interludes of a few minutes joining the more high-powered elements in the program, but their inclusion is essential. “Nixen” opens with an articulate and soft piece for piano, which switches into a more electronic based piece at midpoint highlighted by voices, effects, and cello, making for a nice break after the high powered intensity of “Aria Primitiva.” All taken, Sleep No More more than lives up to all the expectations set by their impressive 2018 EP.

Peter Thelen

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EXPOSE (USA)
par Peter Thelen, 13/04/2018
Chronique de l'album 
ARIA PRIMITIVA - WORK IN PROGRESS

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Since leaving Art Zoyd at the end of the 1990s, bassist & cellist Thierry Zaboitzeff as been busy with his own solo work, as well as writing scores for theater and dance (many of which have been released), many of which have been reviewed in he pages of Exposé. Now we have a 24 minute EP from his latet project Aria Primitiva, titled Work In Progress. Hopefully this EP is a forehint of a full-length release yet to come, the three tracks strongly steeped in electronics and strangeness, which is nothing new if one reviews TZ’s entire body of work; one of his mid-80s endeavors Dr. Zab and his Robotic Strings Orchestra offered listeners strong hints of these kinds of ideas a long time ago, Aria Primitiva is much in the same vein but far more developed and refined, and now with other musicians involved, it is entirely performable in a live setting. The trio consists of Zaboitzeff on cello, bass, sampler and voices (mostly growling, monstrous sort of vocal sounds that fit the futuristic and exotic flavor of the music to a tee, but some vocals with lyrics as well), Cecile Thévenot on keyboards and sampler, and Nadia Ratsimandresy on keyboards and Ondes Martenot, which is an early 1930s era electronic keyboard instrument with an eerie wavering sound similar to the Theremin, primarily used in movies and television and some 20th century classical music. Here, the instrument finds itself right at home in these futuristic nightmarish soundscapes. “Maidaykali” opens the proceedings, six minutes of high speed heavy electronic beats, growling vocals (not unlike something one might hear on any mid-to-late 70s Magma album) and meandering melodic arrangements counterpointing throughout. There is no drummer, so those are all electronic beats. The 15 minute “Aria Primativa” is the centerpiece here, as it winds through numerous sections of M.C.Escher-like musical developments winding back on one another as they seem to propel themselves forward over a foundation of superlative intensity, with sudden changes and angular abstractions coming at the listener at every turn. “Sleep No More” begins with the sounds of dogs barking and general chaos from which an intensely fractured composition emerges, with the vocals repeating “no more, no more…” at regular intervals as it proceeds. It’s over in less than four minutes though, and that’s sadly where this EP ends. Certainly an impressive beginning for Aria Primitiva!

Peter Thelen

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EXPOSE (USA)
par Peter Thelen, 30/05/2016
Chronique de l'album 
MULTIPLE DISTORTIONS

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Subtitled “Archives 2005-2016,” one might get the idea from that subtitle that this is a bunch of leftovers from the last ten years or so, but that’s certainly not the case — nothing could be further from the truth. This collection is superb from the beginning to end, the fruit from the top of the tree so to speak. Many of the 15 pieces here have a definite cinematic quality, much like fragmentary elements of suspense soundtracks that bubble up from dark corners of the psyche. Zaboitzeff is a master of the groove as well as generating melodic intensity, often in dark and mysterious ways, captivating the imagination. Elements of electronic, groove, quasi-orchestral, rock, and avant-garde all collide herein to create a varied sound that completely defies classification, yet holds the listener’s interest throughout. Zaboitzeff plays every instrument on the album, which includes electric bass, electric cello, all manner of guitars, keyboards and synthesizers, acoustic and electronic percussion, samples and programming. One has to wonder from where the composer draws these ideas that seem to grow out of dark fractures of emotion, with powerful driving forces from depths far below the surface. Sharp jagged rock structures first appear with multiple screaming overdriven guitar leads on “Overdrive 4,” one of several related pieces that are scattered throughout the track list in random order. “Confusion” grows out of a backdrop of chattering electronica with some wild and unusual effects that alternately yield to a darker vision, yet maintain a strong melodic current throughout. More dark cavernous explorations ensue with “Sign 2,” a short vignette that seems to follow an improvisational thread. “Vorschrift” follows it, with a catchy repeating melodic riff gently giving way to some whispered effected voices over an electronic foundation. That’s just four, but there are plenty more surprises here that will engage the intrepid listener.

Peter Thelen

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EXPOSE (USA)
par Henry Schneider, 19/08/2014
Chronique du DVD et de l'album
THE CABINET OF DR. CALIGARI

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The Cabinet of Dr. Caligari is one of the most influential films of the German Expressionist movement and it is also considered to be one of the greatest horror movies of the silent movie era. Released in 1920, The Cabinet of Dr. Caligari is the story of a man named Francis who relates a tale about his best friend Alan and Jane the girl they both love. Alan takes Francis to a local fair where they encounter the mystic Dr. Caligari, who exhibits a somnambulist Cesare. Cesare is purported to have the ability to predict the future, so Alan asks Cesare how long he has to live. Cesare responds “until dawn tomorrow.” The prophecy is fulfilled as Alan is murdered at dawn and Cesare is the prime suspect. Cesare creeps into Jane’s bedroom, abducts her, runs from the townspeople, and eventually dies from exhaustion. Then, as Dr. Caligari flees, the police discover a dummy in Cesare’s cabinet. Francis tracks Dr. Caligari to a mental asylum where Caligari claims to be the director. And you are left wondering who is insane? And what is the veracity of this outré tale?

The print on this DVD is a beautifully restored copy of this spine-chilling and sinister movie with its surreal sets and non-Euclidian angles.

Over the nearly 100 years since its release, many composers have contributed music to Dr. Caligari. There have been jazz soundtracks, experimental soundtracks like Bill Nelson’s in 1981, and now there is Thierry Zaboitzeff’s avant-garde version. Thierry is no stranger to silent movie soundtracks as he was a member of Art Zoyd when they composed and played music for Nosferatu, Faust, and Häxan. For Dr. Caligari, Thierry composed and performed the music solo.

The is a PAL DVD, so US residents may have difficulty viewing it unless your computer optical drive can read PAL discs. The DVD contains three viewing options, the full movie with the soundtrack, Thierry’s concert performance with the movie showing on a screen behind him, and a four-minute clip highlighting various moments from the performance. If you choose the concert option, the inter-title cards are in German with French subtitles on the screen. By choosing to watch the movie itself, the inter-titles are in English.

I am not sure how Thierry is able to keep the live music in sync with what is happening on screen as he is concentrating on singing and playing the cello, guitars, synths, loops, and sequencers. But it all works and is fascinating to watch an artist at the peak of his skills performing complex arrangements on multi-instruments solo for 75 minutes. Obviously Thierry spent a lot of time composing and orchestrating the music and thinking about how to perform it live. Watching him you can tell that everything is deliberate, no improvisation. Thierry has quite an arsenal of instruments, electronics, and effects. A lot of the music appears to be triggered by drum pads, guitar, and his cello. Some of the sounds and instruments are so processed you would not be able to identify the source without watching Thierry perform. But this musical tour de force is outstanding and greatly helps to build the tension in the movie.

This DVD will appeal to film students, movie aficionados, and lovers of avant-garde progressive music.

Peter Thelen

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EXPOSE (USA)
par Peter Thelen, 25/10/2013
Chronique de l'album
SIXTEENTH

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Hard to believe that “Dr. Zab” now has sixteen releases to his credit, but it’s true. And of all, this is one of the most eclectic, offering a wide palette of ideas and styles, shifting gears from one track to the next, so much so that it’s often a difficult one to summarize, but it’s nonetheless listenable while being highly explorative and original. For the most part, Zaboitzeff plays all the instruments here (bass, guitars, cello, samplers) as well as some vocals – although the primary focus is on instrumental work. Isabelle Farmini provides beautiful soprano voice parts to four of the cuts, two of which feature lyrics, and Erik Baron’s d-zAkord (a group of five guitarists and two bassists) is featured on one other track. Some of the material here could fit in well with some of his soundtrack material, while other pieces are very rhythmic and aggressive, offering a strong and potent mix of jazz, ambient, ethnic, weird mutant rock, and even touches of zeuhl. Opener “Slippery Nights” is a case in point, offering a curious strangeness that is instantly compelling. “Ov.6” represents a slower building melody working within some haunting dreamlike atmospherics. “Free at Last” pits intense bass and electronic grooves over the famous speech by Dr. Martin Luther King, gradually adding some clever melodic twists and rhythms. After a chaotic start, “Schluss mit Kunst” finds a curious electronic oriented groove fed by samples and some intense guitar buildup. “Touch” combines a variety of electronics (textures and samples), female voice and guest beat-boxing into some very innovative results, perhaps one of the disc’s most interesting cuts. While this disc tends to shift around in some strange unexpected directions, it nonetheless makes for a very interesting listen beginning to end.

Peter Thelen

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EXPOSE (USA)
par Peter Thelen, 21/09/2013
Chronique de l'album
PLANET LUVOS

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TZ’s latest comprises music written for a theater project created by the Editta Braun Company in Austria in 2012. That’s all one can tell about it from the scant credits on the disc. His website offers a bit more information: "The Salzburg choreographer Editta Braun leads us through a blue underwater world back to the origins of life... The viewer sinks into a blue, bubbling waterworld. The only sign that humans exist is the distant sound of a steamship whistle, somewhere far away.” Perhaps Act 1 has no musical accompaniment, but the seven pieces here go from Act 2 to Act 8, and most are avant-garde ambient vignettes of varying length featuring synthesizers, strings, bass, guitar, grotesque treated voices, bells, various other percussion, and an abundance of sampled sounds and voices. The pervasive sound of water haunts most of this, and those voices that weave in and out of the instrumental bed throughout the production are disturbingly dark, sinister and demonic, recalling some horror movie soundtrack material. Much of it is just a free-floating web of atmospherics, textures, and samples; most of this has no steady rhythmic beat that would place this anywhere close to rock, but melodies do appear and dissolve within the gentle mayhem. One might at times be reminded of the avant abstractions of Far Corner or Yeti Rain, or even Djam Karet’s dark ambient side. Very good for what it is.

Peter Thelen

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EXPOSE (USA)
par Peter Thelen, 17/09/2013
Chronique de l'album 
SEQUENCES
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Most will recognize Zaboitzeff from his long tenure as bassist / cellist / composer in Art Zoyd. Since the late 90s he has had a very productive solo career, with over a dozen releases to his credit during that period. This is one of three releases from 2012, a soundtrack for the film Winds of Sand, Women of Rock by Nathalie Borgers, which deals with the lives of the Tubu people of the Sahara desert (mainly Chad), the extreme conditions under which they live, and in particular the role of women in that society. The eighteen tracks here offer a variety of vignettes that provided the musical bed for the film, as well as some that were written but not used. Ranging from under one minute to over five, most fall in the middle somewhere, fusing ambient textures and defining melodies, often embellished with ethnic instruments and samples (voice clips and found sounds). Zaboitzeff composed and arranged all the material and played all the instruments himself (bass, cello, guitars, synths, voice, sampled piano, percussion, flutes and other instruments), and the result truly sets the scenes and moods imaginatively, and works well even for one who hasn’t actually seen the film. There are many highlights herein, and very little that could be considered filler; the themes are stated succinctly and never overstay their welcome. All taken, this is an outstanding set that stands strong on its own.

Peter Thelen

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EXPOSE (USA)
par Peter Thelen, 01/01/2008
Chronique des albums
MISSA FURIOSA / VOYAGE AU CENTRE DE LA TERRE

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Thierry Zaboitzeff is a name most will recognize from his many years as the bassist/cellist of Art Zoyd, before striking out on his own in the late 90s. At hand are his latest two albums, both dealing with very old familiar concept themes that could be (and have been) disasters in the hands of other artists; instead, Zaboitzeff has given new life to these through very imaginative and unexpected compositional treatments and arrangements. He is never one to be predictable, and these two are quite different from each other as well as from any of his other previous work. Missa Furiosa is an unusual take on the age-old Catholic Mass, with his radical versions of the "Kyrie," "Gloria," "Sanctus," and other parts exploring far reaching musical terrain, be it dark ambient environments mixed with middle-eastern flavored vocal prayer, or heavy repetitive pulsating electronic beats with dense arrangements for multiple voices and choirs, the latter occasionally hinting of the Carl Orff-like side of the classic Magma sound. Zaboitzeff handles most of the instrumentation (bass, cello, keys, guitars, programming, etc.) through numerous overdubs and loops, with guests on drums, violin, oud, and three vocalists. The end result is at once modern and ancient, cold and warm, where unlikely sounds and structures are butted up against one another in sometimes bizarre, but effective juxtaposition. Voyage is another beast altogether, once again featuring prominent vocal passages and choral arrangements, but infinitely darker this time, conjuring up twisted realms of Gothic imagery, augmented with a lush cinematic production and interesting bits of folk, classical, avant-garde, and minimalist structures all thrown into the mix. Add saxes and horns (or samples thereof) and judicious use of electronic effects to the instrumental mix this time as well. Both powerful releases that, while fundamentally similar, explore very different moods and perspectives. Both recommended.

Peter Thelen

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EXPOSE (USA)
par Mike Ezzo, 01/04/1999
Chronique de l'album
INDIA

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Dr. Zab strikes again, with his second release already (the fourth of his whole career) since calling it a long day with Art Zoyd back in 1997. On this soundtrack to a modern ballet project of the same title, it’s difficult to tell how much comes from the gut, rather than is merely done to spec, but I assume Thierry had rather a sizeable amount of leeway. Due to the subject matter though, it should be known that there is practically nothing resembling what you would hear from Art Zoyd. Neither does it fit any pattern of composition that I’m aware of, nor is it iconoclastic and out to smash all tradition under its thumb. What Thierry seems to be doing is pushing the fringe as far as it will bend before breaking, leaving the listener in a state of indecision: do I like this, or am I annoyed by it? If this is the goal then India is a success, for I am quite honestly stumped in a way that I can’t remember being in a good long time. On 14 different selections (most of which clock in under five minutes) he uses sampled sounds of mainly sitar and tabla, synthesizer, vocalizing in French (both solo and chorus), and percussion, to deftly capture the moods of stark loneliness, claustrophobia and mania. At times the music can be almost shocking; at others pleasant and bountiful. His singing is even more lyric-oriented than on Heartbeat, and a particular sitar motif recurs intermittently, conferring a sense of unity and structural foundation. This is not some form of crass culture, nor faux-ethnic forgery — out to blend various disciplines for their own sake — but a particularly European form of expression. I say European, not French, as the French haven’t really been known for being world explorers. Thierry however is Magellan! A true master. Make up your own mind whether you like it or not; but the man is in a category of his own design.

Mike Ezzo

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EXPOSE (USA)
par Mike Ezzo, 01/02/1998
Chronique de l'album
HEARTBEAT

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The de facto brain behind Art Zoyd since 1975, Thierry has now gone AWOL from that French institution, and seems to have spared nary a moment in rushing headlong into a solo career. Still, this isn't his first one-man-band outing if we take into account 1983's Prométhée, and the subsequent, Dr. Zab's Robotic Strings Orchestra. In the past he displayed an awe-inspiring wizardry for creating chilling atmospheres by manipulating textural and thematic materials into an identifiable and irony-emblazoned chemistry. And now he takes it even further, the difference being that the gothic-futuristic Zaboitzeff approach is dished up in a concise song context, with vocals and (at times) even discernible lyrics, though still intoned by a deep-from-the-tomb baritone. He sounds like some demented Cossack. Though largely realized using sampler keyboards, Heartbeat sees him continuing to mine the most unexpected sound sources, juxtaposing them in startling new ways: the cello in "El Amor Brujo"; the bass harmonics (which after all is his main piece of hardware) in "Léger Comme le Vent." Marvel at how he flanks this Satie-like furniture music against the frantic pacing of "Komba" and you begin to see what was probably holding him back in Art Zoyd. Guitar and female voice embellish the mini-canvasses as well, neither a single note or turn of phrase ever being poorly placed. Solo ventures are often a mere skeleton of past glories, but not so in this case. If you have ever been reluctant to step into the Art Zoyd universe for fear of its staunch unfriendly welcome, then this CD is tailor-made for you.

Mike Ezzo

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EXPOSE (USA)
par Mike Ezzo, 01/10/1993
Chronique de l'album
DR.ZAB & HIS ROBOTIC STRINGS ORCHESTRA

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Zaboitzeff is the bass guitarist/cellist for Art Zoyd. This solo project shows him in a more electronic setting, as it is done mostly using synths and sequencers. There are 22 tracks of varying length and styles, but firmly in the neo-classical/electronic style. The album is brilliant, and strikes a good balance between melodics and dark Zoydian textures; it's one that tends to grow on the listener, but not one that will alienate on the first listen; in fact this album is sufficiently accessible that even folks who've had problems adapting to the dark and angular worlds of bands like Art Zoid and Univers Zero should have no problem with this.

Mike Ezzo




RYTHMES CROISÉS (F)
LUVOS migrations d’Editta BRAUN et Thierry ZABOITZEFF :
Métaphore d’une humanité résiliente de sa propre civilisation dévastatrice ?
13 juillet 2023 Philippe Perrichon Articles et Entretiens, Chroniques

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Métaphore d’une humanité résiliente de sa propre civilisation dévastatrice ?

Créé le 22 novembre 2022 à Salzbourg, le spectacle LUVOS migrations met en scène la rencontre de deux veines d’inspirations fortes, atypiques, et dont l’originalité et parfois l’étrangeté se saisissent de l’attention du spectateur : LUVOS migrations, à l’instar des œuvres précédentes de ce tandem lumineux signe l’osmose parfaite entre le style résolument novateur, à la fois sculptural et mouvant de la chorégraphe autrichienne Editta BRAUN et la palette musicale si personnelle du compositeur français Thierry ZABOITZEFF.

Le travail commun d’Editta BRAUN et de Thierry ZABOITZEFF est l’histoire d’une collaboration de plusieurs décennies : en 1997, ils co-produisent un de leurs premiers spectacles communs intitulé Heartbeat qui sera mis en scène par Stéphane Vérité (Szenefestival Salzburg, 1997). Le nombre de ces collaborations n’aura de cesse dès lors, avec quelques points d’orgue tels que Eurydike en 2004 ou König Artus en 2010, ou encore Hydráos en 2020 avec l’incroyable danseuse Anna Maria MÜLLER – spectacle qui, outre la toujours fascinante musique de Thierry ZABOITZEFF « convoquera » aussi BEETHOVEN, SCHUMANN, DEBUSSY.

Le propos de Hydráos renvoie fort pertinemment aux questions soulevées par un confinement généralisé qui suggère des pistes d’évolution, voulues ou subies, surtout au plan psychique, voire fantasmagorique, lorsque les contraintes liées à un enfermement à vocation sanitaire entraînent des bouleversements sociétaux et individuels profonds -interférences de l’imaginaire, de l’angoisse ou de la dimension onirique dans notre quotidien.

Si Thierry ZABOITZEFF est bien connu de nos lecteurs comme co-fondateur d’ART ZOYD, sa carrière de compositeur hors de ce contexte bien connu date de plus de vingt-cinq ans (cf. sa récente anthologie en 3 CD) ! Né en 1953, Thierry ZABOITZEFF, multi-instrumentiste novateur trace sa trajectoire en solitaire ou en collaboration à travers le monde entier depuis 1995. Il a, depuis lors, enregistré vingt huit albums. Son site, www.zaboitzeff.org est une mine d’or pour qui souhaite découvrir ou redécouvrir la richesse de son parcours exceptionnel.

Née en1958 en Autriche, Editta BRAUN est considérée à juste titre comme une pionnière de la chorégraphie contemporaine. Forte d’un diplôme universitaire en sciences du sport, en langue et littérature allemandes (Université de Salzbourg), Editta BRAUN a étudié la danse à Paris et à New York. Elle enseigne à l’Université de Salzbourg et à l’Université privée Anton Bruckner de Linz. Elle a créé plus de 30 productions (théâtre physique, danse) et autant de tournées à travers le monde avec sa compagnie. Sa carrière est émaillée de collaborations interculturelles, sur fond d’engagement politique : elle pose un regard résolument féministe sur la société et le théâtre.

Elle a reçu le Prix international des arts et de la culture de la ville de Salzbourg en 2014, ainsi que le Grand Prix des arts de la région de Salzbourg en 2017.

Le propos de LUVOS migrations, film-chorégraphie de 19 minutes.
Avec LUVOS migrations, Editta BRAUN évoque, à travers une chorégraphie fantastique, aux corps sans visage, aux attitudes vivantes certes, mais non-conformes à une gestuelle familière, l’évolution dans le temps, l’espace et les paysages définis par la civilisation, d’une population étrange, mi-humanoïde, mi-animale frayant son chemin indéfini sur les ruines d’un monde écroulé, figé ou dépeuplé. Projection onirique d’un monde épuisé à outrance par les humains ? Lendemains mystérieux post-cataclysmique pour une espèce émergente et fragile ? Hypothétique survivance biologique succédant à un naufrage de civilisation ? Cette étrange esthétique chorégraphique est imbriquée des couleurs cristallines et profondes de la musique ciselée d’un Thierry ZABOITZEFF dont l’originalité sied à merveille avec la dimension très novatrice du spectacle chorégraphique de Editta BRAUN. Le « Cairo Breaking Walls Festival » ne s’y est pas trompé en lui attribuant le prix spécial du jury en janvier 2023.

LUVOS migrations a aussi été primé Meilleur film de danse en janvier 2023 et a obtenu la troisième place en mai 2023 au festival Florence-Dance-On-Screen. Il a de même été présenté successivement à Salzbourg, au Caire, à Trostberg en Allemagne, à Pittsburgh aux États-Unis (au Constructed Sights Dance Film Festival) et a aussi été projeté à Cologne au Moovy Dance Film Festival ainsi qu’à Londres, etc.

La direction du film et la chorégraphie ont été assurées par Editta BRAUN et Menie WEISSBACHER qui était également derrière la caméra et était en charge de la post-production. L’enregistrement, la composition, l’interprétation et le mixage de la musique sont signés Thierry ZABOITZEFF ; et il faut souligner la magnifique performance des quatre danseuses Martyna LORENC, Anna Maria MÜLLER, Sonia BORKOWICZ et Berta RAMÍREZ.

La production de ce film remarquable, à l’esthétique novatrice, a été financée grâce au support du Ministère Fédéral Autrichien des Arts et de la Culture ainsi que par la ville de Salzbourg et l’État Fédéral de Salzbourg.

Editta BRAUN : « LUVOS a été créé dans notre port d’attache de Salzbourg et a commencé son voyage avec succès à travers 40 villes dans 20 pays. Partout, nous rencontrons l’étonnement et les standing ovations, quelle que soit l’origine culturelle des publics. Que ce soit au Sénégal ou en Bulgarie, en Estonie, en Écosse, en Grèce, à Chypre, en Israël ou en Irlande – une production LUVOS attire beaucoup d’attention et remporte des prix, comme il vient de le faire à l’un des plus grands festivals de théâtre égyptien, le Festival international de théâtre expérimental du Caire.

Mais qu’est-ce que LUVOS ?

Nous – c’est-à-dire mes danseurs spécialisés et moi-même – créons des êtres qui oscillent entre animaux et plantes avec des corps féminins extrêmement mobiles et enlacés, pour la plupart nus. Les corps complètement dépersonnalisés des danseurs (le visage et la poitrine ne sont jamais visibles) nous font oublier qu’il s’agit ici d’êtres humains. L’illusion est ainsi créée d’évoluer dans un monde unique, un univers nommé LUVOS. [La couleur spécifique de cet univers est] largement déterminée et suscitée par les compositions de Thierry ZABOITZEFF et la conception précise de l’éclairage de Thomas HINTERBERGER (*).

Il y a 37 (!) ans, en 1985, cette esthétique particulière a été lancée par Kollektiv Vorgänge (autour de Beda PERCHT et moi-même) avec une courte pièce, filmée par l’ORF et récompensée au plus important concours chorégraphique européen de l’époque à Paris.

À partir de 2001, j’ai développé des longs métrages très différents avec des générations de danseurs que nous avons emmenés dans le monde de la danse et du théâtre. Les prérequis physiques et techniques que les danseurs LUVOS doivent apporter avec eux sont si spécifiques qu’au fil des années un ensemble hautement spécialisé a émergé. Entre-temps, LUVOSmove® est devenu une technique de danse certifiée, que j’enseigne à l’université et qui fait l’objet de recherches scientifiques.

En ce début d’année 2021, alors que les performances scéniques internationales sont encore hors de question en raison de la pandémie, le désir de développer davantage le thème surgit : quelles nouvelles choses peut-on raconter de l’univers LUVOS par des moyens cinématographiques ? Avec la photographe et cinéaste Menie WEISSBACHER et l’équipe spécialisée de LUVOS, nous avons plongé dans l’aventure ! »

L’angle musical de LUVOS migrations : entretien avec Thierry ZABOITZEFF

Dans quelles circonstances s’est augurée votre collaboration avec la Editta Braun Company ?

TZ : Cela remonte à 1997, année de notre rencontre, je venais de quitter ART ZOYD et nous montions ensemble un duo: Heartbeat, un projet danse et musique live qui confirmera notre désir de poursuivre notre relation particulière et artistique.
L’année suivante, Editta m’invite à écrire et enregistrer la bande son originale du spectacle India pour la compagnie (1998) …

Y a-t-il précession de la musique, de la chorégraphie ou du propos dans la détermination d’un projet comme LUVOS migrations ?

TZ : Dans le cas de LUVOS migrations, la chorégraphie et les images ont été créées avant la musique. Dans certains cas lors du tournage, Editta a utilisé des musiques ou ambiances (pas forcément les miennes), histoire d’installer un certain climat. Mais tout a été composé au final sur les images définitives, y compris les bruitages et ambiances hors musique que j’ai recréés et synchronisés. À la toute fin, il y a eu évidemment des retouches dans les images et la musique (longueurs, dynamique etc.).

Ce mode de travail, de coopération est-il habituel dans le cadre de votre collaboration ?

TZ : Habituel, non ! Mais nous utilisons parfois cette méthode, les processus de création sont très variés et toujours très excitants. À titre d’exemple, souvent, sur chaque projet, nous décidons, ou Editta me demande un type particulier d’instrumentarium… Sur Nebensonnen, tout devait être autour du piano… Sur le premier projet Luvos, tout serait électronique, les demandes dramaturgiques venant compléter mes palettes électro-acoustique et instrumentales.

Je suppose que tu es, comme très souvent, seul maître à bord du projet musical ? Composition, interprétation, mixage…

TZ : Non, je propose des options sonores suite à nos échanges préliminaires, nous en débattons un peu puis je refonds toute la matière sonore et compositionnelle afin d’être au plus proche de la demande d’Editta et de sa compagnie en y conservant ma pâte et lorsque tout semble défini, je rejoue, réenregistre et remixe avec mon savoir-faire en studio.

Il y a de toute évidence un propos philosophique ou, au moins, politique et sociétal dans la trame sur laquelle les chorégraphies de la Editta Braun Company sont développées. Y a-t-il délibérément une continuité de propos entre les films successifs produits par la compagnie ?

TZ : Avec ses travaux chorégraphiques, Editta suit essentiellement deux impulsions : d’une part, l’exploration imaginative du corps humain en mouvement, déshabillé, dans son abstraction détournée (série Luvos, jeu avec l’illusion du corps) et, d’autre part, les possibilités de faire face aux dysfonctionnements sociaux et politiques par un discours artistique vital, qui professe l’émotion et une profonde humanité. L’internationalité comme perception et inspiration mutuelle ainsi que l’attention particulière portée à la situation des femmes caractérisent son travail depuis ses débuts jusqu’à aujourd’hui.

Les soutiens institutionnels en Autriche semblent indiquer une notoriété et une reconnaissance certaine des ouvres de la Compagnie Editta Braun (ECB). Penses-tu que la France est à la traîne de ce type d’intérêt pour les activités artistiques ?

TZ : De toute évidence, les soutiens autrichiens existent depuis la création de la Editta Braun Company et se sont développés au fil du temps. On ne peut pas dire que la France soit à la traîne, je n’en sais rien. Lors de notre parcours artistique, nous faisons des rencontres et développons des collaborations, ce sont de lents processus, souvent avec des institutions de pays fort différents et concernant la France, rien de sérieux n’a été initié ou entrepris jusqu’à ce jour mais cela n’est pas un problème.

As-tu d’ores et déjà d’autres projets en gestation avec Editta BRAUN ?

TZ : Un second projet de film est en cours, les premiers tournages se feront en août prochain mais je ne peux vous en dire plus pour le moment.

À quand une compilation de ton travail musical récapitulant ces décennies de coopération ?

TZ : J’y songe, mais il me faudra un peu de temps avant de réaliser ce type de compilation car nous n’aurons pas l’image et cela signifie qu’il faudra reconsidérer les découpages, les longueurs, les mixages tout en conservant l’identité originelle de chaque projet.

Article réalisé et propos recueillis par Philippe Perrichon
https://thierryzaboitzeff.bandcamp.com/album/luvos-migrations-ep

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RYTHMES CROISÉS (F)
Thierry ZABOITZEFF en pause réminiscente
2 mai 2023 Rythmes Croisés Infos et Brèves

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À peine a-t-il achevé son anthologie-anniversaire fêtant ses 50 ans de musique(s) que Thierry ZABOITZEFF a enchaîné sur un nouveau projet artistique. Aussi, on ne peut lui en vouloir de s’être octroyé une pause, pendant laquelle il a… enregistré une nouvelle musique !

En attendant un nouvel album, le Dr. ZAB’ sort donc un single, disponible uniquement en version digitale, comme une parenthèse entre deux projets titanesques. L’ambiance du morceau convie justement à l’ »arrêt sur image », à la mise en mode « off » pour mieux se laisser happer par le monde alentour, le paysage qui s’offre, les souvenirs qui remontent subrepticement à la surface d’une conscience rafraîchie. (Et en ce domaine, ZABOITZEFF nous a récemment gracieusement ouvert sa boîte de Pandore mnémonique avec sa série de textes biographiques retraçant son parcours…)

Titrée Réminiscences, cette nouvelle composition donne l’impression d’entendre un groupe de musique contemporaine tendance musique de chambre, dans le sillage de certaines pièces épurées et nonchalantes auxquelles ZABOITZEFF nous a déjà habitués, voire de certaines pièces « artzoydiennes ».

Il ne s’agit toutefois pas d’une composition et d’une interprétation de groupe. Thierry y déploie ses compétences de multi-instrumentiste, officiant tout à la fois aux piano préparé, guitare électrique, guitare acoustique à douze cordes, trompette, saxophone alto, violon alto, violoncelle et petit ensemble à cordes.

Le résultant y est bluffant, s’écoute et se réécoute avec délectation, tant ces Réminiscences savent capter ces instants nécessaires où la sensation, le rêve et le passé combinent leurs frissons pour hypnotiser une âme et la régénérer.

Réminiscences est en écoute sur la page bandcamp de Thierry ZABOITZEFF, ainsi que sur différentes plateformes.

https://thierryzaboitzeff.bandcamp.com/track/r-miniscences-single

https://www.zaboitzeff.org/reminiscences-single.html


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RYHMES CROISES (F)
par Philippe Perrichon, 28/10/2022
chronique du coffret rétrospective
Thierry Zaboitzeff - 50 ans de musique(s)
Site Web

Thierry ZABOITZEFF : Au cœur de cinquante ans de Musique (s)
28 octobre 2022 Philippe Perrichon Articles et Entretiens, Chroniques

Pour beaucoup, Thierry ZABOITZEFF est, d’abord, le co-fondateur et un compositeur essentiel, aux côtés de Gérard HOURBETTE, du groupe ART ZOYD, certes, et c’est considérable. Mais si c’est probablement le creuset qui lui a permis de déployer ses couleurs propres, sa carrière dépasse largement son rôle de compositeur et de musicien au sein de ce groupe. Thierry ZABOITZEFF a en effet produit plus de trente-cinq enregistrements (vinyles, CD, enregistrements digitaux) en solo, bien plus encore qu’ART ZOYD, groupe auquel il aura cependant imprimé son style pendant plus de vingt-cinq ans. Thierry ZABOITZEFF fête en 2022 ses 50 ans d’un parcours musical protéiforme. À cette occasion est paru un album justement titré 50 Ans de Musique (s), avec lequel nous vous proposons de faire plus ample connaissance, d’autant qu’il prend la forme d’un triptyque.

Ce triple CD qui rend hommage aux cinquante années de musique de Thierry ZABOITZEFF est un bel objet dont nous sommes redevables au talent d’un autre Thierry, ami du premier, Thierry MOREAU, à qui nous devons bien des pochettes et des jaquettes des musiques que nous aimons sans avoir pris le soin de vérifier quel talentueux graphiste en était l’auteur.

Le choix délibéré de Thierry MOREAU d’un contenant riche en couleurs et au graphisme soigné fait écho à la palette variée de Thierry ZABOITZEFF ainsi qu’à son souci de la précision si perceptible dans chacune de ses œuvres. Les affinités entre ces deux artistes ne datent pas d’hier : Thierry MOREAU avait déjà illustré la réédition de l’enregistrement de Symphonie pour le jour où brûleront les cités d’ART ZOYD mais aussi Pagan Dances, Professional Stranger, ARIA PRIMITIVA de Thierry ZABOITZEFF. Il était sûrement encore question d’affinités avec le groupe belge UNIVERS ZÉRO quand Thierry MOREAU réalisa la jaquette du CD Phosphorescent Dreams. Si tant est que vous souhaitiez compenser votre méconnaissance quant au travail de ce graphiste prolifique, n’hésitez pas à cliquer sur le lien ci-dessous :

https://moreauthierry2965.wixsite.com/graphic/pochettes-de-disques

Mais découvrons donc ce que cache ce bel album de Thierry ZABOITZEFF, intitulé 50 Ans de Musique(s).

Le livret joint s’ouvre sur les notes de DENIS DESASSIS : outre l’invitation à s’immerger dans l’univers de Thierry ZABOITZEFF, DENIS DESASSIS semble hésiter entre les multiples facettes de la musique de Thierry ZABOITZEFF. Que raconte-t-elle? Comment évoquer en quelques mots une musique qui va au-delà d’elle-même, hautement congruente avec un travail chorégraphique puissant qui la prolonge et l’intensifie ? Déroutante? Oui. Séduisante ? Tout autant. La musique de Thierry ZABOITZEFF ne s’éloigne jamais d’une veine d’inspiration caractérisée par un choix ciselé des timbres, des couleurs, générant des atmosphères multiples, comme autant d’univers. DENIS DESASSIS conclut son apologique introduction par ces mots -que l’auditeur pourra confirmer quand il aura lui-même effectué le voyage : « C’est un récit qui questionne notre monde, dont on sait le caractère implacable, épousant les contours d’une danse hypnotique zébrée de vibrations telluriques autant que d’éclats de lumière à même d’apaiser les zones d’ombre que ces derniers révèlent. On peut, sans risque de se tromper, penser qu’il existe quelque part, tout près de nous, une Planète ZABOITZEFF. L’émerveillement vous attend ».

Trois fines tranches de plaisir d’un bleu profond s’offrent à nous en trois volets musicaux prometteurs. Elles sont porteuses d’émotions, d’expression dense et de paysages sonores qui sont autant d’univers inouïs qui, tous, conduisent à la perception de ce sentiment d’urgence, de nécessité absolue à faire jaillir cette musique intérieure, exigeante et passionnée de Thierry ZABOITZEFF dans notre espace sonore. De prime abord, on aurait pu s’attendre à une répartition chronologique des titres proposés. Ce n’est cependant pas le choix retenu ici par le compositeur. Car il s’agit bien d’une proposition : la production de Thierry ZABOITZEFF est ici résumée mais de façon non-exhaustive, loin s’en faut.

En effet, l’œuvre du compositeur et multi-instrumentiste (basse, violoncelle, samplers, voix, guitare, percussions, programmation…) – qui se charge généralement aussi de l’enregistrement, du mixage et du mastering – s’étire sans passages à vide sous nos oreilles dispersées depuis les années 1970. Thierry ZABOITZEFF y équilibre avec talent l’expressivité des voix et des différents instruments avec cette précision quasi-horlogère de ses compositions qui, dès ART ZOYD, signait le style propre à ce groupe mythique. Cette préoccupation de précision, cette ascèse épurée, de prime abord austère, est omniprésente dans ce triple album. Cette récapitulation expose des compositions aux climats spécifiques à l’univers varié et complexe de Thierry ZABOITZEFF. Le compositeur, maître d’œuvre et architecte, y agence pièces soutenues et intenses avec des pièces plus apaisées ou à l’orchestration plus sobre, à la façon dont la respiration s’articule entre inspiration et expiration, alternance nécessaire à la randonnée musicale qu’il nous propose dans son univers.

Je crois qu’il ne s’offusquera pas si je dis de Thierry ZABOITZEFF que c’est un hypermnésique remarquable. En effet, profitant de l’accalmie événementielle forcée subie par tous les artistes et le public sous couvert de sécurité sanitaire, Thierry a régulièrement abondé une rubrique de son site relatant son incroyable parcours. Comme beaucoup de ses admirateurs, j’attendais régulièrement les nouvelles publications, année par année, qu’il publiait sur son site. Cette rubrique est une mine d’or pour tous les amateurs de musique et pour tous les musiciens tant elle regorge d’anecdotes qui sont tellement similaires au vécu de nombre de musiciens ayant commencé à tourner dans les années 1970. Pour en avoir un aperçu, c’est ici :
https://www.zaboitzeff.org/zaboitzeff-raconte.html

Ses collaborations sont multiples et on notera, pour faire court, son importante contribution de musicien compositeur jusqu’à ce jour avec la compagnie de danse autrichienne Editta BRAUN COMPANY et la magnifique période de ARIA PRIMITIVA dont témoignent deux superbes enregistrements : Work in Progress et Sleep no more. Sa période Thierry ZABOITZEFF & CREW, de 2002 à 2020, a aussi donné le jour à la magnifique Missa Furiosa dont voici un extrait, le Kyrie, donné en public : https://youtu.be/JOztOerFlac

La prétention du rédacteur ne saurait aller au-delà d’une invitation à explorer par vous-même ce triple album, qui, lui-même peut être comparé à la partie émergée d’un iceberg tant l’œuvre de Thierry ZABOITZEFF est dense et prolifique. Nous nous bornerons à vous en proposer quelques moments saillants ; mais ce choix est évidemment subjectif et peut s’apparenter à une sélection de cartes postales tirées d’un voyage impossible à résumer. Puisse-t-il vous inciter à faire vous-même ce voyage profond en compagnie du maestro.

Voyage, justement, est le titre de la première pièce du premier CD. Cette pièce, composée en 2005, aux couleurs festives, ethniques, nous entraîne en Afrique, en Chine… Les timbres magnifiques où se mêlent en des textures de velours la basse et les staccatos des violoncelles sont bien représentatifs de la manière avec laquelle Thierry ZABOITZEFF assoit ses compositions. Cette prédominance du jeu des cordes frottées se retrouve dans la pièce suivante, Domagali, composée en 2007, où Thierry pose ce petit chorus de violoncelle à base d’harmoniques qui est bien dans sa manière.

Dès le titre Pagan Dances, composé en 2021 – pièce extraite de l’album éponyme -, nous sommes plongés dans les couleurs plus sombres et tendues plus familières aux connaisseurs de la musique de Thierry ZABOITZEFF. Cette ré-immersion trouvera son point culminant avec Cérémonie Parts 1-2-3 composée en 1983 ou encore Prometean Waves de 1984 dont la deuxième partie fournira une partie des ingrédients d’une pièce présente dans le fabuleux Mariage du Ciel et de l’Enfer, œuvre composée pour un ballet commandé par Roland PETIT et dont la musique était jouée en direct par le groupe en même temps que la troupe de danse. La petite pause rafraîchissante par Ballade, écrite en 1982, nous conduit à nouveau dans l’univers « historique » de Valenciennes, pays de mineurs et de métallurgistes (un contexte social comparable présidait à la naissance d’UNIVERS ZÉRO en Belgique) :

Épreuves d’acier – Fragments d’une forge : Épreuves d’acier est à l’origine une composition commandée à Thierry ZABOITZEFF par le photographe Philippe SCHLIENGER et son association « Les Insatisfaits » pour l’exposition « Épreuves d’Acier – Fragments d’une forge ». Ce projet a été piloté en France pour Thierry ZABOITZEFF par l’association Soundtracks. Ce travail a été publié en livre-disque par les éditions françaises Contrejour. La musique a été composée, interprétée et enregistrée par Thierry ZABOITZEFF en 1995.

Mein Augenstern, composé en 2000, égrène ses notes de pianos pluviales sur un tapis de soie de violoncelles qui n’est pas sans évoquer certaines atmosphères bartokiennes tandis que les harmoniques du violoncelle solo s’étirent hors du temps.

La pièce drôlatique intitulée Sangria, composée par Rocco FERNANDEZ, fondateur premier d’ART ZOYD, est sortie à l’origine en 1971 et a été arrangée en 2022 par Thierry ZABOITZEFF.

Après Confusion et Crash, le compositeur nous emmène à travers un paysage lunaire dont il a le secret. Planet LUVOS Act 8 exhale son mystère dans une semi-obscurité qui est une des facettes du compositeur, s’y retrouve ce travail délicat sur les timbres, l’équilibre des nuances et la maîtrise de l’espace qui donne une véritable dimension à la pièce et y invite l’auditeur en douceur.

LoSt ouvre le deuxième chapitre du triple album. La couleur folâtre du côté d’un rock binaire appuyé mais dont les harmonies aériennes dessinent un filigrane propice à de longues notes saturées et pourtant, assez vite, les cordes parlent à nouveau, avec un sens du contrepoint qui pose une marche harmonique ouvrant à nouveau la voie aux couleurs initiales de la pièce.

Amina et ses cordes feutrées, ponctuées de percussions et d’une ligne mélodique et d’harmonies presque conventionnelles dans l’univers du musicien a été composé en 2007 pour le film Winds of Sand – Women of Rock de Nathalie BORGERS.

La dimension onirique est souvent sous-jacente dans l’œuvre de Thierry ZABOITZEFF, et ces rêves mystérieux ou ces cauchemars parfois, donnent à sa musique une dimension cathartique n’éludant aucune des émotions qui peuvent émerger de l’inconscient. La fragilité de l’humain est ici extirpée de ses peurs à s’exprimer tandis que s’affirme avec force, douceur, enthousiasme ou angoisse la puissance créatrice par laquelle la musique libère le musicien et l’auditeur. La musique de Thierry ZABOITZEFF n’est pas de facilité, ni conçue pour distraire la conscience d’elle-même et de la nécessaire introspection du tréfonds de nos âmes. À l’instar de la Gestalt, on pourrait dire de la musique de Thierry ZABOITZEFF qu’elle est une musique du contact, une musique qui conduit l’auditeur à contacter ressentis? émotions et sentiments sans souci d’évitement ni mièvrerie aucune.

Ici la joie côtoie la peur ou la ferveur, la douceur et le silence mais rien n’y est gratuit, tout sert ce propos d’une musique qui est un voyage intérieur. Inclassable – et tant mieux – ce registre musical, auquel les œuvres d’UNIVERS ZERO ou de PRÉSENT sont apparentées, est libéré des modes et des tendances, des clichés et des facilités. C’est probablement ce non-assujettissement aux modes et autres tendances qui permettent à Thierry ZABOITZEFF de faire cohabiter des pièces créées à des périodes éloignées les unes des autres dans un ordonnancement qui correspond davantage à un voyage initiatique qui nous permet de découvrir les facettes variées qui caractérisent son inspiration.

Mais poursuivons avec Thierry ce voyage au centre de sa musique.

The Cabinet of Dr Caligari Akt IV fait suite au travail de Thierry ZABOITZEFF avec ART ZOYD sur Nosferatu (MURNAU), Faust (MURNAU), Häxan (CHRISTENSEN), trois ciné-concerts réalisés entre 1989 et 1996. Thierry ZABOITZEFF, quinze ans plus tard, revisite ces compositions… Cette fois il est seul en scène avec tout un arsenal hi-tech sans pour autant délaisser ses instruments de prédilection : le violoncelle, la basse, les percussions, les guitares et sa voix…

Créé le 9 Septembre 2010 à Berlin, The Cabinet of Dr Caligari Akt IV nous entraîne justement, via ses évanescences oniriques, dans ce monde sombre et obsédant des percussions qui jaillissent soudain pour, tout à coup, laisser place à un ostinato lancinant : oscillant entre rêve et cauchemar, nous sommes invités à cette ronde atonale, dissonante parfois où le compositeur joue avec les plans sonores, les espaces lointains ou proches, conférant ainsi à sa pièce une dimension de liberté parfois enivrante.

Komba est extraite de Heartbeat, Concerto for Dance and Music dont le titre complet est Heartbeat, Des Cornes de brume, un capitaine. Une femme qui dort dans le ventre d’un navire. Deux Rêveurs… a été créé en 1996-1997 à Salzbourg. Précisément la première a eu lieu le 11 avril 1997 au Szene Salzbourg. C’est une œuvre conjointe associant, en live, musique et danse. La musique est de Thierry ZABOITZEFF, et la danse et la chorégraphie de Editta BRAUN. Le concept et la direction artistique ont été assurés par Stéphane VÉRITÉ. Ce spectacle live a fait l’objet d’une tournée : Szene Salzbourg / Festival Tanzsprache WUK Vienne / Bela Bartok Komitat Györ en Hongrie / Festival Maishofner Sommer / Tauriska / Sommer SZENEfestival / Steintheater Hellbrunn / Festival Mautfrei Brotfabrik à Bonn / Festival Österreich tanzt / Festspielhaus St. Pölten / Impulsfestival Bregenz / Théâtre de l’Odéon / Festival Tanzpool à Vienne.

Komba est emblématique des climats développés également par le compositeur au sein de son spectacle solo Dr. Zab & his Robotic Strings Orchestra. La pièce, dont l’écriture a un caractère « ascensionnel », date de 1993 et plutôt qu’un long discours, laissons ici parler la musique : https://youtu.be/CWILR7Fi9YY

Après cette course verticale effrénée, Thierry ZABOITZEFF nous emmène dans un univers délicat et feutré ou un ostinato de piano accueille sa voix qui sait se faire douce, des arpèges de guitare délicats, un chant d’arrière-plan qui n’est pas sans évoquer un chant traditionnel pygmée. C’est Clear Light, pièce composée en 1992. Le compositeur y fait montre d’une grande maîtrise technique et instrumentale, ainsi qu’un sens aigu du mixage et de l’équilibre des timbres et des espaces. La perception spatiale de la pièce n’obère pas son intention d’intimité.

Après Zart, une pièce à plusieurs volets composée en 1995, où le clarinettiste Christian KAPUN est venu apporter sa voix aux instruments tous assurés par Thierry ZABOITZEFF, c’est au tour de Mariée avec la nuit de nous emporter dans la danse.

Cette pièce, composée en 1984 et enregistrée en 1990 est revisitée ici par Thierry ZABOITZEFF : en reprenant l’écriture, il l’envisage dans une version plus courte et plus proche d’une instrumentation qu’on pourrait qualifier de rock-progressive : elle est en effet composée de six guitares électriques (dont celle qui tient la mélodie centrale est assurée par Thierry ZABOITZEFF) et de trois bassistes (évidemment Thierry y joue aussi sa propre partie de basse). Le projet initial, destiné à la scène et baptisé Overdrive, n’aboutira pas hélas, et il n’en subsistera que cette pièce pourtant superbe enregistrée en 2011 et dont la réorchestration n’a pas altéré l’énergie déjà dense de sa première version. Thierry ZABOITZEFF y réalise le tour de force de proposer ici une pièce accessible au public qui méconnaît son travail sans rien concéder à la facilité cependant.

So Etwas Wie Blau, enregistrée en 2021 pour l’album Professional Stranger est encore une de ces respirations apaisées mais vigilantes dont le compositeur a le secret. Un balancement entre deux accords de piano sur une basse de velours sert de trame aux frémissements d’un violoncelle que rejoignent bientôt le chant du compositeur puis les perles dissonantes et cristallines de la main droite du piano… Où rêve et réalité s’entremêlent ?

L’intention du présent article étant de vous inviter à ce voyage, il serait fastidieux d’en établir ici la carte. Force est de reconnaître qu’il peut sembler injuste et réducteur de limiter nos commentaires à certaines pièces de cet opus tant il est vrai qu’aucune n’est mineure. Nous nous bornerons donc cependant, comme annoncé, à mentionner désormais quelques-unes de ses étapes en gardant à l’esprit que l’audition de ce triple album réserve des joyaux non évoqués ici, afin d’en préserver toute fraîche la saveur.

Avec Rage & Domination nous visitons l’album India enregistré en 1998. Superbe pièce énergique mêlant avec maîtrise instruments et enregistrements (de bruitages, de voix) dans une technique de composition qu’on pourrait comparer à une forme de collage mais sans jamais être déconnectée du caractère vivant et présent de l’œuvre. C’est un savoir-faire qui est souvent de mise chez le compositeur et il le maîtrise sans jamais s’y perdre, sans jamais nous y perdre. Thierry ZABOITZEFF y joue du violoncelle, de la guitare, des samplers, assure la programmation, l’enregistrement, le mixage et le mastering comme tout au long de ce triple album pratiquement.

Baboon’s Blood dans sa version de 2022 est un nouvel arrangement de cette pièce enregistrée en 1987 sur l’album Berlin. Daniel DENIS, le percussionniste fondateur d’UNIVERS ZERO se fait ici le comparse de Thierry ZABOITZEFF : Daniel DENIS est un compositeur essentiel d’UNIVERS ZERO dont il assure aussi la tenue des percussions. Leurs prestations communes sont en partie visibles et audibles dans les extraits de concerts filmés dans le cadre du RIO, le festival de Rock In Opposition. La pièce est poussée à sa tension maximale, Thierry ZABOITZEFF y ajoutant quelques effets sonores et une dimension imprécatoire absente de la version initiale. Ici le compositeur fait une nouvelle référence à Macbeth. La pièce se ponctue sur un ricanement à la fois sinistre et… jubilatoire !

Ce deuxième volet de notre voyage initiatique s’achève sur Die Maschine pièce composée pour l’album Multiple Distorsions en 2013, qui, malgré son caractère mécanique, est vibrante de lumière. Nous sommes prêts pour le dernier étage de la fusée, allons-y, on te suit Thierry !

ARIA PRIMITIVA

Et nous entrons de plain-pied dans l’univers de ARIA PRIMITIVA avec cette pièce Sleep no more. D’aucuns l’auront compris : la musique de Thierry ZABOITZEFF n’est jamais là pour nous bercer même si elle n’exclut pas la douceur, et quand elle nous semble de prime abord violente, elle nous invite à partager la joyeuse ferveur ou, à tout le moins, la vibrante énergie vitale qui l’anime. C’est un contrat à passer entre nous et le compositeur. L’affaire étant entendue, nous pouvons cheminer avec lui dans son univers et découvrir la sensibilité derrière ce qu’on aurait pris à tort pour de la froideur.

ARIA PRIMITIVA est une formation très aboutie dans la démarche musicale de Thierry ZABOITZEFF. C’est un trio composé de Nadia RATSIMANDRESY (ondes Martenot – instrument merveilleux si brillamment mis en valeur par MESSIAEN, notamment dans ses Petites Liturgies de la présence divine – claviers et samplers), Cécile THÉVENOT (claviers et samplers) et le compositeur et interprète lui-même.

Sleep no more, pièce de l’album éponyme, est, clairement, cette invitation fervente à ne pas relâcher sa vigilance et à poursuivre la démarche créative dans laquelle s’inscrit le compositeur. Sa première mouture datait de 1990 pour l’album Nosferatu, composée dans le contexte d’ART ZOYD pour illustrer la version du film du même nom de MURNAU. La version qui figure sur le présent album date de 2019.

Après la respiration d’un Phantasiespiel qui peut être entendu comme un intermède néo-classique dont l’intention contrapuntique est annoncée par le thème initial de piano qui se déploie en canon nous entrons dans la phase ascensionnelle de cette anthologie. Aria Primitiva, qui donne son nom à cette formation, est un titre composé en 2019 qui nous conduit dans un nouvel univers, spécifique à ce trio. La pièce est une vraie réussite : s’y marient timbres et instrumentations puis voix posées sur des rythmiques répétitives et cycliques au caractère obsédant. Cependant, malgré cette référence à une veine d’inspiration déjà éprouvée par les expériences passées du compositeur, la maîtrise instrumentale et électronique d’Aria Primitiva inscrit cette pièce résolument dans son temps.

Nous avons évoqué plus haut la Missa Furiosa, œuvre ambitieuse articulée en différents mouvements inspirés directement de la liturgie chrétienne et ayant servi de base à bien d’autres messes célèbres du répertoire classique, de Jean-Sébastien BACH à Ludwig Van BEETHOVEN. Entreprise audacieuse et véritable monument musical, articulé selon la structure classique de la messe, la Missa Furiosa de Thierry ZABOITZEFF s’ouvre logiquement sur un Introitus enregistré en 2002 dans le contexte de la formation ZABOITZEFF AND CREW. La section vocale est composée de Christine AUGUSTIN, mezzo-soprano, Jean BERMES, baryton, Rupert BOPP et Thierry ZABOITZEFF. Chose rare chez le compositeur, la formation s’est adjoint un batteur, Peter ANGERER. Les deux dernières pièces de ce troisième volet sont aussi extraites de la Missa Furiosa : ce sont le superbe Requiem et l’intense Libera Me, dont nous reparlerons plus loin.

Une illustration sonore s’impose, la voici : https://www.youtube.com/watch?v=crY4Vlx1ZNg

Deil Zom an de Lay, enregistrée en 2012 pour l’album 16, pose sa basse ronde et veloutée sur les notes de main gauche du piano. Cette profondeur vibre dans le sternum. L’arpège égrène une dentelle qui accueille la voix de Thierry. Une mélodie douce vient compléter cette pause paisible. Sa guitare lance dans l’espace sa plainte étirée à la manière d’un Matte Kudasai cher à KING CRIMSON. La pièce est encore un vrai joyau alchimique.

Nous sentons bien que le capitaine ZABOITZEFF a conçu son vaisseau interstellaire et sa démarche initiatique avec une logique et une sensibilité tournées vers son auditoire. Avec Konzo Bélé, nous sommes aux confins du système solaire, observant avec émerveillement la voie lactée, renouant avec nos âmes d’enfants. Comme en écho lointain nous parviennent de la planète bleue les chants pygmées qui nous ont accueillis au début du voyage. L’instrumentation, aérienne, cristalline évoque ce point du voyage où l’on ne peut être que différent, épuré, prêts pour le grand saut. Composée en 1992 pour l’album Marathonnerre 1 et 2 d’ART ZOYD, la pièce a été remixée en 2022 pour le présent triple album.

Le grand saut a lieu, êtes-vous prêts ? Voici Komba dans sa version piano, piano joué par Thierry – il est peut-être superflu de le rappeler car tout instrument qui lui est présenté semble un défi à relever pour cet homme-là ! Komba est probablement un acte de foi du compositeur : cette pièce dont nous avons déjà entendu la version orchestrale, Thierry ZABOITZEFF l’a d’abord écrite pour basse et ordinateur, puis l’a transposée pour piano seul dans le cadre de sa collaboration avec la Editta BRAUN COMPANY pour le projet Close up. C’est ici la version qu’il interprète lui-même qu’il nous offre, pour piano et ordinateur, enregistrée en 2021. Pièce dense, avec son staccato obsessionnel, Komba court d’une tonalité à l’autre dans une course soutenue qui a tout d’une ascension que rien ne semble pouvoir arrêter. Résolument tonale et tonique, la pièce ne manque pas, dans cette version, d’affinités avec les premier et troisième mouvements de la Sonate pour piano Opus 26 de Béla BARTOK (tout en restant cependant dans un cadre résolument plus consonant) ou encore certaines pièces pour piano solo d’un certain Nik BÄRTSCH, dont nous avons déjà évoqué la démarche dans ces colonnes : https://www.rythmes-croises.org/nik-bartsch-ronin/

Après Komba, nous voilà prêts pour une sorte de final en deux temps qui, ensemble, peuvent résumer le sentiment qui émerge parfois de la musique de ce compositeur : entre le Requiem (adapté librement du Requiem de MOZART) de sa Missa Furiosa et son Libera me, qui clôture cette œuvre, nous passons de l’extrême gravité, du recueillement le plus délicat, teinté de mélancolie au déploiement d’une énergie vitale urgente, essentielle, animée d’une aspiration à une forme de libération mystique exprimée dans une sorte de marche verticale. Avec sa Missa Furiosa, Thierry ZABOITZEFF a bâti un monument musical dont témoigne ce triple album et dont l’apothéose est emblématique de sa démarche de créateur.

Entretien avec Thierry ZABOITZEFF

Merci Thierry d’avoir accepté le principe de cette interview car, si j’ai bien compris, votre timing est assez serré…

Thierry ZABOITZEFF : Oui et je vous prie de m’en excuser. En effet sitôt ce projet de coffret terminé et livré, je suis à nouveau en studio pour la composition et l’enregistrement d’une BO sur un film de 19’ LUVOS Migrations un projet piloté par Editta BRAUN COMPANY. « Vision d’avenir ou images d’un univers parallèle ? Dans des décors naturels à couper le souffle, des paysages industriels automatisés et des ruines désertes, se déploie un voyage à travers le temps et les espaces de vie. Les étranges créatures LUVOS du théâtre d’illusion corporelle d’Editta BRAUN s’emparent de la musique de Thierry ZABOITZEFF. »

C’’est un nouveau défi pour moi et je remercie Editta BRAUN pour sa confiance chaque fois renouvelée.

Un Teaser de cette bande originale est accessible ici : https://vimeo.com/751118062

Cette récapitulation a un effet saisissant : elle fait réaliser à quel point votre travail s’est étalé dans le temps et suscite l’envie de se replonger dans votre discographie et votre production considérable. Comment est né ce projet de triple-album ?

TZ : Bon ! vous n’êtes pas sans ignorer que j’aurai bientôt 70 ans et lorsqu’on a la chance d’arriver à cet âge sans trop de problèmes, on ne peut s’empêcher de se retourner, non sans une petite pointe de fierté et de faire une sorte de point, de bilan et je me suis dit qu’il serait intéressant de regrouper dans un coffret au format relativement serré afin d’éviter toute redite ou redondance, une anthologie, je préfère ce mot à celui de compilation que je trouve fade et vilain…

Dans tous les cas, il n’était absolument pas question de ressortir mes 30 albums dans un coffret au risque d’une catastrophe économique et d’une indigestion carabinée.

J’ai donc commencé à travailler sommairement sur 3 à 4 playlists, histoire de me rendre compte de la tâche sur un niveau artistique. Ensuite convaincu de la faisabilité, je décidai de faire le tour de mes contacts afin de savoir qui pourrait co-produire un tel album. Par politesse, comme il se doit dans le métier, je contactai en premier lieu le label et l’éditeur qui me soutient depuis 2005 (WTPL-Music et Monstre Sonore) qui fût immédiatement partant aux conditions que je fixais. C’était en décembre 2021 et avions d’ores et déjà prévu une sortie pour juin 2022 mais que finalement nous repoussions à septembre 2022.

Ce fût un travail compliqué et difficile dont je suis satisfait à l’arrivée et je crois que le secret a été d’oublier toute chronologie et il a fallu ensuite masteriser et unifier tous ces enregistrements d’époques différentes.

Plusieurs aspects de cet ensemble sont très impressionnants : tout d’abord vos talents de poly-instrumentiste, puis votre maîtrise des technologies actuelles. Comment s’est effectuée cette expansion de vos compétences ?

TZ : Il y a fort longtemps, j’étais uniquement bassiste mais aussi un peu guitariste, cela convenait parfaitement au cadre rock-prog rock des années 1970, mais très vite Gérard HOURBETTE et moi-même au sein de ART ZOYD, décidions de casser les codes, ce que Rocco FERNANDEZ avait déjà commencé…

Cela se traduisit par des ajouts progressifs de pédales d’effets en tous genres, chambres d’écho pour allonger les sons, leur donner des espaces plus larges, dès notre deuxième album, je me mettais non sans mal au violoncelle pour renforcer ce côté musique de chambre électrifiée… Ainsi de fil en aiguille, nous nous sommes intéressés également aux techniques de studio qui étaient en ces temps-là inaccessibles financièrement. Malgré le travail magnifique accompli pour chaque album en studio, nous avions toujours d’immenses regrets : pas assez de temps pour les prises, le mixage, etc.

Mais voilà qu’au milieu des années 1980 l’informatique musicale débarque et, dès lors, nous nous équiperons de manière à devenir complètement autonomes concernant nos enregistrements. Sans entrer trop dans le détail, ce fût pour moi, pour nous, une révolution : le MIDI/les claviers/puis très vite les Samplers Hardware abordables/les systèmes d’enregistrement digital multipistes. Il a fallu apprendre sur le tas et maîtriser ces nouvelles lutheries, de cette époque jusqu’à aujourd’hui en prenant bien garde de ne pas se laisser manger par le côté uniquement technique. Pour ma part, j’ai toujours veillé à un juste équilibre entre machines et instruments acoustiques mais parfois, cela arrive, la machine dégage quelque chose que vous ne pouvez reproduire avec un instrument acoustique et qui s’inscrit bien dans le contexte de la composition.

J’ai un seul petit regret, mais c’est sans doute le prix à payer de l’exercice d’une anthologie : j’avais beaucoup aimé votre travail autour du Livre Vermeil de Montserrat et c’est peut-être un des volets de votre travail d’arrangeur et de compositeur moins connu. Avez-vous aussi ce regret ?

TZ : Comme vous le dites, c’est le prix à payer. J’ai bien évidemment tenté d’inclure une des pièces de ce projet Le Livre Vermeil de Montserrat mais, au final, je me suis aperçu que je n’avais pas un matériau d’assez bonne facture pour cela. Entre temps j’ai téléphoné à Sandrine ROHRMOSER et nous nous sommes mis d’accord pour enregistrer professionnellement ce projet l’an prochain.

Pouvez-vous nous parler de votre travail de collaboration avec Thierry MOREAU qui nous fait aussi l’honneur de rédiger dans nos colonnes ?

TZ : Je connaissais Thierry MOREAU depuis de nombreuses années (époque ART ZOYD) puis par hasard, je l’ai croisé dans un train entre Douai et Paris en 2004 je crois : nous avons échangé fort sympathiquement, je lui ai par la suite envoyé quelques albums et le temps a passé.

Peu à peu et fort discrètement, il s’est approché, me faisant part de son travail graphique, notamment pour des pochettes d’albums. Il m’a très vite ensuite proposé de travailler sur mes pochettes, ce que j’ai refusé car je n’avais que très rarement les budgets pour cela. Cependant son approche et son travail m’avaient tout de suite séduit si bien qu’en 2017, lorsqu’il fût question d’un album pour ARIA PRIMITIVA, je fis des pieds et des mains pour que son travail de conception graphique soit, de suite, intégré au budget de la prod. Le travail s’est fait dans un grand respect mutuel et ce jusqu’à ce coffret sur lequel il a fait un travail fantastique complètement en dehors de ce que lui ou moi aurions pu imaginer.

Êtes-vous animé par une forme de spiritualité (quand bien même elle serait toute personnelle – en bon autodidacte qui se respecte ! – à mon modeste niveau je suis également autodidacte et je sais que c’est parfois difficile mais que c’est un choix qui rend plus libre) ? Cette question me vient à travers votre recours au latin, qui est un choix culturellement marqué, typiquement européen, et, également, ancré (et encré) dans un contexte chrétien qui a marqué notre continent (et au-delà).

TZ : Cher Philippe, je suis animé par des pensées diaboliques !!! (rires) Non je rigole ! La référence au latin est liée à mon histoire personnelle avec mon grand-père maternel : il était organiste et lorsque j’étais enfant je l’accompagnais à la tribune pour la grand-messe. La puissance des tuyaux d’orgue m’ont marqué… ainsi que le garde suisse qui réglait le déroulement de l’office. Tout ce contexte bien plus tard m’a inspiré pour la Missa Furiosa, cela faisait un moment déjà que je voulais m’attaquer à ces riffs un peu technoïdes en les associant au latin… Le pitch était tout trouvé !

Pouvez-vous nous parler de votre étrange violoncelle ? Cet instrument m’a toujours intrigué…

TZ :Vous parlez de mon Silent Cello de Yamaha customisé ? Durant un certain nombre d’années, j’ai travaillé comme compositeur et musicien « live », très souvent en plein air, été comme hiver… Mon violoncelle acoustique en a tellement souffert, il ne tenait plus l’accord dans les conditions météo extrêmes et a fini par se briser… J’ai donc trouvé ce stick quasiment insensible aux intempéries grâce à ses mécaniques de basse, mais je l’ai rééquipé de micros piezzo d’excellente qualité, car le système Yamaha de base n’était pas très convaincant. Ce système me permit ensuite de jouer par tous les temps et sans problème de feedback en me donnant la possibilité d’alterner entre un son classique ou électro à l’aide de pédales d’effets que connaissent fort bien les guitaristes.

Quel a été votre parcours initial ? Je vous imagine bien en autodidacte intégral…

TZ : Je suis l’autodidacte intégral ! Tout un temps, dans mes débuts, j’avais un problème avec cette idée, j’ai toujours été entouré de musiciens très professionnels et formés. Beaucoup d’entre eux avec qui j’ai travaillé ont été très respectueux de cela et très à l’écoute de mes idées.

Puis le temps passant, je me suis affranchi : les expériences, mes apprentissages non conventionnels sur les différents instruments que j’utilise puis, ensuite, également, ma formation en autodidacte sur l’informatique, les techniques d’enregistrement, constituent un tout et un patrimoine dont je suis très fier car ainsi, j’ai pu suivre mes chemins de traverses avec toute la fantaisie que je souhaitais !

Quels sont vos projets pour les mois et les années à venir ?

TZ : Comme je le disais précédemment, l’enregistrement de mon adaptation du Livre Vermeil de Montserrat avec Sandrine ROHRMOSER, en vue d’un album… Ensuite un peu de repos !!!!!

Puis un peu plus tard quelques surprises, je l’espère.

Merci de cet entretien et encore bravo pour ce bel album !

TZ : Merci à vous, pour toute votre attention.

Article et Entretien réalisés par Philippe Perrichon – Photos : Bettina Frenzel (scènes) – Zablab2022 (portraits)

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RYTHMES CROISES (F)

par T.Moreau, 3/10/2021
Chronique du EP
PAGAN DANCES

Site web

L’intro me fait immédiatement penser à une immersion connexe entre Jon HASSELL et des musiques de films inspirés des classiques contemporains du XXe siècle. L’équilibre entre les textures, les percussions, les samples et cordes sont toujours chez Thierry ZABOITZEFF d’une grande rigueur d’écriture. C’est de l’ordre de la science rythmique et de sensualité post-stravinskienne du Sacre du Printemps.

La musique est structurée mais libre, ouverte, généreuse. Le piano martelé en frénésie « bartokien » est aux aguets, et la guitare « frippienne » et la rythmique obsédante soulignent des climats sombres et inquiétants, vibrants et vivants. J’ai l’impression d’écouter une musique du film imaginaire, un ballet de danses polovtsiennes post-dystopie.

Pagan Dances est un dernier sursaut de l’humanité, une danse ultime des entrailles imaginaires de notre inconscient collectif. Cette œuvre est un pur régal, une éloge de l’ombre.

Thierry Moreau

PS : Ce EP est disponible en streaming sur les plateformes Apple Music / Spotify / Deezer / Youtube Music / Amazon Music / Soundcloud et sur la page :
Pagan Dances – EP | Thierry Zaboitzeff (bandcamp.com)

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RYTHMES CROISES (F)
par Stéphane Fougère, 17/02/2021
Chronique de l'album
PROFESSIONAL STRANGER

Site web

Au début de l’année 2020, Thierry ZABOITZEFF annonçait la mise au repos des performances scéniques de son trio ARIA PRIMITIVA pour cause de management chronophage. Ne l’aurait-il pas décidé que les événements de cette année en auraient décidé à sa place… La crise virale planétaire que nous avons tous connu (et qui semble ne pas vouloir nous lâcher…) a forcé le milieu du spectacle à se mettre en veilleuse. Au moins certains artistes auront mis cette période à profit pour écrire, enregistrer… C’est ce qu’a fait Thierry ZABOITZEFF, qui nous livre ici sa 27e production discographique en solo ! Signe des temps (durs, comme chacun sait), celle-ci est la première à paraître directement en format numérique sur toutes les plateformes de téléchargement et de streaming (il y a certes eu la nouvelle version réenregistrée de Nebensonnen parue au printemps, mais ce n’est pas un album totalement inédit), avant de connaître une version CD « physique ». Le « Dr. ZAB » y tient tous les instruments et en a assuré le mixage et la production. Il n’y a là rien de nouveau dans le processus artistique suivi par ZABOITZEFF depuis qu’il a quitté ART ZOYD, et il n’a pas attendu l’arrivée d’un coronavirus pour se consacrer à la création en solitaire (même si, de temps à autres, il a tourné avec un groupe, comme ce fut le cas pour Missa Furiosa et plus récemment donc avec ARIA PRIMITIVA).

Professional Stranger fait partie de ces musiques que Thierry ZABOITZEFF compose depuis plusieurs années pour la scène, le théâtre et la danse, principalement pour les créations de la Compagnie de la chorégraphe Editta BRAUN. En l’occurrence, cet album sert de bande-son au projet Long Life, qui devrait être joué sur scène en mai 2021 à Salzburg. Son « soundtrack » sort donc bien en avance, mais ce n’est pas bien grave puisque ZABOITZEFF a toujours fait en sorte que ses musiques puissent aussi être écoutées hors du contexte pour lesquelles elles ont été préalablement conçues. Chaque création de l’Editta BRAUN COMPANY offre au un nouveau défi artistique, tant visuel que sonore, et ce que donne à écouter Professional Stranger se situe aux antipodes de ce que contenait le Sleep No More d’ARIA PRIMITIVA.

La pièce d’introduction, Neoklassicos le Grand, joue cependant les trompe-oreilles. On retrouve cette ambiance d’errance dans un espace monumental désert, soulignée par un orgue solennel et ponctuée de percussions baguenaudantes et de voix subreptices, avant qu’un piano ne s’immisce et qu’un thème joué au violoncelle ne viennent alléger le climat tout en lui conférant une tonalité mélancolique. Les nostalgiques de certaines atmosphères art-zoydiennes devraient se sentir ici en terrain familier… Ensuite, passée l’ouverture d’une porte grinçante, on bascule avec L’Insouciance de Vénus dans un univers plus minimaliste, voire ambient, baigné d’une douce lumière apaisante, qui n’est pas sans rappeler certains paysages automnaux de Nebensonnen.

C’est ici que fait irruption un instrument auquel le Dr. ZAB ne nous avait pas encore habitué : l’accordéon ! (Numérique ou réel, allez savoir …) Et ce dernier constitue bien la principale nouveauté sonore de cet album, au point qu’il va se faire entendre jusqu’à la fin de celui-ci, sous des approches différentes, tantôt en bourdon, tantôt en tant qu’instrument soliste. C’est ainsi que ce même accordéon donne le coup d’envoi d’une valse acoustique parfaitement inattendue dans Mali Valcer ! On reste dans une tonalité folklorique aux relents argentins avec El Caos et son rythme claudicant et ses embardées de cordes limite burlesques. Voilà un morceau qui n’aurait pas déparé sur un disque de Lars HOLLMER !

Derevo indique un retour à un climat de déréliction dans une configuration instrumentale évoquant la musique de chambre (accordéon, piano, cordes). Sur So etwas wie Blau, les accords de piano installent un climat plus trouble et sombre, et un violoncelle électrique y entonne un chant de lamentation aux allures de contemplation devant un champ de ruines, à laquelle se joint bientôt une chorale spectrale. Il n’y a cependant aucun heurt, aucune rupture, aucun tressaillement, et c’est plutôt comme un baume qu’agit cette pièce, avant qu’Overlap Processing V.2020 ne vienne nous réveiller avec son thème obsessionnel à l’accordéon qui convie au chavirement des âmes et des corps (percussions basses aidant), et auquel se joignent des cordes aptes à susciter quelques frissons.

L’autre surprise de Professional Stranger, c’est la présence de deux reprises. Il ne s’agit pas de reprises de pièces maîtresses d’ART ZOYD ou de toute autre référence « avant-gardiste ». On parle ici de reprises de tubes « pop » ! La première est une adaptation du très populaire Venus de SHOCKING BLUE, qui fait entendre, outre une guitare acoustique, une programmation rythmique, des cordes enjouées et l’omni-présent accordéon, la voix de Sandrine ROHRMOSER (qui avait déjà travaillé avec ZABOITZEFF dans sa Missa Furiosa). Aussi imprévisible qu’incongrue, cette reprise arrive comme un cheveu sur la soupe dans l’édifice de Professional Stranger, mais n’a pas été placée dans ce disque par hasard puisqu’elle déboule après L’Insouciance de Vénus (forcément!). « Langue dans la joue » – comme disent les Anglophones – est en vérité cette reprise !

L’autre reprise a été placée en clôture du disque, comme un générique de fin. Cette fois, ZABOITZEFF s’attaque à un classique du groupe DEPECHE MODE, Enjoy the Silence. Plus inspirée, cette reprise est de toute beauté, mêlant plusieurs textures de claviers et de cordes, et sur laquelle le Dr. ZAB fait entendre cette fois son propre chant, au timbre bas et meurtri. On y entend aussi une curieuse voix sur bande, et le bourdon est cette fois assuré… par une mouche ! On le voit, l’inquiétante étrangeté n’a pas quitté l’univers de Thierry ZABOITZEFF…

Professional Stranger ne manquera pas de désarçonner par endroits ceux qui attendaient du ZAB un opus réglementé « musique progressive expérimentale ». On y retrouve néanmoins les climats habituels en clair-obscur de ses œuvre solistes, avec certes quelques ingrédients supplémentaires et des incursions qui sembleront saugrenues aux esprits avant-gardistes intransigeants. Mais Thierry ZABOITZEFF a précisément cherché à éviter de se mettre à « l’avant-garde à vous », se définissant justement comme un « étranger professionnel » aux courants artistiques et à leurs normes. Enjoy the Emotion…

Stéphane Fougère

Site : www.zaboitzeff.org

Page : https://thierryzaboitzeff.bandcamp.com/album/professional-stranger

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RYTHMES CROISES (F)
par Stéphane Fougère, 03/04/2020

Chronique de l'album
NEBENSONNEN - REMAKE
Site web

Un autre “parhélie” pour Thierry ZABOITZEFF

La période de confinement étant propice à l’exhumation d’archives, le compositeur et multi-instrumentiste Thierry ZABOITZEFF (ARIA PRIMITIVA, ex-ART ZOYD) en a profité pour terminer le “remake” d’un de ses anciens albums, l’hivernal Nebensonnen (Parhélie, ou “soleil double”), paru originellement il y a tout juste vingt ans (déjà ?!), soit en l’an 2000, sur Atonal Records (lire notre chronique).

Regrettant certains aspects techniques de cette ancienne production, le “Dr. ZAB” s’est mis en tête d’y remédier et a conçu une nouvelle version. Il dit à ce sujet : « Bien que les moyens de studio plus importants aient été mis en œuvre à l’occasion de ce remake, tout y est plus acoustique, plus simple, plus direct… finis les nappes de synthés et les loops de cordes et de piano. Tout a été rejoué dans cette atmosphère de solitude et de confinement, même la pièce Divertissement créée à l’origine dans et pour ART ZOYD. »

La crise liée à la pandémie de Covid19 ne permettant pas actuellement la fabrication de supports physiques (CD, LP), ce Nebensonnen (remake) sort aujourd’hui exclusivement en version digitale sur toutes les plateformes de streaming et de téléchargement, ainsi que sur la page Bandcamp de Thierry ZABOITZEFF (sur laquelle on peut également trouver des archives inédites) : https://thierryzaboitzeff.bandcamp.com/

Apte à scruter les mystères de la déréliction et du repli, cet album intimiste et recueilli devrait vous réconcilier avec des penchants casaniers que vous ne soupçonniez peut-être pas. C’est donc l’album par excellence à écouter en confinement ! Avec cette nouvelle version de Nebensonnen,
c’est certain : l’hiver revient.

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RYTHMES CROISES (F)
par Stéphane Fougère, 18/07/2019
Chronique de l'album
ARIA PRIMITIVA - SLEEP NO MORE

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Cet album, on l’attendait de pied ferme, avec trépidation, depuis qu’il s’était fait annoncé par le EP Work in Progress, publié en 2017, et une poignée de concerts en Belgique, France et Autriche en 2018. On ne va pas vous relater les origines du groupe, ni les conditions de sa formation, cela vous a déjà été conté dans notre chronique dudit EP. Chacun est donc censé savoir où il est et de quoi il retourne. Mais si vous avez raté l’épisode précédent, sachez pour faire court que derrière ARIA PRIMITIVA se trouve le compositeur et multi-instrumentiste Thierry ZABOITZEFF, qui fut l’une des chevilles ouvrières du groupe ART ZOYD, aux côtés du regretté Gérard HOURBETTE, avant de se consacrer à plusieurs projets personnels (danse, théâtre, cinéma, multimédia…). Je vois des paupières qui se lèvent, il était temps ! Maintenant que vous les avez levées, sachez que vous aurez toutes les peines du monde à les baisser. Car on n’est pas ici pour dormir, ni pour faire somnoler. L’ADN même de la musique d’ARIA PRIMITIVA l’en empêche.

Sleep no more : Ne dormez plus. L’injonction vient de loin et résonne fort. Intégrée au spectacle Vorgänge, dont ART ZOYD avait composé la musique en 1987, elle revient aujourd’hui comme un écho retentissant, et ARIA PRIMITIVA en a fait le titre de son premier album. Sleep no more, comme pour dire qu’après tout ce temps, la nécessité de rester éveillé en esprit est plus que jamais primordiale, vitale. Et manière pour Thierry ZABOITZEFF, en retour d’écho, de suggérer que la musique de son nouveau trio trouve son germe dans celle du groupe qu’il l’a fait connaître. ARIA PRIMITIVA n’est pas un hommage, ni une copie, c’est une extension, une floraison inédite qui certes fait écho à l’univers artzoydien, mais qui possède son âme sonore propre, transfigurée par une lutherie à la fois classique et avant-gardiste.

Basse, violoncelle, et voix de Thierry ZABOITZEFF en constitue les éléments tangibles, palpables, électrisants, convulsifs, tandis que les claviers et Ondes Martenot de Nadia RATSIMANDRESY, les claviers et échantillonneur de Cécile THÉVENOT et les programmations rythmiques du Dr. ZAB incarnent (si l’on peut dire…) cette composante virtuelle, fantomatique, immatérielle, irradiante et hypnotique. ARIA PRIMITIVA combine l’abrasivité de l’énergie rock, la sinuosité structurelle d’une certaine musique classique contemporaine avec l’empreinte spectrale de sons urbains et industriels, de pulsions tribales, et même de cris animaliers, chiens et corbeaux à l’affût.

Antique et futuriste, cette “mélodie primitive” fait montre d’une sauvagerie complexe, exprimant une sensibilité primale au sein d’une symphonie apocalyptique qui se meut entre ciel et outre-terre pour secouer un présent qui se refuserait à naître. ARIA PRIMITIVA est le théâtre du mouvement émotionnel perpétuel, ne restant jamais trop longtemps au même endroit et traçant sa route par moult détours, rebonds, chausse-trappes, comme pour mieux intimer aux consciences qui écoutent qu’elles ne doivent pas sacrifier un iota de leur capacité d’attention.

De fait, la musique d’ARIA PRIMITIVA révèle un univers étendu sur plusieurs formats : des compositions épiques ou semi-épiques, des “chansons”, des pièces instrumentales et des improvisations. Si vous vous attendiez à du tout-venant au kilomètre, c’est loupé : on verse ici dans le pluri-dimensionnel !

L’inaugural Endeyi Endesi appâte sans difficulté avec son introduction atonale, ses accords de piano martiaux, sa mélodie frissonnante aux Ondes Martenot, qui colorent en sombre le tapis anguleux qui mène à la pièce du fond, où se fait entendre la voix messianique du ZAB, qui semble dire : « Bienvenue dans le monde tourmenté mais palpitant d’ARIA PRIMITIVA ! » L’accrocheur Sleep no more se rappelle à notre bon souvenir, conservant la mouture qu’on lui connaissait sur le EP (plus compacte que celle d’ART ZOYD), mais bénéficiant d’un mixage un poil plus punchy. Virage à 180° avec Hystamack, une improvisation captée live qui projette dans un vortex faussement soyeux, empreint aux mini-secousses déstabilisantes de plus en plus insistantes, avec dans son dernier tiers cette simili-guitare frippienne qui entonne une complainte rugueuse.

Autre pièce révélée par le Work in Progress, Maïdaykali a également gagné une minute supplémentaire (pour aboutir à sept minutes), du fait du prolongement de son introduction aérienne, qui accentue d’autant plus le contraste avec son développement, en mode cyber-métallique qui ne prend pas de prisonniers !

Déjà dévoilée aussi dans le EP, Aria Primitiva, du haut de ses quatorze minutes, élabore un cinéma pour l’oreille qui tient en haleine de bout en bout. Même rendue un tantinet plus compacte que sur le EP, elle ne perd aucunement son statut de pièce de résistance, et devient aussi le centre névralgique de l’album. Nixen offre un bienvenu moment de pause ambient aux reflux mélancoliques dans sa première moitié, avant que la seconde ne révèle une faune sonore (violoncelle, piano, effets sonores divers…) prête à partir en chasse.

Un bruit de bottes pesantes se fait alors entendre, une mélodie enjôleuse aux Ondes Martenot et violoncelle se pose là, bientôt enrobée de voix spectrales : un chant en allemand se soulève avec solennité, soutenue par une mélodie qui revient de loin… Vous ne rêvez pas, c’est bien Helden, soit la version germanique de « Heroes » de Brian ENO et David BOWIE, prodigieusement métamorphosée en un lugubre et troublant mirage au sein duquel on croit même ré-éentendre le fameux son de guitare de Robert FRIPP ! Le démarquage avec l’original est radical, mais le frisson est garanti.

Kletka, l’autre improvisation live, nous plonge dans des eaux saumâtres, avec piano préparé, cordes tendues, halo assombrissant… Si l’auditeur est arrivé à peu près indemne jusqu’ici, nul doute qu’il souhaitera à ce stade trouver la porte de sortie. Elle lui sera offerte avec Mais ouvrez donc cette porte !, titre conclusif à la structure plus souple mais à l’atmosphère flippante.

On n’ouvre pas les portes impunément, et chacun sait que l’on ne peut regarder des deux côtés à la fois pour découvrir ce qu’il y a derrière… Mais que cela ne vous dissuade pas de pénétrer dans cette zone d’inconfort que vous a aimablement et minutieusement concocté ARIA PRIMITIVA, bien au contraire ! Sleep No More a tout de l’épreuve cathartique ; cet album farouche et sophistiqué fait fonction de canal de communication souterrain avec les parts d’ombre du subconscient, et les paysages effarés qu’il dévoile devrait titiller les friands de mystères escarpés. Et si vous en faisiez votre disque de chevet ?

Stéphane Fougère

PS : Cet album est également disponible en version LP, lequel ne contient que cinq morceaux, soit les cinq compositions majeures, présentées dans un ordre différent). Les pièces improvisées et la reprise de Helden en sont exclues, mais les amateurs de support vinyle ont le droit de se le procurer, ne serait-ce que pour profiter en grand format de la fort belle pochette réalisée par Thierry MOREAU.

Page : www.zaboitzeff.org/aria_primitiva_f.html

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RYTHMES CROISES (F)
par Stéphane Fougère, 16/03/2018
Chronique du EP
ARIA PRIMITIVA - WORK IN PROGRESS

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Les anniversaires sont généralement l’occasion de revoir la famille ou les vieux potes, mais aussi de faire de nouvelles rencontres inattendues. La seconde représentation live de la création rétrospectiviste 44 1/2 d’ART ZOYD, en décembre 2016 au Phénix de Valenciennes, a ainsi offert l’opportunité à son ancien membre historique Thierry ZABOITZEFF de faire connaissance avec deux jeunes recrues du laboratoire « artzoydien », Nadia RATSIMANDRESY et Cécile THEVENOT, en charge des claviers et autres samplers, et même des ondes Martenot pour la première, bref le nec plus ultra instrumental d’une certaine avant-garde musicale. Avec sa basse, son violoncelle électrique, ses samples et sa voix de goule d’outre-tombe, le « Dr. ZAB » représente l’ancienne génération, qui joue encore sur une lutherie traditionnelle même si adaptée aux élans électriques et aux textures électroniques, mais plutôt « old school » face aux méthodes modernes de travail des deux claviéristes. Qui eut pu penser que ces personnalités avaient des choses à se dire ? Ce fut pourtant le cas, et c’est ainsi qu’a germé dans la tête de Thierry ZABOITZEFF l’idée d’un nouveau projet sous la forme d’un trio, ARIA PRIMITIVA.

À peine un an après la création du groupe, si les choses sont allées vite pour ARIA PRIMITIVA, puisqu’un album est déjà en cours de gestation, et cet EP en est la carte de visite, pour ne pas dire le faire-part de mariage. Sa publication atteste de la frénésie créatrice et de la bonne forme de l’inspiration de Thierry ZABOITZEFF, compositeur attitré des trois morceaux présentés sur cet EP, humblement titré Work in Progress, ce qui sous-entend que les compositions en question sont appelées à évoluer encore d’ici leur gravure sur le futur album proprement dit. Mais pour des « versions de travail », elles sont déjà très présentables, éminemment écoutables et, surtout, fortement goûteuses ! Et ce qui frappe à leur écoute, c’est le lien quasi-ombilical qu’elles entretiennent avec l’univers artzoydien des années 1980-90, mais sans nostalgie aucune dans le traitement.

À l’écoute du morceau d’ouverture, Maidaykali, on retrouve cette même aspiration à mêler des éléments musicaux d’univers distincts dans une même marmite, à enchaîner textures ambient, riff métalliques, programmations industrielles, rythmiques tribales, chant sépulcral et autres « extra-terrestralités » pour engendrer un hybride dense et fiévreux qui en impose à l’oreille. Oui, il y a du ART ZOYD là-dedans, mais pas sur un mode plagiaire, plutôt dans une perspective évolutive, confirmée par le choix d’un son neuf, renouvelé, remodelé, et qui simultanément rappelle certaines heures de gloire tout en faisant montre d’une énergie inédite.

Aria Primitiva, le morceau éponyme, enfonce le clou. Cette pièce à tiroirs déploie ses tentacules structurelles sur près de 14 minutes, prenant moult détours labyrinthiques tout en jouant de la répétition d’un motif mélodique qui pourrait passer pour un chant de travail dans le monde des Munchkinds ou des Schtroumpfs, mais qui révèle bientôt des tentations plus obscures, des sensations plus abstraites, des mirages sonores (des cordes, un accordéon, des chœurs sortis de nulle part…) des doutes hyperboliques aptes à planter l’auditeur au milieu d’un vide ou d’un maelström, avant de reprendre gaillardement son chemin.

Enfin, la troisième pièce prouve que, lorsqu’on parlait de lien ombilical, on n’exagérait pas puisqu’il s’agit d’un nouvelle version de Sleep No More (dont la version originale clôturait le CD Nosferatu), plus épurée mais aussi dûment rhabillée, avec un ZABOITZEFF plus habité que jamais au chant « pythique ». Cette reprise a double fonction : elle évoque un ancrage dans un certain passé tout en s’en servant comme jalon pour tracer une nouvelle route. ARIA PRIMITIVA ne crée pas en faisant table rase, mais cultive un champs immense en combinant anciens et nouveaux procédés d’écriture, de construction.

Ce Work in Progress taille une matière forte, viscérale, et la sertit d’ambiances diversifiées, de contrastes fulgurants, d’articulations tortueuses et de souffles incandescents. Pour capter le « cri » d’ARIA PRIMITIVA, l’auditeur est averti qu’il lui faudra toute son attention. Et à son écoute, il pourra lui aussi se demander : why are we sleeping ?

C’est en tout cas ce qu’on appelle un « starter » gonflé à bloc !

Stéphane Fougère

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RYTHMES CROISES (F)
par Stéphane Fougère, 15/09/2016
Chronique de l'album
MULTIPLE DISTORTIONS

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Y en a-t-il encore dans la salle qui ne savent pas que Thierry ZABOITZEFF est l’auteur d’une discographie pléthorique en dehors d’ART ZOYD ? Non parce que, dans ce cas, il faudrait voir à s’épanouir loin du radiateur… Avec ce nouveau CD, le « Dr. ZAB » en est à sa 18e réalisation discographique. Plusieurs de ses musiques servent de supports à des spectacles chorégraphiques, d’autres à des ciné-concerts, d’autres devaient servir à des projets qui n’ont finalement pas abouti, et d’autres encore ne servent à rien de particulier ; elles sont là pour le plaisir de l’écoute et peuvent aboutir tout bonnement à un album solo à apprécier en tant que tel. C’est dans cette catégorie qu’il faut ranger Multiple Distorsions.

A l’instar d’Iva Lirma, qui regroupait des archives de la période 2002-2007, Multiple Distorsions est présenté comme un recueil d’archives émanant de ces dix dernières années. S’y alignent des compositions originales inédites, une nouvelle version du Lac des signes (que Thierry avait revisité dans son concert solo Cross the Bridge) et quatre pièces issues d’un projet qui n’a pas vu le jour, Overdrive.

Compte tenu de l’insatiable curiosité musicale du bonhomme – qui explore tant la musique contemporaine que l’électronique, le rock avant-gardiste ou les musiques d’ailleurs – en même temps que de son talent de multi-instrumentiste (basse, guitare et violoncelle électriques, percussions, claviers, échantillonnages…), on se doute que le contenu de Multiple Distorsions ne verse pas dans l’uniformité stylistique. Les connaisseurs de l’œuvre « zaboitzeffienne » retrouveront donc ici leurs marques mais ne manqueront pas d’être étonnés par certaines orientations.

Ainsi trouve-t-on dans ces Archives 2005-2016 une pièce quelque peu réminiscente du son de l’ART ZOYD des années 1980 (Rebonds), des séquences ambient-indus tendues et inquiétantes (Sign 2, Continents), des morceaux électro un poil plus amènes car conçus sur des boucles mélodiques ou rythmiques (Maniphands, Confusion), une pièce à l’ambiance grisante écrite pour un quartette de guitares basses (Lose – extended), des morceaux où s’entrelacent sons acoustiques, jets électriques et boucles et programmations électro (Die Maschine, Wings) et d’autres qui font la part belle à la guitare électrique, comme dans Pourquoi autant d’agitation ? et la série des Overdrive. À ce sujet, il est possible que jamais le Dr. ZAB ne s’était autant rapproché de l’idiome rock « classique » qu’avec Overdrive 3, introduit par un riff aussi saignant que bluffant et nourri d’un solo « frippien » à s’y méprendre !

Thierry ZABOITZEFF n’a pas son pareil pour composer des pièces qui agissent comme des miroirs ou des reflets de la face cachée et obscure de la psyché humaine. Les climats dépeints dans ce recueil sont certes imprégnés de rêveries glaçantes, d’angoisses transpirantes, de colères magmatiques et de remue-ménages bazardés, déployés avec un goût travaillé du détail ; mais l’humour a aussi sa place, comme l’illustre notamment Vorschrift, qui combine rythme « dance » avec banjo et trompette !

Alors certes, ces Multiple Distorsions font montre d’un éclectisme qui en déroutera certains, mais les quinze morceaux réunis dans cet album ont tous une griffe distinctive qui ne trompe pas et illustrent chacun à leur manière une forme de distorsion sensorielle. Et, à y bien regarder, les albums solo de Thierry ZABOITZEFF se sont toujours distingués par leur profusion d’idées, d’inventions et leur richesse stylistique. C’est pourquoi Multiple Distorsions s’élève bien au-delà du simple statut de compilation de fonds de caisse et s’écoute comme un album solo dans la lignée de Dr. Zab and his Robotic Strings Orchestra, Heartbeat, India, The Fantômatick Bands, Iva Lirma et 16. Et quelque chose me dit que Thierry ZABOITZEFF, même après avoir fait le ménage dans ses disques durs, n’a vraisemblablement pas encore tout dit.

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TRAVERSES (F) devenu RYTHMES CROISES
par Stéphane Fougère, 2014
Chronique de l'album et du DVD
THE CABINET OF DR. CALIGARI

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Quand un docteur est confronté à un autre docteur, quelle prescription vaut-il mieux suivre ? La sortie de ce DVD qui permet conjointement de revoir un chef- d'œuvre du film muet réalisé par Robert WIENE en 1920 (soit Le Cabinet du Dr. Caligari) et de découvrir la version musicale concoctée par Thierry ZABOITZEFF (alias « Dr. ZAB ») apporte peut-être une réponse. Le hasard a voulu qu'au même moment, Le Cabinet du Dr. Caligari fasse l'objet d'une présentation à la Berlinale, dans une version restaurée et mise en musique par John ZORN, qui n'est pas non plus un modèle de « normalitude ». C'est le signe qu'en 2014 cette œuvre, qui a marqué l'Histoire du cinéma expressionniste allemand, continue à trotter dans les esprits. Ce film-manifeste, en forme de récit dans le récit, a non seulement influencé bon nombre d'autres réalisations cinématographiques (Nosferatu et La Nuit du chasseur, qui en reprennent la scénographie, Edward aux mains d'argent, dont le grimage du personnage campé par Johnny DEPP renvoie à celui du somnambule incarné par Conrad VEIDT, jusqu'à Mulholland Drive et Shutter Island, pour cette façon de bluffer le spectateur en lui faisant suivre le rêve ou le délire d'un personnage...), mais a aussi laissé des traces esthétiques dans le heavy metal, le glam-rock ou la new wave (BAUHAUS…).Car, outre le jeu expressionniste des acteurs (Werner KRAUSS et Conrad VEIDT en tête), les audaces visuelles du film ont contribué à sa notoriété.Il y a cette stylisation outrancière des décors, cet uni- vers graphique tourmenté, à base de lignes brisées, de tâches claires ou sombres, de perspectives obliques et d'angles brisés, ces espaces distordus et torturés comme autant de signes patents de la paranoïa du personnage de Francis, qui voit dans le Dr. CALIGARI une incarnation du Mal. On n'est guère étonné que ce « caligarisme » (nom donné à l'époque à cette esthétique cinématographique) ait également inspiré Thierry ZABOITZEFF, d'autant qu'avec ART ZOYD, il a déjà versé dans la mise en musique d'autres œuvres cultes du cinéma muet (Nosferatu, Faust, Häxan). Le Cabinet du Dr. Caligari manquait à sa collection, ce n'est plus le cas désormais, et ce depuis 2010, année où il a commencé à se produire sur scène sous la formule du ciné- concert, ou interprétation musicale en direct live pendant la projection du film. Comme dans les précédentes expériences de ciné- concerts avec ART ZOYD, le multi-instrumentiste a soigneusement évité tout souci d'« illustration » et s'est attaché à développer une partition suggestive avec de multiples repères pour permettre à l'auditeur/spectateur de retrouver son chemin dans ce dédale cinématographique hallucinatoire et psychotique. La musique du Dr. ZAB est évidemment à l'avenant, évoluant dans un registre électro-acoustique typique de son auteur (et réminiscent par endroits de l'époque art-zoydienne), révélant les tensions et les troubles sous- jacents à l'action, non sans cultiver par endroits le second degré.Il y a ainsi des bruits, des sons, des thèmes récurrents selon les scènes. L'approche de ZABOITZEFF suit en cela le choix de WIENE de coloriser différemment la pellicule selon les scènes (en beige, vert, en bleu, en rose, en jaune...), ou de revenir aux mêmes décors pour plusieurs scènes, de manière à élaborer un univers cohérent et défini tant sur le plan visuel que musical. Certains thèmes sont donc joués à plusieurs reprises, mais dans des versions différentes en fonction de la dramaturgie qui se dégage des images. Ce DVD permet donc à la fois de redécouvrir le film de WIENE mis en musique par ZABOITZEFF, et aussi de suivre une performance de ciné-concert de ce dernier, filmée au Théâtre Toursky de Marseille en 2013 (plus un clip). Dans le premier cas, on voit juste le film ; dans le second, on a l'impression de voir deux films en simultané : le film de WIENE projeté sur un écran, et en simultané la performance musicale et scénique de Thierry ZABOITZEFF, seul sur scène, ultra-concentré sur ses machines, claviers, boîtiers, violoncelle, guitare et percussions, comme dans son spectacle Cross The Bridge. Il dirige l'évolution de la musique comme le Dr. CALIGARI (ou supposé tel) dirige son établissement psychiatrique.Il est du reste réjouissant de mettre en parallèle la scène où le Dr. CALIGARI présente son attraction (le somnambule CESARE) dans une fête foraine, et de voir Thierry ZABOITZEFF jouer les ménestrels high- tech dans une salle de théâtre, accentuant l'ironie de la situation en jouant un thème décalé qui relève de la musique de cirque. Et tout comme le directeur de l'asile, dans une scène visuellement prodigieuse, s'auto-discipline à penser qu'il est le Dr. CALIGARI (la phrase « Du Musst Caligari werden » apparaissant en superposition à plusieurs endroits de l'image, comme une pensée tournant en boucle), on imagine bien Thierry nous dire « Du Musst die Musik des Drs. ZAB zuhören » ! Sans que l'on sache trop si cette musique est censée être un remède à la folie qui s'exprime dans les images ou un facteur favorisant l'aliénation…Cette alliance artistique virtuelle entre le Dr. ZAB et le Dr. CALIGARI s'avère en tout cas une rencontre au sommet.

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TRAVERSES (F) devenu RYTHMES CROISES
par Stéphane Fougère, 2012 puis 28/10/2016
Chronique de l'album
PLANET LUVOS

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Parce qu'il n'en est plus à un contraste près, Thierry ZABOITZEFF livre, conjointement à 16, un autre opus (le dix-septième, donc) stylistiquement plus homogène. Il s'agit à la base d'une musique originale pour chorégraphie (en l'occurrence une pièce créée au cours de l’année 2012 par la compagnie d'Editta BRAUN à Salzbourg et à Vienne) dont le titre, Planet Luvos, évoque volontiers un univers de science-fiction. Mais qu'on se rassure, on ne trouvera rien ici de commun avec les B.O. des Star Wars et autres Star Trek.Plus austère et atonale (mais non dénuée d'humour), la musique composée par ZABOITZEFF avec son habituel instrumentarium électro-acoustique évite le prévisible écueil du « planant/spatial/ambient », même si elle s'acquitte de quelques gages envers le genre. Mais ceux-ci sont bien vite perturbés et pervertis pour évoquer un environnement à la façade pacifique mais aux recoins plus instables et aux mouvements plus troubles (à l'instar des autres extraits de Luvos vol. 2 inclus dans l'album Iva Lirma).Les résonances lunaires de cette Planet Luvos se doublent d'une évocation aquatique récurrente, ce qui n'est guère étonnant quand on réalise que cet univers-ci se niche au fond des mers, là ou tout n'est qu'abysses chaotiques et plaintives, animées de soubresauts floraux, de courants tourbillonnants et peuplées d'une faune en perpétuelle métamorphose, quelque part entre l'animal (benthique ou pélagique) et l'extra-terrestre.Si la mélodie n'apparaît que sous forme velléitaire, voire mutique, c'est parce que cette plongée sous-marine prolongée débouche dans un monde originel, embryonnaire, où l'humanité est réduite à une minorité presque parasite, une intrusion accidentelle.Thierry ZABOITZEFF a réalisé avec Planet Luvos une fascinante évocation d'un fond marin aux allures de cosmos renversé, tâché d'étoiles décidément singulières.

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RYTHMES CROISES (F)
par Stéphane Fougère, 28/10/2016
Chronique de l'album
SIXTEENTH

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Plus récemment, Thierry ZABOITZEFF a réalisé 16 (Sixteenth). Pourquoi 16 ? Tout bonnement parce qu’il s’agit de son seizième album. « Déjà ? » ne manqueront pas de s’interroger les retardataires.

Faisons les comptes : la première escapade solitaire de Thierry remonte en effet du temps d’ART ZOYD, c’était en 1984, avec Promethée. Il y en a eu une deuxième en 1992 (Dr. Zab & his Robotic Strings Orchestra) puis une troisième en 1995, Épreuves d’acier, finalement intégrée au Häxan d’ART ZOYD, mais c’est évidemment depuis qu’il a quitté ce dernier que ZABOITZEFF a multiplié les productions, toutes aussi variées et originales les unes que les autres. On ne va pas toutes les recenser ici, mais si l’on inclut la compilation Back Up et son rare disque en duo avec Harald FRIEDL (Rauch), sa discographie s’élève bel et bien à seize disques avec celui-ci.

Allez savoir si Dr. ZAB a voulu faire de cet album une commémoration, un repère dans le temps, une étape marquante, mais 16 s’avère être un peu de tout ça à la fois, tant son auteur a mis les petits plats dans les grands. ZABOITZEFF a mitonné un opus opulent à base d’instruments classiques, rock, électro-acoustique, programmations, samples et voix, selon des recettes déclinées à toutes ses sauces de prédilection, du classique-contemporain solennel à l’électro-technoïde baroque en passant par le rock martial et volontiers zeuhlien, le dark-ambient et la musique de chambre.

Dans 16, contemplations béates et cauchemars ambulants, instants de sérénité et séquences de guérilla, images d’un Eden disparu et visions d’un apocalypse imminent, chimères et gargouilles, voix d’anges et voix de goules marchent en rang serré, les uns devant ou derrière les autres, ou côte à côte, ou se fondent et se confondent au gré des transitions ou des ruptures. Outre la propre voix de ZABOITZEFF, naturelle ou viscérale, 16 fait intervenir d’autres voix, réelles ou virtuelles. Plusieurs titres bénéficient ainsi de l’organe vocal séraphique de la soprano Isabelle FARMINI ; une rythmique hoquettante est tracée par deux « beatboxers » sur le primesautier Touch, la voix du performeur Tomaz SIMATOVIC compte les millions sur le débridé Schluss mit Kunst, et ce sont des fragments de discours de Martin LUTHER KING qui ponctuent la cavale paniquée de Free at Last.

A ces thèmes survoltés s’opposent d’autres qui distillent des lenteurs mystérieuses, tel le classisant et sentencieux Kordz et les anges gardiens, que l’on croirait écrit pour DEAD CAN DANCE, ou encore le suave et plaintif Deil Zom an Delay, joué lors du spectacle live Cross the Bridge de Thierry il y a deux ou trois ans. Les connaisseurs de longue date retrouveront dans 16 des compositions déjà enregistrées ailleurs. ZABOITZEFF nous gratifie en effet d’une nouvelle version électroïsante et très second degré de son Dr. Zab & his Robotic Strings Orchestra (dont la mélodie prenante est inspirée de la VIIIe Symphonie de CHOSTAKOVITCH), rebaptisée Dr. Zab am Wolfgang See.

Et ô surprise, Thierry revisite également son classique Mariée à la nuit, qu’il interprète avec le personnel du collectif d’Erik BARON, d-zAkord. (C’est la seule fois dans l’album où il est accompagné d’un groupe.) Cette version toute en cordes n’a rien à envier à celle d’ART ZOYD, et se permet même de ressembler à un inédit d’un ProJeKCt frippien. On aurait du reste souhaité que cette collaboration du ZAB’ avec d-zAkord se poursuivre au-delà de cette seule pièce…

N’étant pas directement lié à une création chorégraphique ou filmique, 16 est un album-somme qui fait montre d’une inspiration stylistique plurielle que les séides puristes jugeront outrecuidante, tant elle est arborée comme un étendard (non sanglant). L’originalité, la variété des climats et des structures de composition révélées dans les douze compositions de cet album illustrent l’audace créative de Thierry ZABOITZEFF.

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TRAVERSES (F) devenu RYTHMES CROISES (F)
par Stéphane Fougère, 01/2014 puis 28/10/2016
Chronique de l'album 
SEQUENCES

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Ça commençait à faire un bail que le compositeur et multi-instrumentiste Thierry ZABOITZEFF n'avait pas ajouté de nouveaux deniers dans son escarcelle discographique, déjà bien plantureuse. Ses trois dernières réalisations le montrent chacune une facette différente de son champ d'action artistique.
On connaissait Thierry ZABOITZEFF comme illustrateur sonore de ballets et chorégraphies, on ne l'avait pas encore entendu comme compositeur musical de réalisations TV ou cinématographiques. C'est chose faite avec Sequences, qui n'est autre que la version album de la B.O. d'un documentaire de Nathalie BORGERS, Winds of Sand, Women of Rock (Vents de sable, femmes de roc), consacré aux femmes de l'ethnie nomade des Toubou.
Contexte oblige, la musique concoctée par ZABOITZEFF se pare évidemment de couleurs ethniques. De nombreuses pièces parmi les 18 « séquences » du disque sont nourries de samples d'instruments ethniques (percussions, flûtes, luths, vièles) et de chants traditionnels qui voisinent avec les plus coutumiers violoncelle, basse, claviers et le « robotic strings orchestra » du ZAB.
Ce n'est certes pas la première fois que des emprunts aux musiques traditionnelles et world sont réalisés par Thierry (souvenez-vous de l'album India). Mais leur intégration à la bande son d'une production documentaire a apparemment obligé le compositeur à ne faire qu'un usage parcimonieux de sa grammaire originale. On pourrait très bien écouter cette bande originale la première fois sans se douter qu' « il y a de l'ex-ART ZOYD dans tout ça ».
Mais une écoute plus attentive finit par repérer certains traits caractéristiques déjà présents dans d'autres réalisations solistes de ZABOITZEFF, voire dans les derniers albums d'ART ZOYD auxquels il a participé, mais sous une forme plus diluante. Il n'est pas certain cependant que Sequences se distingue dans la masse de productions world fusion à base de samples que des artistes comme Thierry DAVID, LIMBORG ou Steve SHEHAN ont déjà amplement concouru à développer dans les années 1990. Toutefois, cet album affiche une volonté d'accessibilité qui n'est pas non plus déshonorante... juste un peu plus passe-partout.
N° 34 - 01 2014)

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TRAVERSES (F) devenu RYTHMES CROISES (F)
par Stéphane Fougère, 03/2008 puis 31/05/2021
Chronique de l'album
IVA LIRMA

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Voici une nouvelle preuve – s'il fallait encore en avancer – de la prolixité créatrice dont fait preuve « l'ex-ART ZOYD » depuis son départ dudit groupe.
C'est le label espagnol Margen Records, déjà auteur de la réédition CD de son premier LP, Prométhée, qui publie ce recueil pour le moins composite.
Iva Lirma compile en effet plusieurs musiques composées par Thierry ZABOITZEFF
pour des spectacles de la chorégraphe Editta BRAUN pendant la période 2002-2007
et qui n'étaient pas encore parues en CD.
S'agissant d'une compilation, l'homogénéité musicale n'est évidemment pas de mise,
mais je soupçonne l'auteur de ces musiques d'avoir sciemment orienté sa sélection en vue d'accroître cet aspect éclectique, comme il l'avait déjà fait avec d'autres précédents albums, comme Heartbeat, India ou The Fantomatick Bands.
Expérimentales ou plus accrocheuses, les musiques réunies dans Iva Lirma (nom du studio d'enregistrement du ZAB ') forment un bouquet très contrasté. Elles peuvent prendre la forme d'atmosphères troublantes et heurtées (oXalis 1), de thèmes néo-classiques entêtants aux claviers, violons et violoncelles (Crash), ou de pièces cultivant l'exotisme déviant (la pseudo-chinoiserie Gertrude, le mirage orientalisant de Coppercity)
ou encore d'un capharnäum excentrique mêlant rythmes électro, notes jazzy, riffs rock et... des ronflements (Matches of Time) ! La palme de l'extra-terrestrialité revient assurément à Luvos vol. 2, avec ses espaces hiératiques électroplanants subrepticement animés d'étrangetés sidérales. (Son épilogue, en revanche, lorgne du côté d'un UNIVERS ZERO qui aurait absorbé un euphorisant.) A l'opposé, et comme pour accentuer encore davantage le trouble de l'auditeur, se trouve une pochade à écouter au second degré, revisitant la ritournelle populaire Promenons-nous dans les bois... avec un chant de muezzin à l'horizon.
C'est donc un Thierry ZABOITZEFF totalement affranchi du cadre « artzoydien » qui s'exprime ici, cultivant les coqs-à-l'âne et les croisements musicaux les plus abrupts, voire les plusincongrus, usant de la technologie électroacoustique pour créer des musiques qui se refusent à choisir entre l'abstraction contemporaine et l'accessibilité populaire, et font se cotôyer des scénarii sonores emphatiques, angoissants, oniriques ou ludiques.
N°23 (mars 2008)

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TRAVERSES (F) devenu RYTHMES CROISES (F)
par Stéphane Fougère, 03/2008 puis 26/10/2016
Chronique de l'album
VOYAGE AU CENTRE DE LA TERRE

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La production discographique de Thierry ZABOITZEFF semblait avoir marqué le pas ces derniers mois... mais semblait seulement. Ce n'est pourtant pas faute d'avoir continué à composer des musiques pour divers spectacles.

Sans doute le dernier coup d'éclat en date du « Dr. ZAB » a-t-il été sa contribution musicale au spectacle réalisé en 2005 au Stade de France autour de l'œuvre de Jules VERNE Voyage au centre de la Terre, à l'occasion du centenaire de la mort de l'écrivain visionnaire. L'ample couverture médiatique dont a bénéficié le spectacle a permis de rassembler quelque 130 000 spectateurs. Cela dit, de par ses choix esthétiques, la création ne s'adressait pas nécessairement à tout le monde et sa mise en scène, qui a transformé l'arène sportive en cratère aussi vertigineux que statique, a fait couler beaucoup d'encre. Quoi qu'il en soit, l'événement a donné l'opportunité à Thierry ZABOITZEFF de faire entendre sa musique (jouée en direct lors des représentations) à un très large public qui, dans sa grande majorité, ne devait pas la connaître, et n'avait sûrement jamais rien entendu de tel. Les plus avertis y ont trouvé des accointances avec l'univers de MAGMA ; comme c'est drôle...

Le Dr. ZAB a-t-il à cette occasion mis de l'eau bénite dans son chaudron maléfique ? Bien sûr que non. ZABOITZEFF continue à faire ce qu'il fait de mieux, un mélange de musique électro- acoustique pimentée de rock aux accents classico-symphoniques, avec cette « patte » reconnaissable et les usuels traits distinctifs qui la caractérisent. Voix, claviers, samples, cordes, percussions et quelques vents constituent l'ossature timbrale de cette musique « anamorphique » qui, même privée de son pendant visuel, joue la carte de la suggestion fantasmatique, ouvrant sur des horizons mutants.

A des séquences hiératiques évoquant des paysages de quiétude peuvent succéder des moments plus perturbés, avec des embardées électro-lyriques et des rythmiques martiales ou haletantes qui renvoient à des cauchemars peuplés de créatures vindicatives et de spectres ricanants et qui, tout aussi subitement, s'évanouissent pour ne laisser subsister que des ambiances intimistes de musique de chambre néo-classique ou des climats plus cérémoniels, voire religieux.

Si, pour la version concert, quelques musiciens secondaient Thierry ZABOITZEFF aux violons, saxophones et percussions, la version CD voit ce dernier assurer tous les instruments. Le Dr. ZAB n'est accompagné que des deux chanteuses, la mezzo soprano Sandrine ROHRMOSER, déjà remarquée dans la Missa Furiosa, et la soprano Gerda RIPPEL. Leurs lignes vocales dynamisent ce voyage intra-terrestre de leurs harmonies singulières ; et quand ces voix féminines éthérées sont confrontées à la voix de goule du ZAB', l'effet est d'autant plus saisissant.

L'odyssée sonore entreprise par ZABOITZEFF & CREW ne manque certes pas de rebondissements et fait voyager de tableaux en tableaux tous aussi fantasques les uns que les autres. Si ce n'est un voyage en centre de la Terre, c'est au moins une expédition aux confins de la sphère mentale et de ses projections oniriques, apaisées ou troublées.

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TRAVERSES (F) devenu RYTHMES CROISES (F)
par Stéphane Fougère, 10/01/2002 puis 24/10/2016
Chronique de l'album
DR. ZAB VOL. 2 - THE FANTOMATICK BANDS

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Neuf ans après ses premières frasques digitalisées en compagnie de son orchestre à cordes robotiques, le Dr. ZAB revient hanter nos platines avec une nouvelle moisson de thèmes tout aussi variés les uns que les autres. Cette fois-ci, il s'est entouré d'un nouvel orchestre, FANTÔMATICK BANDS, dont la particularité est d'être constitué pour moitié de mortels sans doute échappés de la charrette de l'Ankou, et de spectres fiers de leur condition, parmi lesquels on retrouve le célèbre chanteur Terri ZABINOVITCH, l'immanquable bassiste Valentino ZAB, l'innénarrable batteur Olaf FRÄP DÜR, et le remarquable violoniste kobaïen Ühnn KORDÄSOHNARCK !!... Ah la fine équipe que voilà ! C'est l'orchestre auquel on ne rêvait plus !

Il n'est évidemment pas facile de savoir si les différents timbres vocaux et les instruments divers et variés qui se font entendre ici et là sont authentiques ou ne sont que l'ombre d'eux-mêmes, et ce n'est d'ailleurs pas le but ! Le Dr. ZAB ne recule devant aucune illusion samplée pour parfaire ses opérations de chirurgie sonore esthétique et ce faisant nous livre un bouquet pour le moins éclectique et dense qui pourra paraître décousu, inégal, mais certainement pas figé sur un seul regard. Ce violon chinois qui nous accueille d'entrée de jeu ( Ainsi écrivait Marco Polo ), perturbé par la pratique épistolaire, un rien saccadée, de l'explorateur, est-il réel ou virtuel ? Toujours est-il que sa capacité à planter un décor envoûtant est confondante. Et notre bon Dr. ZAB de nous conter ainsi nombre de visions nocturnes, alimentées d'inquiétudes baroques, de fantaisies obscures, de souvenirs futuristes et de méditations frissonnantes...

Rien n'est jamais totalement noir, ni toujours complètement rose, ou bleu, ou vert, ou autre, dans les histoires du DR. ZAB, les couleurs passent en coup de vent, comme des empreintes spectrales, se métamorphosant inlassablement pour mieux nous transporter d'un coin à l'autre du globe bariolé ou du bunker agité des émotions humaines. De la cahotique Rhumba des boiteux à la souriante Petite danse italienne sans oublier la Fanfare au pas pachydermique, le folklore du monde subit un check-up malicieux, et comme si cela ne suffisait pas, notre brave médecin en rajoute dans l'irrévérence en «rythm-boxant» un Blues grégorien et en prononçant des imprécations hérétiques ( Révolution ) ; et, contre toute attente, «frankensteinise» pas moins de quatre morceaux du répertoire des «Fab'Four» ! Insolites et déconcertantes, les musiques rassemblées ici et ainsi font figures de bande originale de quelque oeuvre cinématographique imaginaire. Un morceau - certainement le plus riche et le plus palpitant - a du reste été baptisé Le Film manquant. A charge pour chacun de trouver les images qui vont avec. Et n'allez surtout pas demander quand les FANTÖMATICK BANDS seront visibles en concert !

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TRAVERSES (F) devenu RYTHMES CROISES (F)
par Stéphane Fougère, 21/04/2007
Chronique de l'album
MISSA FURIOSA

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On n’attendait certainement pas de Thierry ZABOITZEFF qu’il écrive un jour une messe, fut-elle d’un nouveau genre ! Pas de crise mystique là-dessous, ni de reconversion sectariste : le multi-instrumentiste et chanteur a simplement cherché à créer une oeuvre qui traduirait au mieux son goût pour les musiques orchestrales, vocales et théâtrales et les impressions laissées de longue date par le faste des grand-messes catholiques et ses représentations iconographiques, sans aucune arrière-pensée prosélyte.

Ainsi s’est mise en place la Missa Furiosa, qui est, de l’aveu même de son auteur, une «messe chantée en latin pour un ensemble techno-pop, trois chanteurs lyriques, des cordes et des manipulateurs d’électronique». Autrement dit, l’oeuvre se présente comme la confrontation d’un rituel antique avec les développements sonores modernes et ses extensions électroniques.

Le ton est donné dès la Préparation, qui baigne dans une onde synthétique sur laquelle se posent des notes de oud, puis un chant oriental, une voix soprane... Et le prédicateur parle. Pas de doute, cette messe ne sera pas très catholi... je veux dire pas très conventionnelle, même si enracinée dans le rite chrétien. L’Introitus entre alors dans le vif du sujet, avec son chant en latin, soutenu par une rythmique techno d’abord sourde puis plus vindicative. Les cordes s’émoustillent, la «goûle zaboitzeffienne» joue les trublions occasionnels en proférant des interjections ésotériques répétitives («Y-e-ah, Y-e-ah...»), la «rave» écclésiastique démarre avec vigueur, en ménageant toutefois l’auditeur par des cassures rythmiques et atmosphériques. Pour le Kyrie, mezzosoprano et baryton unissent leurs élans vocaux dans un étrange environnement sonore que l’on jurerait investi par des extra-terrestres «tim-burtoniens».

Ainsi chaque prière de la messe (Gloria, Lacrimosa, Dies Irae, Agnus Dei...) brasse-t-elle chants latins emphatiques ou intimistes, feux-follets vocaux (mantras chrétiens, ricanements, imprécations éraillées...), bruitages aux résonances ancestrales et sacrales et manifestations sonores plus typiques du monde laïque contemporain. Mais jamais l’artillerie technoïde ne s’impose plus que de raison, et cette Missa alterne moments charnus, frénétiques, et d’autres plus embrumés, confessionnels, constamment animée d’un lyrisme pour le moins baroque où chants, cordes (violon, violoncelle, oud), vents (clarinette), percussions d’ailleurs, nappes synthétiques et émanations électroniques jouent les vases communiquants de la passion et de la transe plutôt que les partisans des querelles de chapelles, qu’elles soient religieuses ou artistiques. La Missa Furiosa professerait-t-elle l’extase oecuménique ? C’est en tout cas un clergé pour le moins convulsif qui se manifeste ici (Saint-Médard doit traîner dans le coin...), et qui trouve tout juste le temps de reprendre son souffle et son sérieux compassionnel le temps d’un Requiem emprunté à MOZART, certes métamorphosé (solo d’harmonica inclus !) mais toujours imposant. La messe s’achève sur un Libera Me martial et habité que même MAGMA pourrait envier.

La grande force de la Missa Furiosa est qu’elle passe outre les cloisons étanches entre les univers artistiques profanes et sacrés. Elle introduit la transe des fêtes modernes dans le rite chrétien, à moins qu’elle n’installe le formalisme religieux dans l’extase électro-technoïde. On en ressort lézardé de frissons autant physiques qu’intérieurs. Cette oeuvre a bien mérité son absolution.

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TRAVERSES (F) devenu RYTHMES CROISES (F)
par Stéphane Fougère, 10/2000 puis 21/10/2016
Chronique de l'album
MINIATUREN

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Miniaturen est une production de Thierry ZABOITZEFF pour la nouvelle pièce d’Editta BRAUN créée pour l’ouverture du «Salzburger Festspiele» de 1999 : cette fois, le Dr. ZAB ne s’est pas contenté d’activer son orchestre à cordes robotique et machinique. Contre toute attente, il a constitué autour de lui une petite équipe de musiciens faits de chair et d’os authentiques !

Comme une surprise n’arrive jamais seule, Miniaturen a été de plus composé à partir d’anciennes pièces que Thierry avait écrites pour ART ZOYD ! Pas moins de 41 pièces miniatures ont donc été réenregistrées et assemblées de manière à engendrer une «suite zoydienne en 3 mouvements».

Chacun de ceux-ci dure environ 20 minutes et se réfère à une sensation : le beau (Schön), le délicat (Zart) et le froid (Kalt). À vrai dire, ce dernier qualificatif définit bien mal les qualités de ce nouvel opus. On se doute en effet que la présence de musiciens procure un indéniable supplément de chaleur et de dynamisme à ce disque, d’autant que certaines parties ont été enregistrées live.

Si ZABOITZEFF assure toujours un bon nombre d’instruments (guitares, basse, violoncelles, voix, programmations et « soundscapes » ), les clarinettes sont tenues par Christian KAPUN, la batterie et les percussions par Peter ANGERER tandis que la voix soprano de Judith LEHNER apporte un judicieux contrepoids à la terrifiante voix de goule du ZAB. Précisons que les musiciens en question ne sont pas de serviles invités-décorateurs ; leurs contributions sont vraiment notables et quelques espaces solistes leur ont même été alloués.

Quant aux différents mouvements de cette suite, ils ne manquent ni de rebondissements ni de soubresauts puisqu’ils sont constitués chacun de dix à quinze miniatures aux climats très variés, ce qui donne une œuvre à caractère épique, comme ART ZOYD a pu effectivement en faire.

Tensions dramatiques affinées, effluves de romantisme noir, émanations médiévalisantes, marches funèbres, révoltes schizophréniques et contemplations ambiguës s’enchaînent sans crier gare et sans laisser le temps à l’auditeur de se laisser dominer par une nonchalance ennuyée.

Les mouvements se suivent en se renvoyant parfois la balle, certaines miniatures étant répétées. Le territoire est également balisé par des bruitages récurrents, tels des cloches d’église, des aboiements, des portes blindées qui claquent, des déclics d’appareils photo et des pâmoisons érotiques. Et puis, il y a ces thèmes qu’on a l’impression d’avoir déjà entendus auparavant… Chez le ZAB ? Chez ART ZOYD ?

En tout cas, la réussite de Miniaturen ne tient pas uniquement au fait d’avoir retrouvé la « lettre » artzoydienne, mais aussi un esprit que même certains ne retrouvaient plus chez ART ZOYD. Ça en dit long sur les perspectives à venir…

Site: www.zaboitzeff.org

Stéphane Fougère

(Chronique originale publiée dans
TRAVERSES n°7 – octobre 2000)

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TRAVERSES (F) devenu RYTHMES CROISES (F)
par Stéphane Fougère, 03/2001 puis 21/10/2016
Chronique de l'album
NEBENSONNEN

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Après quatre albums solo en à peine trois ans, certains ont pu craindre que les capacités créatrices de l'ancienne «tête» d'ART ZOYD ne s'amenuisent et ont pensé avoir fait le tour de son univers soliste. Et là, surprise, Thierry ZABOITZEFF révèle un autre aspect de son paysage instrumental qui tranche radicalement avec son précédent opus, Miniaturen , paru quelques mois auparavant.
Écrit pour le nouveau spectacle de la chorégraphe Editta BRAUN, Nebensonnen («Parhélies»), qui évoque la mémoire des mères, ce nouvel album de ZABOITZEFF aurait pu être présenté comme un recueil de thèmes pour piano solo si certaines pièces n'étaient réhaussées de cordes (violoncelle, violons) ou/et de nappes de claviers, planantes ou orchestrales. Oubliés les voix de goule, les guitares, les bruitages et les rythmes machiniques ! Exorcisées, les visions de vampires, de sorcières et de damnés. Apaisés, les cataclysmes intérieurs qui provoquaient des sueurs froides.
Contre toute attente, Thierry ZABOITZEFF nous invite à errer dans ces territoires imbibés de brumes neigeuses où la flore est pétrifiée et l'horizon, un mirage de glace. Dans ce cadre inspirant la déréliction et invitant à l'introspection, la martialité «zoydienne» n'a cependant pas tout à fait disparu (Räuber und Gendarrm, Härte) et c'est tout naturellement qu'une version remixée de Divertissement , pièce composée pour l'album Génération sans futur , s'intègre à cette Oeuvre traversée tout à la fois de solennité émouvante, de fantaisie purgative et de contemplations meurtries (écoutez Im Berg , entre autres). Un disque pour l'hiver...


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TRAVERSES (F) devenu RYTHMES CROISES (F)
par Stéphane Fougère, 10/2000 puis 21/10/2016
Chronique de l'album
ALICE

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Cinquième opus solo de Thierry Zaboitzeff, Alice est aussi la troisième réalisation de son époque "after-artzoydienne" , caractérisée par une collaboration étroite avec la chorégraphe autrichienne Editta Braun. Au même titre que Heartbeat et India, Alice est une œuvre de commande, mais qui a cette fois servi pour une production française de Stéphane vérité, le spectacle Alice, c’est merveilleux non ?

Merveilleux ? Je ne saurais le dire puisque je n’ai pas vu le spectacle et ce n’est pas son pendant musical qui est de nature à me guider. Sans support visuel, la musique d’Alice capte difficilement l’attention de l’auditeur, ce qui n’était pas forcément le cas des deux précédentes musiques de spectacle de Zaboitzeff. C’est comme si ce dernier avait trop dilué le vin et le sel de ses idées tant l’ensemble apparaît trop sage, à la limite exsangue.

La chanson et la récitation de textes y sont très présents (l’album a pour sous-titre Les Chants d’Alice et du vieux monde) alors que la musique est plutôt statique, froide, traînant parfois en longueur. Sans doute le sujet du spectacle n’a-t-il pas permis à Zaboitzeff de faire valoir et de renouveler les diverses facettes de son langage sonore ou alors de façon trop unilatérale. Toujours est-il que, sur le plan créatif, Alice est en deçà de India et de Heartbeat.


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TRAVERSES (F) devenu RYTHMES CROISES (F)
par Stéphane Fougère, 07/1999 puis 19/10/2016
Chronique de l'album
INDIA
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On avait déjà constaté, sur son album précédent (Heartbeat, chroniqué dans Traverses n° 2), quelques penchants pour le patrimoine folklorique européen. Seulement voilà : à force de virer " toujours plus à l'Est ", Thierry ZABOITZEFF a débarqué sur la péninsule indienne ! Crise mystique ou quête de racines indo-européennes ? Toujours est-il que les compositions de ce nouveau CD servent de support à un spectacle chorégraphique de l'artiste autrichienne Editta BRAUN. Il va falloir vous y habituer : ZABOITZEFF et elle forment désormais une seule âme ! Thierry a tout écrit, assure tous les instruments et fait même entendre son brin de voix. Je ne sais si le spectacle est fondé sur une histoire linéaire, mais rien ne prouve que Thierry ZABOITZEFF en a de toute façon respecté la progression pour son album. Toutefois, celui-ci possède son propre fil conducteur en dépit de son aspect désordonné et foisonnant.

Pour les besoins du sujet, une quantité de samples - autorisés ! - de chants et d'instruments indiens (flûte, bansuri, sitar, tablas, harmonium, tampura...) ont été pratiqués. Mais pour mieux brouiller les pistes, Thierry ZABOITZEFF a aussi emprunté à d'autres contrées asiatiques : vièle er-hu chinoise, cymbales tibétaines, cloches, gongs, etc., surgissent ainsi par instants. (Il me semble même reconnaître un sample de la voix de la chanteuse tibétaine Yungchen LHAMO !) L'Inde que ZABOITZEFF nous fait visiter est loin d'être uniforme et se dessine plutôt au travers de virulents contrastes : méditative dans Shakti & Aphrodite, mystique dans The Bodies of the Goddesses, bigarrée et surpeuplée dans Claustrophobia in Madras, caniculaire dans Heat & Suffocation ; c'est aussi l'Inde lointaine et hostile qui engendre la déréliction du pèlerin égaré (Loneliness, Nostalgia in Bengalore) et bientôt sa colère (Rage & Domination), mais c'est également l'Inde des mutations à l'orée du nouveau millénaire, incarnée par le délirant Holi Trance Final Cut, projection de Goa, qui fait danser techno le sitar, les chants de dévotion et même les vaches sacrées !

Néanmoins les attaches aryennes n'ont pas été complètement coupées puisque quelques touches de folklore européen refont surface par endroits. Austrian Jungle Raga combine ainsi sitar, chant indien féminin, rythme machinique, tablas et chœur d'hommes tyrolien ! Enfin, l'album s'achève sur une berceuse au nom qui ne trompe pas : Schlaf Kindlein Shlaf. Cette fois-ci, il n'y a plus de doutes : Thierry ZABOITZEFF s'est littéralement affranchi des balises structurelles et stylistiques artzoydiennes, au risque de froisser les convaincus autoproclamés de la cause des musiques nouvelles européennes. Mais même avec un titre comme India, cet album ne fait pas mentir quant à sa provenance. Les frontières ne sont plus ce qu'elles étaient, c'est tout !

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TRAVERSES (F) devenu RYTHMES CROISES (F)
par Stéphane Fougère, 07/1998 puis 19/10/2016
Chronique de l'album
HEARTBEAT

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Depuis un an maintenant, Thierry ZABOITZEFF a définitivement quitté ART ZOYD et s’est lancé dans de nouvelles aventures artistiques et musicales en compagnie de la chorégraphe autrichienne Editta BRAUN. Heartbeat est leur premier spectacle en commun et se présente comme un " Concerto for Dance et Music Op. 1 ", en toute humilité...
Ne cherchons pas à éviter les truismes : la musique ressemble à celle d’ART ZOYD. Et on ne voit guère comment il pourrait en être autrement, sauf à penser que Thierry ait abjuré son glorieux passé. Mais à quoi bon, dites-moi ? Cela dit, ceux qui se souviennent de ses deux précédentes productions solistes (Promethée et Dr. Zab & his Robotic Strings Orchestra) risquent de voir s’écarquiller leurs oreilles (ça, c’est de la gymnastique !) à l’écoute de ce concerto, car plusieurs de ses éléments se démarquent de ceux qui constituaient l’univers artzoydien. Aussi, si l’on retrouve dans Heartbeat des climats familiers du groupe légendaire – et même quelques samples déjà utilisés dans Marathonnerre (cf. Introduction et Clear Light) –, d’autres ingrédients attestent de la volonté de ZABOITZEFF de s’émanciper des ambiances glauques un peu trop faciles.
Si la musique classique contemporaine est toujours en ligne de mire, des influences ethniques se manifestent avec plus d’insistance, notamment dans Russia, imprégné de folklore local, et dans certains phrasés rythmiques à base de percussions. Et si PROKOFIEV est salué au passage (Kijé), une visite est également rendue dans le répertoire de Pete TOWNSEND (See me, Feel me, Touch me, Hear me). Précisons en outre que Thierry ZABOITZEFF assure tous les instruments : claviers bien sûr, mais surtout la guitare, un instrument devenu introuvable chez ART ZOYD et qui, dans Heartbeat, est en bonne partie responsable de la diversification de la palette sonore.
Le chant fait également un retour en force : Thierry use toujours de sa voix de goule qui aurait avalé une patate chaude de travers, mais offre à maintes reprises l’occasion de découvrir son organe vocal " au naturel ". Hormis d’autres voix samplées, celle d’Editta BRAUN se fait entendre sur trois titres, dont un en duo avec Thierry, Ever More. Il s’agit d’une chanson écrite par Valentine PETIT (fille de Roland PETIT), avec qui ZABOITZEFF a déjà travaillé me semble-t-il, et qui vante la passion amoureuse cannibale et impie... En somme, c’est un tube en puissance ! Quant au morceau qui donne son titre à l’album et qui y figure en deux versions, il se porte sans doute le plus garant de ce renouvellement puisque l’on y entend des chants féminins rappelant DEAD CAN DANCE et les VOIX BULGARES, tandis que Thierry chante dans un dialecte kobaïen sur fond de rythme dance.
Indéniablement, une respiration nouvelle a encouragé Thierry ZABOITZEFF à livrer des parties de lui-même qui n’avaient pas eu le loisir de s’exhiber jusqu’ici. Si d’aventure des auditeurs non acquis à la cause artzoydienne se surprenaient à apprécier cet album, qu’ils ne s’inquiètent pas : c’est bon signe !




CHROMATIQUE.NET
Thierry Zaboïtzeff - 50 ans de musique(s)
Tags: electro, jazz, Rock in Opposition, rock progressif
Sorti le: 23/09/2022
Chronique par Jean-Philippe Haas

Label: WTPL Music
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Il ne fallait pas moins de trois CD remplis à ras bord pour se faire une idée du travail réalisé par Thierry Zaboïtzeff en un demi-siècle d’aventures musicales ; tout d’abord avec Art Zoyd (dont il fut le codirecteur avec Gérard Hourbette, décédé en 2018) puis dans d’autres formations, et surtout en solo, brassant de multiples genres comme le rock progressif, le jazz, le RIO, la musique électronique, répétitive, dans des domaines aussi variés que le théâtre, la danse, le ciné-concert… pour ne citer que quelques-unes des nombreuses facettes du compositeur multi-instrumentiste.

50 ans de musique(s) n’est pas une simple compilation : de nombreux titres ont été dépoussiérés, réenregistrés (comme ces versions récentes de « Konzobélé » et « Mariée à la nuit », figurant d’abord sur le diptyque Marathonnerre d’Art Zoyd), d’autres sont issus de performances live (par exemple « Unsex Me Here » ou « Baboon’s Blood », originellement sur Berlin, d’Art Zoyd également). Largement instrumentale, la musique de Zaboïtzeff, hormis les cordes (basse, guitare, violoncelle) et le piano, comprend tout un attirail électronique (sampleur, synthétiseur, boîte à rythmes). Elle ne néglige pas pour autant l’apport de la voix : chant torturé sur cet extrait de The Cabinet of Dr. Caligari, vocalises sur « Dr Zab am Wolfgang See » tiré de Sixteenth, langage inventé magma-esque sur « Deil zom an de lay » ou « Sangria » (ce dernier en en hommage au fondateur d’Art Zoyd, Rocco Fernandez), chant lyrique (« Requiem », « Libera me »)…

Cette volonté de sortir des cadres sans perdre l’auditeur au passage aboutit à un art souvent exigeant mais accessible, barré sans être abscons, où des paysages sonores aux climats changeants (comme le récent « Pagan Dances » ou l’impressionnant « Aria Primitiva », tiré de l’album du même nom) côtoient des pièces plus courtes créées autour d’éléments mélodiques simples (« Domagali », « Planet LUVOS act 8 », « Derevo », « Phantasiespiel »…). Les atmosphères induites sont souvent étranges, voire sombres (en particulier sur les compositions de la période Art Zoyd), l’électronique et les boucles viennent appuyer des propriétés hypnotiques (« Confusion », « Luvos vol.2 Epilogue », « Die Maschine »), parfois à la limite de la techno (« Introitus »).

Bien que certaines d’entre elles aient été développées dans un cadre multimédia (en particulier pour accompagner les spectacles de danse d’Editta Braun), les compositions sélectionnées ici se suffisent à elles-mêmes, sans qu’il soit besoin de connaître les tenants et les aboutissants de l’œuvre à laquelle elles sont destinées. Elles happent facilement la curiosité d’un esprit ouvert et fascinent par les ambiances qu’elles créent.

Ceux qui suivent Thierry Zaboïzeff depuis longtemps ne seront peut-être pas les premiers concernés par cette rétrospective. En revanche, celui qui a lâché l’affaire un peu trop tôt, l’amateur de musiques qui évoluent hors des sentiers battus ou simplement le mélomane curieux trouveront largement de quoi satisfaire leur appétit non conventionnel et pourront par la même occasion ajouter un nom à leur liste d’artistes incontournables.

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CHROMATIQUE.NET
par Jean Philippe Haas 23/06/2014
Chronique de l'album
SIXTEENTH

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Thierry Zaboïtzeff fait partie de ces laborantins qui ne se contentent pas de ce qui se fait ou de ce qui existe, et veulent créer un univers musical distinctif. Pendant un quart de siècle, Gérard Hourbette et lui ont tenté dans Art Zoyd de repousser les frontières de leur art en puisant dans le jazz, le rock progressif, les musiques électroniques et contemporaines pour créer des œuvres innovantes, multimédia, sans limites. Volant de ses propres ailes depuis 1997, Zaboïtzeff offre avec Sixteenth sa déjà seizième œuvre en solitaire.

Il n’est guère possible d’apposer un genre défini à la douzaine de titres de l’album, tant ils sont animés chacun d’une vie et d’une pulsation propres. Instrumentaux ou chantés par la soprano Isabelle Farmini, ils naviguent à l’occasion au voisinage de Magma, voire de Klaus Schultze mais c’est à l’univers de leur auteur qu’ils appartiennent le plus souvent. Jamais tout à fait électronique, jamais vraiment acoustique, la musique du multi-instrumentiste penche pourtant plus volontiers vers l’utilisation des machines, et plus particulièrement sur la seconde moitié du disque. De compositions linéaires ou plutôt directes (« Slippery Nights », « Makes Me Sleep », « Deil zom an delay ») en plages plus complexes, ou dédiées davantage aux atmosphères (« Kordz et les anges gardiens », « Mariée à la nuit », reprise electro-symphonique d’un titre d’Art Zoyd ou encore « Free At Last », qui met en scène Martin Luther King et son fameux discours), on trouve largement son bonheur, qu’on ait des affinités avec la musique électronique ou le RIO.

Quoi qu’il en soit, Zaboïtzeff évite toujours l’écueil des sonorités discutables et ne remplace pour ainsi dire jamais un instrument par son imitation synthétique, hormis dans les moments orchestraux. Cela fait de Sixteenth une œuvre moderne qui s’inscrit dans la durée. Plus accessible que son Planet Luvos qui ne peut se passer du support visuel et théâtral pour lequel il a été créé, ce disque n’en est pas moins ambitieux, et démontre que son auteur ne se repose pas sur ses nombreux lauriers.

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CHROMATIQUE.NET
par Jean Philippe Haas, 19/11/2014
Chronique de l'album et du DVD
THE CABINET OF DR. CALIGARI

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Dans la grande tradition d’Art Zoyd dont il fut membre, Thierry Zaboïtzeff s’attaque à une nouvelle bande originale, celle du chef d’œuvre muet de l’Allemand Robert Wiene, Das Cabinet des Dr. Caligari, sorti en 1919. Créée en 2010 à Berlin, la musique sort aujourd’hui sous forme d’un DVD contenant notamment – et c’est appréciable – le film qu’elle illustre. Celui-ci baigne dans un climat gothique où le mystère et le fantastique alimentent une mise en scène totalement expressionniste. Cette sortie est donc une occasion toute trouvée de (re)voir les décors extraordinaires et l‘ambiance surréaliste de cet incontournable classique du cinéma d’entre-deux guerres, agrémenté d’une musique électro-acoustique qui colle au plus près des images et des atmosphères. Thierry Zaboïtzeff reste ici fidèle à l’hybridation instrumentale dont il a le secret. L’électronique et l’électrique cohabitent avec l’acoustique, se mêlent en une symbiose entre le vivant et la machine. Notre homme-orchestre accompli suit minutieusement la trame narrative et retranscrit au mieux les délires visuels de Wiene et les ambiances anxiogènes qui enveloppent tout le film, jusqu’au retournement final qui dévoile la vraie nature des protagonistes. Cette histoire de meurtres, de somnambule prescient où le surnaturel est omniprésent, trouve en séquences rythmées quasi-militaires et plages ambient oppressantes, unies par des thèmes récurrents, sa bande originale idéale, ultime, telle qu’elle n’aurait pu être écrite à l’époque.

Outre le film et son illustration sonore, le DVD contient la performance live d’un ciné-concert enregistré au théâtre Toursky à Marseille le 15 janvier 2013, qui voit le musicien interpréter sa création en direct pendant la projection. Une belle façon de constater que cette musique n’est pas une chose de laboratoire destinée à demeurer sur un support virtuel, mais qu’elle a pour vocation de venir toucher directement le public dans une interaction multimédia. Qu’on soit séduit par l’approche innovante du musicien ou qu’on soit un cinéphile admiratif de la virtuosité de Wiene – ou les deux – ce DVD est un objet indispensable pour qui considère que les Arts ne doivent pas rester cloisonnés et que les œuvres peuvent prendre une nouvelle dimension grâce aux passerelles jetées entre elles par des artistes comme Thierry Zaboïtzeff.

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CHROMATIQUE.NET
par Jean Philippe Haas, 28/07/2016
Chronique de l'album
MULTIPLE DISTORTIONS

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Vu d’ici, Thierry Zaboïtzeff ne s’arrête jamais de composer ou de jouer. Depuis 2014 et The Cabinet of Dr. Caligari, on l’a retrouvé à la réalisation de musique pour des spectacles de la compagnie de danse d’Editta Braun, ainsi qu’avec un conséquent single intitulé Aria Primitiva. On l’a vu aussi sur scène en ciné-concert, ou avec ses anciens acolytes d’Art Zoyd pour le projet 44 ans ½, célébration anniversaire qui eut lieu le 19 septembre 2015 à Carmaux au festival RIO. Au milieu de ces activités, l’artiste a tout de même pris le temps de mettre un peu d’ordre dans ses archives et sortir ce Multiple Distortions.

La plupart des quinze titres ici présentés appartiennent au domaine de la musique électronique, dans le sens large du terme, mais notre homme parvient toujours à garder un équilibre entre l’utilisation de « vrais » instruments et le recours au sampling et à la programmation. Créations originales, versions alternatives d’anciens titres, le multi-intrumentiste balaie assez largement son champ de composition. Comme il l’a démontré à maintes reprises sur ses illustrations sonores de classiques du cinéma muet, seul ou avec ses ex-comparses, il sait créer des ambiances uniques, pigmentées de petits motifs entêtants (« Confusion », « Le lac des signes v.3 », dont la première version figure sur Marathonnerre II d’Art Zoyd). Souvent rythmées, quasi dansantes parfois (« Vorschrift »), certaines plages ont aussi une dimension cinématographique (« Sign 2 », « Confusion ») ou du moins des aspects ambient assez prononcés, pendant que d’autres suivent une ligne mélodique plus définie. Zaboïtzeff crée des boucles répétitives, changeantes ou minimalistes, y mêlant ses instruments de prédilection comme la basse (« Lose-extended version for electric bass guitars quintet ») ou la guitare (la série des « Overdrive »).

Il y a à boire et à manger, comme on dit, dans ces archives qui proposent une grande variété d’atmosphères et d’utilisations de l’électronique. Multiple Distortions est un bon moyen d’entrer dans la musique actuelle de Thierry Zaboïtzeff, pour ne plus en sortir ensuite.

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CHROMATIQUE.NET
par Jean Philippe Haas, 09/01/2007
Chronique de l'album
PROMETHEE

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Composé, enregistré et mixé en 1984 par Thierry Zaboïtzeff lui-même, Prométhée est son premier album solo alors qu’il est en même temps le bassiste et co-fondateur de la formation Art Zoyd.Prométhée est la musique de la pièce « Aeschilus Prometheus« » montée par « Le Collectif du Hainaut ». Au cœur et probablement à la tête du mouvement « musique nouvelle », Zaboïtzeff se plonge dans la création d’une œuvre personnelle, angoissante et terriblement étrange.

Développée en deux parties et divisée en quatorze plages, Prométhée est une œuvre relativement courte. Trente-huit minutes d’une musique à la croisée du rock et de la musique électronique. Zaboïtzeff s’adonne à tous les instruments entendus, mis à part les saxophones et les voix féminines.
Extrêmement expressive et sombre, la musique de Prométhée est avant tout une musique d’accompagnement pour un spectacle. Elle se veut donc d’ambiance et relativement simple dans ses structures. Les superpositions de rythmes et de couleurs harmoniques suffisent à maintenir un climat d’angoisse, tant les répétitions de cycles créent un terrain propice à ce genre de développements. Les sons de synthétiseurs, même si ils paraissent datés à ce jour, prévalent sur l’ensemble des compositions. L’électronique, alliée principalement à la basse et aux synthés, est le fondement de ce disque.
Prométhée contient les bases de certains morceaux contenus dans les albums d’Art Zoyd Le mariage entre du ciel et de l’enfer (1985) et Marathonerre (1992). On y retrouve aussi les sonorités propres aux groupes de RIO Univers Zero et Present, même si les éléments complexes ne sont pas de mise ici.

N’ayant jamais été publié à ce jour en disque compact, une version remasterisée plus de vingt ans après sa sortie en vinyle apparaît comme une très bonne initiative. La redécouverte, ou tout simplement la découverte de cet album pour certains ne peut être qu’une expérience déroutante et unique.




LA VOIX DU NORD DIMANCHE 27 AOÛT 2023
Pour Zaboitzeff, 50 ans de musique,
et toute une vie après Art Zoyd


En 2017, coup de cymbale. Le New York Times avait classé « 44 et demi », du groupe nordiste Art Zoyd, parmi les coffrets du
siècle entre Bowie et Zappa. Six ans après, le Sambrien Thierry Zaboitzeff, l’autre compositeur d’Art Zoyd avec Gérard
Hourbette, a sorti son propre coffret, sur un demi-siècle de création. On attend la critique new-yorkaise.

PAR THÉO TERSCHLUSEN
tterschlusen@lavoixdunord.fr

LE CITOYEN DE SALZBOURG

Là, Thierry Zaboitzeff souffle un peu. 70 printemps, pas de tournée prévue, devant lui une page blanche, dans son studio. Quel son ça fait, si sur sa contrebasse l'archet glisse sur un linge mouillé ? Il vit maintenant en Autriche, à Salzbourg. La ville de Mozart. Pas le moindre soupçon, chez lui, de rivalité avec le divin Amadeus. Mais la certitude d'avoir bien fait de s'accrocher à sa guitare. Privilège rare, Zaboitzeff a publié fin 2022 un joli coffret de trois disques sur ses 50ans de musique (lire ci-contre). Collector. Le morceau le plus vieux remonte à la préhistoire: 1971. Sangria est comme
son nom l'indique une élucubration rock et déjantée. C'est aussi la première étincelle de la fusée Art Zoyd, groupe nordiste jamais entré au Top 50 mais autour duquel des chapelles de fans brûlent des bougies jusqu'au sein de la faculté de musicologie de Tokyo.

L'ENFANT DE SOUS-LE-BOIS
Mythique : le groupe, créé par un Valenciennois, Rocco Fernandez (en 1969, année exotique), a pris son envol, vraiment, à Maubeuge. Thierry Zaboitzeff est né à Sous-le-Bois, cœur ouvrier de cette Sambre où les cours d'usine, dans les années 1950, occupent toute la vallée. Il s'en souvient : « Gamin, tout le monde autour de moi avait quelqu'un qui travaillait à l'usine. »
Pas lui, qui gratte sa guitare et écoute de la pop rock. En s'y sentant déjà à l'étroit. Il lorgne sur Franck Zappa, guitariste alchimiste, et Magma, les Français
précurseurs du rock progressif. La suite fait penser à la rencontre de Lennon et Mac Cartney, sur les docks de Liverpool. Au tournant des années 1970, le directeur du foyer des jeunes travailleurs Sangha met «Zab» en cheville avec un autre gamin : Gérard Hourbette. Thierry est autodidacte, Gérard a fait le conservatoire et préfère le violon.

Thierry Zaboïtzeff a une philosophie : inventer, ne jamais s'ennuyer, ne jamais se retourner. Ce qui ne l'empêche pas d'offrir à ses fans ce coffret qui recèle une cinquantaine de pièces, cailloux blancs amassés le long d'une carrière. Le plus vieux date de. 1971, alors que le rock progressif allait prendre son envol.

LA MÈCHE ET LA COMÈTE
Qui a allumé la mèche ? Les deux, mon général. Ils ont le même appétit pour les sons nouveaux. Ils décident d'abord de ce dont ils ne veulent à aucun prix. En gros, le show-biz: «Nous étions orgueilleux et inconscients. » Ils rejoignent Art Zoyd et embarquent pour la première partie de la tournée de Magma (tiens..).

La suite sera du même tonneau : inventer, ne jamais tomber tout cuit dans un bac de disquaire dûment étiqueté. Inclassables, cela leur réussit pas mal.

Art Zoyd, dans les années 1980, déboule à la télé chez Drucker un dimanche, avec le corps de ballet de Roland Petit. Remplit le stade de Barcelone pour les JO de 1992 avec les artificiers du groupe F. Tournera jusqu'en Australie en passant par le Royal Albert Hall de Londres avec ses cinés-concerts dédiés au cinéma muet, dont le très fameux Nosferatu de Murnau.

UN PREMIER COFFRET MYTHIQUE
Gérard Hourbette est mort en 2018. Fin 2017, un supplément de Noël du New York Times a classé l'anthologie 44 et demi d'Art Zoyd comme l'un des coffrets du siècle, entre Bowie, Zappa (retiens) et Thelonious Monk.
Hourbette et Zaboitzeff se sont séparés au tournant du siècle : plus la même vision musicale.
Hourbette a gardé la maison, et les studios liés, à Valenciennes. «Zab » a poursuivi son chemin à lui. Sur les quelque 50 pièces de son coffret, seuls sept sont estampillés Art Zoyd. « Je ne me suis jamais retourné. »

QUELQUE 50 PIÈCES, AUTANT DE CLIMATS
Expérimentale, cette musique ? Ce serait déjà l'emprisonner. Nombreuses sont les pièces du coffret, rangées de façon aléatoire, qui ont l'écriture classique, voire la légèreté du jazz, façon Avishaï Cohen, le contrebassiste israélien. Ainsi Domagali, écrite en 2017, bande-son pour un doc belge sur les femmes toubous du désert.
Plus tourné vers la mélodie qu'Hourbette, Zaboitzeff ? « Nous étions surtout parfaitement complémentaires. » Dans l'invention aussi, la volonté de changer de style et d'instrumentation. Violoncelle électrique, claviers, sax tenor, voix, dont la sienne propre, qu'il a trouvée dans l'ultra-grave.. « J'essaie de nouveaux climats, en fait je n'aime pas m'ennuyer. » Épreuves d'acier, écrit dans les années 1990, tend certes vers le rock industriel, lui qui a été écrit pour illustrer musicalement une expo de photos sur une forge lorraine. Mais dans son coffret, Zaboitzeff a aussi glissé plusieurs pièces écrites pour la chorégraphe Edita Braun, qui ont la fluidité qui sied au ballet. Collaboration fructueuse : l'Autrichienne est devenue l'épouse du musicien il y a deux ans.

Retrouvez l'article original

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LA VOIX DU NORD (F)
19/04/2018
Thierry Zaboitzeff, l’ex Art Zoyd, en concert à Soignies

En tous les cas, ils sont rares à pouvoir se prévaloir d’être considéré par le New York Times comme l’un des groupes phares du siècle. Pas mal indifférent à cette reconnaissance tardive, que devient Thierry Zaboitzeff, l’autre cheville ouvrière, avec Gérard Hourbette, d’Art Zoyd ? Il travaille… beaucoup. Après avoir participé au concert anniversaire de44 ans et demi, passé par le Phénix, il est revenu à son propre parcours, et à son tout nouveau spectacle, Sleep no more, avec sa formation Aria Primitiva. L’autre jour, à la maison Folie de Lomme, il en présentait une version de travail, élaborée sur la métropole, peaufinée ensuite à Strasbourg. Pour une musique restée aussi inclassable qu’elle l’a toujours été. Post-rock, symphonique, tribale ? Qu’importe puisqu’on y a retrouvé la voix de Zaboitzeff, remontée d’on ne sait où autour des claviers de Nadia Ratsimandresy et Cécile Thévenot, toutes deux vues avec Art Zoyd aussi. Ils seront samedi 21 au festival de Soignies (B), à 16 h. Pour l’instant la seule date dans la région, même si le spectacle a déjà intégré Salzbourg et Vienne dans son calendrier. Ne les ratez pas.

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LA VOIX DU NORD (F)
Chronique du concert
MISSA FURIOSA
Théâtre du Manège de Maubeuge (F)
par OI. D. 23/10/2002


Thierry Zaboïtzeff au Manège après cinq ans d'absence : un retour largement acclamé par le public maubeugeois.
Zaboïtzeff, aux antipodes d'Art Zoyd.
Cinq ans. Cinq ans que le public sambrien n'avait pas eu la chance de voir Thierry Zaboïtzeff, l’un des co-fondateurs d'Art Zoyd, sur une scène de Maubeuge.
Installé depuis 1997 en Autriche, où il poursuit une carrière solo, le Maubeugeois était de retour mardi soir au Manège, pour présenter sa dernière création, Missa Furiosa. Rien de comparable, ici, avec la démarche poursuivie aujourd'hui par son ancien compère Gérard Hourbette, d'ailleurs présent dans le public aux côtés d'un ancien batteur d'Art Zoyd, Daniel Denis
(Univers Zéro). La musique de Zaboïtzeff, elle, part dans tous les sens : au son, religieux, d'un orgue d'église, soutenu par des chœurs largement inspirés par Magma, succèdent soudain des riffs funky, jazzy et rock. voire même techno.
Le public est surpris. Agréablement. En témoigne la standing ovation réservée à Zaboïtzeff et à ses cinq musiciens (quatre
Autrichiens et un violoniste-vocaliste allemand) sitôt jouée la dernière note de l'œuvre.
Aujourd'hui, musicalement parlant, Zaboïtzeff a semble-t-il définitivement tourné la page Art Zoyd. Question : collaborera-il de nouveau avec Gérard Hourbette ? Peu probable. Ensemble, les deux hommes auraient pourtant encore pas mal de choses à (se) dire...

OI. D.

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LA VOIX DU NORD (F)
Il voyage au centre de la musique
Par Laurent  Decotte 01/2006


Thierry Zaboitzeff, cofondateur d'Art Zoyd, a grandi à Maubeuge et vit en Autriche. Il a composé la musique du spectacle anniversaire de la mort de Jules Verne, au Stade de France.

TROIS représentations, 100 000 personnes au Stade de France. C'était le spectacle événement de la fin d'année
2005 dans l'Hexagone : l'adaptation sur scène du chef-d'œuvre Voyage au centre de Ja terre, imaginée à l'occasion du centième anniversaire de la mort de son illustre auteur, Jules Verne. Toute la partition musicale a été composée par un Maubeugeois de 52. ans : Thierry Zaboïtzeff.

Né à Sous-le-Bois, il a grandi allée Verte. Première sensibilisation à la musique au collège de l’Épinette. Au départ, il écoute ce qu'il en-
tend. Puis il s'est décidé à pencher l'oreille un peu plus. Son univers n'était pas Salut les Copains mais Pink Floyd pour commencer,
puis Jimmy Hendrickx, Captain Beefheart, Franck Zappa. Plus tard, il découvrira le jazz, puis la musique
classique. Beaucoup de musique classique : les contemporains mais aussi Bach et Mozart. Clin d'œil d'Apollon, aussi Dieu de la musique. Thierry Zäboïtzeff vit depuis 1996 dans la ville de naissance du prodigieux Amadeus : à Salzbourg, au pied des montagnes.

Art Zoyd, c’est fini.
C'est à cette date qu'il a quitté l'aventure Art Zoyd, odyssée musicale qu'il a lancée en 1971 avec Gérard Hourbette. D'ailleurs, à ce
sujet, il ne fait pas dans la politesse mal placée : « Au
début, ça n'a franchement pas été simple. Avec la musique que l'on faisait, on passait pour des extraterrestres. Heureusement, on a été reconnu à l'extérieur.
Ce qui a fait dire à Maubeuge qu'il faudrait peut-être faire quelque
chose pour nous. » Il ne renie pas cette aventure. Mais avait envie de s’en détacher. « On était devenu un grand parti, avec une ligne.
Et moi je voulais faire le pas de travers. » Il ne tient d'ailleurs pas à ce qu'on lui dise qu'il est l’ancien d'Art Zoyd. « C’est normal, je l'ai
fait. Mais je veux me décoller cette étiquette musique contemporaine. » Autant dire qu'il est peu probable qu'il réintégre le groupe :
« On ne sait ce que la vie nous réserve, mais je ne pense pas. » Et de poursuivre, au sujet de Maubeuge : « Une vie d'artistes est faite
d'embûches et d'avancées. Redescendre à Maubeuge serait revenir à mes débuts, le lieu de mes premières galères. »

Depuis qu'il a quitté Art Zoyd, le néo-Autrichien a multiplié les expériences. Des compositions solos, dont Missa furiosa, une messe chantée en latin qu'il
a joué à Maubeuge en 2002. Il a proposé un spectacle à l'occasion du classement de Salzbourg au patrimoine mondial de l'Unesco et a
créé des musiques pour la danse, le théâtre ou le cinéma. En l'occurrence « un téléfilm pour la télé autrichienne, "Africa Representa', que nous négocions
aussi pour Arte. C'est une musique à base de rap. Et nous sommes allés enregistrer des voix en Tanzanie.
Une superbe expérience. »

La musique des JO ?
Et pourtant, «rien ne laissait présager que je devienne compositeur. » Il n'a pas fait le conservatoire, ses parents ne sont même
pas musiciens. Seule explication, une première guitare qu'il triture, et très vite une passion qui l’habite.
« Je me suis mis à la basse, puis au violoncelle sur un coup de tête. J'avais envie d'en mettre dans un de mes spectacles alors j'en ai acheté un et j'ai appris les bases. » Si bien qu'il a pour projet de monter une pièce pour violoncelle. Se faire rencontrer le rock, le classique ou la musique contemporaine est son credo. Il aimerait composer une œuvre pour guitare. Aurait tellement aimé écrire pour Miles Davis. Et finalement a séduit le grand public : avoir été
choisi pour le stade de France le place à un autre niveau. Devoir séduire le plus grand nombre, tout en restant exigeant, l'enchante. Il a été courtisé par tous les médias, ce qui ne l'impressionne pas. Il est entré dans le cercle de ceux qui pourraient par exemple composer la prochaine musique
des Jeux Olympiques. « On en parle, mais il y a de la concurrence, beaucoup de concurrence. »…

Thierry Zaboitzeff est compositeur multi-instrumentiste. Sa récente consécration au stade de France, pourrait lui ouvrir des portes encore plus grandes.

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LA VOIX DU NORD (F)
à propos du spectacle et de la sortie l'album
DR ZAB. & HIS ROBOTIC STRINGS ORCHESTRA
Par Pierre Henry 04/1992


La nouvelle potion musique du docteur Zab.

Thierry Zaboitzeff a beau se cacher derrière son nom, on le retrouve toujours. Zaboitzeff, un patronyme devenu la terreur du clavier de machine à écrire. Entre nous, il ne faut quand même pas perdre de
vue que l’homme est étymologiquement le produit d'un « écraseur de phoques ». D'ailleurs, son grand père fut jadis bûcheron de l'autre côté du
rideau de fer.
A Moscou, lors du final de « Nosferatu », je le revois en train de faire littéralement craquer un public éperdu de modernité, tirant de ses fournaises vocales personnelles un « No more » qui n'a pas fini de résonner. Basta cependant des origines quand on est plutôt Lenon que Lenine. Etrange et sauvage, quand même une telle voix de lion pour un violoncelliste.
Il n'empêche, avec ses allures de routard, ses blousons de cuir éternels, et son mutisme d'’ex-adolescent reconverti en adulte Kerouaké, Thierry Zaboitzeff est l'atypique du succès. Mais de modestie en modestie, on finit par mériter le chapeau. (1)
On a coutume de dire que Thierry est le plus physique du groupe. Sur l'estrade, il ne tient jamais en place et sa musique passe en lui comme s'il s'était coincé les doigts dans une prise. Or, voilà-ti-pas qu'il vient de se faire passer pour le docteur Zab. Je dis bien, docteur Zab. C'est écrit sur la pochette de son dernier C.D. : « D' Zab and his robotic strings orchestra ». Et par un tour de substitution propre à l'esprit d'artiste l'illustration de couverture représente trois commensaux complètement givrés tirant des coups de pistolet autour d'une table. Pas triste.
Mais comme un miracle n'arrive jamais seul, on reconnait aussi les zouaves comme étant les trois acteurs de « Marche funèbre pour un chat », créée d'après une nouvelle de Gombrowicz le 19 mars 1991 à Jeumont. Le nom des acteurs était aussi simple que celui du docteur Zab.
Voyez plutôt : Van Dijck, Turbiasz, et Dehollander.
Le nouveau CD de Thierry Zaboitzeff est une compilation d'une vingtaine de pièces musicales d'inégale longueur. On y reconnait comme étant de
son style à la fois une énergie féroce, une sorte de goût tribal pour le choc et l'incantation, une forme de volupté de l'étrange, une euphorie naturelle,
et l'équilibre d'un constructeur de labyrinthes.
Il y a de tout dans ce coffret et l'on est bien obligé de s'en approcher par des images. Rivages, portes de fer, rugissements, voyages, envols. Et même, et même, pour terminer un bel exercice d'hésitation.
Voici donc un vivier sonore empli à ras bords d'inspiration et de lanscinance. On aimerait y puiser. Ca va se faire. Du 9 au 18 avril, la musique du docteur
Zab sera accueillie à l'Espace Pier Paolo Pasolini de Valenciennes pour un spectacle inédit.

Pierre Henry

(1) On notera que Thierry Zaboitzeff a réalisé en 1984 l'album prométhée e en 1990 un disque laser contenant neuf mélodies destinées à Valentine Petit (La fille de  Roland Petit Zizi Jeanmaire) pour un spectacle "Etreintes".



ELECTRO CHOC (F)
par Thierry Moreau, 02/01/2007

Ex co-leader du groupe Art Zoyd, Thierry Zaboitzeff poursuit son parcours sans Art Zoyd.
Thierry apportait le côté lyrique et rock que le groupe a désormais perdu...
Missa Furiosa est bien plus convainquant que le Art Zoyd actuel tant il a su faire une synthèse entre le passé et les innovations de courants plus ancrés de notre contemporanité sonore.
Alchimie savante et intuitive entre électro, rock et chant lyrique ou gutural en latin, relents "zeuhl" et gothiques ou cold wave...
Ce disque sombre est teinté d'humour, son écoute est à lire au second degré, ni voyez pas de quelconques blasphèmes parce qu'on y décèle des incursions de chants religieux...
Cet opéra techno- lyrico-rock-contemporain est bien plus vivifiant que les groupes gothiques qui alignent clichés sur clichés... Un must!!! 




KOID9 (F) 2023 N° 122 CHRONIQUES
Thierry Zaboitzeff
50 ans de musique (s)

(Monstre Sonore - WTPL Music / dist. PIAS)
par Renaud Oualid
Site Web

Compositeur et multi-instrumentiste, l'une des têtes du groupe Art Zoyd de 1971 à 1997, Thierry Zaboitzeff écrit aujourd'hui pour la danse, le théâtre, des évènements multimédia, le film ainsi que pour ses propres projets et performances. L'an dernier, Thierry a fêté, ici et ailleurs, sur les réseaux sociaux, ses cinquante années de musique... Photos, vidéos, textes, anecdotes, historique... Un album rétrospective logiquement titré 50 ans de musique(s) et retraçant les meilleurs moments de sa carrière est sorti en septembre dernier ; cela ne signifie pas qu'il compte s'arrêter là, mais un demi siècle, ça se fête, non ?

Magnifiquement présenté dans un digipack dépliant 8 volets (à l'artwork signé Thierry Moreau), assorti d'un livret présentant chaque titre (note de pochettes de Denis Desassis), les 3 CDs de cette rétrospective (qui refusent le tracklisting chronologique pour des raisons de fluidité) sont tout bonnement indispensables à qui s'intéresse à la riche carrière de ce fabuleux musicien (de près de 70 ans), dont nous vous avons parlé à plusieurs reprises.

Avec 43 titres (certains morceaux ont été remasterisés, d'autres ont été modifiés et ré-enregistrés), pour une durée maousse de 218 mn (soit près de 3h30), les genres embrassés par l'artiste éclectique sont nombreux, citons notamment pour mémoire l'électro rock symphonique, l'ambient, le classique contemporain, l'alternatif, le chant liturgique, le post rock ou encore la musique de film/théâtre/ballet, les musiques nouvelles, évidemment le rock in opposition... et même le progressif ! (liste non exhaustive tant le musicien a diversifié ses musiques).

Les trois disques (pleins comme un œuf, plus de 70mn chacun) sont constitués de morceaux de sa longue carrière, la plupart étant issus de la presque vingtaine d'albums qu'il a sorti après 1997, avec également des versions live qui ne sont disponibles nulle part ailleurs, mais aussi des morceaux de ses deux albums solo sortis alors qu'il était encore membre d'Art Zoyd, plusieurs morceaux classiques de ce groupe, une poignée de morceaux de Zaboitzeff & Crew, quelques superbes titres d'Aria Primitiva (dont je vous ai déjà dit le plus grand bien dans ces pages), et même la version personnelle de l'artiste du premier single d'Art Zoyd de 1971 "Sangria”, en hommage au fondateur du groupe, Rocco Fernandez.

Un fabuleux voyage que vous ne regretterez pas de faire avec l'artiste et les très nombreux et différents musiciens avec qui il a collaboré depuis ces 50 ans ! Joyeux anniversaire TZ !

https://thierryzaboitzeff.bandcamp.com

Renaud Oualid 

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KOID9 (F)
par Renaud Walid n°108 05-2019
Chronique 
ARIA PRIMITIVA - SLEEP NO MORE (CD)
ARIA PRIMITIVA - WORK IN PROGRESS (EP)

(Booster / WTPL Music / Monstre Sonore /
Inouïe Distribution)

Et voici le nouveau projet de Thierry Zaboitzeff, l'une des deux têtes du groupe Art Zoyd de 1971 à 1997. Entre 1997 et 2017 Thierry a produit 18 albums entre rock symphonique, musique électronique et acoustique.
Composé de Nadia Ratsimandresy, ondes martenot, claviers,samplers, Cécile Thévenot, claviers,
samplers et Thierry, composition, guitare basse, violoncelle électrique, voix, samplers,
Aria Primitiva, le « trio improbable », comme l'indique l'artiste lui-même, est magique, à plus d'un point. Le groupe a été en résidence à la Maison Folie Beaulieu de Lomme puis en concerts durant l'année 2018 (festivals les intemporelles, Soignies et les Tritonales, le Triton - Les Lilas, concerts ARGEkultur, Salzburg et Porgy & bess, Wien).

JC Alluin annonce d'emblée la couleur sur le CD : « Carrefour imaginaire a la croisée d'itinéraires personnels denses et exigeants, Aria Primitiva agrège les courants, les références, se créant un vocabulaire unique en transposant l'auditeur dans une succession de dédales imagés aux détours parfois abrupts, savamment agencés, car, ici, la quiétude n'est jamais de mise trop longtemps... Post Rock ? Symphonique ? Tribal ? Contemporain ? Européen ? Ambient ?"

Commençons par le commencement en expliquant comment s'est faite cette rencontre, Thierry a rencontré Nadia et Cécile pour l’un des derniers concerts anniversaire d'Art Zoyd au Phénix de
Valenciennes en décembre 2016, auquel il participait en tant que compositeur et membre historique. Cet événement, très intense musicalement et affectivement, a su faire coincider leurs univers singulièrement divers. Il a reconnu en elles cette même curiosité artistique, ce langage commun qui s’affranchit des mots, une énergie primitive, qui sait ? Il est des instants de l'existence qu'il faut savoir entendre, celui-ci en fut un et ils se sont proposés de le faire sonner. Le trio s’est formé sur cet accord presque parfait entre eux, pourtant improbable, il s’est imposé
comme une évidence.

Le trio offre des sons nouveaux, une sensibilité particulière, un choc de cultures bouillonnant dans le creuset du magma humain. L'idée de mêler des sonorités impalpables aux rythmes tribaux, de frotter sa voix et celle du violoncelle à l’évanescence inquiétante des ondes Martenot de Nadia et
aux samplers hypnotiques de Cécile, réveillait en Thierry l'enthousiasme d'un aventurier.
Ils veulent être sauvages, bruyants, orchestraux, dépouillés, intimistes, rigoureux, improvisateurs libres aussi parfois, utilisant tous les moyens techniques à leur disposition comme le sampling et looping en temps réel.
Sleep no more |! Le trio adresse cette injonction à l'auditeur qui se hasarde dans ces compositions sensibles et âpres. Pincée, percussive, immatérielle, allusive, vocalique
la musique impose sa loi. Une combinaison qui donne naissance à ce qui, en nous, résonne le plus fort, l'écho primitif, le son originel.

Pourquoi chercher si profond les basses régulières et leur faire correspondre des harmoniques fugaces ? Pourquoi creuser au plus loin les résonnances du corps humain ?
Simplement pour révéler : « Ne t’endors pas, je ne sais pas tout ».
Le paradoxe d’Aria Primitiva est en mouvement.

Work in Progress sort en 2018, c'est un EP 3 titres au format digipack, qui offre une
musique un peu différente car toutes les parties instrumentales définitives n'étaient
pas encore enregistrées ni mixées. ll s'agissait là d'un travail déjà bien avancé mais incomplet. Cet EP faisait office de carte de visite. On y trouve “"Maïiïdaykali" (5:56),
"Aria Primitiva" (14:49) et "Sleep No More » (3:42).

On retrouve donc ces trois titres en versions définitives (plus ou moins différents également en temps) dans l'album complet Sleep No More qui sort fin 2018 et représente l'album que le trio voulait sortir. Sur 53’35 et 9 titres, le trio développe un certain atypisme non conventionnel. Par son approche souvent Zeuhl ("Sleep No More” ou "Maïidaykali"), on jurerait souvent écouter les éructations vocales de Christian Vander dans Magma ! Mais la musique ne saurait se résumer à une copie servile, füt-ce t'elle d'un maître (on y trouve aussi du King Crimson, par exemple,sur "Nixen" (5:10), qui commence en duo piano et - ce que l’on croirait être une guitare- Frippienne — sauf qu'il n'y a PAS de guitare !). Elle est bien plus originale que cela : on y retrouve cette obsession du son (saluons le mastering absolument magnifique), des ambiances tour à tour
sombres ou magiques, cette urgence absolue, ces chants hallucinés, ces sons étranges (vinyles qui grattent, corbeaux !), ces percussions primitives... La pièce maitresse du disque est constituée des 13’57 du morceau titre : un festival de tout ce qui fait la saveur de la formation : oreilles non
averties s'abstenir, musique très exigeante ! Je note avec plaisir l'humour toujours présent
de l'artiste avec le titre "Mais ouvrez donc cette porte !”" (rempli de grincements d'huis
divers, évidemment !).

Deux courts titres ("HystamackK" (3:46) et « Kletka” (3:33)) ont été enregistrés live à Salzburg en
novembre 2018 et sont des improvisations collectives très ambiantes. "Helden" (5:26)
est en fait la reprise du fameux titre « Heroes" de Brian Eno et David Bowie dans sa version allemande, comme la chantait Andrea Schroeder ou Apocalyptica.

Signalons pour finir le joli design des digipacks signé Thierry Moreau. Existe au
format digipack et LP (dans une version plus courte avec 5 morceaux dans un ordre
différent (face À et face B obligent...) et sur toutes les plateformes numériques (iTunes-
Amazon-Spotify-deezer-YouTube Music et
j'en passe !) www.zaboitzeff.org

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KOID9 (F)
par Renaud Oualid

Magazine Rock&Progressif
Chronique de l'album
MULTIPLE DISTORTIONS

Le nom de Thierry Zaboitzeff revient assez régulièrement dans Koid‘9, il faut dire que le bonhomme n‘en est pas à sa première œuvre musicale ! J'avais notamment chroniqué trois de ses albums solo dans le n° 88, Sequences (2009), Planet Luvos et Sixteenth (2012) ainsi que dans le n° 90 son DVD du célèbre film muet Le Cabinet Du Dr. Caligari (2014), revisité musicalement de très belle manière.

19ème album solo de l’ex—musicien d‘Art Zoyd, ce Multiple Distortions (sous titré Archives 2005—2016) s'écoute vraiment comme un album et non une compilation de chutes diverses. Toutes ces pièces ont un point commun : l'électrification et l'édition séquencée à outrance, la saturation, la dynamique, la distorsion sensorielle. Terriblement éclectique, donc forcément savoureux (on ne s'ennuie pas) mais un peu dangereux (on ne peut tout aimer), ce disque comporte des compositions inédites mais également une version 3 du "Lac des Signes"(sans fôte d'orthographe !) et quatre morceaux d’un projet mort—né : “Overdrive”. Le bonhomme est un multi-instrumentiste chevronné, jugez-en plutôt, il tient ici basse, guitare et violoncelle électriques, guitare acoustique, claviers, percussions, échantillonnages, électronique et programmations ! Les titres les plus rock auront ma préférence, tels "Pourquoi tant d'agitation ?“ (et son ouverture littéralement bordélique !) ou les 4 "mouvements" de “Overdrive”, où la guitare est souvent éminemment Frlppienne (écoutez donc "Overdrive 3" (3:35), qui semble sorti d’un disque inédit de... King Crimson !).

On retrouve d‘autres ambiances sur ce disque, programmations électro et boucles mêlées à des instruments électriques plus traditionnels ("Die Maschine", "Wings"), musique du monde déjantée (“Vorschrift”), quintet de guitares basses (“Lose—extended for Electric Bass Quintet", 8:40 à faire écouter à tous les bassistes d‘urgence !), ou des trucs totalement déments et rigoureusement indescriptibles ("Maniphands", "Sign 2", "Continents",...).

Appelez-ça du rock avant—gardiste, de la musique contemporaine, de l'électronique, voire même pour les plus fous d'entre vous du... progressif (!!!) mais donnez sa chance au Dr. Zab, un extrêmement talentueux musicien qui sort des sentiers (archi) battus avec 76'11 (!) de musique hors du commun.

Renaud Oualid
KOID9 (F)

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KOID9 (F)
par Renaud Oualid
Magazine Rock&Progressif

Chronique de l'album et DVD
THE CABINET OF DR. CALIGARI


Les plus avertis d'entre vous se souviennent peut-être des trois ciné-concerts réalisés entre 1989 et 1996 par Thierry Zaboitzeff avec Art Zoyd sur "Nosferatu" (Murnau), "Faust" (Murnau) et "Hâxan" (Christensen).
Quinze années ont passé et l'artiste a décidé de remettre le couvert en adaptant sa musique à un chef d'œuvre du cinéma muet expressionniste allemand, j'ai nommé "Le Cabinet du Dr. Caligari" (Robert Wiene, 1 920) avec l'halluciné Conrad Veidt dans le rôle mythique de Cesare.
Film-manifeste de l’expressionnismeallemand, "Le Cabinet du Docteur Caligari" tient une place à part dans l’histoire du cinéma. Ce sont bien entendu les décors qui frappèrent en premier les spectateurs : maisons de travers, rues tordues, architecture biscornues sans aucun angle droit. Ces décors, fait uniquement de tentures peintes, donnent l’impression d’être coupés de la réalité, transportés ailleurs et cette sensation accentue l’étrangeté du récit et le déséquilibre mental du narrateur. Maintes fois qualifié de visionnaire, ce scénario (écrit juste au lendemain de la guerre de 14-18) fustige l’autoritarisme, celui qui transforme les hommes en automate : certains historiens du cinéma y ont vu une prédiction de la montée du nazisme. "Le Cabinet du Docteur Caligari" reste remarquable à visionner 90 ans plus tard, le plus bel exemple de l’expressionnisme allemand au cinéma.Deux versions sont disponibles : le film en version teinté avec intertitres en anglais non sous-titré (72') et la captation d'un ciné- concert donné en 2013 au Théâtre Toursky de Marseille (75’), avec intertitres en allemand sous-titrés en français), avec le film qui défile ainsi que le musicien qui joue en direct la musique du film, visibles à l'image en même temps par un savant montage entre le film et sa prestation.
On trouve enfin un clip du ciné-concert sur le même thème qu'a donné Thierry à la Biennale de Salzburg (4'25).
Pour ce ciné-concert, l'artiste est désormais seul en scène avec tout un arsenal hi-tech et ses instruments de prédilection : le violoncelle bien sûr, mais aussi la basse, les percussions, les guitares et sa voix. L'artiste est impressionnant de maitrise au beau milieu de cette forêt d'instruments, de câbles et de boitiers électroniques. Il se veut tantôt montreur de marionnette, bruiteur, créateur d'espaces troublants mais aussi compositeur au sens plus traditionnel, sachant dans ce grand délire cinématographique et sonore nous donner des repères, des thèmes identifiables. Telle une partition d'opéra déployant un lyrisme juste, décomplexé et se mariant tellement naturellement aux sons électro-rock que Dr Zab développe depuis des années déjà. A certains moments les acteurs sont comme sortis de l'écran et se perdent avec le compositeur en direct pour nous raconter leur histoire, des histoires Car cette musique initie plusieurs strates pour mieux nous perdre dans ce Cabinet du Dr. Caligari, référence incontournable du cinéma allemand.
NB : Dr Zab a joué cette œuvre (avec projection du film à l'appui) au festival Gouveia Art Rock (Portugal) des 26 et 27 avril 2014.

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KOID9 (F)
par Jean-Marie Lanoë, n°88 printemps 2014
Magazine Rock&Progressif

Chronique de l'album
SIXTEENTH

"A tout instant, j’apprends" aimait à dire Marguerite Duras. Quand "on" m’a envoyé les deux derniers avatars de Thierry Zaboitzeff, "Sixteenth" et "Planet Luvos", j’ai failli tout envoyer bouler à la première - distraite - écoute. "Ce n'est pas pour moi", ai-je pensé immédiatement. Et puis j’ai réessayé en pensant que j’étais le roi des cons. Je ne savais pas encore - je me suis renseigné depuis - que Zaboitzeff était l’un des fondateurs du Art Zoyd de jadis. Qu’il était devenu depuis un grand multi instrumentiste d’une musique avant gardiste qui mélange joyeusement l’electro, l’electro acoustique, le classique, le jazz. Une fusion post moderne dont on a un sacré aperçu avec "Sixteenth", projet ambitieux pour lequel le natif de Maubeuge s’est adjoint avant tout la soprano Isabelle Farmini.
Drôle de découverte ! D’abord il n’est pas si difficile d’entrer dans l’univers du "Docteur Zab". (Pour l’autre CD, "Planet Luvos", c’est beaucoup plus ardu car comme il s’agit de la BO d’une pièce de Danse-Théâtre-Physique, il n'est pas évident de se passer du visuel même si l’on sent (entend) bien que les océans y sont omniprésents, fin de la parenthèse "Planet Luvos"). "Slippery Nights" ouvre donc "Sixteenth". A la recherche éperdue de références, Magma vient à l’esprit, Jean-Luc Ponty aussi - période, jazz rock, pour les cordes mais aussi et surtout l’espèce de rythmique sous jacente. Cette notion de beat, étrange et entraînant, gavée de loops et de programmations, on la retrouve aussi sur "Free at Last", sur fond de discours universel de Martin Luther King.
C’est passionnant, comme le serait la rencontre de John Barry et du Pat Metheny le plus déjanté ; sur "Mariée à la Nuit", "Connectivity" (terrible, avec la merveilleuse voix de Isabelle Framini) ou le final de "Touch" aussi, sans oublier l’épatant, syncopé et celtique "Dr Zab Am Wolfgang See". Entre ces échappées qui vous font taper du pied se terrent parfois de petites merveilles comme "Deil Zom An De Lay" presque prog tout comme l’ "Ov.6" et sa guitare Hackettienne. Bon, il existe bien quelques passages plus drus, dont "Schluss Mit Kunst" mais notre impression finale est que pour peu qu’on y tende une oreille attentive, l’univers de Zaboitzeff n‘est pas le "désert aride pour intellos en mal de sensations" (DAPIEMDS) qu’on avait cru d’abord percevoir. C’est bon, de se tromper. Puis de découvrir.
KOID9 (F)
Jean-Marie Lanoë

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KOID9 (F)
par Dominique Reviron, 2005
Magazine Rock&Progressif
Chronique de l'album
MISSA FURIOSA


Thierry Zaboitzeff n’est pas un inconnu pour l’amateur de Rock Progressif. En effet, on trouve la trace de ce multi instrumentiste dés 1976 au sein du groupe Art Zoyd où il compose avec Gérard Hourbette une musique radicalement neuve, associant brillamment les instruments classiques à l’électronique et l’électro-acoustique.

En 1996, Thierry quitte le groupe pour se consacrer à ses propres projets où la musique n’est qu’un pan dans une approche culturelle beaucoup plus exhaustive. Le spectacle total est le but avoué de ce sculpteur d’espaces sonores qui entend intégrer ballets, danses, théâtre, électronique, chœurs et images en un seul environnement scénique.

Cette "Missa furiosa" fut d’abord un évènement, créé en Autriche en 2002, qui rassemblait des chanteurs lyriques, un orchestre de cordes, des manipulations électroniques et Zaboitzeff lui-même, en tant que principal interprète, chanteur, violoncelliste, bassiste, guitariste, etc...

Ce CD est donc la bande originale de ce show, et on peut oser avancer qu’il s’agit d’une messe chantée en latin au travers d’un ensemble Techno Pop. Rien que ça!

Signalons avant l’écoute, qu’il n’y a pas de volonté de promotion religieuse, catholique ou autre, de la part du musicien. On est très loin des errements de Neal Morse. Thierry précise d’ailleurs que quelques chants aux couleurs de l’islam ou du bouddhisme ont pris leur place dans son projet, et que l’intérêt d’une messe musicale réside dans son cérémonial, son rituel, sa communion, sa transe et bien sûr dans son orchestration.

Si le premier titre "préparation" est conforme à ce que l’on attendait, envolée incantatoire de chaque soliste dans un climat oriental, puis citation de l’Ecclésiaste ("tout n’est que vanité..."), "introitus" voit l’émergence d’un rythme Techno que l’on sentait sous-jacent, accompagné de voix classiques chantant en latin. C’est assez curieux mais pas inintéressant. Surtout que le rythme répétitif est plus complexe qu’il n’y parait, un peu comme le faisait Steve Hillage dans son System 7. On entend nettement des cloches d’église, des samples de cris, des accompagnements de violoncelle, plein de petits additifs qui attirent l’attention. Mais attention, le rythme peut s’accélérer, donner dans la Trance avec claviers et synthés qui dépotent comme en boîte de nuit.

Le "kyrie" abandonne ces trépidations pour revenir à un tempo moins basique qui permet aux solistes de chanter cette pièce incontournable dans toute messe. Notons quand même que l’on est très loin du "kyrie" traditionnel, l’accompagnement étant ici assez étrange. "Gloria" possède un groove "Zeuhlien". D’abord la basse virevoltante, ensuite des chœurs aigus et scandés, qui rappellent Magma (la fin de "Mekanik... " par exemple), un développement instrumental technique et mélodique avec un saxophone tout droit sorti d’Uniweria Zekt, puis des chants abruptes qui font tellement penser au groupe de Vander que l’on se demande si les paroles sont en latin ou en kobaïen.

"Les moines" est un petit titre, sans percussion, calme et réfléchi, méditatif aussi, très bien servi par les mélopées des solistes. C’est le seul morceau possédant une évidente connotation religieuse.

Le "lacrimosa" est assez curieux avec son rythme sautillant (je ne dirais pas Funk, mais pas loin) en contraste complet avec les paroles, les voix, la mélodie. Impressions mitigées de l’auditeur devant ces oppositions voulues par Thierry Zaboitzeff.

La messe se poursuit avec les étapes connues : "sanctus", "dies irae", "libera me", un emprunt au Requiem de Mozart "Agnus dei", totalement méconnaissable ici par un traitement sévère à l’harmonica qui répond au soprano solo sur 2 pistes musicales superposées. Très bizarre, pas évident pour le mélomane, encore moins pour l’amateur de Prog ou de Rock.

Il est évident que cette messe est une musique qui ne se donne pas. Comme toute œuvre un tant soit peu originale ou novatrice, il faut que l’auditeur fasse un effort de compréhension, que plusieurs écoutes soient réalisées, et là, petit miracle, on se rend compte alors de la qualité mélodique de l’ensemble, de la beauté des contrastes, de la clarté des chants sublimée par l’orchestration imprévisible. Je dirais que le tout fusionne et fonctionne !

Et puis, il ne faut pas oublier qu’on ne discerne que la partie émergée de l’iceberg. Ce CD ne propose que la musique d’un spectacle total et cette "Missa furiosa" étonnante est probablement plus assimilable, plus à son aise dans ce contexte, avec des images géantes, des éclairages fous, des acteurs, des ballets et ...des spectateurs.

Ceux qui voudront en juger par eux-mêmes se rendront au théâtre Toursky de Marseille, le 18 janvier 2005, date où cette grande messe sera présentée à nouveau en version concert.
KOID9 (F)
Dominique Reviron

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KOID9 (F)
par Renaud Oulid, n°88 printemps 2014
Magazine Rock&Progressif
Chronique de l'album
SEQUENCES


" Sequences" est la version album de la musique du film-documentaire de Nathalie Borgers " Winds of Sand, Women of Rock" (2009) dont Thierry Zaboitzeff signe la B.O. Un magnifique disque totalement instrumental, souvent proche du Peter Gabriel de " Passion", huit titres (entre 1 et 5') qui sont autant de vignettes utilisées pour décrire le quotidien rude des femmes Tubu du Sahara et la condition de la femme dans la société. Thierry a composé et arrangé tout le matériel et joue de tous les instruments (basse, violoncelle, guitare, synthétiseurs, voix, piano samplé, percussion, flutes et autres instruments ethniques). A l'inverse de " Planet Luvos" , il n'est absolument pas nécessaire d'avoir les images devant les yeux pour apprécier cette musique contemplative absolument superbe ! Une belle réussite.




METAL.DE (D)
par Michael Klaas, 20/07/2019
Chronique de l'album
ARIA PRIMITIVA - SLEEP NO MORE

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Aria Primitiva - Sleep No More Einen finsteren Klumpen lässt Thierry Zaboitzeff mit seinem Projekt ARIA PRIMITIVA da auf uns zu rollen. Einst eine der beiden Schlüsselfiguren der Kammer-Rock-Band ART ZOYD gewesen, treibt es ihn nun mit dieser Formation und dem vorliegenden Full-Length-Album „Sleep No More“ auf nicht minder avantgardistische, dafür weniger kammerorchestralische und umso elektronischere, geradezu industrielle Pfade, die denen von KAUKOLAMPI nicht unähnlich sind. Wobei der hiesige Stoff weniger krautig geraten ist. Der Sound von „Sleep No More“ hat wie angedeutet keinen kammermusikalischen Charakter inne, zumal hier kein größeres Ensemble am Werke ist. Die Songs sind aber dennoch von klassischer Musik und ein Stück weit auch vom Rock beeinflusst, wobei im Vordergrund natürlich Synthesizer und zum Teil sehr angriffslustige Beats stehen. Aber im Grunde treffen sämtliche Genre-Bezeichnungen für „Sleep No More“ ohnehin nur bedingt zu, da in den Songs teilweise einfach zu viel abgeht. In weniger erfahrenen Händen wäre das Songmaterial zu einem furchtbaren Stil-Durcheinander verkommen. Die verdrehte Welt von ARIA PRIMITIVA Zaboitzeff hat sich für das Projekt mit Nadia Ratsimandresy und Cécile Thévenot zusammen getan, die ihrerseits ebenfalls wie Zaboitzeff (teilweise auch nur aushilfsweise) bei ART ZOYD aktiv gewesen sind. Und wer mit deren Musik jemals in Kontakt gekommen ist, zum Beispiel durch deren avantgardistische Soundtrack-Neuinterpretationen von Stummfilmklassikern wie „Nosferatu“, dürfte eine ungefähre Ahnung haben von dem, was ihn auf „Sleep No More“ erwartet. Immerhin gibt es den Titelsong des hier vorliegenden Albums auf „Nosferatu“ in einer seiner früheren Fassungen zu hören. Und in der Tat: „Sleep No More“ wird seinem Titel gerecht. Denn was das Trio hier aufs Parkett zaubert, klingt in seinen intensivsten Momenten wie

ein verdrehter Fiebertraum von Trent Reznor. „Endayi Endesi“ eröffnet das Album noch vergleichsweise ruhig mit sachter Industrial-Perkussion, lässt dank ominöser Melodien und gewichtigen, geradezu dramatischen Klavier-Schlägen dennoch Übles erahnen. Dank seiner klassischen Schlagseite ziehen sich ansprechende Melodien durch den Song hindurch, der sich dann zum Ende hin aufbaut und nicht direkt in ein explosives, aber dennoch in ein vergleichsweise bombastisches Finale mündet. „Sleep No More“ macht seinem Namen Ehre „Maïdaykali“ gaukelt dem Hörer ein wenig erholsame Idylle vor, ehe sich der Song in einen aggressiven, schweren Industrial-Stampfer verwandelt. Hier setzt auch der etwas skurrile Gesang von Zaboitzeff ein, der sich jedoch seltsamerweise gut ins Klangbild einfügt. Die rauen Vocals erinnern irgendwie entfernt an Cornelius Jakhelln (SOLEFALD). Dagegen scheint das rhythmische Korsett des dreizehnminütigen Kernstückes „Aria Primitiva“ ein wenig von den „Ghosts“-Songs der NINE INCH NAILS inspiriert zu sein, während scharfkantige Streicher und Synthesizer zum Teil dissonant auf den Hörer ein plärren. In der zweiten Hälfte zieht das Trio die atmosphärische Schraube dann deutlich fester mit einer Intensität, die reif für das Horrorkino ist. „Nixen“ verspricht in der ersten Hälfte dagegen tatsächlich etwas Erholung, auch wenn Klavier und Beats in der zweiten Hälfte des Songs doch düstere Nadelstiche setzen, um die Atmosphäre wieder in verstörende Sphären hinein zu treiben. In Sachen Skurrilität sticht „Helden“ den Rest der Tracks locker aus, bei dem es sich doch tatsächlich um ein durch den Industrial-Wolf gedrehtes, deutschsprachiges Cover des David Bowie-Songs „Heroes“ handelt. Und trotz starkem Akzent bringt Zaboitzeff die ikonischen Zeilen ganz gut rüber. Mit „Hystamack“ und „Kletka“ lassen ARIA PRIMITIVA noch ihre improvisatorischen Muskeln spielen. Das klingt erst einmal

unspektakulärer, als es ist, denn hier treibt die Band die Atmosphäre durch den Ambient-lastigen, gar formlos und ungreifbar anmutenden Sound in geradezu unerträgliche Höhen. Geisterhaft langgezogene Synths, ein Klavier, das mal schneidend und mal hämmernd attackiert, sowie ein subtiler Drone fräsen sich zielsicher in die Magengrube hinein und wühlen diese auf. Da ist man fast froh, dass der Titeltrack so eingängig und melodisch ausgefallen ist. Ein Stimmungsvolles Highlight Erfreulich ist in jedem Falle der konsistent klare Sound, der das gesamte Album souverän trägt und hervorragend hörbar macht. In seinen ruhigeren Momenten zeigt die Produktion die nötige Transparenz, um nahezu jedes noch so kleine Detail im Klangbild differenzieren zu können. Unterdessen wird den aggressiveren Passagen eine Menge Druck und Durschlagskraft verliehen, sodass sich das Album seine Dynamik auch an der Oberfläche bewahrt. Das führt dazu, dass die Songs trotz ihrer Fokussierung auf Stimmung extrem gut hörbar bleiben. Im Gesamten haben ARIA PRIMITIVA also ein unglaublich dichtes, düsteres und doch abwechslungsreiches Werk geschaffen, das nur schwer zu kategorisieren, aber dennoch erstaunlich leicht zu hören ist. Zwar sind einige Songs bereits auf der vorangegangenen EP „Work In Progress“ erschienen (und wie bereits erwähnt ist auch der Titeltrack etwas älter). Dennoch fügt sich das alles auf „Sleep No More“ zu einer Einheit zusammen, die allein durch fließende Übergänge zwischen den Tracks noch intensiver geworden wäre. Aber macht euch nichts vor: „Sleep No More“ wird euch dennoch gekonnt den Schlaf rauben...

Michael Klaas



CHRONIC'ART (F)
par Jérôme Schmidt, 24/04/2000
Chronique de l'album
MINIATUREN

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Tout d'abord connu pour son travail de composition génial au sein du cultissime groupe Art Zoyd, Thierry Zaboitzeff a su, dès le milieu des années 80, imposer son nom au devant des musiques dites "nouvelles". Un bref retour historique : en 1976, naît Art Zoyd, croisement improbable entre Bartok, Stravinsky et Magma. Leurs premiers albums, totalement décalés par rapport à la scène de l'époque, marquent la pierre fondatrice d'un courant aux croisées des musiques contemporaines et d'un certain rock français. Bizarrement, une démarche aussi radicale a pu surmonter la sape morale et financière de la vulgarité musicale environnante et généralisée, survivant grâce à l'intérêt d'autorités nationales et locales. Pour une fois, l'utilité de la subvention étatique en matière de musique est avérée.

D'abord rattaché trop rapidement à son groupe d'origine, Zaboitzeff a réussi en quelques albums à se forger un son, une identité immédiatement reconnaissable. Dans la grande lignée des musiques pour ballet, il a amorcé une collaboration suivie et fertile avec la chorégraphe Editta Braun. Avec Heartbeat , India puis Alice, Zaboitzeff (Dr Zab pour les intimes) a défini un paysage sonore plus techno et électronique que ses opus précédents. De retour ici à une instrumentation plus spartiate, moins clinquante, et surtout beaucoup plus acoustique, il signe une série de miniatures musicales extrêmement convaincantes, penchant plus encore vers les sonorités nouvelles. Des idées brillantes comme à l'habitude et servies, on ne change pas, par une interprétation sèche mais ample, parfaite mais définitivement humaine. De l'ensemble à cordes, à la synthétisation discrète, les compositions de Zaboitzeff ne donnent pas plus dans l'outrance que dans le banal ou le commun. Cette grande parade miniaturisée d'une musique toujours aussi actuelle dans l'esprit et la forme a tout de la démonstration de force, légère, d'un musicien malheureusement trop souvent méconnu.
CHRONIC'ART (F)
Jérôme Schmidt



BABYBLAUE SEITEN (D)
LE PASSAGE - THIERRY ZABOITZEFF
Chronique de l'album par Siggy Zielinski
08/02/2024

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Cofondateur d'Art Zoyd, compositeur et multi-instrumentiste, Thierry Zaboitzeff a sorti début 2024 un nouvel album-concept, "La Passage". Il y est question d'un avenir dystopique que l'homme a provoqué en détruisant la nature.

Dès le morceau d'ouverture "à la poursuite du zoyd - extended", les sombres visions du futur nous accueillent dans la bonne tradition du zoyd. Un motif répétitif pour la basse et les guitares sert de base à un entrelacement menaçant de chants gutturaux, d'une trompette névrosée, de contributions avant-gardistes au piano dans l'esprit de Keith Tippett et de voix parlées frénétiques. Vers la fin, une majestueuse mélodie de la chute plane au-dessus de tout cela.

Avec "Les forêts précèdent les hommes, les déserts les suivent", les mots de François-René de Chateaubriand (1768-1848) résonnent au début de "La Forêt" ("Der Wald"). Cela rappelle que le déboisement massif a commencé il y a déjà plusieurs siècles, d'autant plus que la "civilisation" humaine précoce n'aurait pas été concevable sans l'utilisation massive du bois. "La Forêt" concilie les sons du terrain avec la déforestation, les passages ambiants sombres, les moments classiques et romantiques inspirés par la musique classique moderne ainsi que les contributions vocales mystérieuses.

Le titre "Poster Boy", à la composition rapide et à mi-chemin entre le classique moderne, l'électronique et l'art-rock, a été utilisé dans sa forme originale pour le film de Nathalie Borgers "Fang den Haider". Il est possible qu'un Poster Boy représente ici symboliquement la phase finale hédoniste de la civilisation actuelle. Très joliment déjanté, le "Twisted Zoydian Song", comme le titre l'indique déjà avec justesse. Le morceau a quelque chose d'une danse avec le diable à la fin de notre époque. Les chants parlés bizarres, les percussions électroniques, le synthétiseur, la guitare électrique, le piano et les instruments à vent créent des grooves inquiétants dans cet avant-prog venu de l'enfer, qui contient probablement aussi une pointe d'humour.

En comparaison avec tout ce qui précède, la composition finale intitulée "Le Passage" sonne presque romantique. Sur une base électronique détendue de rythmes et de séquences, on entend une voix presque pop accompagnée de cordes et d'une trompette. Tout va bien, tout va à moitié, c'est ainsi que l'on pourrait également interpréter le morceau titre.

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BABYBLAUE SEITEN (D)
LUVOS migrations - EP
Chronique par Siggy Zielinski du 5-.9.2023
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"LUVOS migrations" est un film de danse de 19 minutes réalisé par le photographe/cinéaste autrichien Menie Weissbacher et la chorégraphe Editta Braun. La première a eu lieu le 22 novembre 2022 au centre culturel cinématographique de Salzbourg, DAS KINO. Une bande-annonce sur www.editta-braun.com/e/films/luvos-migrations.html donne à peu près l'impression d'un spectacle de danse d'avant-garde, dans lequel les corps des quatre danseuses presque nues évoquent plutôt les plantes ou les insectes. Le site web mentionne en outre une trentaine de danseuses qui ont participé à l'élaboration des mouvements de danse difficiles et originaux. Les quatre danseuses exécutantes ont été filmées sur écran vert en studio, puis l'écran vert a été remplacé par diverses images d'arrière-plan.

La pièce musicale de 17 minutes accompagnant le film de danse susmentionné a été réalisée en solo par Thierry Zaboitzeff. Avec les nombreuses pistes sonores différentes et le caractère de musique de chambre, on peut presque parler d'un homme-orchestre. La dame qui chante de temps en temps provient probablement d'un sampler. Sinon, on entend divers bruits de la nature et autres effets échantillonnés ainsi que du piano, des synthétiseurs, un trombone, une trompette, des cordes, des séquenceurs, des rythmes électroniques et des violoncelles.

Le morceau alterne entre des passages plus denses et des passages arrangés avec plus de parcimonie. Dans l'ensemble, le mélomane ouvert peut écouter un mélange original de styles : musique classique moderne, musique progressive à large spectre, paysages sonores ambiants et électronique.

Considérés ensemble, la musique et le film de danse de "LUVOS migrations" devraient constituer une expérience impressionnante. (Le film ne semble toutefois pas être disponible sur Internet). D'autre part, la musique de Zaboitzeff est en soi suffisamment intéressante pour se suffire à elle-même.

Traduit automatiquement de l'allemand.

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BABYBLAUE SEITEN (D)
Thierry Zaboitzeff - 50 ans de musique (s)
Année de parution : 2022
Particularités/style : Musique électronique ; Electronica moderne ; Classique moderne ; RIO / Avant ; Worldmusic / Ethno ; Zeuhl ; autre
Label : Monstre Sonore - WTPL - Music
Note moyenne : 12/15 (1 avis)
Chronique par Siggy Zielinsky 05/03/2023

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En septembre 2022, le multi-instrumentiste Thierry Zaboitzeff (solo, Zaboitzeff & Crew, Aria Primitiva, Art Zoyd, Univers Zero, d-zAkord Erik Baron) a publié une compilation 3CD/téléchargement qui offre un aperçu des 50 ans de création du musicien.

On y trouve 43 compositions, soit plus de 3,5 heures de musique sur cinq décennies. Certains morceaux ont été remasterisés, d'autres ont été modifiés et réenregistrés. La musique de Zaboitzeff est connue pour être la première adresse pour les amateurs d'avant-prog, de rock in opposition, de dark avant-ambient, de prog de chambre, de musique classique moderne, de zeuhl et d'autres styles similaires.

En commençant par Art Zoyd et d'autres projets jusqu'aux travaux de commande pour le théâtre de danse et le cinéma, Zaboitzeff présente des paysages sonores entre musique de chambre et électronique, qui transmettent tour à tour une intensité considérable, ou une obscurité mystérieuse, et ressemblent parfois à des rituels inquiétants. Certains morceaux plus détendus et romantiques pourraient aussi être liés aux exigences liées aux travaux de commande.

Le musicien travaille souvent seul, parfois avec de petites formations, mais il parvient quand même à créer des arrangements orchestraux imposants dans lesquels la basse, le violoncelle, les rythmes programmés, la voix, les samples et les claviers jouent un rôle décisif.

Parmi les exceptions à cet égard, on trouve notamment les morceaux enregistrés avec Art Zoyd, ce qui signifie généralement une formation de musique de chambre complète.

Zaboitzeff parvient toujours à créer des combinaisons sonores surprenantes. Dans "Dr Zab am Wolfgang See", par exemple, le beatboxing, une chanteuse d'opéra, des claviers électroniques, une guitare basse, des rythmes programmés et des sons de harpe forment une image globale inhabituelle. "Sangria" sonne comme un numéro de musique de chambre électronique d'avant-garde d'inspiration orientale. Dans certains morceaux, le compositeur utilise des rythmes prononcés. Dans "Introitus", on assiste même à une fusion de rythmes technoïdes avec la musique de chambre et des chants d'opéra (voire de zeughl ?). Dans le même ordre d'idées, "Touch" fait coexister des rythmes électroniques très puissants avec des chants féminins d'opéra. "Requiem" et "Libera Me" (tous deux tirés de l'album "Missa Furiosa" de Zaboitzeff & Crew) me font l'effet d'un opéra de Zeuhl bombastique. Une conclusion impressionnante à une compilation très intéressante.

Les collectionneurs et les vrais fans pourront également découvrir des morceaux peu connus sur les 3 CD, notamment des enregistrements live, des singles, ou des versions retravaillées, ou remixées.

Avec "50 ans de musique (s)", on dispose d'un matériel sonore très précieux qui, de par son énorme diversité, ne laisse guère place à l'ennui et constitue un voyage musical fascinant. Surtout si l'on aime le prog de Zaboitzeff, ce qui signifie en gros une fusion obstinée d'éléments de style électronique, de musique classique moderne et d'avant-prog. De temps en temps, on y ajoute des éléments de musique du monde, d'opéra, de jazz, de symphonie progressive et de folk.

Retrouvez l'article original

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BABYBLAUE SEITEN (D)
par Siggy Zielinski, 7/12/2021
Chronique du EP
PAGAN DANCES
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So etwas braucht der Musikfreund in dieser finsteren Zeit auch: eine eklektische Musik, die eher schroffe Felsen- oder Küstenlandschaften abzubilden scheint, statt zauberhafte Märchenwelten vorzutäuschen.

Für seine digitale EP „Pagan Dances“ hat Thierry Zaboitzeff alle akustischen und elektronischen Instrumente selbst gespielt, alle virtuellen Instrumente selbst programmiert, selbst gesungen und geschrien (wie er selbst dazu sagt) und alle anfallenden tontechnischen Arbeiten auch gleich selbst erledigt.

Elektrisches Cello, Bass, Gitarre, Keyboards und programmierte Rhythmen lassen sie ich in dieser Musik heraushören, die eine gesunde Unruhe und unterschwellige Bedrohung zwischen Kammermusik, Moderner Klassik, Ambient, einer Prise Elektronik und Avant-Prog vermittelt. Dazu wurden holprige und simple elektronische Rhythmen verwendet. In dramatischeren Momenten erklingen noch virtuelle Blasinstrumente. Um nur die wichtigsten Komponenten zu nennen. Schnell sind die kurzweiligen fünfzehn Minuten des Titeltracks vorbei.

Es folgen noch fünf Minuten der Legende von NayMa, die die leicht unheimlichen Rezitationen und Sprechgesänge in einer mir unbekannten Sprache präsentieren. Begleitet werden diese von getragener Kammermusik, die aus Piano- und Cello-Themen und programmierter Perkussion besteht.

Veröffentlicht am:7.12.2021
Letzte Änderung:7.12.2021
Wertung:11/15 

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par Siggy Zielinski, 26/04/2021
Chronique de l'album
PROFESSIONAL STRANGER

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„Professional Stranger“ ist eigentlich im November 2020 erschienen, und zwar als Download. Wegen der Antivirus-Krise verzögerte sich die CD-Ausgabe sehr und ist bis auf weiteres im April 2021 vorbestellbar. Wie oft bei Zaboitzeff war die Musik für ein Tanztheater-Projekt vorgesehen. Dieses heißt „Long life“ und wurde von der Choreographin Editta Braun noch in der Zeit konzipiert, als das normale Leben möglich war. Die Vorstellung sollte eigentlich im Mai 2021 in Salzburg seine Premiere feiern. Darin geht es um die Lebensgeschichten der Menschen, die zeitweise mit denen der Bäume verglichen werden. (Bei Interesse findet man hier noch mehr darüber: http://www.editta-braun.com/e/productions/long-life.html).

Zu der Musik meinte Thierry Zaboitzeff, der hier fast alle Klänge im Alleingang beisteuert, diesmal hat ihn seine Intuition ein wenig auf Distanz zu der experimentellen Musik gehen lassen, für die er bekannt ist. „Professional Stranger“ bietet trotzdem überwiegend immer noch eine originelle Mischung aus Neoklassik, Ambient und Kammerprog. Soweit sich das erkennen lässt steuert Zaboitzeff dabei die Keyboards, die programmierten und echt gespielten Rhythmen, das Akkordeon, die Gitarren, Cello und Bass bei.

Trotz der Einschätzung des Künstlers halte ich die Stücke wie „El Caos“ oder „Overlap Processing“ für gelungene Beispiele für kreativen Avant-Kammer-Prog. Dafür steht „Derevo“ doch eher für den melodischen Kammerprog. Trotzdem nicht schlecht.

Für diese Theatervorstellung brauchte es offenbar noch zwei sehr bekannte Pop-Songs: „Venus“ von Shocking Blue und „Enjoy the Silence“ von Depeche Mode. Aus rechtlichen Gründen dürfen diese nicht auf Bandcamp auftauchen, dafür aber bei den anderen bekannten Streaming-Diensten. Den Gesang auf „Venus“ steuert eine gewisse Sandrine Rohrmoser bei. Zumindest hat man aus dem Pop-Hit von Depeche Mode doch eine Art experimentelle Kammer-Pop-Nummer gemacht, statt, wie im Falle von „Venus“, nur die Songstruktur zu reproduzieren.

Insgesamt platziert sich Zaboitzeff nach meiner Einschätzung mit „Professional Stranger“ stilistisch zwischen allen Stühlen. Für die Avant-Prog-Freaks oft vermutlich etwas zu entspannt, für die Melodic Prog-Freunde doch zu seltsam. Es bleibt hoffentlich eine kleine Hörergruppe, die diese ungewöhnliche Musik zu schätzen weiß, auch wenn es ohne die dazugehörige Theatervorstellung vor Augen nicht immer leicht sein dürfte.


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BABYBLAUE SEITEN (D)
par Achim Breiling posted 07-04-2019
Chronique de l'album
ARIA PRIMITIVA - SLEEP NO MORE

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(WTPL Music BTZAP001, 2019, CD)

Aria Primitiva sind Thierry Zaboïtzeff (ehemals einer der beiden Köpfe von Art Zoyd), Cécile Thévenot und Nadia Ratsimandresy, und man ist in dieser Besetzung seit 2017 aktiv. Ratsimandresy gehörte zur wohl letzten Besetzung von Art Zoyd (wenn wir einmal annehmen, dass die Formation nach dem Tode Gerard Hourbettes Geschichte ist), und ist z.B. auf "Phase V" zu hören. Gemeinsam mit Zaboitzeff hat sie auch schon bei den Art-Zoyd-Jubiläumskonzerten auf der Bühne gestanden (siehe "44 1​/​2 - Live + Unreleased Works").

Da auch Cécile Thévenot sich vorwiegend in experimentellen Klanggefilden aufhält, und auch schon im Umfeld von Art Zoyd tätig war, haben sich hier also durchaus klangverwandte Seelen zusammen gefunden. Warum also auf der Internetpräsenz der Formation (eine Unterabteilung auf Zaboitzeffs Webseite) das Ganze als 'unlikely trio' bezeichnet wird, ist etwas unklar. Vielleicht wegen der geschlechtsspezifischen Zusammensetzung? Aber, das sollte man heutzutage doch auch nicht mehr als ungewöhnlich ansehen.

Wie auch immer, aufgrund der jeweiligen musikalischen Hintergrundes der drei Beteiligten sollte auch klar sein, welcher Art Musik auf "Sleep No More", dem im März 2019 erschienen Debütalbum des Projekts zu finden ist. Drei Nummern des Albums wurden schon 2018 auf der EP "Work in Progress" veröffentlicht. Das Titelstück war zudem in seiner Urversion (ohne Beteiligung der beiden Damen) einstmals als Download-Single erhältlich (siehe "Aria Primitiva"). Nun gibt es also die 'full version' (wie extra auf dem Cover vermerkt).

Elektronisches, Samplerklänge, und allerlei Keyboardexkurse treffen auf Zaboitzeffs Bass, sein Cello, und bisweilen seine recht eigentümlichen, sonor-heiser-grunzenden 'Gesangsdarbietungen', ab und zu unterlegt mit programmierten perkussiven Mustern. Da Zaboitzeff wohl meistenteils für die Komposition zuständig war, unterscheidet sich das Gebotene nicht allzu sehr von der auf seinen vorhergehenden Soloalben zu finden ist. Auch das rezentere Klangschaffen von Art Zoyd ist hier nicht sehr weit weg.

Eine trotzdem recht eigene Suite aus avandgardistischer Elektronik mit Progcharakter gibt es auf "Sleep No More" zu hören, die sich meist eher düster und bedrohlich voran arbeitet. Momente mit freiformatigerem Wogen und Schweben sorgen genauso für Abwechslung, wie allerlei experimentelles Tonbasteln und Improvisieren (man höre z.B. das wüste "Hystamack" oder "Kletka"), von pulsierenden Beats oder sehr authentischen perkussiven Imitationen unterlegte, rockig-sperrige Abschnitte, diverse Klangverzierungen vom Sampler (die Zaboitzeff-erfahrenen Hörern bisweilen bekannt vorkommen werden), verträumtem Klangmalen ("Nixen") und fast in Richtung Artrock gehende Songs (zumindest das eigentümliche "Helden" - von Zaboitzeff in Deutsch vorgetragen). Das Ondes Martenot sorgt zudem für neue (im Vergleich zum bisherigen Solowerk Zaboitzeffs), klassisch-elektronische Klangfarben.

"Sleep No More" ist alles in allem ein gelungenes Album das eine ausgewogene und dicht verwobene Mischung aus Elektroprog, experimentellen Klangbasteleien, klassischer Elektronik und Avantprog bzw. elektronischen Kammerrock im Geiste von Art Zoyd (oder Zaboitzoffs Soloschaffen) bietet. Das Ganze hat einen sehr mächtigen und detailreichen Sound, und kann durchweg überzeugen, auch wenn dem Rezensenten einige Stellen mit etwas monoton wummernde Ums-Ums nicht so zusagen. Man gewöhnt sich aber daran.

Veröffentlicht am: 7.4.2019
Letzte Änderung: 14.4.2019
Wertung: 12/15 

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par Siggy Zielinski, 21/03/2018
Chronique du EP
ARIA PRIMITIVA - WORK IN PROGRESS

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(Booster / WTPL Music) 2018

Aria Primitiva nennt sich ein Trio, das Thierry Zaboitzeff (ex-Art Zoyd, Bass, Cello, Voices, Sampler) zusammen mit Cécile Thévenot (Keyboards, Sampler) und Nadia Ratsimandresy (Ondes Martenot, Keyboards, Sampler) gründete. (Beim Ondes Martenot handelt es sich übrigens um ein frühes elektronisches Instrument, das 1928 zum ersten Mal vorgestellt wurde).

Zaboitzeff, Ratimandresy und Thévenot traffen 2016 bei einem Jubiläumskonzert von Art Zoyd aufeinander. Dabei hatte Zaboitzeff den Eindruck, dass die drei gut miteinander harmonierten und ein gemeinsames Projekt sich anbieten würde. Auch wenn weiterhin ausschließlich die Kompositionen und Arrangements von Zaboitzeff verwendet würden.

Dabei ist die vorliegende EP vorwiegend dafür gedacht, die Zeit bis zu einem im Sommer 2018 kommenden Vollzeit-Album zu überbrücken.

Allen Freunden von experimentellen Klängen bietet die EP eine eher selten zu hörende Melange aus den Elementen des symphonisch angehauchten Avant-Prog, der Modernen Klassik und den schrägen Elektronik-Collagen. Gelegentlich wird das Ganze von den mal growlenden, mal drohend deklamierenden, dann wiederum flüsternden, oder theatralisch-opernhaft gesungenen Stimmbeiträgen von Zaboitzeff gekrönt, oder von den Techno-ähnlichen Rhythmen und den an Industrial-Metal erinnernden Einwürfen aufgemischt.

Ein Tonträger mit einer leider sehr kurzen Spielzeit, der nicht nur den Art Zoyd- und Zaboitzeff-Fans, sondern allen Freunden von ungewöhnlichen Klängen zu empfehlen ist. Man darf gespannt sein auf das für den Sommer angekündigtes reguläres Album des Trios.
Siggy Zielinski
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par Achim Breiling, 26/5/2016
Chronique de l'album
MULTIPLE DISTORTIONS

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Nach einer Reihe von nur als Download oder als limitierte CDR (oder “on demand”) erhältlichen Werken, veröffentlicht Thierry Zaboitzeff, der es übrigens immer noch (Stand: Frühsommer 2016) als nötige erachtet, gleich auf der Startseite seiner Internetpräsenz auf die Tatsache hinzuweisen, dass er einstmals einer der beiden Köpf von Art Zoyd war, mit “Multiple Distortions” wieder ein Album ganz normal (vielleicht bald: “altmodisch”) auf CD. “Archives 2005-2016” lautet der Untertitel, was den Ursprung des hier Vorzufindenden auch gleich definiert. Wie bei “Iva Lirma” handelt es sich hier also um eine Sammlung von allerlei Nummern, die diesmal im eben genannten Zeitraum aufgenommen wurden. Die Stücke von “Iva Lirma” entstanden dagegen in den Jahren 2002 bis 2007.
Man kann sicher nicht behaupten, dass Zaboitzeff hier sonderlich andere Musik im Angebot hat als auf den Vorgängeralben. Im Grunde hat er seinen Stil spätestens auf “Heartbeat” gefunden, eine Art Vereinfachung des damals bei Art Zoyd vorzufindenden Klangs, und hat seitdem eher wenig daran geändert (mit Ausnahme des eher delikaten „Nebensonnen“). Die stilistische Breite hat sich allerdings über die Jahre erhöht, hielten mit der Zeit auch tanzbodenartige, weltmusikalische und leicht metallisch-rockige Sounds Einzug in Zaboitzeffs Musik.
Eine Art von elektronisch-klangvollem One-Man-Kammerprog ist daher auch auf “Multiple Distortions” meist vorzufinden, der voluminös, angeschrägt, abwechslungsreich und eher düster dahin gleitet, unterfüttert mit allerlei Tastensounds und Elektronikdröhnen, gleichzeitig aber von eher kammermusikalisch-symphonischem Charakter, ganz im Geiste der franko-belgischen Rockavantgarde aus dem Art-Zoyd-UZ-Umfeld. Ganz typisch diesem Sound verbunden ist z.B. “Le lac des signes v.3”, oder das wunderbare “Lose-extended for electric bass guitar quintet”.
Allerdings hat Zaboitzeff mehr zu bieten – die oben erwähnte Erweiterung der stilistischen Breite – z.B. sehr rockig, getragen bis kantig-sperrige Instrumentalnummern, die etwas an modern Stickprog-Gefilde erinnern (ja, so in etwa wie ein Stücke der Stick Men), wie man es z.B. in den vier „Overdrive“-Nummern hören kann. Ansonsten gibt es recht viele wirre Gemenge aus Elektronikmustern, Midi-Instrumentalimitationen, allerlei Gesampeltem und Perkussivem (meist aus der Dose) zu hören (“Maniphands”, “Continents” oder “Confusion” seien als Bespiele genannt. Dazu kommen freiformatige Klanggefüge, die wieder eher nach moderner Kammermusik klingen (“Sign 2” z.B.).
Etwas aus der Reihe tanz das humorvolle “Vorschrift”, in dem Akustigitarrenartiges, Banjogeschrammel, Wums-Ums-Rhythmen und Bossa-Geklimper munter voran tanzen. Apropos Wums-Ums. Bisweilen arbeitet sich hier immer mal wieder eher monotones Rhythmusgewummer nach vorne (wie schon auf früheren Alben des Franzosen), allerdinge meist in einem eher sperrig-schrägen Klangumfeld (wie man es z.B. im abschließenden “Wings” hören kann).
Alles in allem kommt “Multiple Distortions” ziemlich homogen aus den Boxen und verströmt die typische (gewohnte), auf allen Produktionen Zaboitzeffs vorzufindende mächtig-sonor-angedüsterte, von Bassklängen und Elektronik bestimmte Atmosphäre (vom Cello ist eher selten etwas zu hören). Wer die Musik von Art Zoyd und das bisherige Schaffen Zaboitzeffs schätzt, der macht hier nicht viel falsch, so er denn mehr dieser Klänge braucht. Wer Zaboitzeffs Musik noch nicht kennt, für den wär “Multiple Distortions” dagegen ein durchaus brauchbarer Einstieg.
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Achim Breiling

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par Siggy Zielinski, 13/04/2014
Chronique de l'album et du DVD
THE CABINET OF DR. CALIGARI

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Das Cabinet des Dr. Caligari von Robert Wiene ist ein expressionistischer Stummfilm aus dem Jahre 1920, der als enorm einflussreich gilt und auch spätere Filmklassiker wie Nosferatu und Metropolis beeinflusst haben soll. Die DVD "The Cabinet of Dr.Caligari" von Thierry Zaboitzeff bietet nun jedem an Avant-Prog interessiertem Hörer die Gelegenheit diesen wichtigen Streifen kennenzulernen und sich dazu auch die von Zaboitzeff (selbstverständlich nachträglich) komponierte Filmmusik anzuhören. Durch die DVD kann man auch sehr gut nachverfolgen, wie zutreffend die Musik das filmische Geschehen begleitet und hervorhebt.

Der neue Soundtrack ersetzt einen wohl Anfang des zwanzigsten Jahrhunderts üblichen Kinopianisten. Eine solche Aufführung (mit der Musik von Zaboitzeff statt von einem Pianisten) von "The Cabinet of Dr. Caligari" fand zum ersten Mal 2010 im Rahmen des ersten Brotfabrik Somnambule Festivals in Berlin statt.

Was ich beispielsweise zu der Theatermusik von Zaboitzeff zu "Planet Luvos" schrieb, lässt sich leicht abgewandelt auch für den Soundtrack zu "The Cabinet of Dr. Caligari" anwenden. Der Schwerpunkt der Musik von Zaboitzeff liegt für mich immer noch bei avantgardistisch geprägten Klangbildern zwischen Elektronik-Rock, moderner Klassik, Ambient-Elektronik und Kammerprog.

Da aber die Vorfälle um Dr.Caligari doch um einiges...aufwühlender anmuten, als z.B. die in einer Unterwasserwelt, wurden stellenweise auch aufwühlendere Stilmittel verwendet, wie der an Grunzgesang grenzende Sprechgesang und eine Passage mit einer klassischer Tenorstimme.

Derartiges bekommt man auch während der auf der DVD enthaltenen 75-minütigen Dokumentation geboten, die sich um ein 2013 in Marseille stattgefundenes "The Cabinet of Dr. Caligari"-Konzert von Zaboitzeff dreht. Da sieht man den Musiker abwechselnd Cello, Gitarre, Mundharmonika, Bass, Perkussion und Keyboards spielen. Live werden dadurch Samples erzeugt, die dann immer wieder elektronisch bearbeitet und als Schleifen verwendet werden. Vieles an der elektronisch geprägten Musik wird aber auch in fertiger Form abgerufen. Parallel dazu bekommt der Konzertbesucher den besagten Film zu sehen Die Grenzen zwischen einer Dokumentation und einem Konzertfilm sind für mich hiermit nicht ganz nachvollziehbar. Irgendwelche, normalerweise in einer Dokumentation zu erwartenden Interviews, oder Ähnliches, erwartet man vergebens.

Darüber hinaus beinhaltet die DVD einen ca. 4-minütigen Clip, der Ausschnitte von einem "The Cabinet of Dr. Caligari" gewidmeten Life-Auftritt während der Salzburg Biennale 2011, dem Festival für Neue Musik, bietet.

So bekommt man für sein Geld gleich eine Studio- und eine Live-Version der Filmmusik. Für Zaboitzeff-Sympathisanten (und auch für Freunde vom elektronisch geprägten Avant-Prog) eine durchaus lohnenswerte Anschaffung.
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Siggy Zielinski

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par Siggy Zielinski, 19/05/2013
Chronique de l'album
PLANET LUVOS

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Planet Luvos" nennt sich ein modernes Tanzstück der österreichischen Choreographin Editta Braun, von dem es inzwischen schon zwei Teile gibt. Die von sieben zeitweise nackten Tänzerinnen dargestellte Unterwasserwelt zeigt auf jeden Fall einen einfallsreichen Umgang mit dem menschlichen Körper, der zu einem fremdartigen, möglicherweise mutierten Wesen wird. Die Auslegungen des Spektakels sprechen u. A. von den genetisch veränderten Nachkommen der Menschen, die nach dem Untergang unserer Gattung ein neues Leben unter Wasser beginnen.
Thierry Zaboitzeff wird wohl einer der wenigen Musiker auf diesem Planeten sein, der imstande ist die passende Klangwelt zu einer derart abgefahrenen Vorstellung zu kreieren. Er erschafft avantgardistisch geprägte, gelegentlich auch an Art Zoyd erinnernde Klangbilder zwischen moderner Klassik, Ambient-Elektronik und Kammerprog. Kurze rhythmische Passagen und flüchtige Ensemble-Skizzen dienen als kleine und seltene Abwechslung in einer schwebenden Ambient-Welt voller Naturgeräusche. Die Musik verdichtet sich nur manchmal zu erkennbaren Strukturen, um danach wieder zu entschweben. So hört man im ersten Teil ein Fragment für Bassgitarre, verfremdete Stimme und elektronische Tasteninstrumente sowie eine experimentelle Passage für Perkussion, weiblichen wortlosen Gesang und ein bedächtiges Sequencermotiv. Die meist sehr freie Musik, in der jede Art von Geräuschen gleichberechtigt ist, soll scheinbar dem Zufallsprinzip gerecht werden, dem die Eindrücke und die Begegnungen unter Wasser unterliegen. Da dienen einzelne Töne und vielseitige elektronische Effekte, mit oder ohne Ähnlichkeit zu den bekannten Instrumenten, als vage Orientierunspunkte in einer unheimlichen Welt.
Auf Iva Lirma gibt es noch mehr Früchte der Zusammenarbeit - darunter auch aus Luvos Vol.2 - zwischen Thierry Zaboïtzeff und Editta Braun zu bestaunen.
Eine überwiegend ohne erkennbare Regeln auskommende, aber dennoch einfallsreich anmutende Ambient-Unterwassermusik ist Herrn Zaboitzeff mit dieser Tanztheater-Arbeit gelungen. Für einige Hörer faszinierend, für die anderen möglicherweise nicht nachvollziehbar.
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Siggy Zielinski

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par Siggy Zielinski, 25/05/2013
Chronique de l'album
SIXTEENTH

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"Sixteenth" nennt sich das im Jahre 2012 erschienene Werk von Thierry Zaboitzeff. Demnach gab es in jenem Jahr bereits sechzehn Solowerke des enorm kreativen Franzosen. Bei dem eventuellen Versuch diese Zahl nachzuprüfen erfährt der interessierte Avant-Prog-Hörer auf der Webseite des Künstlers, dass das 1995 veröffentlichte Fotoalbum von Philippe Schlienger "Epreuves d'acier" nach Ansicht von Zaboitzeff als sein Solowerk No.3 zu fungieren hat. Dem Buch liegt die CD mit dem Titeltrack bei, der später auch als eine Art Zoyd-Nummer auf "Häxan" erschien. Bis auf die eine Ausnahme besteht die Zaboitzeff-Diskographie "nur" aus den herkömmlichen CD's.
"Sixteenth" ist ausnahmsweise mal kein Soundtrack-Album von Zaboitzeff und auch kein Konzeptwerk, sondern einfach eine thematisch lose Ansammlung von Studioaufnahmen. Man findet also keine fiktiven Ensembles, die Zaboitzeff angeblich begleiten, sondern einige wenige echte Musikerkolleg/Innen, die ihn bei seinem Vorhaben unterstützen. Darunter fünf Gitarristen, zwei Bassisten (alle sieben aus dem Umfeld von d-zAkørd), eine Sopranistin sowie zwei bis drei seltsame Gäste, die ebenso seltsame Aufgaben wahrnehmen, indem sie "beatboxen", oder "voice of millions" beisteuern. So habe ich ganz nebenbei gelernt, dass Beatboxen nichts anderes bedeutet, als Rhythmen mit dem Mund zu erzeugen.
"Sixteenth" präsentiert ein vergleichsweise breites musikalisches Spektrum des Zaboitzeff-Universums. Darunter findet sich temperamentvoll groovender Avant-Prog mit growlendem Sprechgesang ("Slippery Nights"), anmutige Hymnen mit einer Sopranstimme und starken Zeuhl-Einflüssen ("Makes Me Sleep", "Deil zum en delay"), ein Experiment zwischen Anarchie, Krautrock, Elektronik, Dark Ambient- und Industrial-Elementen ("Schluss mit Kunst"), eine elektronisch eingefärbte Huldigung an den Kampf von Martin Luther King mit Fragmenten seiner Rede ("Free at Last"), gitarrenorientierter Avant-Prog zwischen unter der Oberfläche versteckter ("Ov.expv") und offener ("Mariee...") Anspannung, elektronisch-experimenteller Industrial-Prog mit Soprangesang ("Connectivity"), ein symphonischer Kammerprog-Longtrack ("Kordz..."), finsterer Kammerprog zwischen Melancholie und unterschwelliger Aggression ("Ov.6") und schließlich auf originelle Weise zusammengefügte Elemente von rhythmischer Elektronik, Prog, Hip-Hop und Zeuhl in "Touch". Das abschließende "Dr Zab. am Wolfgang See" könnte als eine durchaus humorvolle Reise an den Wolfgangsee verstanden werden, in der die Sopranistin einige flotte Melodien zum aus den Keyboards und elektronischen Rhythmen bestehenden Ein-Mann-Ensemble des Projektchefs trällert.
Insgesamt halte ich "Sixteenth" für ein sehr unterhaltsames (und abwechslungsreiches) Werk, falls man die Definition der guten Unterhaltung auch auf finster eingefärbte, oder experimentelle Stücke ausdehnen darf. 25.5.2013
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Siggy Zielinski

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par Siggy Zielinski, 18/05/2013
Chronique de l'album
SEQUENCES

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"Sequences" beinhaltet die Filmmusik zu einem Dokumentarfilm von Nathalie Borgers. Der „Winds of Sand, Women of Rock" genannte Streifen beschäftigt sich mit dem in der Sahara lebenden Volk der Tubu. Genauer gesagt geht es darin um die aus unserer Sicht unter extremen Bedingungen lebenden Frauen. Gemeint sind nicht nur die klimatischen Bedingungen, sondern u. A. auch die Tatsache, dass die Tubu-Frauen in ihrem Leben keinen Schritt ohne die Erlaubnis ihrer Männer tun können.

Die Aufgabe die Musik zum Leben eines Wüstenvolkes zu schreiben birgt die Gefahr, dass der Komponist und Arrangeur auf die sich bietenden Klischees zurückgreift und seinen Auftraggebern vorwiegend die auf die Europäer orientalisch wirkenden Melodien zu ethnischer Perkussion liefert. Das Thema scheint Thierry Zaboitzeff zu liegen, hat er immer wieder auf seinen Soloalben Interesse an der sog. World Music durchblicken lassen.
Natürlich musste Zaboitzeff dem verständlichen Wunsch seiner Auftraggeber nachkommen orientalisch anmutende Musik für die Filmfreunde weltweit aufzunehmen. So können die zu erwartenden, entsprechend klingenden Passagen für Perkussion, exotische Saiteninstrumente, Flöte und Geige, an einer Stelle sogar mit Windgeräuschen unterlegt, nicht fehlen. Zaboitzeff versuchte aber dem Ganzen seinen Stempel aufzudrücken, indem er an vielen Stellen einen von orientalischen Elementen durchsetzten Kammerprog generierte, bei dem die Beiträge der Tasteninstrumente (mal als Klavier, dann wieder in Form eines Streicherensembles) mit ihren oft prägnant angelegten Figuren als roter Faden dienen. Neben exotischen Saiteninstrumenten und akustischen Gitarren verwendete der Künstler auch die Klänge der Cellos und der Blasinstrumente, die abwechselnd dicht verwobene und symphonisch ausladende Strukturen vermitteln.
In "Amina" gibt es männlich-weiblichen World Music-Gesang in der französischen Sprache. An einigen Stellen von „Sequences“ werden bei mir Erinnerungen an Phillip Glass wach, dann wiederum an die verträumte Ethno-Ambient-Trompete von Jon Hassell. Wenn ich es nicht in einer solchen Filmmusik für fast ausgeschlossen halten würde, so würde ich die zurückhaltenden Damengesänge in "Women of Rock Variation" und "The Destiny of Amina" für ein Zeuhl-Stilmittel halten.

Wenn man sich nicht daran stört, dass die vorliegenden musikalischen Skizzen nur selten über zwei Minuten hinausgehen, um weniger dem CD-Hörer, als dem Film zu dienen, und wenn man sich vergegenwärtigt, dass ein Soundtrack anderen Regeln folgen muss, als eine reguläre Veröffentlichung, so kann "Sequences" auch ohne die bewegten Bilder die toleranten Freunde des Kammerprog gut unterhalten.
18.5.2013
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Siggy Zielinski

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par Achim Breilling, 06/11/2007
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IVA LIRMA

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Thierry Zaboitzeff, one-time bassist and cellist, and, together with Gerard Hourbette, the creative force behind Art Zoyd, opens his archives. The Belgian’s new album has just been released (autumn 2007) by Spanish label Margen Records, where last year his cd debut came out. The new cd is subtitled ‘Archives 02-07’. ‘Iva Lirma’ contains 12 pieces which Zaboitzeff composed between 2002 and 2007. Each of them originally accompanied various dance theater performances by Edittta Braun such as ‘Luvos vol. 2’, ‘Manifest’, ‘oXalis’, ‘Matches of Time’ and ‘Coppercity’.
Those familiar with Zaboitzeff’s and Art Zoyd’s music won’t be surprised by what they find on ‘Iva Lirma’. The Frenchman creates with bass, cello, guitars, trumpets, various keyboards, percussion, assorted samples and electronic sounds dense, mostly sinister and threatening soundscapes, which flow out of the boxes in a sustained to very rhythmic way. Once again Zaboitzeff produces weird and hard-edged music. Compared to ‘Mïssa Furïosa’ or ‘Dr. Zab Vol. 2’, this cd presents more avantgarde and complex, if not complicated, compositions. The whole is simply more sparse and electronic, although now and again cello and bass dominate and define the sound.
Very rhythmic numbers (like the introductory ‘Matches of Time’), where Zaboitzeff thankfully abstained from the dancebeats which used to appear now and again, meet with threateningly sultry, dense sound waves, sustained ethno electronic and real Kammerprog, which occasionally reminds us of colleagues from Univers Zero and Present (listen to the second half of ‘Luvos vol. 2 Epilogue’). Zaboitzeff sings now and again, scratchy and rough as usual. The title song captivates with a hypnotically sinister refrain which bores itself into your brain. In the final ‘Crash’ Zaboitzeff sounds like Apocalyptica. Several cello grooves rock, accompanied dynamically by well-programmed percussion and brings the album to an almost hymnic end.
Zaboitzeff doesn’t necessarily offer anything new on ‘Iva Lirma’, but what he presents here is of good quality and interesting enough to be recommended by Electro-RIO-Avantgardists. Compared to his ex-colleagues from Art Zoyd, who are moving more and more onto contemporary-classic terrain, Zaboitzeff’s sound creations are clearly more lightweight and transparent. This may please the Proh listeners among us, who like more weird and complex music without going overboard.
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Achim Breitling

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par Achim Breilling, 27/05/2008
Chronique de l'album
VOYAGE AU CENTRE DE LA TERRE

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In December of 2005 the city of Paris celebrated the 100th anniversary of the death of Jules Verne. The festivity’s biggest event was a spectacular musical and optical staging of Verne’s ‘Journey to the Center of the Earth’. On December 17th and 19th, the huge Stade de France (French national stadium) in the Paris suburb of St. Denis was transformed into an enormous crater, and the public gathered in the middle of it. A battery of projectors and 40,000 square meters of screen were employed to show Stéphane Vérité and Philippe Corbin’s optical interpretation of Verne’s novel.

There was a storyteller, who supposedly recited parts of the script, various pyrotechnics and, of course, suitable music. The latter was composed by Thierry Zaboitzeff and performed live by him and his six fellow crew members, floating above the stage on four nine-meter-high towers. Supposedly, more than 130,000 people experienced this event, although I assume this is counting both evenings together. Not many musicians can claim to have performed in front of so many people at once, even though Zaboitzeff must admit to himself that most of them didn’t come to see him.

Nevertheless, a sticker decorates Zaboitzeff’s newest album (spring 2008), pointing out that it ‘contains the album version of the show, which attracted over 130,000 spectators!’. At least you find out an important fact : ‘Voyage to the Center of the Earth’ is not a live album recorded in December 2005. Zaboitzeff composed, played, produced and recorded this album before the Paris concert in his studio in Salzburg. He was assisted only by Sandrine Rohmoser and Gerda Rippel’s elegant voices. The rest the Frenchman did all by himself. Zaboitzeff was assisted by further musicians on the two evenings in the Stade de France.

From a musical point of view the listener is offered what one expects from Zaboitzeff and the theme. Compelling sounds, mostly dark and dramatic, flowing powerfully and grandiosely-produced from the speakers. Neoclasssic, highly electrified chamber rock sounds rule here in good Art Zoyd tradition, carried by string sequences, e-guitar, bass, cello, diverse electronic sounds and an endless number of voices, tones and sampler sounds, including some very convincing drum and percussion imitations. For nearly 20 years, Zaboitzeff has used several of them regularly, especially diverse bells. At times the music gets very hectic, almost machine-like, dancing contemporary-electronic-laden out of the speakers. Elegiac soundscapes, sacred sound cathedrals and very symphonic-classical parts are interposed with powerful, at times dissonent erruptions which leave their imprint on the whole. Zaboitzeff (with his typical rumbling voice) and the two women sing quite a lot, mostly without words or in a language either i can’t understand or which is made-up.

‘Voyage to the Center of the Earth’ offers a very sonorous, at times fulminant, secretive-mysterious trip (to the center of the earth or to other abysses – i can’t discrern many ties to Verne’s novel) which will certainly appeal to the lovers of the Frenchman’s. Of all his solo albums up until now, this one is the most balanced and convincing, even though one can note that Zaboitzeff always works with similar means of sounds and effects.
At any rate, here he has perfected his technique !
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Achim Breiling 

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par Achim Breilling, 24/04/2007
Chronique de l'album
DR. ZAB VOL. 2

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Thierry Zaboitzeff released part II of the sound excursion Dr. Zab in 2001. Part I – ‘Dr. Zab & his robotic strings orchestra’ – came out in 1992, while the Frenchman was still a member of Art Zoyd. ‘Dr. Zab Vol. 2’ was recorded by the Fantômatick Band, a Kammerrock formation of more than 20 musicians Zaboitzeff put together just for this album. At least the cd booklet leads you to believe this. If you read the booklet more closely, you will soon guess that behind the musicians’ strange names only one person is performing – Thierry Zaboitzeff. As with all of his solo albums, he alone is responsible for most of the sounds you hear, doing nearly all of the recording and mixing himself.

Of course it is possible that some of the wind and string sounds and some vocals don’t come from sampler, tape or from Zaboitzeff himself, and maybe a guest musician really does make a short (involuntary?) guest appearance. Be that as it may, as on part I, Zaboitzeff produces a very dense network of electronic keyboard and MIDI sounds, canned drums, some bass, various instrumental pieces, all kinds of sounds, snatches of speaking and singing voices and sampler pieces which all together sound musical and rich coming out of the speakers. Four very strange Beatles’ cover-versions are mixed in, sung by the master in his grunting-groaning voice.

The music’s atmosphere is floating and gloomy, recognizable by the sustained numbers from Art Zoyd’s electronic phase. Keyboard strings and bass insure Kammerrock interludes, oboe-like keyboard sounds create elegiac softness while the sounds of Arabic-Far East percussion and plucking instruments lend an ethno-touch, along with several exotic, unnamed voices. The music is at times somewhat strange and crooked, resounding and echoing freely and confusedly. Now and then the whole becomes simpler and ripples by in an unspectacular, almost shallow way (in ’Landregen’, for instance, which is very aptly named).

Those who are familiar with Zaboitzeff’s solo work and the work he did on the last Art Zoyd albums will recognize some similar themes. Apparently, Zaboitzeff likes to re-use old samples. It seems to me that he builds new pieces using fragments of old numbers, like playing with building blocks. Not that pieces are directly copied, but you get the feeling that you’ve heard diverse parts of ‘Dr. Zab Vol. 2’ before.

In that respect, ‘Dr. Zab Vol. 2’ does not offer anything new for Art Zoyd and Zaboitzeff connoisseurs. Listeners who like the Frenchman’s music will still like this album. Besides, this album is much more humorous than most of the others Zaboitzeff has produced. For instance, the strange grunting version of ‘Come Together’ is really cool!
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Achim Breiling 

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par Achim Breilling, 29/01/2005
Chronique de l'album
MISSA FURIOSA

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Thierry Zaboitzeff calls his and his crew’s newest album ‘Mïssa Furïosa’ a ‘techno-pop mass’. Well, i fear he won’t land in the disco dance charts with this ! ‘Mïssa Furïosa’’s premiere was elaborately staged at the Brucknerfest in Linz in September 2002. The small Paris label Intoxygene released the mass as a cd in 2004.

What do we hear here? A mass for two vocal soloists, voices, keyboards, bass, cello, violin, e-guitar and drums, enriched with electronic sounds, samples, tapes, computer rhythms and beats, ethno sounds and Zaboitzeff’s gloomy growl. Zaboitzeff followed the form of the traditional Catholic mass (Introitus, Kyrie, Gloria, Sanctus, Angus Dei – he left out the Credo), added a few more sets of his own, and created an electro-liturgical spectacle, complete with Latin lyrics.

The result is dense and full-toned, definitely interesting and very unusual. Gloomy, Zoyd-like sound mass meet classical soprano and baritone vocals, Middle Age choirs with modern dance beats, accompanied by hectic strings, wafting electronic peaks and minimalistic-repetetive bass patterns. Heavenly choirs float over endlessly repeating sequence patterns, augmented by Zaboitzeff’s demonic voice, bellstraps and hectic string sounds, over which the two solist’s intricately woven song soars. Floating sacral sounds intersperse with intense sections which at times become Zeuhl-like/hysterical (‘Dies Irae’), with sonorous, monumental keyboard landscapes, an almost-gospel choir (‘Gloria’), lamenting ‘monk’s chants’, a rhythmic-complex electronic sound jungle, short, nearly danceable sections, dominated by bass, drums and rhythm machine and much, much more.

When interviewed, Zaboitzeff stressed that his work contains neither blasphemous nor particularly Catholic intentions. His aim was to recreate the sacral atmosphere, the religious and iconographic rituals (embedded in a modern, contemporary sound) that had impressed him so much as a child during church visits. Some listeners may dislike the faintly techno-like beats which occasionally appear, but once you get used to them, ‘Mïssa Furïosa’ becomes interesting to listen to, with an impressive sound. The old Art Zoyd spirit shimmers through all over the place. Strange but good!
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Achim Breiling 

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par Achim Breilling, 14/06/2002
Chronique de l'album
MINIATUREN

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After he left Art Zoyd, Thierry Zaboitzeff worked mostly solo, composing music for various dance theater productions. Three of these – Heartbeat (1997), India (1998) and Alice (1999) – are included in the cd being reviewed here. Unfortunately, these works don’t always manage to capture the listeners attention without the visual support.

Zaboitzeff augmented his production of ‘Miniaturen’ in 2000 by colleagues Christian Kapun (clarinette) and Peter Angerer (drums) and the cd was labelled ‘Zaboitzeff & Crew’. Although Judith Lehner’s voice can still be heard on some of the tracks, apparently she doesn’t belong to the official band line-up.

‘Zoidan Suite in 3 Movements’ is the subtitle of this work, complemented by ‘Dance piece for 9 female dancers and 18 wintercoats’. Zaboitzeff lines up 40 tracks (condensed into 3 movements and the finale) filled with countless ‘zoydic’ sound fragments. Art Zoyd experts (especially ones who know their albums from Marathonnerre to Häxan) and those familiar with Zaboitzeff’s solo works (especially Dr. Zab & his robotic strings orchestra) will recognize them. New ideas and sounds, bizarre voices (especially Zaboitzeff’s growling song) and the two crew members’ clarinette and percussion playing add a new dimension to the old sound. The recording is powerfully mixed and, especially when enjoyed via headphones, a true tour de force through Zaboitzeff’s soundscape.

Nevertheless we must deduct a few points in the category ‘B grade’ (creativity). Overall, this cd is more or less ‘recycled’, because Zaboitzeff reuses most of the old Zoyd samples without hardly changing anything, so parts of it sound as if he had just remixed tracks from old cds. That said, the old material is still simply brilliant, so even a ‘remix’ is worthwhile. Plus, the addition of two musicians and diverse new ideas leaves much to be discovered on Zaboitzeff’s cd. Nice piece!
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Achim Breiling 

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par Achim Breilling, 09/04/2005
Chronique de l'album
NEBENSONNEN

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‘Nebensonnen’ is Thierry Zaboitzeff’s seventh solo album, and he did all the work on this record himself. The album’s subtitel ‘works for pianos, strings and soft electronics’ implies not only the instruments employed but also that the music on this disc is relatively quiet.
The piano dominates on ‘Nebensonnen’, which is basically a collection of piano pieces embellished with strings and electronic sounds. The one or two piano parts played range from sedate to lively, oriented on neoclassic models such as Bartok, Stravinsky or Schostakowitsch or the piano improvisations of Keith Jarrett. Now and again, Zaboitzeff accompanies himself on the cello. More often, string sound samples and sustained gloomy electronic tones provide a more extensive accompaniment and remind the listener of Art Zoyd’s electronic phase (from ‘Nosferatu’ on). This music is quiet, austere and unadorned, a true reflection of the album’s bleak cover art ... a fitting background to a rainy fall day or late winter afternoon.
Number 16 – ‘Divertissement’ – is a remix of the number of the same name from his album ‘Musique pour l’Odyssee’ (though it scarcely varies from the original), and the only time the album attains a full sound. The music is melancholy, almost cold (although there are cheerful moments, such as in ‘Räuber und Gendarm’/’Cops and Robbers’), yet it eminates a very simple, sublime beauty.
‘Nebensonnen’ seems to be a destillation of Zaboitzeff’s music, like a simplified yet clearly delineated sketch of the Vienna-based Frenchman’s musical ideas. This album is perfect for life’s quieter hours (by which i imply that some may find this music boring) !
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par Achim Breilling, 01/05/2007
Chronique de l'album
ALICE

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‘Les chants d'Alice et du vieux monde’ is the full title ofThierry Zaboitzeff’s fifth solo album. Like it’s predecessors ‘Prométhée’, ‘Heartbeat’ und ‘India’, ‘Alice’ was composed as background music for a scenic dance theater performance called ‘Alice, c’est merveilleux, non?’. As usual, Zaboitzeff does all the work, excepting three short saxophone interludes by Luciano Pagliarini.
Overall, ‘Alice’ is is fairly tranquil. The sounds pace along in a sustained, elegiac and diffident way, becoming even restrained, for a Zaboitzeff album there is a lot of singing and declaiming (astoundingly, not in Zaboitzeff’s typical rumbling-groaning way), embedded in plain soundscapes and subtle swirls of noise. Bass, cello and guitar are used sparingly. More predominant are piano, e-piano, keyboards, MIDI sounds and many (some old familiar) samples. Beautiful, well-rounded sounds flow out of the speakers. Zaboitzeff smoothly mixes diverse sounds, snatches of singing, noises and exotic instrumental fragments with clouds of softly wafting keyboards. Nevertheless, the album ripples along in a quite diffident and composed way.
Connoisseurs of Thierry Zaboitzeff’s music will hardly be surprised by ‘Alice’. They will find the usual neo-classical/strange sound mixture, only this time somewhat one-dimensional, languid, harmless (almost complaisant) and austere. Maybe the music was more interesting to see and hear performed together with the scenic production. In a purely acoustic sense the music is a very fluffy and resonant earful, but power and tension are missing from this album. ‘Alice’ is probably the most uninteresting album the Frenchman ever made !
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Achim Breiling 

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par Achim Breilling, 08/05/2007
Chronique de l'album
INDIA

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Die Trennung war nun offenbar vollzogen. Unten auf dem Cover von "India", dem vierten Soloalbum von Thierry Zaboitzeff, ist "Ex Art Zoyd" zu lesen. In stilistischer Hinsicht hat diese Trennung allerdings keine Spuren hinterlassen. Auch "India" klingt, wie schon der Vorgänger "Heartbeat" (auf dem Zaboitzeff noch mit dem Zusatz "from Art Zoyd" firmierte), nicht sehr viel anders als das, was die nordfranzösische Kammerprogformation in den 90er Jahren produziert hat. Etwas einfacher ist die Musik gestrickt, weist gelegentlich mit ein paar Dancebeats Zugeständnisse an den Zeitgeschmack auf und hat diesmal eine ausgeprägt exotische Atmosphäre.
Wie "Heartbeat" ist auch "India" Musik für ein von Editta Braun in Szene gesetztes Tanztheaterstück. Darin geht es - wie man leicht erraten wird - um Indien. In der Musik schlägt sich dies natürlich in allerlei Ethnoklängen nieder (Sitar, Tablas, indische Saitenklänge, elegische Flötentöne etc.) und in entsprechenden Gesangseinlagen und Sprachfetzen. Eingebettet sind dieselben im Zaboitzeff-typischen, getragen bis aufgewühlt dahinfliessenden, neoklassisch-elektronischen Zoydschen Raumklang, erzeugt von allerlei Tasteninstrumenten, Bass, Gitarren und Cello. Dazu kommt eine Unzahl von gesampleten Geräuschen, Stimmfetzen und Klängen, programmierte, mitunter recht heftig aus den Boxen stürmende Perkussion und allerlei bizarre, elektronische Sounds. Ab und an wird auch gesungen bzw. gesprochen, von Zaboitzeff in Französisch und von verschiedenen, im Beiheft nicht genannten, vermutlich aus Indien stammenden Damen und Herren. Allerdings stammen nicht alle aus Indien. In "Austrian Jungle Raga" (und auch später immer wieder) ist ein Männerchor zu hören, der mit Sicherheit in einer deutschsprachigen Alpenregion beheimatet ist.
Ab und zu baut Zaboitzeff Dancebeats in die Musik ein (in "Such is My Dream" z.B.), die für eine nichtklassische Tanzaufführung zwar ganz angebracht sind, dem konservativen Progger aber vielleicht etwas übel aufstoßen werden. Recht derb ist in dieser Hinsicht "Holi Trance Final Cut", welches mit allerlei Umz-Umz-Umz-Abschnitten aufwartet, aber mit seiner wirren Mischung - insbesondere dem hier immer wieder dazwischenpurzelnden Alpenchor - selbst dem Rezensenten ein Schmunzeln abgewinnt.
"India" ist eine durchaus gelungene Scheibe mit Ethno-Elektro-Kammerprog, die Liebhabern der elektronischen Phase von Art Zoyd sicher zusagen wird. Zaboitzeff erzeugt hier einige sehr dichte, fremdartige Klanglandschaften und gelegentlich auch sehr ergreifende, melancholische Momente ("Loneliness"), die den Hörer fesseln, auch wenn das Ganze nicht die Klangmacht und Komplexität seiner Stammband erreicht.
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Achim Breiling 

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par Achim Breilling, 28/04/2007
Chronique de l'album
HEARTBEAT

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‘Heartbeat’ was the first solo album Thierry Zaboitzeff made after leaving Art Zoyd. At that time the separation was not absolutely final, at least not when the cd first came out (‘Häxan’, the last album Zaboitzeff worked on, was also released in 1997). Under Zaboitzeff’s name you can still find ‘from Art Zoyd’ printed on cover and disc. ‘Heartbeat’ is - like most of Zaboitzeff’s solo work – the soundtrack to a dance theater production of the same name. Editta Braun created the choreography and lent her voice to a few pieces. Some of the cd’s tracks were recorded during the production’s first performance in Salzburg in April 1997. The cd’s subtitel is ‘Concerto for Dance & Music op. 1’.

Zaboitzeff recorded the music to ‘Heartbeat’ completely by himself, and during the performances he more or less played the work live (with the help of computer and sampler). Because Zaboitzeff was Art Zoyd’s dominant element (along with Gérard Hourbette, with whom he shared the composing), it’s not surprising that ‘Heartbeat’ bears a great stylistic resemblence to the Art Zoyd albums on which Zaboitzeff worked and which were released shortly before ‘Heartbeat’, such as ‘Faust’ and Häxan’. Zaboitzeff’s solo music is somewhat simpler and more catching, but all in all the album sounds exactly the way one would expect an Art Zoyd musician’s solo album to sound. ‘Heartbeat’ contains neo-classical Kammerrock

sounds, made up of string-sounding keys, e-guitars, bass, cello and countless sampler sounds and noises, including drum and percussion imitations. Zaboitzeff sings now and then, his voice at times deeply groaning or normal and musical.

‘Heartbeat’ starts off powerfully. Beeping synthesizer sounds, a thunderstorm pouring out of the speakers, the creaking noises of a sailing ship, splashing water, howling winds, sonorous humming, MIDI-saxophone interludes and all kinds of sounds make up the very dense and pressing ‘Introduction’, after which subdued bells chime into the measured pace of the ‘Kijé’, an interpretation of the well-known theme from Sergei Prokofiev’s’Lieutenant Kijé’s Suite’, more commonly known in rock circles as Sting’s’Russian’. Zaboitzeff’s grunting voice is very effective in this song. The sound quality of this album, like all of Zaboitzeff’s work, is very impressive, very powerful, clear and full of nuances. The music’s key note is rather gloomy and melancholy, but the addition of tribal singing samples give it an occasional exotic ethno-atmosphere.

Threatening clouds of sound, atmospheric sound flickers, disturbing sound collages and the sustained measured pace of Kammerrock all can be found on ‘Heartbeat’, as they characterize Art Zoyd’s electronic albums from ‘Nosferatu’ on, only with less complexity and denseness than Zaboitzeff’s ex-band. A few strange songs, sung in Zaboitzeff’s strange voice (‘Russia’, ‘Clear Light’ or the bizarre cover version of ‘See Me, Feel Me, Touch Me, Hear Me’) skillfully lighten up the album. It’s not always quite clear which language Zaboitzeff sings in – it could possibly be Kobaïan. Because guitars, bass and cello often take over the melodic line, ‘Heartbeat’ doesn’t seem overly ‘electronic’, even though it’s teeming with sound samples. Insiders will recognize some of these samples from other Art Zoyd albums, as mentioned above, and also from Zaboitzeff’s second solo album ‘Dr. Zab and his robotic strings orchestra’. This will not be the last time the Frenchman uses the same sounds again.

I like ‘Heartbeat’, even though it contains a few simple, somewhat stomping electronic-canned drums-dance sections, which i suspect most Art Zoyd fans won’t like. If you are one and stumble over this album, buy it !

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Achim Breiling

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par Achim Breilling, 30/05/2002
Chronique de l'album
DR. ZAB & HIS ROBOTIC STRINGS ORCHESTRA

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Thierry Zaboitzeff, Art Zoyd’s bassist until 1996, released his second solo album in 1992, at the same time as the two ‘Marathonnerre’ cds (‘Prométhée, his first solo work, was released in 1983).

On this album Dr. Zab takes a romp through his home studio. Zaboitzeff mixes together an orgy of sampled sounds and noises and diverse instrumental tracks. The result is a singular, electronic sound brew which from ‘Marathonnerre’ on increasingly characterizes Art Zoyd’s music as well : neo-classical, gloomy, threatening, symphonic, complex – just more synthetic as the music on the band’s albums from the 1980’s.

The whole work is quite varied, including a series of background noises (water dripping), horses clip-clopping, helicopters flying by...etc.), at times quoting classical role models (for instance the track ‘Dr. Zab & his robotic string orchestra’ is stolen directly from the third movement of Schostakowitsch 8th symphony) without mentioning the corresponding composers – but hey, we’re used to Prog-musicians doing that – and has a truly gigantic sound.

‘Dr. Zab & his robotic strings orchestra’ is a wholly interesting cd and a worthy investment for all Art Zoyd-completists and electronic sample freaks.

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Achim Breiling

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par Achim Breilling, 29/04/2007
Chronique de l'album
PROMETHEE

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In 1984 the bassist, cellist, keyboarder and innovator of electronic sounds, Thierry Zaboitszeff, who has been a leading member of the Northern French RIO-Chamberprogformation Art Zoyd since the mid-1970’s, released his first solo album. The two numbers from ‘Prométhée’ originate from the score of the dance theater piece ‘Aeschilius’ Prometheus’, which Zaboitzeff composed for the Collectif Theatral Du Hainault. Zaboitzeff did almost everything himself, as with nearly all of his future solo albums. He played all the instruments – except the saxophone which surfaces now and then, played by Art Zoyd band colleague Didier Pietton – as well as doing all the mixing and production work.

In terms of music, Zaboitzeff’s first solo excursion doesn’t differ much from the compositions found in the later ‘Le Marriage du Ciel et de l’Enfer.’ Anyone who is familiar with the Art Zoyd albums will recognize the similaritiy in the beginning of ‘Part Two’. Zaboitzeff presents a simpler and more electronic sound than Art Zoyd’s, the music seems more uniform, but in places more hypnotic, almost like music to a strange, electro-acoustic ritual. Now and then the whole thing peters out, with long, ethereal sounds that drift, shimmer and plink, splashing without contour out of the speakers, and moments when the music paces statically, without really getting anywhere. Otherwise one is offered complex-offbeat, drifting-bizarre Chamberprog, vibrant sound constructions, complicated tonal collages dominated by bass, guitars, cello and keyboards, supplemented by several percussive structures as well as tape recordings, strange voice recordings and electronic effects. Zaboitzeff uses these interesting sound decorations more and more with Art Zoyd and in later solo works.

In comparison to Zaboitzeff later solo works, ‘Prométhée’ seems somewhat unripe and pieced-together. But nevertheless, this album has a much more experimental focus than later works along with a sympathetic, raw charm. Art Zoyd fans, especially those who favor the before-mentioned ‘Le Marriage du Ciel et de l’Enfer’, should lend their ears to ‘Prométhée’, which was released as a CD in 2005.
BABYBLAUE SEITEN (D)
Achim Breiling



INROCK.RU (RU)
par Elena Savitskaya, 12/11/2021
Chronique du EP
PAGAN DANCES

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En version Russe originale suivie d'une traduction en français par un traducteur automatique en ligne.

Мастермайнд французского рок-авангарда Тьерри Забойцев не дремлет: в сентябре текущего года он выпустил новый цифровой сингл. В нём две композиции – «Pagan Dances», давшая название всему EP, и «La Légende de NaYmA». Почти 15-минутная «Pagan Dances», безусловно, отсылает нас к Стравинскому: его «Весне священной», «Жар-птице» с её «Поганым плясом Кощеева царства». Но у Забойцева это, если можно так выразиться, язычество постиндустриальной эпохи. А потому звучит всё современно, в духе времени: с обильной электроникой, машинными ритмами, сонористическими фактурами, встроенными в звуковую ткань сэмплами. В то же время в музыке много живого, человеческого – выразительно поющая в руках Тьерри акустическая виолончель, фортепиано и даже электрогитара. Стоит ли говорить, что на всех инструментах сыграл, всё запрограммировал и свёл воедино сам Тьерри Забойцев?
Композиция «Pagan Dances» имеет рондообразную структуру и построена на чередовании и обновлении нескольких элементов-лейтмотивов. Это отдалённые диссонантные «зовы» синтезатора, звучащие таинственно и пугающе (с них начинается пьеса); певуче-печальные фразы виолончели; прыгающие изломанные мотивы и гаммообразные пассажи фортепиано, на которые накладываются тягучие завывания электрогитары (они напоминают о манере Роберта Фриппа); долбящие аккорды всей группы; фрагменты с чёткими, почти танцевальными ритмами и сэмлированными вставками – они звучат драйвово и одновременно зловеще. Всё это наслаивается, «накатывается» друг на друга, а заканчивается «Pagan Dances» поистине «апокалиптической» кодой с трубными гласами низких духовых и закольцованным хоралом струнных – она напоминает и мрачные старинные пассакалии, и, конечно, провидческие альбомы Art Zoyd вроде «Symphonie pour le jour où brûleront les cités».
После этого достаточно короткая (около 5 минут) «La Légende de NaYmA» звучит как сказка-колыбельная. Но сказка довольно страшная. В ней Тьерри Забойцев на фоне мерцающих мотивов фортепиано, скрипучих контрапунктов виолончели и отдалённых переливов электроники ведёт рассказ на непонятном языке. (Иногда там слышатся русские слова вроде «ужаса»). Он будто бы никого не пугает, а наоборот, успокаивает. И всё же… О чём этот рассказ? О кровопролитных битвах, пережитых страданиях, потерянных богатствах, прекрасной заточённой в башне принцессе? Мы не знаем, чем всё закончилось, будем надеяться, что хорошо… Остаётся лишь слушать глубокий голос Тьерри Забойцева и одинокое пение виолончели, звучащее в самом конце этой песни-легенды.
В целом сингл – просто подарок любителям прогрессива и авангарда, рекомендуется к обязательному прослушиванию.
PS Отметим и интересную монохромную обложку авторства Тьерри Моро (Thierry Moreau): «танцующий пень» как бы олицетворяет ожившие силы природы.
Послушать сингл можно на всех цифровых платформах, например, на bandcamp: https://thierryzaboitzeff.bandcamp.com/album/pagan-dances-ep


TRADUCTION
Le cerveau de l'avant-garde rock française Thierry Zaboitsev ne dort pas : en septembre de cette année, il a sorti un nouveau single numérique. Il a deux compositions - "Pagan Dances", qui a donné le nom à l'ensemble de l'EP, et "La Légende de NaYmA". "Pagan Dances" de près de 15 minutes nous renvoie sans aucun doute à Stravinsky : son "Sacred Spring", "Firebird" avec sa "Rotten dance of Koscheev's Kingdom". Mais pour Zaboitsev, c'est pour ainsi dire le paganisme de l'ère post-industrielle. C'est pourquoi tout sonne moderne, dans l'air du temps : avec une électronique abondante, des rythmes de machine, des textures sonores, des échantillons intégrés dans le tissu sonore. En même temps, il y a beaucoup de vivant, d'humanité dans la musique - un violoncelle acoustique, un piano et même une guitare électrique, chantant de manière expressive entre les mains de Thierry. Inutile de dire que Thierry Zaboitsev lui-même a joué, programmé et rassemblé tout sur tous les instruments ?
La composition "Pagan Dances" a une structure de forme ronde et est construite sur l'alternance et le renouvellement de plusieurs éléments leitmotiv. Ce sont de lointains "appels" dissonants du synthétiseur, qui sonnent mystérieux et effrayants (le morceau commence par eux) ; les phrases mélodieusement tristes du violoncelle ; des motifs brisés sautant et des passages de piano en forme de gamme superposés aux hurlements filandreux d'une guitare électrique (rappelant la manière de Robert Fripp); marteler les accords de tout le groupe; fragments avec des rythmes clairs, presque dansants et des inserts samplés - ils sonnent à la fois entraînants et menaçants. Tout cela est superposé, « roulé » les uns sur les autres et se termine par « Pagan Dances », une coda vraiment « apocalyptique » avec des voix de trompette de vents faibles et un choral de cordes en boucle - cela rappelle à la fois la sombre vieille passacalia et, bien sûr, le des albums visionnaires d'Art Zoyd comme Symphonie pour le jour où brûleront les cités. "
Après cela, le plutôt court (environ 5 minutes) "La Légende de NaYmA" sonne comme une berceuse. Mais l'histoire est assez effrayante. Thierry Zaboitsev y raconte une histoire dans un langage incompréhensible sur fond de motifs de piano vacillants, de contrepoints de violoncelle grinçants et de débordements lointains d'électronique. (Parfois, des mots russes comme "horreur" y sont entendus). Il ne semble effrayer personne, mais au contraire, il se calme. Et pourtant... De quoi parle cette histoire ? A propos de batailles sanglantes, de souffrances vécues, de richesses perdues, d'une belle princesse emprisonnée dans une tour ? On ne sait pas comment tout cela s'est terminé, espérons que ce sera bon... Il ne reste plus qu'à écouter la voix grave de Thierry Zaboitsev et le violoncelle solitaire chanter à la toute fin de cette chanson mythique.
En général, le single n'est qu'un cadeau pour les amateurs de progressif et d'avant-garde, il est recommandé pour une écoute obligatoire.
PS Notons aussi l'intéressante couverture monochrome de Thierry Moreau : le « moignon dansant » comme incarnait les forces de la nature ravivées.
Le single est à écouter sur toutes les plateformes digitales, par exemple sur bandcamp : https://thierryzaboitzeff.bandcamp.com/album/pagan-dances-ep

12 Novembre 2021
inrock.ru
Elena Savitskaya
Note 9/10
Avant Progressive

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INROCK.RU (RU)
Par Elena Savitskaya, 8/02/2021
Chronique de l'album
PROFESSIONAL STRANGER

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Traduction automatique en ligne

Thierry Zaboitzeff : Professional StrangerLe nouvel album solo de Thierry Zaboytsev, le cerveau de l'avant-garde rock française, a vu le jour en novembre 2020. Cela s'est produit seulement un an et demi après la sortie en mars 2019 du premier de son nouveau projet Aria Primitiva (voir le compte-rendu). En outre, trois bandes sonores de spectacles de la chorégraphe Editta Braun se trouvent entre ces deux sorties (l'une d'elles, "Nebensonnen", est sortie pour la première fois en 2000 et a été réenregistrée, les deux autres, "Layaz" et "Trails", sont nouvelles). Et ce n'est pas tout ce qui a été publié récemment ! Mais l'album solo est quelque chose de spécial, de personnel, on peut dire, d'intime. Contrairement à l'avant-rock industriel et tribal vraiment "tapageur" d'Aria Primitiva, "Professional Stranger" sonne transparent, minimaliste, fascinant et chaleureux. Thierry a lui-même joué de tous les instruments, parmi lesquels on trouve invariablement la guitare basse, le violoncelle, les claviers, différents samplers et... l'accordéon (mais nous en parlerons plus tard).

Dans "Professional Stranger", Thierry a voulu rendre hommage à différentes cultures et époques : les titres multilingues des compositions et le contenu musical lui-même en parlent - mais sans stylisation pure et simple. L'album s'ouvre sur "Neoklassikos le grand" avec un thème néogothique majestueux et légèrement angoissé sur fond de batterie électronique monotone, de contrepoints "postartzoïdaux" de cordes et de chant ethnique. De ce thème naît une mélodie de violoncelle en plastique, dont le développement est interrompu au plus haut point par le coup d'un gong. Suit l'atmosphérique L'insouciance de Vénus, tissée d'accords de piano célestes et de lointains bruits de basse fréquence semblables au tonnerre, dans laquelle apparaît également la mélodie ludique, authentiquement française, de l'accordéon-bandonéon ; Plus loin - un peu naïf, un peu chambré "Mali valcer" ; et, au contraire, spirituel, audacieux, passionné - "El Caos" espagnol aux cordes tournoyantes... Il y a une place pour la piste "russe" (rappelons que le grand-père paternel de Zaboitsev est originaire de la région d'Arkhangelsk, à qui Thierry doit son nom de famille). Il s'appelle "Derevo" (dans certaines versions de l'album, il est même écrit en caractères cyrilliques). Sur fond de motifs minimalistes de piano et de cordes "pizzicato", on y entend une mélodie, chantante et intime, qui passe du violoncelle à l'accordéon. En effet, elle rappelle nos chansons persistantes, les paysages nordiques, et même quelque chose du travail du merveilleux groupe russe "Orchestra Vermichel". Eh bien, les fans russes d'Art Zoyd et Thierry Zaboitsev sont très heureux d'une telle attention !

Le titre "So etwas wie blau" (en allemand : "Something Like Blue") a un caractère ambiant subtil. Le motif en boucle lente dans la basse est accompagné de trémolos de cordes et de hurlements d'outre-monde de trompette et d'anche ou de flûte de pimak. Immersion totale dans un autre monde... Et le "Traitement des chevauchements", avec son rythme ostinato, ses accords qui claquent et ses chants qui se déploient - à nouveau quelque chose de russe, d'archaïque, de dansant-païen, comme un rite préhistorique - rappelle non sans raison le "Printemps sacré" de Stravinsky (malgré son nom super moderne).

Deux reprises sont intégrées dans la série générale des compositions, toutes deux sur des chansons très célèbres dans les milieux pop-rock. Le premier est "Vénus" de Shocking Blue (il fait suite à "L'insouciance de Vénus", s'immisçant de manière assez peu cérémonieuse dans le développement). La version est assez proche de l'original, mais elle sonne avec un peu d'une touche ethnique, étant donné l'instrumentation utilisée. La partie vocale est interprétée par la chanteuse autrichienne Sandrine Rohrmoser, qui collaborait avec Zaboitsev dans ses projets. Mais la dernière chanson "Enjoy the Silence" de Depeche Mode est très originale : dans une tonalité mélancolique post-folk-ambient, également avec l'accordéon et le violoncelle, avec la voix profonde et narrative de Zaboytsev. Le deuxième couplet inclut de manière inattendue des motifs arabes dans l'accompagnement - un mélange interculturel surprenant. Dans l'ensemble, c'est inhabituel, intéressant et très suggestif... Malheureusement, les deux couvertures ne sont pas incluses dans la version bandcamp en raison de la politique de copyright du site, alors écoutez l'album sur Spotify, YouTube ou commandez le CD.

Et à la fin - sur l'accordéon. Thierry Zaboytsev a-t-il maîtrisé un nouvel instrument ? Son timbre est si réaliste - on peut entendre les plus petites nuances, les nuances de la vocalisation, le "souffle de l'air", même la pression des boutons... Avec cette question, nous avons appelé le maestro. Il s'est avéré qu'il s'agissait d'un timbre échantillonné, et que toutes les parties étaient jouées au clavier. Mais la qualité supérieure des échantillons et la possibilité de corriger les plus petits détails créent l'illusion d'une authenticité du son. C'est à cela que servent les progrès ! Et progressiste en conséquence. Cet album est un voyage fascinant, un véritable voyage musical, ou, peut-être, une série de miniatures cinématographiques poursuivant l'idée des ciné-concerts. Et, bien sûr, une œuvre digne du glorieux parcours créatif de Thierry Zaboytsev lui-même.

Elena Savitskaya
InRock
Note: 9 sur 10

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INROCK.RU (RU)
Par Elena Savitskaya, 13/06/2019
Chronique de l'album
ARIA PRIMITIVA - SLEEP NO MORE

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Aria Primitiva – новый проект авантрокового гуру Тьерри Забойцева (экс Art Zoyd). Музыкальная идея проекта, по словам маэстро, заключается в синтезе первобытных ритмов с новейшими звуками и элементами рок-авангарда. Неслучайно на обложке диска изображены устрашающие африканские маски! Даже лица музыкантов на фото подсвечены так, словно на них боевая раскраска. Но на самом деле этнического в Aria Primitiva не так много. Музыка близка позднему Art Zoyd и сольным работам Забойцева, в которых он тяготеет к парадоксальному сочетанию классических жанров с авангардным содержанием («Missa Furiosa» и др.). Скорее, это индустриальная симфония современных каменных джунглей, в которых человек выживает и даже пытается не сойти с ума.

В Aria Primitiva Тьерри Забойцева (бас-гитара, электровиолончель, вокал, программинг) окружают две прекрасные девушки – Надя Радсимандреси и Сесиль Тевено. Обе играют на клавишных инструментах, но если у Сесиль это «обычные» синтезаторы, то про Надин инструмент надо сказать особо. Это волны Мартено (ondes Martenot) – изобретение французского музыканта и радиоинженера Мориса Мартено (1928), в котором звук, генерирующийся электросхемами, может изменять высоту и громкость как при помощи обычной клавиатуры и регуляторов, так и совершенно диковинным образом – при помощи специального кольца. Надевая его на палец правой руки и пронося её над клавиатурой, можно добиваться «поющего» глиссандо и всевозможных космических звуков; а можно создавать вибрирующие тоны определённой высоты. Волны Мартено похожи на более привычный нам терменвокс (изобретение российского физика Льва Термена), но сложнее в устройстве. Надя Радсимандреси – выпускница Парижской консерватории, ныне сама профессор в консерватории Болоньи, где как раз учит, как играть на волнах Мартено и на синтезаторах попроще. Она сама по себе очень востребованная исполнительница и композитор. Её связи с Art Zoyd достаточно давние – Надя участвовала в записи «беззабойцевских» альбомов 2000-х, а также в эпохальном объединении Art Zoyd на фестивале Rock in Opposition в 2015 году.

Благодаря необычному и редкому инструменту звучит «Ария Примитива» довольно своеобразно, хотя, возможно, «голос волн» вы расслышите не сразу. В первой композиции «Endayi Endesi» его заслоняет играющий в унисон (но на пару октав ниже) мощный бас и тревожно пульсирующий ритм. Но в начале «Hystamack» он хорошо заметен – эти взмывающие к небу глиссандо звучат словно сигналы радиообмена с внеземными цивилизациями. А дуэт с электропиано в «Nixen» (затем к нему присоединяется виолончель) просто удивительно хрупок и прекрасен.

Что же касается «примитивности» и шаманизма, то они подстерегают на каждом шагу. То кто-то зловеще захохочет, то собаки (сэмплированные) залают, то вроде даже утка крякнет, то Тьерри горловое пение изобразит. В «Maidaykali» поначалу слышится что-то неуловимо французское, будто бы на ярмарочной площади звучит аккордеон. Но тут же врываются индустриальные ритмы, и сдавленный голос Забойцева настойчиво наговаривает что-то о грядущем апокалипсисе, пусть и на непонятном языке. Главный хит альбома – «Sleep No More», открывающаяся сэмплом с криками какого-то первобытного племени – ритмичная и даже где-то мелодичная композиция с «расщеплённым» вокалом Забойцева (и ведь он, как утверждает, не использует никаких обработок!), чем-то напоминающая артзойдовскую нетленку «Baboon’s Blood». Центральный трек – 12-минутная «Aria Primitiva», электронная симфония с «шагающим» в нечётном размере басом, фортепианными синкопами и гротескными «трубами». То и дело развитие, впрочем, прерывается «висячими» колокольными аккордами, звоном и скрипом струн, цифровыми щелчками, жужжанием электрогенераторов и прочими вскрывающими мозг звуками. А ещё пару раз проходит острохроматическая тема, очень напоминающая DSCH – звуковую монограмму Дмитрия Шостаковича. Недаром всё-таки у Тьерри Зайбойцева есть связи с нашей страной! И неслучайно, думается, одна из импровизационных композиций называется «Kletka» (такие вот возникают ассоциации…). В последней композиции «Mais Ouvrez Donc Cette Porte!» (как, впрочем, и во многих других) слышатся отзвуки Стравинского. Лишь рок-хит «Helden» (кавер вещи Брайана Ино и Дэвида Боуи из альбома «Heroes»), которую Тьерри Забойцев весьма выразительно, в своём мрачном духе, поёт по-немецки (в оригинале песня двуязычная), словно слегка выпадает из этого ряда. Но для бисов она в самый раз – именно так она прозвучала на концерте Aria Primitiva в Зальцбурге в ноябре 2018 года. Да, самое удивительное, что весь этот материал не только прекрасно записан в студии, но и исполняется вживую – разумеется, с «подкладами», но в то же время в реальном времени. Будет возможность – разыщите на YouTube концерт и насладитесь зрелищем.
Рецензия будет опубликована в InRock №88

TRADUCTION 
Aria Primitiva est un nouveau projet du gourou de l'avantrock Thierry Zaboitsev (ex Art Zoyd). L'idée musicale du projet, selon le maestro, est la synthèse de rythmes primitifs avec les derniers sons et éléments du rock d'avant-garde. Ce n'est pas un hasard si de terrifiants masques africains sont représentés sur la pochette du disque ! Même les visages des musiciens sur la photo sont mis en valeur comme s'ils portaient de la peinture de guerre. Mais en fait, il n'y a pas beaucoup d'ethnicité à Aria Primitiva. La musique est proche des œuvres en solo de feu Art Zoyd et Zaboitsev, dans lesquelles il gravite vers une combinaison paradoxale de genres classiques avec un contenu d'avant-garde (Missa Furiosa, etc.). C'est plutôt une symphonie industrielle de la jungle de pierre moderne dans laquelle une personne survit et essaie même de ne pas devenir folle.
Dans Aria Primitiva, Thierry Zaboitseva (basse, violoncelle électrique, chant, programmation) est entouré de deux belles filles - Nadia Radsimandresi et Cécile Théveno. Les deux jouent des claviers, mais si Cécile possède ces synthétiseurs "ordinaires", alors l'instrument de Nadine doit être spécialement mentionné. Ce sont des ondes Martenot (ondes Martenot) - une invention du musicien et ingénieur radio français Maurice Martenot (1928), dans laquelle le son généré par les circuits électriques peut changer la hauteur et le volume à la fois à l'aide d'un clavier et de boutons conventionnels, et d'une manière complètement extravagante - à l'aide d'un anneau spécial. En le mettant sur le doigt de votre main droite et en le portant au-dessus du clavier, vous pouvez obtenir un glissando « chantant » et toutes sortes de sons cosmiques ; mais vous pouvez créer des tons vibrants d'une certaine hauteur. Les ondes Marteno sont similaires au thérémine plus connu (invention du physicien russe Lev Theremin), mais de structure plus compliquée. Nadia Radsimandresi est diplômée du Conservatoire de Paris, elle-même professeure au Conservatoire de Bologne, où elle enseigne le jeu des ondes Marteno et des synthétiseurs plus simples. Elle-même est une interprète et compositrice très populaire. Ses liens avec Art Zoyd sont assez anciens - Nadya a participé à l'enregistrement des albums de Bezzaboytsev des années 2000, ainsi qu'à l'association d'époque d'Art Zoyd au festival Rock in Opposition en 2015.
Grâce à un instrument inhabituel et rare, "Aria of Primitive" sonne assez particulier, même si, peut-être, vous n'entendrez pas immédiatement la "voix des vagues". Dans la première composition "Endayi Endesi", il est éclipsé par une basse puissante jouant à l'unisson (mais quelques octaves plus bas) et un rythme palpitant alarmant. Mais au début de "Hystamack", c'est clairement visible - ces glissandos planant vers le ciel sonnent comme des signaux d'échange radio avec des civilisations extraterrestres. Et le duo avec le piano électrique dans Nixen (puis le violoncelle le rejoint) est tout simplement incroyablement fragile et beau.
Quant à la « primitivité » et au chamanisme, ils guettent à chaque pas. Maintenant, quelqu'un va rire de façon inquiétante, puis les chiens (échantillonnés) aboieront, puis il semble que même un canard grognera, puis Thierry décrira un chant de gorge. Au début, il y a quelque chose de subtilement français dans "Maidaykali", comme si un accordéon jouait dans la fête foraine. Mais ensuite, des rythmes industriels ont fait irruption et la voix étouffée de Zaboitsev dit avec insistance quelque chose sur l'apocalypse à venir, bien que dans un langage incompréhensible. Le hit principal de l'album est "Sleep No More", qui s'ouvre sur un sample aux cris d'une tribu primitive - une composition rythmique et même quelque part mélodique avec la voix "split" de Zaboitsev (et, comme il le prétend, il n'utilise pas aucun traitement !) quelque chose qui rappelle l'impérissable "Babouin's Blood" d'Artzoy. Piste centrale - 12 minutes "Aria Primitiva", une symphonie électronique avec "walking" dans une basse de taille étrange, des syncopes de piano et des "trompettes" grotesques. De temps en temps, le développement est cependant interrompu par des accords de cloche "suspendus", des sonneries et des grincements de cordes, des clics numériques, le bourdonnement des générateurs électriques et d'autres sons qui ouvrent le cerveau. Et quelques fois de plus, il y a un thème chromatique aigu, qui rappelle beaucoup le monogramme sonore de DSCH - Dmitry Shostakovich. Ce n'est pas pour rien que Thierry Zayboytsev a des liens avec notre pays ! Et ce n'est pas un hasard, je pense, si l'une des compositions d'improvisation s'appelle "Kletka" (de telles associations apparaissent...). Dans la dernière composition "Mais Ouvrez Donc Cette Porte!" (comme, d'ailleurs, dans beaucoup d'autres), des échos de Stravinsky se font entendre. Seul le tube rock "Helden" (reprise de la chanson de Brian Eno et David Bowie de l'album "Heroes"), dont Thierry Zaboitsev est très expressif, dans son esprit lugubre, il chante en allemand (dans l'original la chanson est bilingue), comme s'il sortait un peu de cette série. Mais pour les rappels, c'est juste - c'est ainsi que cela sonnait lors du concert Aria Primitiva à Salzbourg en novembre 2018. Oui, le plus étonnant est que tout ce matériel est non seulement parfaitement enregistré en studio, mais aussi joué en direct - bien sûr, avec des "pads", mais en même temps en temps réel. Il y aura une opportunité - trouvez un concert sur YouTube et profitez du spectacle.

La critique sera publiée dans InRock # 88
Impression générale
avant rock 9/10
Thierry Zaboitzeff / Monstre Sonore / WTPL Music

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INROCK.RU (RU)
Par Elena Savitskaya, 14/09/2016
Chronique de l'album
MULTIPLE DISTORTIONS

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avant-rock 10/10
Booster/wtpl-music

Тьерри Забойцев, один из «мозговых центров» знаменитой французской RIO-группы Art Zoyd, покинул свою alma mater в 1997 году и с тех пор работает самостоятельно. Он пишет музыку для театра и хореографических постановок, выступает, как и во времена Art Zoyd, с «синеконцертами» (саундтреки к черно-белым немым фильмам), записывает диски с собственной группой Zaboitzeff & Crew. Эпохальное воссоединение с Art Zoyd на французском RIO Fesitval 2015 года уже осталось в истории: сыгранная тогда двухчасовая программа наверняка увидит свет на аудионосителе, но о долгосрочном реюнионе речь и не шла. Так что Тьерри продолжает творить в своей мастерской – всего с момента ухода из Art Zoyd у него издано 17 дисков. Один из грандиозных проектов последнего времени – «Missa Furiosa» на латинские католические тексты для певцов и... техно-поп-ансамбля (2002). То, что Забойцефф увлекается современными направлениями типа техно, использует сэмплы, программированные ударные и прочую электронику, не должно удивлять – музыкант идёт в ногу со временем. Хотя его главными инструментами остаются бас-гитара и электровиолончель. Как следует из названия диска, это – сборник архивных материалов, охватывающий 2005-2016 годы. Т.е. не такие уж они архивные, а скорее современные. Всего здесь 15 композиций на 76 минут звучания. Правда, к какому году конкретно относится тот или иной трек, в аннотации не указано, да это и не важно – пластинка слушается как единое произведение, на общем дыхании. Разве что первый трек, «Rebonds», более отчетливо принадлежит «артзойдовской» сфере благодаря характерному напряженному настроению, тревожным ритмам перкуссии и диссонантным «зовам» электронных «труб». Хотя и здесь есть довольно внезапный неосвинговый кусок. Вторая вещь, «Le lac des signes v.3», своим шизоидным повторением зловещего мотива у клавесина напоминает и лучшие страницы «зойдианы», и... «сцену с курантами» из «Бориса Годунова» Мусоргского. А вообще на диске вы можете найти совсем неожиданного Тьерри: играющего развесёлое латино («Vorschrift») и хмурое фламенко (“Overdrive 3”), вполне себе прямолинейные гитарные рок-риффы в «Overdrive 4», радикальный нойз/сонористику («Sign 2») и воздушный эмбиент («Continents»), лёгкий симфо-арт-рок (“Die Maschine”) и какое-то совсем изогнутое диско («Wings”)... Кстати, об уже упомянутой «Overdrive»: композиции с таким названием, но с разными идущими не по порядку номерами, прослаивают альбом, и основаны на электрическом и акустическом гитарном звучании. Иногда это могут быть риффы, иногда – мерцающие переборы или вполне развёрнутые темы, звучащие очень меланхолично и... человечно (порой напоминая даже поздний King Crimson, но это напоминание здесь сделано просто как «зацепка» для более широкой аудитории). Одна из самых впечатляющих композиций – "Lose-extended for electric bass quintet". Нет сомнения, что это одна и та же бас-гитара Забойцева, играющая пять голосов этой авангардной фуги и используемая как очень выразительный мелодический инструмент. Здесь же таится сюрприз, честно обозначенный в сноске к трек-листу: композиция содержит «маленький кусочек» напевной мюзикловой темы «My Favorite Things» - кто найдёт, тому приз! Тоже довольно неожиданный ход для того, кого мы привыкли считать великим (что не оспаривается) и "ужасным". В общем и целом, «Multiple Distortions» демонстрирует разные и порой совсем непривычные стороны Тьерри Забойцева – выдающегося композитора второй половины ХХ века, чьё творчество стало образцом для многих авангардных групп последующих поколений. И если вы интересуетесь авант-роком, диск обязательно займёт достойное место в вашей коллекции.
INROCK (RUSSIA)
Елена САВИЦКАЯ

TRADUCTION 
Thierry Zaboitsev, l'un des think tanks du célèbre groupe français RIO Art Zoyd, a quitté son alma mater en 1997 et travaille de manière indépendante depuis lors. Il écrit des musiques pour le théâtre et des performances chorégraphiques, se produit, comme au temps d'Art Zoyd, avec des « synconcerts » (bandes originales de films muets en noir et blanc), enregistre des disques avec son propre groupe Zaboitzeff & Crew. Les retrouvailles marquantes avec Art Zoyd au French RIO Festival 2015 sont déjà entrées dans l'histoire : le programme de deux heures diffusé alors verra sûrement le jour sur le support audio, mais il n'était pas question d'un long terme réunion. Thierry continue donc de créer dans son atelier - au total, depuis qu'il a quitté Art Zoyd, il a publié 17 disques. L'un des projets les plus ambitieux de ces derniers temps - "Missa Furiosa" sur des textes catholiques latins pour chanteurs et ... ensemble techno-pop (2002). Cette, que Zaboitseff aime les tendances modernes telles que la techno, utilise des échantillons, des batteries programmées et d'autres appareils électroniques, cela ne devrait pas être surprenant - le musicien reste dans l'air du temps. Bien que ses principaux instruments soient la guitare basse et le violoncelle électrique. Comme le nom du disque l'indique, il s'agit d'une collection de documents d'archives couvrant les années 2005-2016. Celles. ils ne sont pas si archivistiques, mais plutôt modernes. Il y a 15 compositions au total pour 76 minutes de son. Certes, l'annotation n'indique pas à quelle année tel ou tel morceau fait spécifiquement référence, et cela n'a pas d'importance - le disque s'écoute comme une œuvre unique, dans un souffle commun. Peut-être que le premier morceau, "Rebonds", appartient plus clairement à la sphère "Artzoy" en raison de l'ambiance tendue caractéristique, des rythmes dérangeants des percussions et des "appels" dissonants des "pipes" électroniques. Bien qu'il y ait aussi une pièce non swing assez soudaine ici. La deuxième pièce, "Le lac des signes v.3", avec sa répétition schizoïde du motif inquiétant au clavecin rappelle à la fois les meilleures pages de "Zoidiana" et ... la "scène avec carillons" de "Boris Godunov" de Moussorgski. En général, sur le disque, vous pouvez trouver un Thierry complètement inattendu : jouant du latin joyeux ("Vorschrift") et du flamenco sombre ("Overdrive 3"), des riffs de guitare rock assez directs dans "Overdrive 4", du bruit / sonoristique radical ("Sign 2 ") Et ambient aéré (" Continents "), art-rock symphonique léger (" Die Maschine ") et une sorte de disco complètement courbé (" Wings ")... Au fait, à propos du " Overdrive " déjà évoqué : des compositions portant ce nom, mais avec des numéros différents dans le désordre, superposent l'album, et sont basées sur le son de la guitare électrique et acoustique. Parfois ça peut être des riffs parfois - des thèmes exagérés vacillants ou assez étendus semblant très mélancoliques et ... humains (rappelant parfois même feu King Crimson, mais ce rappel est fait ici simplement comme un "crochet" pour un public plus large). L'une des compositions les plus impressionnantes est "Lose-extended for electric bass quintet". Il ne fait aucun doute qu'il s'agit de la même guitare basse de Zaboitsev, jouant les cinq voix de cette fugue d'avant-garde et utilisée comme instrument mélodique très expressif. Il y a aussi une surprise, honnêtement indiquée dans la note de bas de page de la liste des morceaux : la composition contient un « petit morceau » du thème musical mélodieux « My Favorite Things » - celui qui le trouve, reçoit un prix ! C'est aussi un geste plutôt inattendu pour quelqu'un que nous avons l'habitude de considérer comme grand (ce qui n'est pas contesté) et « terrible » (et c'est la question). Globalement, "Multiple Distortions" montre des côtés différents et parfois complètement inhabituels de Thierry Zaboitsev, un compositeur exceptionnel de la seconde moitié du 20e siècle, dont l'œuvre est devenue un modèle pour de nombreux groupes d'avant-garde des générations suivantes. Et si l'avant-rock vous intéresse, le disque prendra assurément la place qui lui revient dans votre collection.
avant-rock 10/10
Booster/wtpl-music



LE MONDE DE LA MUSIQUE (F)
par Franck Mallet, 01/1998
Chronique de l'album
HEARTBEAT

Associant instruments classiques et électroniques au sein du groupe Art Zoyd, Thierry Zaboitzeff, avec la complicité de Patricia Dallio, Daniel Denis et Gérard Hourbette, a réalisé plusieurs musiques pour des spectacles de Roland Petit (Le Mariage du del et de I'enfer et Valentine Love Songs) et Serge Noyelle (Marathonnerre et Macbeth) ainsi que pour le cinema muet de Friedrich W. Murnau (Nosferatu et Faust) et Benjamin Christensen (Häxan), tout en composant des pièces originales parfois accompagnées de videos, notamment Les Espaces inquiets, Promethee et Berlin.

Aujourd'hui separe d' Art Zoyd, Ie musicien, qui pratique à la fois le violoncelle, la guitare, Ie chant, les claviers et la percussion, entreprend une carrière de soliste, prefiguree en 1992 avec son spectacle Dr Zab & his Robotic Strings Orchestra.

Son dernier enregistrement, Heartbeat, sous-titré Concerto for dance and music op. 1, a ete crée à Salzbourg en avril dernier avec la choregraphe et danseuse Editta Braun.

Avec sensibilité, Zaboitzeff tire de ses machines des sons étranges qu'il intègre à ceux d'instrurnents non electrifiés. Attirant dans ses maillages sonores des bruits naturels, à la manière d'insectes vibrant sous la lumière artificielle, il trame des espaces inquiets bourdonnants, visites ici ou là par des souvenirs anciens, de la suite du Lieutenant Kijé de Prokofiev à la Premiere Symphonie de Mahler, en passant par Magma, Ryuichi Sakamoto et les Who (Tommy). 




PROG RESISTE (B)
Autour du coffret rétrospective Thierry Zaboitzeff - 50 ans de musique (s)

Interview Contact - Thierry Zaboitzeff (solo, ex-Art Zoyd)
Entretien avec : Thierry Zaboitzeff
Propos recueillis par : Tom Charlier
Janvier - Février 2023

Site web



Par une nuit introspective zébrée d'incertitude(s), nous avons cheminé vers le cabinet de curiosités du Docteur Thierry Zaboitzeff, expert plus que patenté en potions capiteuses et autres estranges émanations transmutatoires, qui tisse depuis plus d'un demi-siècle, méticuleusement et avec tout le soutien de l'éclectisme électronique accumulé de près de deux cents ans de dystopies steam punk, la matière des beaux mauvais rêves d'une semi-trouzaine de futurs alternatifs concassés et décompressés. Nous avons osé demander à cet archimage confidentiel quelques indications sur sa recette, qui demeurera secrète à moins de bien délier ses propos initiatiques.

Prog-Résiste : Le 22 septembre dernier, vous venez de sortir un coffret rétrospectif sur vos 50 Ans de Musique(s), pour lequel vous n'avez pas adopté un regard chronologique, ce qui est, avouons-le, dépaysant et créatif dans la conception même. Quels sont les principes fondateurs qui ont présidé à cette sélection et réunion ? Notez que par souci de cohérence interne, nous adopterons ce même regard atemporel pour notre interview.

Thierry Zaboitzeff : Dès le moment où j’avais décidé de m’attaquer à cette anthologie, je n’en aurais jamais imaginé la difficulté pour lui donner un souffle, un élan. Je ne me suis rien refusé et le premier choix fût de travailler ma playlist de manière chronologique, ce qui se révéla un fiasco total, je veux dire par là que cela me semblait lourd, redondant, inécoutable et n’aurait d’intérêt que pour les fanas d’archives datées… Je ne voulais surtout pas proposer ce genre de lecture de ma musique… Il m’a fallu aller en avant puis en arrière puis en avant pour enfin dans les premiers temps, tout mettre à la corbeille avant de recommencer…
Inconsciemment, je souhaitais proposer un voyage au coeur de mes sons, de mes orchestres imaginaires, de mes espaces virtuels ou non. Je ne pouvais être que le seul à décider de cela et de le mettre en oeuvre. Je remettais tout à plat, puis réalisais une nouvelle sélection de morceaux les plus variés possible au sein de mon catalogue, avec ce matériau sonore, je proposerai un voyage hors du temps, de mon temps, en laissant filer mes compositions suivant mon humeur et chemins de traverses que je prends souvent lorsque je compose quelque chose de nouveau.
Tel est le secret de ce coffret rétrospective. J’ai pour la cohérence sonore, remixé ou idéalisé certaines compositions ou dans certains cas, rejoué et ré-enregistré. (voir le booklet…)

PR : Si ma chronologie est exacte, Prométhée et Dr. Zab & his Robotic Strings Orchestra demeurent les seuls albums solo que vous avez réalisé tout en gravitant toujours pleinement au sein d'Art Zoyd. Qu'est-ce qui vous a lors poussé à sortir ces albums sous votre propre nom ?
TZ : Dans les années 82-83-84…, parallèlement à Art Zoyd, j’ai eu l’occasion de travailler pour une compagnie de Théâtre (Collectif Théâtral du Hainaut) pour laquelle durant de nombreuses années, je composais des musiques de scène… Cette expérience m’a totalement investi et enrichi. La musique de l’album « Prométhée » est issue de ce contexte . Pour la toute première fois, je me trouvais dans la situation d’écrire, jouer et enregistrer de la musique sans devoir l’imaginer pour un groupe ou ensemble instrumental en particulier et dans ce cadre, j’allais me lâcher réunissant toutes sortes d’objets et instruments que détournais allègrement de leur usage habituel, ainsi par exemple, mon violoncelle, me servait à fabriquer du vent par frottement des cordes avec des éponges en utilisant conjointement des echos successifs.
Mon but premier étant de planter des décors de sons que je n’imaginais pas être joués par un groupe, à cette époque là… C’était là une démarche intime que je tenais à poursuivre en solo tant que ce langage serait différent de celui d’Art Zoyd.

Concernant « Dr Zab & his Robotic Strings Orcherstra » Il en fût de même, toutes ces musiques provenaient de productions pour le théâtre et dans la fièvre de ces années là, je m’empressais d’en éditer une suite qui serait attrayante sur CD, ce qui fût le cas, je crois ! Puis je me suis pris au jeu, je me suis inventé un personnage « Le Dr. Zab » et de fil en aiguille, parallèlement à mes activités Art-Zoydiennes, j’allais me retrouver sur scène en sorte de « MC » comme l’on disait à cette époque, pour un show entre grandiloquence instrumentale, électro-acoustique et séquences très clipées souvent tournées en dérision car je ne me prenais surtout pas au sérieux. le concert était introduit par une chanson de Luis Mariano qui hurlait depuis mon ghetto blaster utilisé pour mon entrée en scène et se terminait par un bis joué sur un violon-jouet automatique que j’avais toujours peine à mettre en oeuvre pour les besoins de la situation. Vous l’aurez compris, loin des musiques sérieusement bombastiques que je paratiquais pour et avec l’Art Zoyd d’alors…


PR: À propos de l'utilisation de la voix en tant qu'instrument à part entière, quelles sont les influences des différents types de musique vocale traditionnelle sur vos compositions ? Les polyphonies sardes et balkaniques ainsi que le chant guttural mongolien en font-ils partie ?

TZ : Oui, ce sont des chants et des techniques qui m’ont beaucoup intéressé, pas pour les reproduire strictement mais pour les introduire de différentes manières dans mes compositions, plus particulièrement le chant guttural que j’ai beaucoup mêlé à mes sons de basse et de violoncelle pour en produire des timbres si particuliers ou des masses parfois non-identifiables.
Mais je dois dire aussi que j’aimais beaucoup certaines façons de chanter de Tom Waits.
J’ai toujours adoré l’utilisation de la voix, rarement dans un format chanson, plutôt comme une palette supplémentaire dans mes couleurs sonores…


PR: Quasiment simultanément avec Häxan, vous avez exploré de la musique théâtrale chambriste et futuriste avec Heartbeat. Avez-vous des accointances stylistiques avec le RIO de Dagmar Krause et spécifiquement l'album Desperate Straights de Henry Cow/Slapp Happy ?

TZ : Non, Henry Cow est un groupe que j’ai particulièrement écouté et aimé sur les albums « Unrest » et « In Praise of Learning » Ces productions font partie de ma culture musicale au même titre que beaucoup d’autres. J’ai toujours évité tant que je le pouvais de ressembler à tel ou tel courant ou tendance, cela m’a parfois desservi par rapport aux réseaux mais j’en retire une pleine satisfaction aujourd’hui. Bien sûr, je peux affirmer que chaque son et musique que nous apprécions tout au long de notre vie laisse malgré nous une empreinte indélébile.


PR: Comme à l'écoute des trilogies fondatrices de Magma, on ressent une forte influence SF dans votre musique, notamment dans la manière dont vous dépeignez des entours sonores dystopiques, aux reliefs émotionnels délicieusement accidentés. Quelle a été l'impulsion initiale qui a mené à cette démarche, et pourquoi est-elle restée pérenne ? En d'autres termes, qu'est-ce qui fait selon vous sa longévité ?

TZ : Pour ma part, dans mes musiques, je ne fait aucune référence à la SF littéraire ou filmique.
Même si je plante parfois des décors dystopiques, c’est pour mieux en sortir quelques minutes plus tard. Ce que je trouve absolument unique et très palpitant dans la création sonore et uniquement musicale, c’est qu’en l’absence de mots, d’images, nous puissions frissonner à la simple réception d’un son ou d’un groupe de sons et je me plais à ménager des contrastes saisissant dans cet univers particulier qui est le mien. Parfois au départ d’une composition, sur un simple son de voix, je m’imagine une légende ou le début d’une légende qui n’existe pas puis l’agencement des sons des rythmes font le reste… Le Voyage… La Magie… Le Rêve…

PR: Vous avez rejoint Art Zoyd en 1971. Comment avez-vous vécu et influencé le passage de flambeau entre les fragrances psychédéliques du groupe mené par Rocco Fernandez et les premiers albums du groupe à la fin des Seventies ?

TZ : Gérard Hourbette et moi-même sommes entrés ensemble dans Art Zoyd en 1971 à l’invitation de Rocco Fernandez. Je dois dire que nous étions des gamins à cette époque et manquions de maturité mais il nous fallut peu de temps pour trouver notre place dans le groupe, d’en accepter et comprendre les codes puis de les développer et les transcender ensemble jusqu’à notre album culte de 1976 « Symphonie pour le jour où brûleront les cités »
Je raconte ceci sous forme d épisodes sur mon site à l’adresse suivante 
https://www.zaboitzeff.org/zaboitzeff-raconte.html
vous y trouverez moult et savoureux détails qu’il serait trop long de développer ici.


PR: Est-ce l'amour de la musique Zeuhl et du RIO qui vous a mené vers la musique contemporaine du XXe siècle ou l'inverse ? Quel sont vos premières découvertes musicales dans les deux domaines (rock et avant-garde), et y a-t-il un (ou plusieurs) artiste(s) que l'on pourrait considérer comme pont(s) entre les deux ? En clair, comment êtes-vous passé de Neil Young à Magma et Varèse ?

TZ : Comme adolescent et passionné de musique Rock et sans culture musicale particulière, et sans imaginer un instant que je serai un jour musicien et compositeur, j’écoutais beaucoup de choses, les inévitables Beatles, Stones, Kinks… Puis Hendrix, les premiers Pink Floyd… Le choc se produisit lorsque que découvrait Frank Zappa et les Mothers sur une chaine de TV et il en fût de même lors de la sortie du premier double album album de Magma. Tout ce foisonnement d’inventions musicale affutait ma curiosité et très vite, je me suis mis en recherche des origines de ces musiques qui avaient créé en moi une irrésistible envie de devenir musicien et je remontai à Edgar Varèse, Igor Stravinsky, Bela Bartok, Serge Prokofiev, les Musiques Anciennes, Le Jazz avec Miles Davis et John Coltrane, Berio, ligeti… Je m’offrais ainsi une nouvelle culture musicale suscitant bien d’autres envies.

PR: Art Zoyd est reconnu pour ses associations multimédia et ses accompagnements musicaux de films muets des années - mille neuf cent - 10 et 20 (Häxan, Nosferatu, Faust et votre bande son du Cabinet du Docteur Caligari pour ne citer que ceux-là). Avez-vous d'autres projets prévus dans cette lignée ? Quelle a été votre plus grande gageure en la matière ?

TZ : A ce jour, je n’ai pas d’autre projet de ce genre, j’estime avoir déjà tellement expérimenté
dans ce domaine que cela ne me semble plus un « must », une priorité. Avec le recul, le point culminant me semble être le Nosferatu de Murnau que nous avions entrepris avec une certaine innocence et inexpérience mais avec beaucoup d’audace, ce qui a contribué au succès mondial de ce projet soutenu par cette imagerie autour du vampire.
Je mettrais à part les excellents projets Faust, puis Häxan qui mettra un terme à ma carrière avec Art Zoyd, je ne voulais plus actionner des samplers et des boucles au pied d’un écran, nous avions déjà tout dit alors que Gérard Hourbette souhaitait poursuivre cette démarche et l’orienter vers un langage musical plus aride loin de mes envies artistiques.

Quinze années plus tard, je recevrais l’invitation du festival Berlinois « Somnambule ERSTES INTERNATIONALES CALIGARI à créer un nouvel environnement sonore en live sur Le Cabinet du Dr Caligari de Robert Wiene, quasiment sur les lieux du tournage de ce film. J’hésitait un instant car je craignais de retomber dans certains travers puis après quelques essais concluants, je trouvais les chemins excitants d’une nouvelle création et je peux dire que c’est mon meilleur projet de ciné-concert car il me semble que je sois parvenu à un équilibre musical entre instrumental traditionnel et électro-acoustique juste et bien maitrisé. Ce n’est que mon opinion bien sûr !
Je vous invite à consulter cette page pour plus d’information.
https://www.zaboitzeff.org/the-cabinet-of-dr-caligari-cine-concert.html

PR: Voyez-vous quelque chose d’oulipien [par rapport à l'Oulipo, laboratoire de littérature ?
Je ne pense pas avoir quelque chose en rapport avec ce mouvement littéraire, si ce n’est que je tente souvent de déjouer mes habitudes par certaines contraintes notamment lors de commandes de musique pour lesquelles je m’impose parfois de n’utiliser qu’un seul type d’instrument, soit acoustique, soit électronique ou les deux.

PR: J'ai personnellement beaucoup apprécié le lyrisme cinématique, le folklore imaginaire, la puissance évocatrice ambient et les paysages sonores de Professionnal Stranger. Cet opus laisse parler quelques clins-d'œil et influences inattendus, notamment via les covers de Depeche Mode, Bananarama et - mais peut-être est-ce moi qui fabule - la légèreté folk innocente d'un Lars Hollmer. Pouvez-vous nous détailler quelque peu le processus de création de cet album ?

TZ : La Musique de Professionnal Stranger est en partie composée pour un projet chorégraphique et théâtral « Long Life « « editta braun dance company » https://www.editta-braun.com/e/productions/long-life.html pour lequel, nous avions besoin de références rock assez typée et après quelques recherches, je me suis souvenu de Venus (Shocking Blue) que j’adorais lorsque j’étais adolescent, je décidais donc d’en faire une reprise et cela m’a beaucoup amusé d’autant que la couleur sonore générale du spectacle tournait autour de l’accordéon que j’ai utilisé sur toute la bande son du spectacle et il en fût de même concernant « Enjoy The Silence » (Martin Gore - Depeche Mode - Album Violator) morceau que je me suis complètement approprié et adapté pour une scène parlant de l’âge, du temps qui passe et qui ne revient pas en arrière. Même si les thèmes de la pièce sont graves, j’ai intentionnellement traité mes compositions et soundscores pour dégager de la légèreté et de l’insouciance sur un rythme cinématique comme vous le dites très bien et aussi en introduisant des couleurs folkloriques d’Europe de l’Est.


PR: Quels sont vos projets dans l'immédiat ? Une suite de l'EP Pagan Dances est-elle envisagée ou est-il prévu comme une œuvre autonome ?
A cet instant, je dirai que je suis en recherche, purement dans la composition


TZ : A cet instant, je dirai que je suis en recherche, purement dans la composition, des projets attendent que je me dégage du temps comme par exemple enregistrer une adaptation électronique et libre de chants et danses de pèlerins qui se rendaient au monastère de Montserrat près de Barcelone à la fin du Moyen Age pour y vénérer une vierge noire. Ces chants composés par des anonymes furent collectés et notés par les moines dans un livre à la couverture de velours rouge qui porte donc ce titre : “Llibre Vermell de Montserrat” le plus célèbre recueil de chants de cette époque. J’avais monté ce projet avec une chatneuse (Sandrine Rohrmoser) pour quelques concerts en 2004 puis j’ai dû passer à autre chose… Je m’y replonge bientôt.
https://www.zaboitzeff.org/llibre-vermell.html

PR: Par pure curiosité, quels sont aujourd'hui votre pièce d'Art Zoyd et votre composition personnelle favorites, et pour quelles raisons les recommanderiez-vous ? Si ce dernier élément de réponse va de soi, point n'est besoin de le préciser ! Un tout grand merci pour cet entretien à distance éclairant.

TZ : Je ne parlerais pas de pièces mais plutôt d’albums qui sont « Phase IV / Le Mariage Du Ciel et de l’enfer / Les Espaces Inquiets et Berlin ». Ces quatre disques sont pour moi des étapes importantes et charnières dans ma carrière musicale avec Art Zoyd. Nous avons énormément investi humainement, musicalement et ensemble pour monter ces projets et les tournées liées à cette époque.

Merci à vous et à Progrésiste.

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PROGRESISTE (B)
par Dominique Genin 04/2020
Chronique de l'album
ARIA PRIMITIVA - SLEEP NO MORE

Site web

WTPL Music/ Monstre Sonore | - 56'26- FRA ‘18
RIO, Avant-Prog

Il y a environ 2 ans, je vous parlais du nouveau projet de Thierry Zaboitzeff, un trio improbable
mais magique. Il nous sortait à l'époque une première ébauche de l'album que je vous présente aujourd'hui sous forme d'un EP. intitulé Work in Progress.
Mais petite récap tout d'abord pour vous re-situer la chose.
En 1971, Zaboitzeff intègre Art Zoyd qu'il refonde totalement en 1975 en compagnie de Gérard Hourbette. Ce seront les grandes années du groupe, de superbes albums et des grandes créations, comme les musiques composées pour les ballets de Roland Petit {un must}.
En 1997 il quitte le groupe. Art Zoyd va poursuivre sa quête de musiques nouvelles, de plus en plus nouvelles, de plus en plus complexes et parfois assez hermétiques. Thierry, lui, saura mieux doser dans ses projets personnels, avant-garde et accessibilité.
Depuis, il a sorti près d'une vingtaine d'albums où se côtoient l'expérimental, le rock symphonique et les musiques électro-acoustiques. Lors d'un concert anniversaire, il rencontre deux jeunes musiciennes déjà dotées d'une belle expérience et, surtout animées d'une même curiosité artistique. Nadia Ratsimandresy est diplômée en Onde Martenot du conservatoire de Paris et Cécile Thévenot est une pianiste formée entre autres au conservatoire de Dijon.
Ils décident de s'aventurer dans un projet commun où les sonorités impalpables des Ondes Martenot de Nadia, des samplers hypnotiques de Cécile s'allieraient au violoncelle et au chant de Thierry. Mais au-delà d'un cocktail étonnant de sonorités, le trio désire avant tout explorer la confrontation des musiques primitives et de celles dites d'avant-garde. Le projet mûrit, ils sortent un EP d'une petite vingtaine de minutes et se produisent en concert en Europe.
Cet album confirme ce qu'ils nous avaient laissé entrevoir. Ce premier vrai opus comporte 9 titres dont les 3 retravailés de l'EP. Avec Endayi Endesi, composition qui ouvre l'album, les ingrédients de la formule du Zab nous sont présentés. Sleep No More nous est-il demandé ensuite, une reprise de la composition d'Art Zoyd {sur Vorgänge en 87), pas de danger de s'endormir, même s’il fait très sombre ici. La composition phare de l'album, Aria Primitiva, est l'ambassadrice de l'album et résume bien l'objectif du trio, créer une musique électro-acoustique intense et contrastée, où l'intimisme se mêle au volcanisme, où les percussions tribales et hypnotiques s'allient aux vocalises gutturales de Zaboitzeff “ et s'opposent à la douceur évanescente des harmoniques fugaces des claviers et des ondes Martenot.
Maïdaykali est de la même veine, son volcanisme fait penser à Magma {sic}, On se sent tout zeuhl, devant ces éructations vocales à la Vander
Helden, qui outre-Rhin, signifie Heroes, est bien la reprise dans la langue de Goethe, Marx et Lagerfeld (entre autres) du fameux titre de Eno et Bowie, plus proche ici de l'interprétation d’Apocalyptica que de la version originale.
Deux titres, Hystamack et Kletka très Ambiant, impressions sonores dominées par les claviers et des ondes Martenot furent enregistrés live à Salzburg et sont en fait des impros. Idem avec Nixen, minimaliste et délicat.
Mais ouvrez donc cette. porte clôt étrangement cet album pas facile d'accès donc, mais superbement original, qui ose explorer et sait découvrir des mondes inconnus mais captivants.
N'est pas explorateur qui veut et ainsi soit-il.

www.zaboitzeff.org

Dominique Genin (Prog-résiste 100)

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PROGRESISTE (B)
par Dominique Genin, 2018
Chronique de l'album et DVD
THE CABINET OF DR. CALIGARI

Site web

Booster/WTPL Music -150"25
FRA'14

THIERRY ZABOITZEFF, cofondateur d'Art Zoyd, s'est essayé à de nombreuses expériences musicales. Il excelle ici dans
un exercice qu'il a déjà pratiqué avec Art Zoyd : la mise en musique de monuments du cinéma muet. lci nous retrouvons notre Dr. Zab dans le Cabinet du Dr Caligari chef-d'œuvre de Robert Wiene sorti en 1919. Référence incontournable du cinéma expressionniste allemand, ce film muet à l'esthétique et à l'interprétation outrancière, aux décors faits d'espaces distordus exigeait une bande sonore qui mettait en valeur ce climat gothique, mystérieux et fantastique. Ce DVD ne reprend pas uniquement le film sonorisé par Zaboitzelf mais également une performance de ciné-concert de notre Dr. Zab, filmée au Théâtre Toursky de Marseille en 2013. Nous sommes ainsi plongés dans une double projection, film et concert. Cette musique interprétée en live parait ainsi beaucoup plus puissante, plus expressive qu'une simple bande sonore. Entouré de ses instruments, seul sur scène, habité par l'ambiance du film, Zaboitzeff, évolue entre son violoncelle, sa basse, sa guitare, ses claviers, ses percussions et ses machines. Il vit et crée une performance unique où parfois on a l'impression que c'est le Dr. Caligari qui rend visite au studio du Dr. Zab.

www.zaboitzeff.org
Dominique Genin
2018

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PROGRESISTE (B)
par Dominique Genin, 07/2018
Chronique de l'album
MULTIPLE DISTORTIONS

Site web

Contrairement à l'opus précédent aux ambiances variées, Muliiple Distortions me parait moins multiple quant aux ambiances. Celles-ci sont plus uniformes dans les tons sombres, oppressants, moins contrastés. Cet album est un assemblage d'archives qui s'étalent de 2005 à 2016. La plupart des compositions sont inédites, mais aucune info n'est donnée quant à leur date de création. D'autres morceaux sont des versions alternatives d'anciennes compositions, comme le lac des Signes, présenté avec Art Zoyd sur Marathonnerre. Quatre pièces sont également issues d'un ancien projet qui n'a pas abouti, Overdrive. D'autres ont servi de support à divers spectacles. Certaines compositions nous rappellent l'Art Zoyd des eighties, comme Rebonds, d'autres plus nom-
breuses sont plus électroniques, minimalistes faitesde boucles répétitives, dominées par les machines, comme … Die Machine. Mais le Dr. Zab, multi-instrumentiste, sait construire un équilibre entre ses machines et les instruments électro-acoustiques. Il excelle au violoncelle et à la basse, comme sur le
lose extented for electric bass quintet ou à la guitare sur les 4 Overdrive qui ne sont pas sans rappeler un certain Fripp Crimson.
Ces archives représentent donc un savant mélange de musique contemporaine, d'avant garde et d'électro, le tout mijoté dans un sombre chaudron,
qui génère des ambiances troubles et provoque des rêveries angoissantes.

Dominique Genin
Prog-résiste 93

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PROGRESISTE (B)
par Dominique Genin, 07/2018
Chronique des albums
SIXTEENTH / MULTIPLE DISTORTIONS

Site web

Booster/Wtpl - 6452 / 76'11 -FRA ‘12 / 16
Style : RIO, Avant-Prog

Thierry ZABOITZEFF fait parler de lui dans ce numéro ! En plus de la sortie de l'EP qui présente son nouveau groupe, nous avons droit à trois rééditions qui valent la peine d'être écoutées et vues puisque pour l'une de celles-ci, il s'agit d'un DVD... retrouvez moi donc au rayon DVD également}. En 20 ans, le Dr. Zab aura composé Î8 albums et l'histoire continue puisqu'au rayon nouveauté je vous parle également de son nouvel ensemble, Aria Primitiva.

Malgré son imagination débordante, Thierry Zaboitzeff ne nous a pas surpris avec le titre de son seizième album sorti en 2012, intitulé courageusement 16 en français et Sixteenth pour les anglophile. Par contre, en ce qui concerne ses compositions, l'imagination est bien au rendez vous. Il n'est pas aisé de trouver la bonne étiquette, simple et unique, pour coller sur ce CD tant les compositions sont variées. Notre Dr. Zab, comme d'hab, navigue à vue entre l'électrique, l'électronique et l'acoustique. Il joue de tous les instruments mais sait également se faire aider par des machines pour créer boucles et percussions, principalement dans la seconde moitié de l'album. Les instrumentaux succèdent aux superbes morceaux chantés par la soprano Isabelle Farmini. Il sait également mettre en scène ou plutôt en musique le fameux discours de Martin Luther King, dans Free At last. La durée des compositions est de cinq minutes en moyenne, pas de grands développements des idées donc, ce qui rend la musique de Zaboitzeff très accessible. Petite exception quant à la durée, les 12 minutes de Kordz et les anges gardiens permettent de mieux développer différentes atmosphères et font de cette composition une des plus intéressantes de l'album. Au niveau des sonorités et timbres, l'éventail est assez large, les différentes compositions évoquent Art Zoyd {notamment une interprétation de Mariée à la Nuit, Magma, Implosion d'Univers Zero, Dead Can Dance, certaines e-Music allemandes robotisantes mais également certaines expériences de Robert Fripp. Grande variété ou manque d'uniformité, la question ne se pose pas vraiment, grâce à une grande fluidité qui fait que les compositions s'enchainent admirablement pour créer un voyage coloré aux multiples atmosphères.



VENTRILOCUTION (P)
par Luis Olivera, 09/2005
Chronique de l'album
MISSA FURIOSA

Extravagant, outrageous or quite simply daring? Absurd as it may seem, it is extremely difficult to answer this question in light of Thierry Zaboitzeff's immensely bizarre Mïssa Furïosa without introducing a bit of each. Exquisitely crafted vocal lines mingled with brilliantly plangent strings abound in this release, as well as various electronic ear-candies that set the record straight as to whether this is really extravagant stuff or not. Now, the inclusion of techno beats and rhythms may as well serve that purpose but, on a merely visceral level, it just does not sit exceedingly well with me. Of course, as they only comprise a small part of what is Mïssa Furïosa, they become rather harmless, especially in light of works of might & pomp such as the outstandingly varied "Gloria". Come what may, nothing changes the fact that Mïssa Furïosa is an unusually thoughtful take on the nature and attire of the traditional Catholic funereal chant, more so in light of the diverse adjustments and diversions into it enforced by Zaboitzeff's crucible effort. Recommended, but only if religious bigotry is not an issue.



HIGHLANDS MAGAZINE
THIERRY ZABOITZEFF 50 ANS DE MUSIQUE(S)

(Monstre sonore 3 CD, 2022)
Chronique de Didier Gonzalez - Mai 2023

ART ZOYD se forme en 1969 par le guitariste Rocco FERNANDEZ. À la suite de la défection de son fondateur, le groupe est rejoint en 1971 par Thierry ZABOITZEFF intégrant le groupe ART ZOYD qu’il refondera en compagnie de Gérard HOURBETTE à partir de 1975. S’en suivent de nombreuses tournées à travers le monde autour de projets musicaux et scéniques ambitieux. Le guitariste Rocco FERNANDEZ sera remplacé par Alain ECKERT sur le premier album SYMPHONIE POUR LE JOUR OU BRULERONT LES CITES en 1976. Fresque en trois parties inspirée par l'environnement de l’époque.
En 1979, ART ZOYD publie MUSIQUE POUR L’ODYSSEE.
En 1980, l'album GENERATION SANS FUTUR reprend les mêmes thèmes avec les mêmes musiciens.
Cette année-là, une nouvelle version de Symphonie Pour Le Jour Où Brûleront Les Cités voit le jour, précédant le double album PHASE IV en 1982, puis LES ESPACES INQUIETS en 1983.
En 1985 paraît LE MARIAGE DU CIEL ET DE L’ENFER, musique de ballet de Roland Petit puis en 1987, l’album BERLIN.

En 1997, Thierry ZABOITZEFF se sépare d’ART ZOYD et monte son propre studio. À ce moment, vont se succéder de multiples projets sous son nom ou en association à des metteurs en scènes et chorégraphes. Entre 2006 et 2022, créations de nombreuses musiques originales en studio ou en live dans des domaines aussi divers que le théâtre (Die Orestie, Prometheus), la danse Coppercity, Paradies et bien d'autres pour Editta Braun Company ; le cinéma, Wind Of Sand, Women Of Rock de Nathalie Borgers ; des concerts en solo, Cross The Bridge ; des ciné-concert, Le Cabinet du Dr. Caligari lors de l’International Caligari Festival de Berlin. Des spectacles événementiels, Feuerwelt eine Sciencefiction Linzer Klangwolke e, 2011, la formation d'un nouveau groupe en 2017 ARIA PRIMITIVA.

La rétrospective concoctée par Thierry ZABOITZEFF célébrant 50 ans de musique ne respecte aucun ordre chronologique, mélangeant formations et époques. La
musique dissonante de Thierry ZABOITZEFF nous saisit à bras le corps pour nous faire entrer – de gré ou de force – dans un autre univers où l’ambition musicale et un haut degré d’exigence cohabitent. Trouvant ses références dans les musiques nouvelles, la musique contemporaine, le zeulh, Thierry ZABOITZEFF replonge à l’occasion dans le monde stellaire de Ceremonies Part I-II-III extrait de Les Espaces Inquiets, cet album d’ART ZOYD de 1982 qui demeure 40 ans après sa création d’une fulgurante modernité. L’orgue flamboyant, aux couleurs emersonienes en ouverture, chavire, rejoint par des cuivres dissonants, grinçants, menaçants. Les guitares électro acoustiques dessinent des séquences d’accompagnement fulgurantes, associées aux cuivres bourdonnants. La section rythmique assure un rythme impair improbable, nous sommes au cœur de l’aventure musicale. Un solo de guitare aux sonorités de braises, dissonant à souhait vient s’immiscer, avant le retour de l’orgue accompagné d’arpèges de piano. La basse profonde emporte, associée à la trompette aux accents fatalistes et grinçants. Une intensité folle règne sur cette musique. Le morceau Pagan Dances (14’49) enregistré en 2021, disponible au format digital séparément est une grande aventure solo de musique contemporaine, sur lequel Thierry ZABOITZEFF joue de tous les instruments, basse, violoncelle électrique, claviers, samplers, programming. Toujours un très haut d’exigence dans la créativité, très novateur, à l’exécution parfaite.
Le mélange des instruments et leur mixage est parfaitement agencé et durant un quart d’heure nous sommes happés, emportés à travers l’espace.

Promethean Waves (6’35), remonte le temps, en 1984, Thierry ZABOITZEFF jouant du violoncelle, basse, percussion, claviers. La musique, toujours saisissante ne relache jamais sa créativité, partant dans d’improbables directions, dotée de chœurs discrets mais lui assurant une indéniable profondeur.

Epreuves d’Acier – Fragments d’Une Forge (9’36), un enregistrement de 1995 réunit Thierry ZABOITZEFF, Gérard HOURBETTE, Patricia DALLIO avec la participation de Daniel DENIS, percussion. L’aventure musicale est présente dès la saisissante introduction marquée par les effets rythmiques spéciaux, le piano percussif, les cuivres stridents. Alternance de temps faibles, méditatifs, spatiaux et de fulgurances, de jaillissements. Rien n’est prévisible. On passe du cinématique à la musique concrète, jusqu’à ce que l’image concrète de la forge apparaisse devant nos yeux.

Confusion (4’44) est une pièce jaillissante, tourbillonnante à la rythmique électronique imprévisible, où les claviers plongent dans un espace glacial. Pas vraiment de mélodie, mais des climats, des ambiances et du rythme. Entre RIO et contemporain, l’album gagne au fil des écoutes. Crash (Live Version) 2’56, saisit avec son rythme bondissant, son violoncelle aux accents syncopés et son lyrisme. Nous sommes emportés comme dans un labyrinthe dans des sonorités sinueuses, vrombissantes, parfois grinçantes au niveau du violoncelle de Thierry ZABOITZEFF. Etourdissante performance live mais trop courte.

Dans le Cd2 figure Mariée à la Nuit composé en 1984 et adapté pour ART ZOYD en 1990, avant d’être réorchestré pour guitares électriques et basse pour le projet Overdrive, jamais sorti. Une pièce inédite d’une grande qualité et profondeur avec toute la grandeur dramatique de cette musique.

Rage And Domination enregistré et remastérisé en 1998 présente un aspect saccadé, épileptique au niveau rythmique de la musique de Thierry ZABOITZEFF qui joue du violoncelle, de la guitare et manie les samplers avec dextérité ainsi que les rythmiques programmées.

Unsex Me Here extrait de l’album BERLIN d’ART ZOYD de 1987 est présenté dans une version live, où le violoncelle aux traits saccadés se marie avec des claviers sinueux aux sonorités fascinantes.

Dans le Cd3, sur le morceau Aria Primitiva (13’48), le mystère plane à travers les claviers et samplers de Cecile THEVENOT, la basse électrique et le violoncelle de Thierry ZABOITZEFF, les ondes Martenot de Nadia RATSIMANDRESY. L’aspect percussif du piano apparait particulièrement saisissant. Une pièce angoissante.

Children’s Corner (5’23), est une superbe pièce menée par un clavier percutant, auréolé d’une partie de saxophone labyrinthique d’André MERGENTHALER. Extrait du Cd DR ZAB AND HIS ROBOTIC STRINGS ORCHESTRA de 1995.

N’hésitez pas à faire le voyage, d’autant que vous trouverez le triple Cd à 33€ port compris sur le site de l’artiste.

https://www.zaboitzeff.org/

(****½)

Didier GONZALEZ

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HIGHLANDS MAGAZINE (F)
par Catherine Codridex 02/2020 N°101
Chronique de l'album
ARIA PRIMITIVA - SLEEP NO MORE

Site web

WTPL Music BTZAP001, 2019, CD

Chroniquer un album de Thierry
ZABOÏTZEFF est toujours une aventure et cela depuis plus de vingt ans.

Que ce soit avec ART ZOYD et son comparse feu Gérard HOURBETTE dans les années 70,
qu'il participe à une myriade de projets liés au cinéma, au théâtre, à la danse, ce compositeur, bassiste, violoncelliste, chanteur et j'en oublie nous surprend toujours. Un peu moins de vingt albums dans sa discographie, tous différents et tous nous tenant en éveil. C'est sous la forme d’un trio, ARIA PRIMITIVA, que nous est proposé SLEEPNO MORE. À ses côtés, Nadia RATSIMANDRESY aux claviers et ondes Martenot ainsi que Cécile THEVENOT aux claviers et samples. Un Ep de trois titres nous avait mis les oreilles en ébullition en2017.
La suite ne va pas les apaiser. L'idée de base du projet est: « synthétiser des rythmes primitifs avec les derniers sons de l’avant-rock». La pochette représente des masques africains apeurants du plus bel effet. Mais ce visuel ne doit pas trop attirer notre attention. Il faut rester concentré sur la musique, son domaine et son règne. Impossible de renier les ambiances sombres et agitées d’ART ZOYD, le chant profond et inspiré, le langage inventé ce qui a fait relier le groupe à MAGMA pendant quelque temps. Mais, depuis, ZABOÏTZEFF avance, cherche, connecte des éléments improbables. Ici l’utilisation des ondes Martenot. Je vous passe le côté technique du truc, vous ferez comme moi en allant chercher sur Internet le fonctionnement.
Le résultat donne des sons cosmiques vibrants d’une légèreté folle comme sur le morceau d'ouverture Endeyi Endesi. Introduction courte et vaporeuse puis accords guerriers délivrés par le piano, basse puissante et rythme fort. Une mélodie se détache, facile à suivre malgré la complexité et la richesse de toutes les subtilités qui l'entourent.
Sleep No More plonge au cœur d’un village africain. Aboiements au lointain, chants syncopés, déclamations gutturales avant que la musique prenne de l’ampleur. Hypnotique, en boucles successives. Réveil brutal et plein de vie. Hystamack est la vitrine de tout ce qui est réalisable avec le Martenot. Au départ glissements aigus telles des ondes provenant d’une vieille radio, à l'écoute, pour moi, des chants d'oiseaux. Est-on en dialogue avec des «petits hommes verts » ou avons-nous les pieds sur terre au milieu d’une forêt grouillante d'amis ailés? La douceur laisse place à un chaos apocalyptique, à une explosion de peurs et de destructions. Introduction aérienne pour Maïdaykali, sons en apesanteur qui vibrent en se développant. Quelques touches de percussions dans un univers aseptisé. Mais attention, le réveil en fanfare arrive. Contraste saisissant. Chant agressif, puissant, renversant. Le rythme vous capture, les pieds bougent et nous voilà emportés dans un tourbillon incandescent. C’est juste effet Waouh! Arrive en plein milieu de l'album Aria Primitiva. Quatorze minutes haletantes. Basse, piano, sonneries, grincements, craquements, tintements. Changements de rythmes, d’ambiances. La musique prend divers chemins en faisant attention à ne jamais nous perdre. Détail après détail elle nous guide en posant des petits cailloux blancs qui retiennent notre attention. C'est addictif au-delà de l’imaginable. Après un tel moment arrive la peur d’être déçu par le morceau suivant Nixen. Il offre dans sa première partie un moment de pause avec la douceur du piano sublimée par l'acidité des ondes. Dans un deuxième temps l’instrumentation s’élargit encouragée par des effets sonores circonstanciés. Souffle de vie gracile. Encore un moment magique, totalement différent du reste de l’album. Que dire de l’appropriation de la chanson de Brian Eno et David Bowie Heroes qui devient en allemand Helden? Créée en anglais et allemand, chantée ici dans cette langue. Bruit de bottes lourd, au rythme du pas de l’oie en son ouverture, frissons. Thème doux avec les ondes Martenot pendant que le chant venu des profondeurs nous prend aux tripes. Solennel et mystique, troublant et funeste. Une des plus belles interprétations de ce succès planétaire. Emotions conservées, son modernisé. Gravité et noirceur se prolongent avec le morceau improvisé et live Kletka. Dérangeant car sans mélodie mais empli de sonorités qui apparaissent au fil des boucles. Vraiment riche et audacieux. Mais Ouvrez Donc Cette Porte nous conduit vers la sortie, sans essayer de nous rassurer. Toujours flippant sans être exagérément agressif. Rappel des influences du compositeur, Stravinsky en écho. Sleep No More, c’est le moment de sortir des brumes de la facilité, d'écouter, de savourer.
Après la notation ***** il ne reste plus que Fabuleux, Grandiose, Génial et j'ose les employer.

Catherine CODRIDEX

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HIGHLANDS MAGAZINE (F)
par Catherine Codridex, 27/03/2005
Chronique de l'album
MISSA FURIOSA

Intoxygène, France, 2004

Quel curieux disque à chroniquer. Il ne faut pas s'attendre de la part du cofondateur du groupe ART ZOYD, THIERRY ZABOITZEFF a un travail pâle et insipide
L'homme est un créateur, un chercheur, un metteur en scène de la musique. Le concept de messe en latin sur fond techno-pop a de quoi surprendre plus
d'un auditeur non rompu aux mélanges des genres. Surtout que vous ferez des digressions via le jazz et le classique bien sûr. La question étant de
savoir si cette interaction est réussie, la réponse vous appartient. Pour celles et ceux qui ont pratiqué à un moment de leur existence le rite catholique
de près ou de loin, aussi bizarre que cela puisse paraître, l'adhésion au travail voulu par les artistes sera plus facile à appréhender car ils portent déjà en eux la puissance évocatrice de cette musique. Elle magnifie le solennel, le théâtral, le lyrique, le fastueux. Elle vous transporte dans un autre
univers des les premières notes. Elle vous permet une introspection en vous coupant du quotidien. Elle est inscrite dans les gènes des survivants
de la civilisation judéo-chrétienne: C'est-à-dire de nous tous européens. Elle renferme aussi l'enrichissement apporté par la culture islamique après les croisades.
Pour les amateurs de techno je ne suis pas persuadée que le grand écart à effectuer se fera sans douleur car le chemin à parcourir est beaucoup plus long et ardu. Ils auront tout un passé, toute une civilisation à intégrer mais surtout à accepter. Des années, des siècles à franchir en quelques notes de musique.
Le pari est de toute façon interessant et enrichissant en terme de culture musicale.
Il me semble qu'il faille tout simplement laisser derrière soi tout son bagage intellectuel. La musique est là pour faire tout oublier et transgresser les dogmes.
Lorsque vous aurez remisé au grenier votre à priori, il vous restera que le plaisir de l'écoute et vous seraient prêts à unir l'histoire et le présent.
THIERRY ZABOITZEFF maîtrise avec brio les instruments a cordes ce qui n'est pas une découverte, les chanteurs lyriques sont au diapason de l'ensemble de l'œuvre et en paraissent imprégnés. Ils sont dans leur élément. La conception même de l'album renforce le thème de la messe en étant conçu avec un crescendo très bien orchestré pour la montée émotionnelle qui est recherchée par le compositeur.
Je ne désire pas décrire plus précisément et avec des mots ce que j'ai ressentie au fur et mesure des écoutes de ce cd. Les émotions et les images qui naîtront en vous ne peuvent qu'être des plus intimes, tant elles dépendent de votre éducation et de votre vécu.
Que vous soyez adeptes d'autres religions, que vous soyez cathos branchés ou débranches, que vous soyez athées, il perdurera le sentiment d'une communion toujours possible autour de la musique comme unificatrice des cultures.



CITIZEN JAZZ (F)
par Denis Desassis, 24/11/2022
Chronique du coffret : Thierry Zaboitzeff
50 ans de musique(s)

Site web
Jazz, pas jazz, la question est-elle vraiment là ? À l’écoute de ces quelque 3 heures et 40 minutes de musique minutieusement organisées en un coffret de trois CD, on se dit que l’essentiel est ailleurs. Là, dans cet espace assez indéfinissable mêlant des influences multiples (rock, musique classique, minimaliste ou électronique), où s’exprime un musicien insoumis depuis un demi-siècle. Une époque déjà lointaine mais toujours bien présente, commencée quand Thierry Zaboitzeff avait été l’une des chevilles ouvrières de l’aventure Art Zoyd aux côtés de son partenaire Gérard Hourbette. Un long chemin de plus de 25 ans suivi d’une autre expérience toujours en cours (dont nous nous étions déjà fait l’écho il y a quelques années à l’occasion de la parution du disque Aria Primitiva), plus solitaire souvent mais toujours hantée par la même pulsation venue des tréfonds (du cœur, de l’âme, du mystère de la nature et des humains). Pour dire les choses en quelques mots qui puissent cerner ce musicien pas comme les autres, on pourra évoquer « un autodidacte, multi-instrumentiste, un explorateur doublé d’un inventeur, celui d’un idiome de la traversée des « espaces inquiets » où, des profondeurs, peut surgir à tout moment une voix chantant dans une langue oubliée, enfant naturel de son cheminement créatif. On pourra aussi parler d’une musique de chambre contemporaine électro-acoustique, d’un rock technoïde où s’épanouissent basse, violoncelle, claviers, percussions, samples et autres cordes synthétiques » [1]. Il faut de surcroît rappeler que Thierry Zaboitzeff a mis son art au service de la musique bien sûr, mais aussi du théâtre et de la danse (souvenons-nous du Mariage du ciel et de l’enfer et de Roland Petit en 1985, ou de la mise en musique de films anciens : Faust, Nosferatu, Hâxan). Voilà donc un demi-siècle que l’histoire a commencé. Il était temps de la raconter, sans nostalgie aucune mais avec le souci d’en éclairer le cheminement.

C’est chose faite avec 50 ans de musique(s), une véritable somme, un tout longuement réfléchi dont la cohérence au fil des années atteste de la créativité de celui qui, jamais, n’a baissé les bras. Totalement impliqué dans ce qui s’apparente fort à une anthologie, Thierry Zaboitzeff n’a pas hésité, lorsqu’il le jugeait nécessaire, à réenregistrer certaines compositions, à revoir le mixage et le mastering de quelques autres. Bonne idée par ailleurs : il n’est pas tombé dans la facilité d’une sélection chronologique qui aurait pu présenter l’inconvénient de pointer du doigt de façon trop explicite une évolution au fil des décennies. Ici, la cohérence est dans l’agencement d’un long scénario animant couleurs et timbres, variant les rythmes et les atmosphères, dans la construction d’un paysage entre ombre et lumière. Mais avec une passion indéfectible pour « une musique cérébrale sans doute, mais puissamment charnelle ».

Vous entendrez peut-être, tout au long de 50 ans de musique(s), les échos plus ou moins lointains de Bartók, Stravinski, Ligeti, voire Bach en même temps que les influences, plus électriques celles-là, de quelques formations hâtivement rangées dans la case du rock progressif. Mais en réalité, vous plongerez, en totale immersion, dans le monde singulier de Thierry Zaboitzeff. Cherchez bien, il n’y en pas d’autres comme le sien. C’est une vraie aventure, une fresque humaine tout autant que musicale.
Denis Desassis.

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CITIZEN JAZZ (F)
par Denis Desassis, 19/06/2019
Chronique de l'album
ARIA PRIMITIVA - SLEEP NO MORE

Site web

Thierry Zaboïtzeff (elb, cello, voc, elec), Nadia Ratsimandresy (kb, ondes Martenot), Cécile Thévenot (kb, elec).
Label / Distribution : WTPL Music

Ceci n’est pas une chronique. Plutôt une manière de déclaration d’amour envers un musicien sur la brèche depuis tant d’années qu’il semble grand temps d’en souligner ici en quelques lignes la personnalité exceptionnelle et l’engagement dans un processus créatif qui n’appartient qu’à lui. Et qu’on n’est pas obligé de raccorder au cercle du jazz, si tant est qu’une telle classification ait du sens lorsqu’il s’agit de rendre compte d’un univers qu’on ne saurait assimiler à aucun autre.

Thierry Zaboïtzeff, bassiste, violoncelliste, compositeur, chanteur, inventeur et bien d’autres qualificatifs. Tel est le nom de ce musicien explorateur.

Les plus anciens d’entre nous ne peuvent avoir oublié le groupe Art Zoyd, fondé à la fin des années 60 avec son compagnon de route, le regretté Gérard Hourbette, disparu il y a peu. Les beautés de cette formation hâtivement rangée dans la catégorie « rock progressif » étaient sombres, convulsives, comme peuvent le laisser deviner certains titres de ses albums : Symphonie pour le jour où brûleront les cités, Génération sans futur, Le Mariage du ciel et de l’enfer ou bien encore Les Espaces inquiets. Certains voulaient rapprocher le groupe de la sphère Magma, à tort selon nous. Art Zoyd créait certes une autre musique de la traversée des grands espaces, mais de nature et d’origine bien différentes, entre ombre et lumière, d’où pouvaient surgir des voix venues des profondeurs, s’exprimant parfois dans un langage venu d’ailleurs. Celle de Thierry Zaboïtzeff justement. Art Zoyd n’envisageait pas la possibilité d’un autre monde : il avait assez à faire avec le constat trop souvent désespérant de l’état du nôtre.

Les chemins des deux musiciens se sont séparés à la fin des années 90, Gérard Hourbette poursuivant l’aventure Art Zoyd dans un registre plus électronique, et donnant vie aussi à son propre studio de création musicale à Valenciennes, où pourront travailler de nombreux compositeurs adeptes de la recherche musicale, sans oublier chez lui un important travail de nature pédagogique. Jusqu’à sa mort en mai 2018. Mais Art Zoyd, devenu centre de création musicale, continue de vivre grâce à Monique Hourbette-Vialadieu, son épouse et veuve.

De son côté, Thierry Zaboïtzeff s’est avéré hyperactif. On le retrouvera impliqué dans différents projets avec des metteurs en scène ou des chorégraphes. Il formera le groupe Zaboïtzeff & Crew, s’illustrant notamment avec une Missa Furiosa unissant techno et chant lyrique ainsi qu’avec un hommage à Jules Verne, Voyage au centre de la Terre. Concerts solo, danse, cinéma, théâtre et au total une petite vingtaine d’albums au cours de la période 1997-2016. De quoi satisfaire bien des appétits en manque de l’énergie si particulière des premières années d’Art Zoyd.

Et voici que paraît un trio, Aria Primitiva, et son disque Sleep No More dont on avait pu découvrir les couleurs tourmentées l’an passé à l’occasion de la sortie d’un EP composé de trois titres qu’on retrouve sur l’album. Aria Primitiva, c’est un autre projet indéfinissable aux confins de la musique électronique, de la musique contemporaine et du rock symphonique ; un autre nouveau monde, qui semble ne jamais connaître l’espoir d’un apaisement. La pulsion typique du bassiste est toujours là, comme un cœur arythmique en plein effort. Une voix caverneuse rugit dans la pénombre, elle semble venue d’outre-tombe, on la reconnaît entre mille à défaut de comprendre le sens de ses mots. Les explorations sonores parsemées de zébrures électriques des cordes et d’effets électroniques restent au centre des passions du bassiste, toujours aussi prompt à scruter les moindres recoins de sa caverne musicale et de toute sa part d’inconnu. Avec lui, deux musiciennes aux commandes de leurs claviers hypnotiques, Nadia Ratsimandresy et Cécile Thévenot, dont la présence solaire est le contrepoint de celle, très terrienne, du leader. Les Ondes Martenot de la première font merveille, qui éclairent de leur sonorité mutine et évanescente les ombres de la basse et la convulsion sous-jacente des compositions. Sleep No More est de ces disques qu’on écoute en retenant son souffle.

Cerise sur le gâteau de cette réussite, la chanson « Helden », soit la reprise en allemand du « Heroes » de David Bowie. Elle s’affirme d’emblée comme l’une des adaptations les plus intrigantes de ce succès planétaire et ce faisant, se révèle en adéquation parfaite avec l’esthétique sonore imprimée par le Thin White Duke et la guitare envoûtée de Robert Fripp. Ajoutée à la composition titre « Sleep No More », Aria Primitiva tient là deux hits ténébreux en puissance. Mais dans un autre monde que le nôtre, sans doute, qui laisserait sa chance au mystère.

Thierry Zaboïtzeff , parfaitement épaulé, semble vouloir nous dire qu’il est là, et bien là.
Sleep No More le prouve, c’est une évidence.




REVUE & CORRIGÉE
7 septembre 2023
LUVOS MIGRATIONS

par Pierre Durr
Site web

BANDCAMP, DL – 2023

Luvos fut d’abord une étrange planète, monde aquatique générateur de la vie, projet théâtral développé par la chorégraphie Editta Braun, et l’objet en 2013 d’un CD, Planet Luvos.

Reprenant l’idée d’un espace peuplé d’êtres étranges, la chorégraphe, associée au réalisateur et photographe Menie Weissbacher (qui œuvre beaucoup dans les films publicitaires), laisse voir des personnages errant dans un monde que l’humain a détérioré. Bref une courte chorégraphie filmée, mise en musique par son compagnon Thierry Zaboitzeff. La trame musicale, d’un peu plus de seize minutes, s’inscrit dans une musique évolutive, tantôt rythmée voire saccadée, parsemée de nappes sonores plus évanescentes, souvent générée par son violoncelle, dans laquelle se glissent sons aquatiques, cris d’oiseaux, quelques aboiements, un bref hurlement de sirène… créant un environnement d’une sérénité étrange et mystérieuse.

Pierre DURR

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REVUE &CORRIGEE (F)
par Pierre Durr, 06/2020
Chronique de l'album
NEBENSONNEN (REMAKE)

Site web

Plateformes de téléchargement et streaming – 2020

Paru initialement sur le label Atonal en 2000, ce 7 e opus de l’ancien membre d’Art Zoyd, et comme certains autres enregistrements parus à la fin des années 90 conçus pour les chorégraphies d’Editta Braun (Heartbeat, Miniaturen, India, Alice), ce Nebensonnen vient de faire l’objet non d’une réédition mais d’une réinterprétation, bénéficiant de nouveaux arrangements, ce qui semblait plus judicieux à son auteur. Pour l’instant disponible uniquement en version numérique. Exit donc, pour ce « divertissement », les interventions d’invités, anciens partenaires au sein d’Art Zoyd : tout est désormais assumé par Thierry Zaboitzeff, qui hors contexte de la chorégraphie initiale, modifie quelque peu l’ordre des titres en ne retenant qu’une seule occurrence de la courte pièce
« Nebensonnen ». Cette relecture confère à l’album une cohérence plus affirmée par l’accentuation des sonorités liées aux cordes. Un travail plus maîtrisé.

Pierre DURR

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REVUE &CORRIGEE (F)
par Pierre Durr, 21/06/2019
Chronique de l'album
ARIA PRIMITIVA - SLEEP NO MORE

Site web

MONSTRE SONORE/WTLP MUSIC BTZAPO01 - 2019

Formé il y a près de deux ans, sur les routes européennes depuis le printemps 2018,
Aria Primitiva édite enfin son premier opus, Sleep no More*.
Aria Primitiva, c’est le nouveau projet de Thierry Zaboitzeff, qui jusqu’au milieu des années 90 partageait avec Gérard Hourbette l’aventure d'Art Zoyd
(en témoigne la reprise 
de « Sleep No More », une de ses compositions extraite de la courte suite « Vorgänge », figurant sur l’album Nosferatu). À ses côtés, lui-même assurant la basse, le violoncelle, les vocaux et l’échantillonnage, opèrent Nadia Ratsimandresy (ondes Martenot, claviers)
qu'on a pu entendre elle aussi dans quelques récentes formules d’Art Zoyd, et surtout 
dans ses interprétations de Messiaen et de Tristan Murail** ; et Cécile Thévenot (claviers, échantillonnages), laquelle a occasionnellement remplacé Patricia Dallio au sein d’Art Zoyd. La musique d’Aria Primitiva s’inscrit bien naturellement dans cette filiation (ce qui est renforcé par le choix pour la pochette de Thierry Moreau, designer pour Univers Zéro, Shub-Niggurath, Eskaton). Elle en a la dimension sombre, parfois tellurique voire sépulcrale, incandescente et tourmentée, aux vocaux presque zeuhliens. Et pourtant, l’effet trouble de l’apport des ondes Martenot y ajoute un côté aérien. Contraste apaisant ou simple répit, avant de plonger dans les ténèbres ? Enfin, avec « Helden », Aria Primitiva agrège à son style un aspect de la trilogie berlinoise de David Bowie.

* Si l’on excepte l’EP Work in Progress, carte de visite sonore de trois pièces non définitives.

** Nadia Ratsimandresy & Matteo Ramon Arevalos, Messiaen et autour de Messiaen,
ReR Megacorp, 2009 ; avec L'Ensemble Volta, Les Nuages de Magellan, Works by Tristan Murail, Megacorp, 2014.

PIERRE DURR



ROCK PROGRESIVO.COM
par Rafa Dorado, 30/07/2019
Chronique de l'album
ARIA PRIMITIVA - SLEEP NO MORE

Site web

Aria Primitiva - 'Sleep No More' (2019)
(Primera edición 28 septiembre 2018, Monstre Sonore/WTPL Music)

Aria Primitiva - Sleep No More

Hace un año Thierry Zaboitzeff (cello, bajo, voces y programación) ya nos había avisado de este evento con el adelanto de un mini CD en el que se incluían, con diferentes mezclas, 3 temas de este material. El resultado sabía a poco y te dejaba con ganas de más lo que, obviamente, era su objetivo.

Tras la espera, ahora que ya podemos disfrutar de la obra completa, nos encontramos al miembro fundador, junto al malogrado Gerard Hourbette, de la mítica banda de rock de cámara Art Zoyd, en el centro de un trío que completan Nadia Ratsimandresy a los teclados y ondas Martenot y Cécile Thévenot a los teclados y sampler.

La paleta de colores tonales, ya de por sí amplia en la obra de este compositor, se ve por tanto reforzada. La inclusión de ondas Martenot nos acerca por momentos a un concepto casi sci-fi años 50 que en algunos momentos encajaría perfectamente como banda sonora apócrifa de cualquier clásico del género; pero las composiciones, todas del francés afincado en Austria, a excepción de una versión del 'Heroes' ('Helden') de Eno y Bowie, nos dejan un trabajo de estilo puramente Zaboitzeff con sus querencias por un rock zeuhl electrónico y minimalista, muchas veces cercano a la obsesión y donde la sorpresa a niveles tanto armónicos como texturales te aguardan a la vuelta de cada microsurco. También hay sitio para el caos y la improvisación en 'Hystamack' y 'Kletka' que funcionan a modo de respiraderos entre la organización cartesiana que define la música de Zaboitzeff.

Curioso, cuando menos, que se recupera como título central una remezcla de 'Sleep No More', tema que que ya había aparecido cerrando el 'Nosferatu' (1990) de Art Zoyd a modo de bonus tracks junto a otros dos temas extraídos de 'Vorgänge', banda sonora para un ballet, y que en 2005, en otra remezcla completamente distinta y casi metalera, apareció en el Vol. 5 de 'Músicas desde el Abismo' del sello margen Records que acompañaba el número 24 de margen Magazine que incluía sendos dossiers sobre Art Zoyd y Thierry Zaboitzeff. La remezcla presentada aquí es más respetuosa con el original, incluso con arreglos muy melódicos de teclado que 'humanizan' la composición lejos de los arrebatos casi death metal de la versión de 2005.

Temas como 'Maïdaykali' nos devuelven, tras una intro reposada y ambiental, al Zaboitzeff más complejo e incluso hardcore. 'Endayi Endesi', que abre el disco, no reniega de las influencias zeuhl que le son tan familiares, pero su aspecto orquestal y las melodías de ondas Martenot lo escoran hacia un concepto más electrónico. El atmosférico y pianístico 'Nixen' funciona casi como interludio en su primera mitad para recuperar en su parte final la convulsión y tensión que son tan propias de su estilo.

Lo mejor, el extenso 'Aria Primitiva' de hechuras contemporáneas, arrebatos épicos y un nivel de sinergia del trío en su máximo esplendor.

Cierra 'Mais ouvrez donc cette porte!' con su típico toque expresionista y oscuro en primer plano, enriquecido por un concepto rítmico sincopado que nos devuelve los aromas del Faust de Art Zoyd.

No nos olvidamos de reseñar el magnífico trabajo gráfico del gran Thierry Moreau que anticipa y complementa el contenido musical.

Si conoces la obra de Art Zoyd y Thierry Zaboitzeff querrás tener esto, y si quieres iniciarte en su sonido 'Sleep No More' de Aria Primitiva no es un mal lugar para comenzar, pero ¡cuidado, crea adicción!




KOSMIK MUZIK
par Jean Christophe, 21/11/2022

Les 50 ans de musique(s) de Thierry Zaboitzeff
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Avec un tel panorama, on aurait pu craindre un coffret un peu passéiste avec moults archives à la clef, au son d'époque forcément analogique et d'époque. Mais nous ne sommes pas ici sur ce registre rétrospectif mais, plutôt, sur celui d'une carte de visite réactualisée et pleinement actuelle, y compris au niveau sonore, avec un travail visuel de Thierry Moreau parfaitement en phase avec cette modernité électrique affirmée.

De Thierry Zaboitzeff on connait évidemment son passé dans Art Zoyd dont certaines belles traces figurent ici, parfois dans une forme réactualisée, y compris par le magnifique Aria Primitiva à la destinée hélas abrégée. Un clin d'oeil à Rocco Fernandez, fondateur de AZ, des extraits savamment choisis que les afficionados sauront reconnaitre et quelques "covers" assez décoiffantes...

L'homme a quitté cette matrice en 1997 et c'est là où, ce coffret, devrait ouvrir des portes à beaucoup. S'affranchissant de toute logique chronologique, Thierry Zaboitzeff a construit ici un labyrinthe audacieux où l'auditeur est emporté en des terres multiples. Du séminal Prométhée, paru en 1984 et dont votre serviteur a bien usé le LP à l'époque, au récent Pagan Dances (uniquement en numérique), ce sont plus de 20 disques produits sous son nom qui se sont succédés, hélas, sans beaucoup d'écho ici, faute de distribution et de promotion.

Ce coffret permettra donc à nombre d'entre vous de découvrir un univers personnel, protéiforme tout en étant extrèmement cohérent. Alors peu importe le catalogage : musiques nouvelles, progressif, post rock, musique contemporaine, rock in opposition, chant liturgique... Thierry Zaboitzeff est partout et, surtout, ailleurs, en musicien libre et affranchi, en compositeur singulier aux univers pluriels. Il y a urgence à le (re)découvrir.

(Label : Monstre Sonore/ WPTL)


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KOSMIK MUZIK
par Jean Christophe, 30/07/2019
Chronique de l'album
ARIA PRIMITIVA - SLEEP NO MORE

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La scène française se porte bien : 2 - Aria Primitiva Sleep No More

Un premier EP, première carte de visite, avait permis en 2017 de prendre contact avec la musique du groupe impulsé par Thierry Zaboitzeff. Le titre de ce premier album fait évidemment écho au Art Zoyd des années 80 mais il serait vain de chercher en Aria Primitiva un clone. Disons qu'on se situe dans un prolongement de certaines esthétiques mais avec une instrumentation forcément différente sans parler du temps qui s'est écoulé...

Au travers de multiples expériences, hélas peu relayées en France, Thierry Zaboitzeff livre ici un disque extrèmement travaillé, une oeuvre mature aux dédales surprenants qui happent l'auditeur aventureux. On ne se pose que rarement en ces paysages sonores parfois tourmentés, sombres ou plus calmes pour quelques brefs instants... L'instrumentation est dense et fournie avec de belles ouvertures sonores où les deux musiciennes, Nadia Ratsimandresy et Cécile Thévenot, sont particulièrement à leur aise. On l'aura compris, voici un disque particulièrement puissant dont on peut espérer qu'il permette à Thierry Zaboitzeff de toucher un public plus vaste ce qui ne serait que justice, compte tenu de son passionnant parcours...

Jean Chistophe Alluin 30/07/2019



KEYBOARD MAGAZINE (F)
par Bruno Heuzé, 01/1998
Chronique de l'album
HEARTBEAT


Fondateur du groupe Art Zoyd en 1971, Thierry Zaboitzeff continue a en être le bassiste et violoncelliste, ainsi que l'un des principaux compositeurs. On le retrouve ici seul pour une musique composée pour le spectacle de la danseuse Editta Braun. Ayant principalement travaillé sur echantillonneur, Zaboitzeff explore ici en baladin solitaire, d'inquiétantes terres aux frontières noyées de brume, où se seraient rencontrés l'obscurité médiévale et les mécaniques puissantes de l'ère industrielle. II n'y a pourtant la aucune saturation bruitiste, mais de lentes progressions aux harmonies croisées, ou l'intensite dramatique monte en crescendo. Résolument insolites, les climats se créent a partir d'étranges hybridations de voix samplées et de rythmiques sourdes, de violoncelles dérivants, de claviers traités et de vocalises gutturales ou apaisées, de cliquetis d'horloge qui deviennent battements de coeur ...
Un bel album a la sombre incandescence.
KEYBOARD MAGAZINE (F)
Bruno Heuzé

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KEYBOARD MAGAZINE (F)
par Christian Jacob, 04/1992
Chronique de l'album
DR. ZAB & HIS ROBOTIC STRINGS ORCHESTRA


Art Zoyd est, avec Urban Sax, Magma et quelques autres, l'un des groupes français qui se sont forgés une forte identité dans le champ des musiques Thierry Zaboitzeff, l'un des piliers d'Art Zoyd, nous offre un album solo où se manifestent pleinement ses talents de compostion et sa maîtrise des instruments électroniques : rythmiques hypnotiques, boucles répétitives, fusion des styles et des traditions, soundtracks débridés et climats recueillis, ironie parfois grinçante et jeux mécaniques.
Le Dr. Zab, au milieu de ses drôles de machines, explore de manière ludique des labyrinthes de la modernité. De la même famille et du même talent, Patricia Dallio nous avait, il y a quelques mois, gratifié d'un très bel album,
« Procession ", sur le label D.T.R. (distr. M.S.I.).
KEYBOARD MAGAZINE (F)
Christian Jacob



IMPRO JAZZ (F)
par Philippe Renaud, 10/2016
Chronique de l'album
MULTIPLE DISTORTIONS

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Même si l’ex bassiste d’Art Zoyd poursuit son chemin dans les traces de son ancien groupe (qu’il continue d’ailleurs de citer sur la pochette), ces archives ne remontent qu’à l’année 2005, à des années lumières de l’originalité de ce groupe classé "Rock in Opposition" au milieu des années ‘70s. Mais, pour éviter une déception chez les aficionados du groupe, il faut préciser que l’esprit est resté le même, bien que Thierry Zaboitzeff soit désormais un groupe à lui tout seul.

Peu de renseignements sur la pochette, juste le détail des titres et le timing, de manière à ce que l’on ne sache pas quand tel ou tel morceau a été enregistré. Mais cela n’a guère d’importance, tant, je le répète, la base sonore qui a permis de découvrir une nouvelle musique, une musique inouïe, est toujours là, une trame lancinante et répétitive sur laquelle se greffent plusieurs autres instruments parmi lesquels des percussions, des tubular bells, des guitares saturées (d’où le titre de l’album), et de l’électronique qui n’existait pas lors de l’enregistrement de la "Symphonie pour le jour où brûleront les cités"… 15 titres défilent ainsi, à écouter très fort, de préférence dans le noir (cela me rémémore une vidéo passionnante du groupe enregistrée dans le nord de la France), un voyage dans le temps mais dans une expression moderne et futuriste.
IMPRO JAZZ (F)
Philippe Renaud

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IMPRO JAZZ (F)
par Philippe Renaud, 10/2016
Chronique de l'album
SIXTEENTH

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En 2012 donc, Thierry Zaboitzeff avait produit toujours tout seul mais cette fois avec quelques intervenants selon les morceaux cet album un peu plus compact quant à la construction et la réalisation. Plus gutural aussi, dans une ambiance légèrement plus noire que celle d’Art Zoyd. Illuminée cependant par des arpèges et des glissandos quelque peu folk / progressif, avec une voix féminine sur quatre titres dont le très langoureux "Makes me Sleep". Après l’orage autour du manoir hanté, la volupté et l’innocence. Un très beau contraste vite brisé par un ouragan de sons inquiétants, un thème électronique à vitesse variable, des cassures et brisures, des OVNIs traversants, on imagine la présence de dinosaures et autres bêtes sympatiques, puis la musique s’engage sur un chemin qui grimpe, s’intensifie, rythme binaire arrêté net pour mieux repartir… et on se laisse emporter par ce tourbillon musical hypnotique, qui stoppe trop vite pour retrouver cette voix de soprano détenue par Isabelle Farmini, proche du kobaïen de notre cher Magma. Dans le morceau suivant, Zaboitzeff inclut une partie du fameux discours de Martin Luther King concernant son rêve, dans un environnement basé sur les percussions et l’électronique.
Thierry Zaboitzeff a décidé de poursuivre sa carrière tout seul, c’est tout à son honneur. Ses disques sont difficiles à trouver, comme dans la période de ses débuts, pour lui rien ne semble avoir changé. Raison de plus pour le contacter et lui passer commande.
IMPRO JAZZ
Philippe Renaud

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IMPRO JAZZ (F)
par Marc Sarrazy
Chronique de l'album
DR. ZAB. VOL. 2


... Pour respecter la chronologie. Epaulé par les Fantômaticks (groupe énigmatique au personnel incertain puisque de savoureux pseudos (Terri Zabinovitch, Valentino Zab ... ) côtoient sans complexe un Olaf Frap Dür (à la batterie évidemment), un DJ RsZ ou un Fête Nat De la Souffrière ... ), Zaboïtzeff nous a manigancé une myriade d'ambiances qui se mettent en branle, se déroulent et se froissent par l'interruption de nouvelles plages: à l'image de ces quatre reprises des Beatles (ah ! le grayeux Come Together !), se télescopent des musiques tournées vers l' ailleurs, un exotisme de l'étrange : vallées moites, bords de mer exténuants, organismes anesthésiés, crépuscules désertiques, villes endormies ou mortes, horreurs boréales ...
Moins sombres peut-être, qu'à l'habitude, comme des musiques autour du vide qui règne lorsqu' il ne reste personne, mais où tout a déjà eu lieu, où l' air est plein de ces vies qui s'y sont agitées, encore peuplé de fantômes.

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IMPRO JAZZ (F)
par Marc Sarrazy
Chronique de l'album
MINIATUREN 


Ici, tout fleure plutôt l'outre-tombe. On navigue avec bonheur entre les ruissellements glauques du gothisme londonien, les bavures effarées du cinéma expressionniste allemand, une sorte de bal entre Jack l'éventreur, Mabuse, Nosferatu et Frankenstein...

Moulées dans des architectures complexes et bizarres, les musiques sont un modèle d'équilibre à l'intérieur de l'espace sonore (bandes, voix, clarinette et batterie des Crew, basse électrique ... ). Le chant surtout : fiévreux, émis en toute fin d' expiration, il glace autant qu' il brûle. Rythmes malades, fragments de mélodies qui obsèdent, choeurs d'un lyrisme noirâtre, ostinato pris dans la tourmente, cassures sonores : on songe à Magma (la lourdeur et le ronflement en moins), à Palo Alto, à Art Zoyd surtout (on entend par moments d' ailleurs des réminiscences du disque Faust) ... Excellent!

IMPRO JAZZ (F)
Marc Sarrazy

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IMPRO JAZZ (F)
par Marc Sarrazy
Chronique de l'album
NEBENSONNEN


Après les chaos de l'enfer, les brumes oniriques. Nettement plus intimiste, cette suite s'articule autour de courtes pièces récurrentes jouées au piano.
L'organique, le pulsionnel ont fait place au rêve, atmosphères cotonneuses, entre cristal et velours.
Je n'ai qu'un regret à émettre: l'utilisation majoritaire des synthés pour interpréter certaines parties de cordes.
Les instants où l'errance du piano se trouve zébrée par le chant du violoncelle (Zorn en particulier) sont tellement plus intenses qu'on aurait souhaité qu'ils s'étendent aux passages cités précédemment: les synthèses d'ordinateur ne remplaceront jamais le crin d'un archet.
Cela dit, on est à mille lieues des musiques nouvelles gangrenées par d'interminables nappes de synthés : ici, le piano reste l'argument central, les motifs enivrent et si certains climats rappellent René Aubry, la musique porte surtout des accents de Satie et de Debussy par le rapport des notes les unes aux autres. Certaines pièces sont magiques.

IMPRO JAZZ (F)
Marc Sarrazy



VERSUS MAGAZINE (F)
par Stéphane Sansonnet, 2005
A propos de l'album et du concert au théâtre Toursky - Marseille (F)
MISSA FURIOSA


Membre de Art Zoyd (groupe avant-gardiste principalement connu pour la création de musiques de films restaurés comme Nosferatu, Faust, Metropolis
et pour des compositions pour les bollets de Rolond Petit...) entre 1991 et 1997 avec Gérord Hourbette. Thierry Zoboitzeff s'affronchit du duo afin de
se consacrer à ses propres développements sonores. Il se confronte alors à différents orts de la scène (danse, théâtre, événements...) avant de décider de composer une messe techno-pop.
« J'ai voulu composer un dernier projet monumental, j'ai voulu y aller très fort. J'avais déjà commencé il y a quelques années les bribes d'une
messe. Cet exercice a été exécuté par de nombreux auteurs classiques et contemporains. L'idée m'a complètement emballé. Mon parti pris était
d'attaquer la chose en mélangeant divers styles musicaux (techno, rock, ethnique...) sons pour autant en faire une soupe consensuelle ».
Le spectacle délivre donc une musique hybride alliant rythmes techno, chant en latin, bouddhistes et arabes.
Et effectivement. le mélange fonctionne, sons doute pour nous rappeler que nous venons tous de la même terre. D'ailleurs, la structure du spectacle calquée sur une messe catholique est plus la résurgence du passé de Zaboitzeff qu'une volonté de favoriser une religion ou une idéologie au détriment
des autres: « Lorsque j'étois enfant, mon grand père maternel qui était musicien, tailleur et organiste d'église, m'emmenait par la main aux offices catholiques
de toutes sortes, j'ai sûrement, à cette époque, été impressionne par le rite, le faste et la transe de ces
cérémonies que je ne comprenais pas... Avec ce spectacle, je ne désire d'aucune sorte disserter sur le bien fondé de telle ou telle religion...: ce sont le cérémonial, les représentations, la foule, la communion, les images, l'extase, les grondes pompes, les objets du culte, la transe et la musique qui me
motivent.»
Originellement mis en scène par Stéphane Vérité en 2002 en Autriche et à Maubeuge (France), ces spectacles ont été présentés dons une version plus « light» le 18 janvier au Théâtre Toursky de Marseille. Entouré de participants présents dès le déport, rejoint par de nouvelles choristes, Zaboitzeff a donné un spectacle haut en couleur, décuplant l'impact des titres de l'album. La transe est au rendez-vous. Car même si « ce projet s'est monté empiriquement,
sans une véritable recherche spirituelle » et que Thierry reconnaît avoir composé cette messe comme un exercice de style « comme un pirate, un dj, car mettre toutes ces choses ensemble constituait un véritable challenge », on ressent malgré tout (malgré nous ?) un véritable élan épique. Difficile de rester insensible face à ce souffle. Serions-nous victimes de notre (lourd) héritage? Ou plutôt avons-nous perdu l'habitude
de réfléchir à l'écoute d'un album abordant une thématique couramment ridiculisée dons l'univers du rock ?
Je ne saurais que trop vous conseiller de surveiller une éventuelle future représentation de ce spectacle et d'écouter cet album qui reste malgré tout une magnifique bande son.
Tous mes remerciements à Thierry, Editta, l'équipe du Théâtre Toursky.
Zaboitzeff & Crew Missa Furiosa (Intoxygene) www.intoxygene.com



PROGVISIONS.NET (UK)
par José Nafría
Chronique de l'album
MINIATUREN


I had been waiting for a long time for this to happen. The resurrection of Thierry Zaboitzeff, the wonderful French musician, member during many years of my adored Art Zoyd, who in his last solo album (he has published three since his definitive exit of Art Zoyd in 1997) has abandoned the techno-ethnic caprice completely (shown for example, in the interesting India that nevertheless, was not what one expected) to de- voted himself to what I like more, to develop the experimental RIO side he played for years in Art Zoyd.

This last CD of Thierry is a marvel that recaptures the best and darker essences in the Art Zoyd of the 90s (mainly in some moments that come directly from "Haxan" or "Marathonerre" directly), as the subtitle of the album already indicates ("Zoydian Suite in three movements") and as forty (and one) small, dense and atmospheric musical miniatures.

The group of Thierry is formed in this album by Christian Kapun (clarinets), Peter Angerer (drums) and the own Thierry (cello, bass, guitars, soundscapes, voices and programming), with the help in some miniatures of Judith Lehner's feminine voice.

This "Miniaturen: Zoydian Suite in 3 Movements" is the musical part of “a dance piece for nine dancers and eighteen winter coats" (??), created by Editta Braun's company in 1999 for the opening of the Salzburg festival.

As I have commented previously, the album includes three movements: "Schön" in thirteen parts and 19 minutes, “Zart” in seventeen fragments and 21 minutes and “Kalt” in other ten parts and almost 18 minutes, concluding with the independent piece "Finale" of five minutes of duration.

How can I define these musical miniatures? In general, I can say that the sound gen- erated by the programmed tapes, rhythms and convoluted percussion, gelid passages of electro-acoustic music and the wonderful and lonely clarinet brings us to the ghastly, dark and dense atmospheres created by Art Zoyd or the last albums of the Belgian Univers Zero. It is curious how the musical careers of these two big groups continues to intermingle: in this way for example, Daniel Denis, drummer and main composer of Univers Zero has played in many disks of Art Zoyd and in direct, the same as Michael Berckmanns (oboe and bassoon in UZ), Univers Zero last album is co-produced by Art Zoyd's people, Thierry Zaboitzeff played a song in "Ceux du Dehors" of Univers Zero.

Over this sound base loaded with emotional force, we enjoy devastating floods of guitars and bass, desperate voices full with pain, sweet moments amongst whispers, caresses and choral voices, followed by full outbursts of electricity and dirty noise, uneasiness charged with madness and illness, all kind of ambient sounds (orgasms, wailing, clicks of cameras that act as sound flashes during the different sequences of the suite, animals, water...), even, I swear, I can hear some musical fragments that seem pure metal mixed by the blend of Art Zoyd.

This is pure assonant dissonance, the unhinged world of Lovecraft or Kafka made reality, darkness made contemporary music. Truly I cannot imagine how anyone one can make dance out of this no matter how modern it is, with this music without structures, replete of discontinuity and holes, loaded with surprises, changes, sound mutations, rock, free jazz, contemporary, electronic classic..... a whole world that fits in this fabulous sound bible.
PROGVISIONS.NET (UK)
José Nafría



BIG BANG MAGAZINE (F)
par Jérôme Schmidt
Chronique de l'album
HEARTBEAT


Troisième opus du cofondateur du désormais légendaire Art Zoyd (cf Big Bang n°??), pionnier à la fin des années 70 de ce que l'on appellera la "nouvelle musique européenne" ou la "musique nouvelle", "Heartbeat" est une fois de plus une création musicale pour une chorégraphie de Editta Braun. On s'attend donc à trouver tous les gimmicks inhérents aux style mais, pour une fois, l'auditeur sera supris.

En effet Thierry Zaboitzeff après deux albums solo en demi-teinte ("Prométhée" sorti uniquement en LP et "Dr Zab" en CD chez Mantra) livre une superbe musique qui se passe très bien du support chorégraphique et, contrairement à son amie d'Art Zoyd Patricia Dallio elle aussi experte en musiques de ballet (4 beaux albums à son actif à ce jour), il arrive à nous surprendre pendant cette heure fort agréable d'écoute que constitue "Heartbeat". Fort de 14 morceaux de durées assez courtes (2'26 à 7'45) l'album est homogène mais sait alterner avec intelligence les morceaux puissants propulsés par la rythmique d'acier de la basse de Zabo et les séquenceurs judicieusement exploités (comme dans 'Komba') et les morceaux où l'idée de "lente ART ZERO du désir" devient centrale grâce aux vocaux féminins samplés et admirablement utilisés (voire le magnifique "El Amor Brujo" de plus de 7 minutes ou encore "In Grace").

Au cours de l'album, Thierry Zaboitzeff arrive à instituer une couleur musicale très personnelle, toujourds très proche la musique nouvelle mais faisant des incursions heureuses vers la world music (samples de chants africains dans "Clear Light" ou "Heartbeat", percussions très world par moments), incursions qu'il ne surexploite pas. Ayant recours à une multitude d'instruments (basse, claviers, samples, séquenceurs, percussions, voix gutturale), la monotonie n'a pas le temps de s'installer et ses aptitudes vocales y sont pour beaucoup, dévoilant un aspect de ses aptitudes musicales qu'il n'avait pas encore énormément exploité: une voix chaude ou gutturale, tantôt plaintive ou martiale, toujours onomatopéienne, répondant de temps à autres aux très beaux vocaux à la sensualité étudiée d'Editta Braun.

Pour tout dire, un très bel album cohérent, esthètique et pourtant cathartique qui revisite avec intelligence deux thèmes (un de Prokoviev, "le colonel Kijé" et un des... Who (See me feel me) et qui présente 11 compositions personnelles de très bonne facture (le dernier titre étant malheureusement assez peu convaincant). L'ombre d'Art Zoyd n'est jamais bien loin cependant mais qui s'en plaindra? Même pas les grincheux dont je fais partie...

BIG BANG MAGAZINE (F)
Jérôme Schmidt



ZILLO (D)
par Dirk Hoffmann,1998
Chronique de l'album
INDIA


Der ehemalige Art-Zoyd-Musiker Thierry Zaboitzeff hat bereits mit seinem letzten Soloalbum "Heartbeat" eindrucksvoll untermauert, daß er zur neuen Avantgarde der modernen Komponisten-Generation zählt, indem er traditionell klassische Techniken mit experimentellen elektronischen Arrangements und frischen Ideen kombiniert.

Sein vielschichtiger musikalischern Background, der von Klassik über Jazz bis zur ethnischen, elektronischen und Rock-Musik reicht , schmi Izt auch auf seinem neuen Werk "India" mit der spannenden Musik zusammen, die in Zusammenarbeit mit der österreichischen Choreograph in Editta Braun
entstanden ist.

Nach ihren zwei Indienreisen schuf sie ein von indischen und europäischen Tänzern umgesetztes Werk, das Zaboitzeff auf ebenfalls interkulturelle Weise musikalisch begleitet.

Dabei treffen fernöstl iche, tei I weise authentische Folklore-Elemente ganz ungeniert auf ausgefallene elektronische Arrangements und verspielte Akustik-Akzente.

Ein höchst abwechslungsreiches Album, das mit jeder musikalischen Konvention bricht und doch in sich schlüssig klingt.

ZILLO (D)
Dirk Hoffmann

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ZILLO (D)
par Joe Asmodo, 10/1997
Chronique de l'album
HEARTBEAT


Thierry Zaboitzeff "HEARTBEAT" (Atonal/EFA)
Art Zoyd ist eine der kultigsten Avantgarde-Bands, die nun schon seit über 25 Jahren mit ihren (früher) jazz-rockigen und tin den letzten Jahren eher) industrialsymphonischen Werken von sich reden machte. Der Co-Leader dieser Formation, Thierry Zaboitzeft, hat sich nun selbständig gemacht,
um seine radikaleren musikalischen Ideen - was nicht unbedingt unzugänglicher bedeuten muß - in die Tat umsetzen zu können. Dabei verarbeitet er ebenso musikalische Wurzeln seiner Heimat Rußland (z.B. ein schon von Sting verwendetes Motiv aus Prokofievs „Kije-Suite") wie avantgardistisches Klanggut, eine
Portion subtiler Weltmusik und klassische Rockmusik (vielleicht à la The Who?) Das Ergebnis ist eine seltsam schwebende Melange aus
Art- und Avantrockelementen, die selbst zu deren besten Zeiten in den Siebzigern hätten glänzend bestehen können, und mysteriösen bis surrealen
symphonischen Klängen, die in ihrer Summe eine begeisternde Klangreise in Bewegung setzen können.
Als wären die Wirbelnden Derwische von Magma (kennt die noch wer?) zu Buddhistischen Mönchen mit Sinn für Moderne bekehrt worden. Extraklasse!

Joe Asmodo



MIGHTYECHO.BLOGSPOT (A)
par Howard Whiting
Chronique de l'album
IVA LIRMA


Another fine album of utterly captivating music from Zaboitzeff which is extremely inventive , challenging, bombastic, dreamy, cinematic........... i could go on! This is highly sampled music (also with great use of electric guitar and vocals) whch in the right hands, as here, can be manipulated into extraordinary flights of the imagination, musically speaking...

Zaboitzeffs creative genius seems to have no bounds and he was in my opinion the very heart of Art Zoyds sound. Since his departure his solo releases just seem to get better and better, which unfortunately cannot be said the same for the current Art Zoyd.That bands subsequent releases seem to be a mere shadow of there former glory since this mans absence.

Howard Whiting

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MIGHTYECHO.BLOGSPOT (A)
par mightyecho.blogspot
Chronique de l'album
BACKUP

More superb avant rock from the leading force behind "Art Zoyd". Absolutely wonderfull collection here with mostly a compilation of short pieces which have also appeared on several of his other albums. The combination of styles are utterly compelling and fascinating for the lover of adventurous music.
If your into "Art Zoyd" like me, this artists solo work is absolutely essential !!

Source: mightyecho.blogspot



INTRA MUSIQUES (F)
par Stéphane, 04/1984
Chronique de l'album
PROMETHEE

Que dire d'un tel disque ? Le travail du chroniqueur devient ici difficile; goûts personnels et discothèque ne sont plus d'un grand secours. Comment même juger ? Thierry musicien et compositeur du groupe ART ZOYD, nous offre là un disque étrange , aux atmosphères plus martiennes que la musique d'ART ZOYD elle-même; c'est vous dire! Il y a bien quelques liens avec ce qu'ont fait Jon HASSELL OU Brian ENO, mais ils sont si tenus …
Quelques choeurs se promènent avec des rythmiques électroniques, et les mélodies sont dans l'ensemble du style d'ART ZOYD.
On retrouve même un thème qui figure sur leur dernier album "Les Espaces Inquiets". Une musique assez planante, qui n'est pas pour autant mièvre et sans expression: de belles envolées paisibles (?) qui se terminent par un réveil brutal, un brouillard rythmé et sonore à couper au couteau; des dérapages vers l'accéléré de certaines parties du son, rythme ou mélodie, qui donnent des effets surprenants et accrocheurs. Zappa disait que 90% de la musique sortie d'un studio n'utilisait pas, et de loin, les possibilités offertes par celui-ci.
Elles sont, je crois, largement utilisées sur ce disque, et qui plus est, dans un but loin d'être stérile, pour une musique belle intelligente, rare et qui a la pêche (Ouf, je l'ai dit!). Un disque qui vous surprendra et qui vous plaira !
INTRA MUSIQUES (F)
Stéphane



PROGGNOSIS (USA)
par Valerio, 17/01/2017
Chronique de l'album
MULTIPLE DISTORTIONS

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Archives – Multiple Distorsions as it may seem to many of us is NOT just an Archive. Some artists publish an 'archive' album when they have left too many ideas through the years and they have no NEW ideas to make a “new” album. For this 'archive' this is absolutely not the case.

In Dr Zab's Multiple Distorsions theyears of the compositions are not provided so all we just know is a time frame of 2005-2016. No more details, no info…just music and excuse me if I underline just.

Let’s make a step backwards. Who is Thierry Zaboitzeff? If You are into adventorous avantprog and Rock In Opposition You know for sure the legendery French band Art Zoyd, and Dr. Zab is the founder and leader of this legendary band.

After travelling abroad whole world in Theatres composing music for ballett he decided in 1997 to leave the band and start his solo career founding a new band. Zaboitzeff & Crew, and opening his own recording Studio where he focuses more into collaborations with video/film makers creating many (and I say MANY) soundtracks.

Ok, - let’s get down to Multiple Distorsions. If you are familiar with the music of Art Zoyd You have just a little advantage over newnew listeners.. but just a little advantage because Dr.Zab’s music and composing SOLO is not the same. He focuses less into orchestral arrangements and he is more concrete coming directly from soul, a hidden mr.hyde soul maybe.

The Music is most of the time extremely dark and perhaps sad. But even if it’s dark and sad, (as well it was in Art Zoyd), now the development jumps even into beats and electronics typical of the new generation music making. You dive into a rainbow of sound and “positive” feelings…oh dear I saw my wife shaking ass dancing listening track 06 Vorschrift and this is just A M A Z I N G. Imagine to be on a desert Island in the Pacific Ocean… this is the idea it gives me. Anything is extremely beautiful but at the same time it’s dangerous, everything can save You or kill You and every second can be a surprise, can be the end, can be the beginning. It can rain suddenly, it can get extremely windy suddenly.

In this it’s well evident the “soundtrack” orientation of the artist, living little extracts, little minutes of pure joy, defragmented music sometimes…oh well a snake can kill you - but it can also become a good meal full of proteins for your surviving.

This means Thierry Zaboitzeff's music is not a labelled music, an elite music, I mean my wife is even well trained and we don’t listen MTV Music I mean… I just mean everybody can enjoy this music from rock fans to classical accademical students or happy listeners..or depressed fans of emo music.

The electronics are strong and Dr.Zab, multi-instrumentalist, is found playing both basses and guitars in a magistral way with keyboards and sampling doing the rest.

I highly recommend this album for fans of adventorous music. For those who are looking for something different - something in between a soundtrack and a night mare (always a la French way with estreme elegance and attention to details) I suggest you take a listen. You may discover a new kind of music to enjoy.

PROGGNOSIS
Reviewed by Valerio on 17 Jan 2017



KULTURNI MAGAZIN (CZ)
par Petr Procházka, 12/2020
Chronique de l'album
NEBENSONNEN - REMAKE

Site web

Po dvacetiletém integrálním členství v Art Zoyd se originální skladatel a multiinstrumentalista Thierry Zaboitzeff koncem 90. let odpojil od bývalé kapely a vyšlápnul si novou cestou solitéra. Před rokem začal vypouštět na svou bandcampovou platformu veškeré sólové nahrávky včetně raritních či koncertních unikátů. Nikoli jen ryzí alba svého jména, ale i soundtracky k divadelním a baletním projektům. Někde nahrál veškeré nástroje sám, jinde využil přehršel instrumentalistů. Nutno poznamenat, že ani jedna záležitost není vůbec plytká, neopakuje se ani v hudebních tématech ani náladách ani v užití nástrojů. Pokaždé překvapuje. Konzumace jeho hudby vyžaduje naprosto bezbariérový přístup. Pokaždé je to jinak a jinak. Vždy se ale drží harmonie, takřka žádné atonální „ultramodernistické“ úlety. V příkladu pro mě nehorázně vynikající Missa Furiosa z roku 2004.

Hudba k baletu salzburgského tanečního spolku choreografky Editty Braunové vyšla u Atonal Records v roce 2000 a je jedinou zcela nově nahranou starší věcí. Zaboitzeff ji po dvaceti letech přetransformoval, z původní hodinové suity hodně ubral, a s přidanými nástroji i dramaticky oddělil dříve provázané kusy do jednotlivých segmentů, sedmnácti ultimátních skladeb ve zcela nových aranžích. A znova svázal. Hlavní roli vede akustický klavír, ten je nejúčinnějším elementem, který coby zásadní činitel nové verze mění charakter celého dřívějšího díla, pak nenápadná komorní symfonická orchestrace (nejen) smyčců, takřka bez syntezátorů. Byť originální baletní score bylo nesporně výborné, Zaboitzeff zjevně věděl, proč se pustit do remaku od nuly. Nebensonnen (remake) je teď výjimečným, komplexním albem. Skladby jsou oproti původní nahrávce přepečlivě uspořádané, jsou průzračnější, díky nástrojové čistotě i dramaticky napínavější, ocitnete se uvnitř děje, a když přijde pauza, zvědavost nutí poslouchat dál, co přinese další příběh. Ten si stvoříte sami.





EUROCK (USA)
par Archie Patterson, 2022


Thierry Zaboitzeff - 50 YEARS OF MUSIQUE (3)

In 1976 Art Zoyd 3 had been reconfigured since its creation in 1969 and released their first LP titled, 'Symphonie of the Day the Cities Burn'. Also in 1976 The band performed LIVE at the 'Théâtre de la Renaissance' in Paris on November 1976.
In 2022 Thierry just released an extraordinary 3-CD career spanning retrospective box set compilation of tracks from his soundtracks, music for dance and solo albums. In the annals of European experimental bands Thierry's musique is literally not comparable to any other European experimental or progressive music bands I've ever heard.
Today Thierry still writes and performs music for dance, theater, multimedia events, movie soundtracks, as well as music for his own projects and performances.
You can hear a sample 'Pagan Dance', Buy the box set (there are only 3 copies left), a Digital version of the complete set as well as all 31 of Thierry's digital albums (at 40% Off) at Bandcamp.
If you are a fan of French experimental music his new historical retrospective is essential! He's been consistently innovative and his music still embodies the spirit of the 1970's and 80's…
Go to Bandcamp @ https://thierryzaboitzeff.bandcamp.com/.../thierry...


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EUROCK (USA)
par Archie Patterson, 2016
Chronique de l'album et DVD
THE CABINET OF DR. CALIGARI


Last but certainly not least is his most recent release, a soundtrack to Robert Wiene’s classic silent film The Cabinet of Dr. Caligari, available on DVD as well as audio CD. I would recommend the DVD not only because it musically brings to life an original German expressionist classic, one of my favorites since I saw it in a film class back in college. More importantly, it also contains a 75-minute live performance by Thierry playing in accompaniment to a screening of the film. The camera work is fascinating as you watch him perform in real time while the film plays. He employs an incredible array of acoustic and electronic instruments in recreating the musical score, which ranges from electronic rock to post symphonic themes. The music is a masterful experiment in modern classical composition, haunted by spirits of the old masters as well as the creative essence of his Art Zoyd past.
After spending a couple days immersing myself in this music and writing about it, I’m left in amazement that one of Europe’s original pioneering experimental musicians is still today pushing the boundaries of sound further out there. All five of these productions explore completely different musical concepts, serving in a sense to encapsulate Thierry Zaboitzeff’s almost 40-year creative continuum. The music he makes transcends time and today still embodies that original spirit of experimentalism that was present way back in the 1970’s.
EUROCK (USA)
Archie Patterson.

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EUROCK (USA)
par Archie Patterson, 2016
Chronique de l'album
PLANET LUVOS

Planet Luvos is a music score created for stage theatrical performance by an Austrian company. It too is quite different from the other CDs reviewed here. It’s hard to discern the subject exactly as there is no liner notes, the cover illustrated by bodies lying illuminated on a darkened stage suggests a modern dance performance. The sound is highly experimental musically featuring a striking mixture of electronic melodies, myriad effects and vocal interjections. The music certainly evokes a planet with an alien presence. In fact, just now while listening to “Act 7” the film Alien comes to mind. The album certainly makes a fascinating 17th addition to Thierry’s catalog.
EUROCK (USA)
Archie Patterson. 

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EUROCK (USA)
par Archie Patterson, 2016
Chronique de l'album
SIXTEENTH

16 (Sixteenth) is a highly adventurous album that incorporates both rock and Zeuhl music influences. Musically it’s amazingly sequenced as the tracks flow together offering a fascinatingly diverse listening experience. The album demonstrates the wide range of Thierry’s compositional skills. Isabelle Farmini’s soprano voice is integrated into four compositions beautifully; he also makes use of an excerpt from Martin Luther King’s I Have a Dream speech in “Free At Last” creating a powerful piece of musical sociology. The music at times is beautiful, strange, powerfully rhythmic and experimental, resembling a musical kaleidoscope of notes and sounds arranged into an incredibly adventurous organic composition.

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EUROCK (USA)
par Archie Patterson, 2016
Chronique de l'album
SEQUENCES


Sequences is a film soundtrack to Winds of Sand, Women of Rock. A documentary, it chronicles the yearly 1500-kilo march of the Tubu tribe women who trek alone through the desert to collect and sell dates in the marketplace. The music is an incredible fusion of natural sound evocations of the desert and myriad ethic folk-like themes, interspersed with percussion, electronica and e-cello symphonic interludes. As a music score, it’s masterful. I’ve only seen a video trailer of the film on YouTube, but the story about the life of tribal people in the Sahara on the face of it seems incredibly intriguing. The liner notes however characterize it as a story about male subjugation of women making it appear to be video missionary work by a female filmmaker injecting modern Western politically correct cultural ideas into an ancient tribal society. Comments on YouTube also raise questions about incorrect subtitle translations.

Archie Patterson.



PROG CENSOR (F/B)
Thierry Zaboitzeff - Le Passage
rock in opposition – 33:12 – France 2024

Par Auguste - 28/03/2024
Site web

Ce n’est pas une première dans son œuvre, qu’il accumule patiemment depuis des décennies, en recherche constante, yeux ouverts et oreilles déployées, mais chaque fois, la surprise est là, tant Thierry Zaboitzeff est à la fois plongé dans le temps d’aujourd’hui (le temps, c’est le moment, là où nous sommes, en 2024, sur cette ligne inexorable, mais aussi ce temps qu’il fait, aux enjeux si majeurs que la disparition se montre, menaçante – un comble, non?) et nourri des temps d’hier, ceux au long desquels il a créé et accumulé les sons, joué avec les timbres, hérissé les associations, sonnantes ou non, subtiles ou radicales, d’une crépusculaire beauté. «Le Passage» parle de la Terre, ce petit endroit sphérique qui nous abrite et se fâche (tant nous avons joué aux apprentis sorciers), nous secoue (mais pas assez puisque Trump-l’idiot va être réélu), nous pousse à la créativité ultime (la solastalgie – qui désespère les jeunes adultes au point de refuser d’enfanter – accouchera-t-elle de la sagesse?): dans «La Forêt», l’épique de ce nouvel album, la tronçonneuse vainc et l’arbre se déchire avant de s’abattre au sol – mais le piano dessine une mélodie d’espoir?; la trompette de Jean-Pierre Soarez (une autre preuve de vie d’Art Zoyd) trépide dans «Poster Boy», partition réarrangée de la musique de «Fang den Haider», filmé par la belge Nathalie Borgers qui cherche, sur les terres de Carinthie, les raisons de l’épitaphe louangeuse de l’extrémiste corrompu Jörg Haider (il n'y a pas qu’en Amérique…), et lumière d’une aube à repeindre?; «À la poursuite du Zoyd (extended)» entretient le présage, musique sombre et démente; le morceau titulaire, peut-être, réaménage une notion d’espoir?
Auguste

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PROG CENSOR (F/B)
24/09/2023
Thierry Zaboitzeff
LUVOS migrations
rock in opposition / soundtrack – 16:51 – France 2023

Site web

«LUVOS migrations» est une chorégraphie (Editta Braun), un film (Menie Weissbacher) et une musique (Thierry Zaboitzeff): LUVOS, groupe de danseurs spécialisés de e b c (la compagnie de la chorégraphe autrichienne, compagne du compositeur) parle – et montre et met en scène et sort du rêve – un monde étrange, peuplé de créatures ciselées et indéterminées (un corps, des membres, pas de tête), mouvantes et vivantes, habitant des décors de béton et de graffitis qui disent former une civilisation. Cette vision dure (l’apocalypse d’une vision architecturale brutale) et optimiste (le mouvement vital d’êtres torsadés – peut-être adaptatifs) est portée une bande son luxuriante (la riche palette de timbres), animée (les sons animaux et naturels), intrigante (les ruptures de rythmes), mobile (elle nous mène dans la scène) et mobilisatrice (on veut y être, on veut repeindre ces murs, en araser les angles).
Auguste
Bandcamp: https://thierryzaboitzeff.bandcamp.com/.../luvos...
vimeo: https://vimeo.com/751118062

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PROG CENSOR (F/B)
04/12/2022
Thierry Zaboitzeff
50 ans de musique(s)
rock in opposition – 3:37:59 – France ‘22


Comme vous pourrez le lire dans l’interview que Thierry Zaboitzeff nous a accordée, cela fait 50 ans qu’il pratique son art, aussi bien en solo qu’avec Art Zoyd, Aria Primitiva ou encore Thierry Zaboitzeff & Crew. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que pour un autodidacte, notre homme s’en sort haut la main. Pour être honnête, je ne connaissais guère ses réalisations car, jeune, je ne disposais que de peu d’argent de poche et je le réservais à l’acquisition de musique progressive bien sûr, mais moins avant-gardiste. Je n’ai fait connaissance avec son univers que lorsqu'il est venu nous présenter son projet Aria Primitiva au Centre Culturel de Soignies, en 2018, à l’occasion du festival Les Intemporelles. J’ai été immédiatement subjugué et conquis, incité que j’étais à suivre sa carrière d’un peu plus près. La sortie de cette compilation qui mélange habilement les époques est donc une chance exceptionnelle de découvrir ce grand artiste d’une gentillesse tout aussi enthousiasmante. C’est pourquoi je vous invite à vous précipiter sur cette sortie.
Tibère.


Thierry Zaboitzeff a accepté de répondre aux quelques questions que nous nous posions à propos de sa carrière.
(Interview réalisée par Tibère.)

Prog censor – Comment te sens-tu après 50 ans à créer des musiques innovantes ?
Thierry Zaboitzeff – Pas mal, merci! Parfois un peu à l’ouest, dans le doute, mais il y a toujours ce petit quelque chose qui me fait repartir, un accord, une idée improbable, un son, le son, une simple vision qui glisse sur d’autres et m’entraînent dans les dédales magiques de la composition, mais je suis comme le petit poucet, je sème des trucs pour retrouver mon chemin…
En fait je me sens très heureux d’avoir pu mener à bien ce projet de rétrospective.

Pc – Peux-tu revenir pour nous sur les débuts de l’histoire. Ce ne fut guère facile. On le voit en parcourant ton site (http://www.zaboitzeff.org/zaboitzeff-raconte.html) où tu relates épisode après épisode (il y en a actuellement huit), 50 ans d’amour (et de galère) musical(e).
TZ – Oui, je vous conseille de les lire, histoire de bien vous rendre compte de ce que cela signifiait d'être musicien et compositeur indépendant en ces temps-là.
Le début de toute cette histoire, c’est la rencontre avec Gérard Hourbette puis Rocco Fernandez qui nous invite dans son groupe Art Zoyd. Rocco nous quitte en 1975 et nous laisse les clefs de la maison et, à partir de là, nous expérimenterons différentes formations d’Art Zoyd avec un tas de musiciens qui viendront, partiront, reviendront… Toutes ces rencontres et expériences déboucheront sur des moments importants: en 1976, notre premier album puis une tournée en France en première partie de Magma; nous serons également avec eux au Théâtre de la Renaissance (Paris) une dizaine de jours. Puis, pour ne citer que les temps les plus forts, nous ferons une tournée européenne en 1984 suivie de la création avec les ballets de Roland Petit «Le Mariage du Ciel et de l’Enfer» (Milan - Palais des sports / Paris-Théâtre des Champs Elysées / Marseille-Opéra / Bordeaux-Opéra); pour faire court également viendront les ciné-concerts «Nosferatu - Faust et Häxan»… Ceci nous mène en 1997, l’année où je quitte Art Zoyd (profondes divergences sur de nouvelles orientations, lassitude…).
Mais je souhaiterais vous préciser que ce coffret ne consacre que quelques épisodes à Art Zoyd et que je tiens absolument à défendre et mettre en avant ce que j’ai produit dans les 25 années suivant mon départ de AZ.

Pc – Quel ordre as-tu choisi pour nous présenter l’ensemble de ta carrière?
TZ – L’ordre fut un gros casse-tête. Je ne suis jamais parvenu à monter une playlist chronologique qui se tienne ou alors, si j’y arrivais parfois, cela ne convenait jamais sur la durée. Je prenais donc la décision de m’asseoir sur la chronologie et je me dirigeais plutôt sur l’idée de voyage dans mes musiques, avec mes musiques; cette idée est nettement plus intéressante car elle permet plus d’espace, de finesse, de poésie… De plus, aimant jouer sur les contrastes, j’allais me régaler…

Pc – As-tu remixé certains titres?
TZ – J’ai remixé deux titres sur les 43 proposés: «Unsex Me Here», à l’origine sur l’album «Art Zoyd-Berlin», mais que je reprends et remixe en solo et en live en 2009. Puis «Konzobélé» extrait de l’album «Marathonnerre». Pour d’autres pièces, j’ai refait un mastering de manière à unifier autant que possible la couleur de ces compositions fort distantes parfois dans le temps. J’ai également réenregistré «Baboon’s blood» (de l’album AZ-Berlin) en invitant Daniel Denis (Univers Zero) à y jouer les percussions, ce qui rend la pièce plus vivante et plus sauvage, puis en hommage à Rocco Fernandez, le fondateur de Art Zoyd, j’ai repris dans une version toute personnelle le titre «Sangria» que le groupe d’alors avait enregistré sur un 45 tours chez Opaline Records-Chants Du Monde en 1971.

Pc – Comment étaient réalisées la plupart des compositions, que ce soit avec Art Zoyd ou les autres émanations musicales que tu as croisées?
TZ – Vaste sujet! Tout dépend des époques… Autodidacte depuis fort longtemps, je n’écris pas la musique (sur du papier), j’utilise donc des enregistrements audio ou MIDI faits maison car je joue de plusieurs instruments et, avec le temps, je suis devenu aussi un manipulateur d’électronique (séquenceurs, samplers, effets, computers…) pour communiquer ce que je souhaite, d’une manière relativement précise, lorsque j’interviens avec d’autres musiciens et lorsque je ne fais pas appel à eux, je compose et enregistre directement dans mon studio… Mais le point de départ de mes compositions est rarement très sophistiqué, j’utilise à la base un seul instrument (guitare ou clavier ou basse) sur lequel j’échafaude quelques bribes de ce que deviendra un morceau, en chantonnant même, et je me laisse totalement aller à la fantaisie que je recadre et orchestre ensuite dans le studio.
Le processus est un peu différent lorsque je travaille sur des commandes car, dans ce cas, beaucoup de paramètres viennent interférer, comme la durée, les demandes particulières d’un régisseur ou metteur en scène, le type d’instrumentation souhaité…

Pc – Art Zoyd a eu des occasions de jouer (et partager des musiciens) avec des groupes comme Magma ou Univers Zero. As-tu des souvenirs marquants à partager de cette période?
TZ – Avec Magma, que nous estimions énormément, à part les concerts à la même affiche, nous n’avons rien partagé. Peu après ces tournées, je rencontrais Daniel Denis puis Univers zero et nous mélangerons même nos deux groupes en une sorte de bigband apocalyptique, lors de concerts de réunion. J’ai en mémoire celui de «Nancy Jazz Pulsations», c’était chaud! Il y avait les pour et les contre qui se manifestèrent avec force… Nous n’avons fait que quelques concerts dans cette formation économiquement non-viable à cette époque et puis aussi chaque groupe avait des envies plus personnelles pour l’avenir.

Pc – As-tu quelques souvenirs et anecdotes particulières à partager?
TZ – Il y en a de nombreux et je ne peux pas prendre toute la place ici avec cela. Je parlerai plutôt de faits marquants.
En Juin 1984, à l’invitation du chorégraphe Roland Petit : La première du «Mariage du ciel et de l’Enfer» avec le corps de ballet de la Scala de Milan et notre groupe Art Zoyd au Palais des Sports de Milan durant une semaine. Grand événement qui pour un temps nous sortit de notre quotidien de groupe jouant dans des clubs et autres salles alternatives. De grandes audiences s’offraient à nous avec les moyens techniques à la hauteur. Une équipe formidable de techniciens et musiciens.
Pour l’historique et les anecdotes, je vous invite à consulter ce lien: http://www.zaboitzeff.org/zaboitzeff-raconte.html.

Pc – Peux-tu nous parler des années qui ont suivi Art Zoyd, notamment la période Aria Primitiva?
TZ – Dès que je quitte AZ, je me lance dans un tas de projets: danse contemporaine, théâtre… Toujours comme compositeur bien sûr et de temps à autres en live, en solo ou en groupe: Zaboitzeff & Crew sur les projets Miniaturen avec Edita Braun Company, puis Missa Furiosa créé lors du Bruckner Festival Linz en 2002.
Ma rencontre avec la chrorégraphe autrichienne Editta Braun sera le point fort de ces 25 dernières années; je collabore musicalement depuis 1997 à tous les projets de la compagnie, c’est une expérience très forte émotionnellement, très enrichissante, et cela m’a permis d’ouvrir mon art à d’autres horizons et me libérant ainsi des parcours obligés de la musique contemporaine et des circuits musicaux alternatifs parfois un peu sclérosés et fermés.
Aria Primitiva est né assez tard, en 2017, à la suite des concerts anniversaire «Art Zoyd - 44 ½». À cette occasion, j’avais rencontré Nadia Ratsimandresy et Cécile Thévenot qui faisaient également partie de cette formation célébrant cet anniversaire. L’expérience de groupe me manquait et Nadia et Cécile vinrent me proposer de travailler ensemble; j’hésitai un instant et puis banco! Le problème majeur entre nous était la distance nous séparant: Nadia à Paris, Cécile à Strasbourg et moi en Autriche à Salzbourg… Nous avions peine à trouver des dates pour nous réunir tant qu’aucun concert ne fut planifié. Au niveau composition, j’avançais à pas de géant et, en quelques mois, un répertoire de base était prêt et, fort de cela, je me mis à rechercher des dates. Quatre concerts furent planifiés et garantis financièrement. Nous pouvions nous jeter à l’eau et entamer nos répétitions. C’est ainsi qu’est né et aura vécu Aria Primitiva car, après un album («Sleep No More» et ces quelques concerts, Nadia a repris ses activités avec Art Zoyd dont elle était toujours membre et une distance s’est installée durablement, puis Cécile rêvait de plus d’improvisations, ce qui n’était pas le centre d’intérêt principal d’Aria Primitiva qui finalement était devenu mon bébé. J’avais, j’ai beaucoup d’estime pour ces musiciennes mais un avenir me semblait impossible, je décidai d’en terminer avec cette formation puis la crise du covid nous est tombée dessus… Je suis passé à autre chose.
Je dois ajouter que, tant que cet ensemble a existé, j’ai adoré le processus de travail et la perspective d’un nouveau groupe de scène, un peu dans la direction d’Art Zoyd des années 86-87 qu’inconsciemment j’aurais aimé ressusciter… Il y avait tant à faire et tant d’autres musiciens à inviter.

Pc – Des concerts ont-ils été prévus pour fêter les 50 ans de carrière?
TZ – À cette heure, aucun concert n’est prévu et proche de mes 70 ans. Je n’envisage plus la musique sous le prisme des tournées en bus, rangement de matos à trois heures du mat. Les occasions d’excès en tous genre et endosser toujours la responsabilité pour d’autres musiciens qui ne se bougent que parce que vous seul leur demandez de bouger… Certes, je suis un peu aigri sur ce thème après avoir vécu de désagréables situations.
Disons que je ne suis plus intéressé par cette façon de vivre la musique… J’ai d’autres projets autour de mes sons et vous me donnerez peut-être l’occasion de vous en parler plus tard.

Pc – Merci Thierry pour cette interview. Un dernier mot pour encourager nos lecteurs à (re)découvrir tes univers?
TZ – Merci à vous! Mais pour cette dernière question je citerai Denis Desassis que j’ai invité à préfacer ce coffret et il vous parlera de cette anthologie mieux que personne, et assurément mieux que moi! Et encore merci à lui pour ses mots.
«Voici donc 50 ans de musique(s) illuminés par le foisonnement d’une anthologie suscitant l’admiration, tant la cohérence d’ensemble, depuis les premières heures d’Art Zoyd jusqu’aux dernières chorégraphies païennes, relève ici de l’évidence. Musique, cinéma, danse, théâtre sont assemblés en un grand tout affranchi du temps et des barrières stylistiques pour s’abandonner à un imaginaire peuplé de tourments et d’espoirs, ceux d’un voyage en direction du grand mystère. L’œuvre de Thierry Zaboitzeff est parée des couleurs ténébreuses d’une épopée de l’initiation dévoilant au fil des jours des paysages énigmatiques parfois désolés, dont la contemplation suscitera une curiosité mêlée de fascination.»


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PROG CENSOR (F/B)
par Auguste 03/12/2021
Chronique du EP
PAGAN DANCES
Site web

Thierry Zaboitzeff
Pagan Dances
#rockinopposition – 19:36 – France ‘21
Il a un son bien à lui (et le violoncelle électrique n’en est pas le seul garant) – le graal de tout groupe, d’autant plus difficile à atteindre pour un artiste seul (en dehors des contours si personnels de la voix) –, Thierry Zaboitzeff (Aria Primitiva, ex-Art Zoyd, musiques de théâtre, de film…), capable d’exploration caverneuse et aérienne en même temps (le couple chant/piano du «suspendu dans la grotte», «La Légende de NaYmA»), tout comme d’un périple plus obscur (hasardeux?) dans l’univers de ces «danses païennes», nerveux, inquiétant, aux confins de ce que nous voulons voir – ou entendre.
Auguste
Lien Bandcamp:
https://thierryzaboitzeff.bandcamp.com/album/pagan-dances-ep

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PROG CENSOR
par Auguste, 23/01/2021
Chronique de l'album
PROFESSIONAL STRANGER

Site web

Thierry Zaboitzeff
Professional Stranger
art rock – 41’15 – France/Autriche ’20

J’ai écrit «Art rock», parce que c’est notre usage, presque rituel, aussi restrictif, abusif, arbitraire – classifier appauvrit – qu’utilitaire, pratique, bénéfique – modéliser enrichit –, lorsqu’on rend compte d’une œuvre, de la caractériser (suivant une taxonomie lapidaire mais représentative), de la décrire (comme on peut), de la comparer (pour situer), de la contextualiser (en fonction de ce qu’on connaît), de (tenter de) la comprendre (qu’a voulu faire l’artiste, à ce moment de son parcours?) et de l’apprécier (suivant le cas), mais qualifier ce nouvel (et vingt-septième) album est justement un des défis posé par la diversité des pratiques esthétiques de Thierry Zaboitzeff, connu pour son parcours au sein d’Art Zoyd. «Professional Stranger» est l’espace sonore créé autour de «Long Life», chorégraphie intimiste à deux danseuses (34 et 74 ans) d’Editta Braun, qui parle de l’expérience de la vie, ses désillusions et son désir tenace d'un monde meilleur. Zaboitzeff y déroule un souffle qui fait parfois penser à celui – pop comme l’est sa réinterprétation de «Venus» des Hollandais de Shocking Blue mais aussi populaire comme cette "Petite valse" («Mali valcer» en croate) – de Yann Tiersen pour «Amélie Poulain» («Дерево (Derevo)»), où l’accordéon se marie avec un enracinement rock de chambre («Overlap Processing»), jazz («So etwas wie blau»), minimaliste (la patte du Brian Eno de «Taking Tiger Mountain (By Strategy)» dans «L'insouciance de Venus») ou électro-classique dans cette gutturale version du hit de Depeche Mode («Enjoy the Silence»). «Professional Stranger»…, la définition, à prendre au sens littéral, réjouit.

Auguste

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PROG CENSOR (B/F)
par Lucius Venturini, 27/11/2019
Chronique de l'album
MINIATUREN - REMASTERED

Site web

Thierry Zaboitzeff & Crew
Thierry Zaboitzeff & Crew
RIO – 63’00 – France ‘19
Il s’agit d’une remise à neuf d’un projet de 1999, de Thierry Zaboitzeff: 41 compositions «miniatures», intégrées organiquement pour former trois longues pièces frisant les 20 minutes, également nommées «Zoydian Suite en Trois Mouvements». Évidemment, cela produit un espace de mouvements et de transformations permanentes autour de certaines émotions qui sont ici mises en exergue.
D’abord, «Schön», beau en allemand. Christian Kapun officie à la clarinette et Peter Angerer aux drums. Le ZAB s’occupe du reste... De fait on nage dans une musique contrastée, où les timbres et les inventions rythmiques se marient parfaitement avec les harmonies tendues et le chant aux effluves zeuhl.
«Zart», doux, est la pièce la plus longue et commence avec quelques magnifiques moments de percussions. Ensuite on plonge dans une sorte d’ambiance médiévalo-zeuhl et la ronde continue jusqu’à la fin du mouvement. Un régal…
Enfin, «Kalt» (froid en allemand) nous offre un voyage grinçant en RIO-land, avec - nécessairement - des relents d’Art Zoyd dans le collimateur et de superbes passages de RIO/rock de chambre. La voix de soprano de Judith Lehner apporte un côté aérien à cette pièce qui évoque aussi Magma à certains moments.
L’opus termine avec un «Finale» qui nous laisse avec le cœur plein d’impressions fugitives, kaléidoscopiques, colorées de ce voyage passionnant pour un grand disque de notre cher ZAB… Cela méritait cette révision et remise à neuf… Superbe remaster…À ne pas manquer. On en redemande!
Lucius Venturini
4,5/5

https://thierryzaboitzeff.bandcamp.com/album/miniaturen-remastered

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PROG CENSOR (B/F)
par Auguste, 07/06/2019
Chronique de l'album
ARIA PRIMITIVA - SLEEP NO MORE

Site web

Aria Primitiva
Sleep No More
electro-symphonic/art-rock – 53’31 – France ’19
On attendait ce premier album avec une avidité grandissante, excités par la toute première prestation publique du nouveau projet de l’ex-Art Zoyd devant l’audience médusée du festival Les Intemporelles. Le trio est atypique: violoncelle électrique, basse, samplers et voix (Thierry Zaboitzeff), claviers et samplers (Cécile Thevenot), ondes Martenot et clavier (Nadia Ratsimandresy). Le trio est choc: des cultures (classique, rock), des styles (avant-garde, expérimental), des sonorités (électronique, tribale), des écritures (précise, improvisée). Le trio est énergie: hypnotique, inquiétante, puissante. Il amalgame deux générations, qui ont en commun le goût de l’aventure sonore et quelque chose à dire au bout de leurs doigts. L’album intègre les trois éclatants titres annonciateurs de l'EP «Work in Progress», remixés au coup de poing un brin plus acéré - «Maïdaykali» y gagne d’ailleurs une minute. «Endayi Endesi» donne le ton d’entrée de jeu: étrangeté aérienne des ondes Martenot, claques brutales de la basse, rythmes motoriques et claniques de la non-batterie, voix de gorge ou de catacombes, additifs concrets (rire, aboiement). Improvisés et live, «Hystamack» et «Kletka» élargissent l’espace nécessaire à l’album pour s’épanouir encore un peu plus, quand «Nixen» renouvelle l’oxygène pour la déclamation d’amour aux héros de Bowie («Helden»). Variation parmi les variations («… pour une porte et un soupir»?), «Mais ouvrez donc cette porte!» referme d’une époustouflante manière celle d’un album insolite et fertile.
Auguste



CUNCUNNAMA.BLOGSPOT.CO.AT
par Liborio Friki
Chronique de l'album
MINIATUREN


I had been waiting for a long time for this to happen. The resurrection of Thierry Zaboitzeff, the wonderful French musician, member during many years of my adored Art Zoyd, who in his last solo album (he has published three since his definitive exit of Art Zoyd in 1997) has abandoned the techno-ethnic caprice completely (shown for example, in the interesting India that nevertheless, was not what one expected) to de- voted himself to what I like more, to develop the experimental RIO side he played for years in Art Zoyd.

This last CD of Thierry is a marvel that recaptures the best and darker essences in the Art Zoyd of the 90s (mainly in some moments that come directly from "Haxan" or "Marathonerre" directly), as the subtitle of the album already indicates ("Zoydian Suite in three movements") and as forty (and one) small, dense and atmospheric mu- sical miniatures.

The group of Thierry is formed in this album by Christian Kapun (clarinets), Peter Angerer (drums) and the own Thierry (cello, bass, guitars, soundscapes, voices and programming), with the help in some miniatures of Judith Lehner's feminine voice.

This "Miniaturen: Zoydian Suite in 3 Movements" is the musical part of “a dance piece for nine dancers and eighteen winter coats" (??), created by Editta Braun's com- pany in 1999 for the opening of the Salzburg festival.

As I have commented previously, the album includes three movements: "Schön" in thirteen parts and 19 minutes, “Zart” in seventeen fragments and 21 minutes and “Kalt” in other ten parts and almost 18 minutes, concluding with the independent piece "Finale" of five minutes of duration.

How can I define these musical miniatures? In general, I can say that the sound gen- erated by the programmed tapes, rhythms and convoluted percussion, gelid passages of electro-acoustic music and the wonderful and lonely clarinet brings us to the ghastly, dark and dense atmospheres created by Art Zoyd or the last albums of the Belgian Univers Zero. It is curious how the musical careers of these two big groups continues to intermingle: in this way for example, Daniel Denis, drummer and main composer of Univers Zero has played in many disks of Art Zoyd and in direct, the same as Michael Berckmanns (oboe and bassoon in UZ), Univers Zero last album is co-produced by Art Zoyd's people, Thierry Zaboitzeff played a song in "Ceux du Dehors" of Univers Zero.

Over this sound base loaded with emotional force, we enjoy devastating floods of guitars and bass, desperate voices full with pain, sweet moments amongst whispers, caresses and choral voices, followed by full outbursts of electricity and dirty noise, uneasiness charged with madness and illness, all kind of ambient sounds (orgasms, wailing, clicks of cameras that act as sound flashes during the different sequences of the suite, animals, water...), even, I swear, I can hear some musical fragments that seem pure metal mixed by the blend of Art Zoyd.

This is pure assonant dissonance, the unhinged world of Lovecraft or Kafka made reality, darkness made contemporary music. Truly I cannot imagine how anyone one can make dance out of this no matter how modern it is, with this music without structures, replete of discontinuity and holes, loaded with surprises, changes, sound mutations, rock, free jazz, contemporary, electronic classic..... a whole world that fits in this fabulous sound bible.
http://cuncunnama.blogspot.co.at
Liborio Friki



TECHNIKART N° 262 (F)
Entretien Laurence Rémila 09/2022 
Thierry Zaboitzeff - 50 ans de musique(s)


L'OBJET DU CULTE - THIERRY ZABOITZEFF
THIERRY ZABOITZEFF, L'AGITATEUR
" ABATTRE LES CLOISONS ! "

Il est l'un des piliers d'Art Zoyd, groupe mythique du free-rock à la française. Pour fêter son demi-siècle d'agitation musicale,
Thierry Zaboitzeff publie une majestueuse compilation 3-CDs. Interview carrière.


Vous revenez sur votre parcours avec ce coffret 50 ans de musique(s). Comment êtes-vous devenu l'un des membres
des légendaires Art Zoyd ?

Thierry Zaboitzeff : La création d'Art Zoyd, c'est 1969. Moi, j'arrive dans le groupe avec mon ex-collègue Gérard Hourbette (violon), maintenant disparu,
en 1971. C'était sur l'invitation du fondateur Rocco Fernandez (guitare et chant). Puis il y a eu une refondation du groupe, avec une recherche de style, de langage, et on a sorti l'album Symphonie pour le jour où brûleront les cités (AZ Production) en 1976.

Votre découverte du rock ?
Alors, ça remonte à loin ! J'écoutais des choses un peu bateau, puis tout d'un coup, comme nous habitions pas loin de la frontière belge, j
e découvre à la télévision flamande un concert de Frank Zappa. Et je me dis que c'est ça que je veux faire. On voyait des musiciens couchés sur un lit,
des sketchs, une séance de pets, de rots… Rires.)

Comment était l'industrie musicale à vos débuts ?
C'était la liberté. Il n'y avait pas de plans de carrière, beaucoup moins de marketing... Et nous, on était une sacré bande d'allumés, parfois très inconscients.

Et comment étaient vos premiers concerts avec Art Zoyd ?
Quand on faisait les premières parties de Magma, ça nous mettait en contact avec un public qu'on ne connaissait pas. Ils venaient pour Magma
et nous, on était une espèce d'anti-Magma car on était un groupe sans batterie alors que chez Magma, la star, c'est le batteur (Christian Vander),
mais ça se passait très bien.

Vous, c'était : trompette, violon et basse.
Qui, c'était une formation squelettique, mais tout était électrifié. Avec ma basse, j'occupais toute la place d'un batteur. J'assurais toutes les
rythmiques, je me servais des archets du violon. Il y'avait un jeu rythmique inspiré de Stravinsky, de Bartok, des compositeurs de l'Est...

Avec une volonté de ne pas être trop planant malgré l'absence de batterie ?
Oui, on sortait du mouvement un peu babacool. On était une nouvelle génération, on avait envie d'autre chose.

Vous êtes resté avec Art Zoyd une trentaine d'années.
26 ans ! On a toujours eu une volonté d'originalité, et on à continué dans la voie des débuts jusqu'à l'album Phase IV (1982), c'était le point
d'orgue de cette façon de travailler. Nous avons été contactés ensuite par le chorégraphe Roland Petit qui nous a proposé d'écrire la musique de
son prochain ballet, comme il l'avait fait avec la musique de Pink Floyd en 1972, C'est là qu'on a commencé à avoir des claviers dans le groupe,
puis des sampleurs, on a ensuite monté des ciné-concerts avec Nosfératu et Faust qu'on a joués partout dans le monde.

Vous quittez le groupe en 1997.
C'était la fin d'un cycle : on avait des désaccords, mon collègue partait sur de la musique contemporaine avec plus de machines,
et moi, je voulais le contraire. Depuis, je mène ma barque comme je veux.

Tu sors ces jours-ci une compilation de tes cinquante ans d'activisme musical. Pourquoi avoir évité le tracklisting chronologique ?
Ça a été douloureux ! J'ai commencé en voulant faire émerger des petits concepts sur chacun des trois disques. Mais ça s'emboitait mal, ça se
cassait la gueule. Alors j'ai commencé par un truc des années 2020, suivi d'un morceau de 1976 et ainsi de suite, Le principal était que ça colle
musicalement... Donc ça saute du coq à l'âne, mais c'était le souhait.

Et que pensez-vous de l'industrie musicale en 2022 ?
J'aimerais qu'on abatte les cloisons, qu'on mélange les gens qui font de la techno, du rock, du jazz... Là, on entend des trucs auto-tunés d'un
côté, la musique classique et contemporaine d'un autre ; les gens du jazz qui ne veulent pas en sortir. Donc : un peu plus de mixité musicale !

50 ans de musique(s): compilation 3-CD sur
le label Monstre Sonore/WTPL Music


Entretien Laurence Rémila
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BEST MAGAZINE #3 (F)
par Kevin Letalleur - septembre 2022


THIERRY ZABOITZEFF, cinquante nuances de génie.
L’inclassable THIERRY ZABOITZEFF est de retour cet automne avec l’anthologie 50 ans de musique, rétrospective épique d’une carrière hors du commun.

Le grand public tend à l’oublier, mais au cœur des années 70, la France fut un haut lieu de la musique progressive. Moins rayonnante que la légendaire scène britannique – portée par la richissime école de Canterbury – le courant prog français se démarquait alors par un avant-gardisme poussé dans ses retranchements les plus barrés. Avant-gardiste, le rock progressif l’était pourtant déjà bien assez : les expérimentations sonores, hybridations et autres bizarreries étant l’essence même de ce mouvement. Ange, Triangle ou encore Gong regardèrent ainsi droit dans les yeux King Crimson, Jethro Tull et autres Genesis – groupe qui par ailleurs rencontrera à ses débuts un succès plus important en France et en Belgique que dans son Angleterre natale. Néanmoins, une formation se chargera d’envoyer plus que toutes les autres le prog français dans le cosmos. Ce groupe, c’est bien évidemment Magma.

La mythique formation fondée par Christian Vander – que d’aucuns considèrent comme le plus grand batteur de tous les temps – a embrassé les principes du genre avant tant de véhémence et d’intensité que même l’étiquette « progressive » leur apparaissait trop étroite. Ils inventèrent ainsi un genre, le zeuhl, considéré comme « multidirectionnel et spirituel » plus encore que musical, mais aussi carrément un dialecte : le kobaïen. Un certain nombre de groupes vont alors explorer les chambres magmatiques creusées par la bande à Vander et, pour certains, forer jusque dans les calderas les plus reculées de cette musique d’un genre nouveau. C’est parmi ces foudingues du son que l’on retrouve les Nordistes d’Art zoyd.

Fondé en 1969 par Gérard Hourbette, Rocco Fernandez, et évidemment Thierry zaboitzeff, Art zoyd n’était au départ qu’une formation hard rock comme il en existait à l’époque tant d’autres. C’est sous l’impulsion du dernier nommé que le groupe va progressivement faire évoluer sa musique et abandonner l’instrumentarium traditionnel du rock, délaissant guitares et batteries au profit du piano et des violoncelles. C’est dans cette démarche néo-classique qu’Art zoyd sort en 1976 Symphonie pour le jour où brûleront les cités, premier album d’une discographie labyrinthique et en constante évolution. Ils deviendront dès lors les chantres de l’un des mouvements les plus radicaux du prog, le rock in opposition qui, comme son nom l’indique, s’oppose inconditionnellement

au format radiophonique et plus généralement, aux diktats de l’industrie musicale.

Durant les années 80, Art zoyd s’éloignera progressivement de ses racines néo-prog pour diriger sa musique vers un style plus synthétique, considérant l’arrivée du fameux Yamaha DX7 et des samples comme l’opportunité de repousser plus loin encore les frontières du son. En parallèle, zaboitzeff se lance à l’époque en solitaire avec la sortie en 84 de Prométhée, là encore le début d’un catalogue parmi les plus prolifiques de l’Hexagone – et qui le verra parfois sortir plusieurs disques par an. C’est précisément ce pan de la carrière du maubeugeois que l’anthologie 50 ans de musique revisite, à travers trois CD d’une quinzaine de tracks chacun. « Seulement », serait-on tenté de dire.

L’histoire de Thierry zaboitzeff, c’est celle de cinquante ans de pure création musicale, malheureusement méconnue du commun des mortels, auquel le monsieur n’appartient probablement pas. Là se situe la malédiction des authentiques visionnaires et des pionniers véritables : être condamné aux oubliettes de la mémoire collective des générations futures et aux quolibets de leurs contemporains car, comme le veut la célèbre formule de Jonathan Swift : « Quand un vrai génie apparaît en ce monde, on peut le reconnaître à ce signe que les imbéciles sont tous ligués contre lui ».

Kevin Letalleur
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HEMISPHERE SON (F)
Par Franck Marguin 15/11/2022

Site web


Les larmes de Prométhée
Cofondateur du collectif Art Zoyd, Thierry Zaboitzeff revient aujourd’hui, en 3 CD, sur 50 années de musique(s). L’occasion de redécouvrir l’une des aventures les plus singulières et transgenres du paysage musical français.


En 1984, le musicien Thierry Zaboitzeff publie, sur le label Cryonic, un premier album solo nommé Prométhée. La pochette du disque, une peinture signée Raymond Majchrzak, montre deux médecins visiblement inquiets au chevet d’un homme mourant, qui n’en a vraisemblablement plus pour longtemps. L’étrangeté du rapport entre cette image et le nom de Prométhée me hante depuis la découverte de ce disque, quelques années après sa sortie. La déconstruction du mythe pour l’ancrer dans un quotidien aussi banal que sordide laisse imaginer une musique puisant ses racines dans la même dichotomie, liant le sacré à la grisaille du quotidien.
Quand sort ce premier opus solo, Prométhée, Thierry Zaboitzeff, natif de Maubeuge, a déjà une longue carrière derrière lui, au sein du collectif Art Zoyd, actif depuis 1968. Collectif plus que groupe, car une trentaine de musiciens y sont venus jouer au fil du temps, même si le noyau dur était composé de Zaboitzeff, Patricia Dallio et Gérard Hourbette, dont le décès en 2018 marqua la fin des activités après 50 ans de bons et loyaux services. Formé dans un premier temps pour des musiques de scène, théâtre, danse, Art Zoyd sort son premier disque en 1976, le déjà très réussi Symphonie Pour Le Jour Où Brûleront Les Cités, et les quinze ans qui suivent voient fleurir les chefs-d’œuvre : Musique pour l’Odyssée (1979), Génération sans Futur (1980), Phase IV (1982), Les Espaces Inquiets (1983), Le Mariage du Ciel et de l’Enfer (1985), ainsi que, nos deux favoris, Berlin (1987) et Nosferatu (1990). 
Lorsque le groupe débute, il est sans équivalent ; cette musique n’a jamais été entendue avant, et ne sera pas plus copiée par la suite. Pourtant, l’influence d’Art Zoyd sera déterminante sur toutes les musiques aventureuses de la fin du XXe siècle. Influente, mais inimitable. Dès les débuts les caractéristiques si fortes du son Art Zoyd sont affirmées. C’est une musique liturgique, qui ne craint pas d’utiliser les symboles, et qui mêle des influences aussi diverses que le rock progressif, le free jazz, le néo-classique, la musique contemporaine et, lointaine cousine, la musique expérimentale. Les œuvres sont souvent instrumentales, et lorsque la voix se fait entendre, elle est gutturale, semble sortir des ténèbres, scandant plus qu’elle ne chante.
Habitué à composer pour la scène, Art Zoyd se prend de passion pour une autre discipline, celle de composer pour le cinéma. Mais leur spécificité va être de composer des musiques pour des films issus de l’âge d’or du muet. Pionniers dans le genre, ils créent de gigantesques et impressionnants ciné-concerts, exercice auquel se prêtent aujourd’hui de nombreux musiciens mais qui, à l’époque, s’apparentait à un véritable événement. Ils inaugurent cette série avec le Nosferatu de Murnau, enchaînent avec le Faust du même cinéaste, et font ensuite découvrir au public le merveilleux Häxan de Benjamin Christensen, à une époque où le film est invisible. Suivent des bandes-son pour le Metropolis de Fritz Lang, La Chute de la Maison Usher de Jean Epstein, L’Homme à la caméra de Dziga Vertov. Ces ciné-concerts sont de véritables expériences scéniques. Art Zoyd ne se contente pas de jouer la musique d’un film en se cachant derrière où à côté de l’écran, mais se met en scène de manière spectaculaire, grandiloquente parfois, créant un spectacle vivant où l’image et le son communiquent en permanence. Les films sont ainsi sortis de leur muséification programmée pour trouver une résonance contemporaine salvatrice.
Le disque qui nous fait parler de Thierry Zaboitzeff ici a le mérite de se nommer on peut plus simplement : 50 ans de musique (s). Outre le chiffre 50 qui est impressionnant (qui peut en effet se targuer d’avoir composé pendant 50 ans et de continuer à le faire avec la même aisance?), c’est le « s » entre parenthèses qui retient l’attention. Véritable touche-à-tout, multi-instrumentiste (même si la basse a toujours été son instrument de prédilection), Zaboitzeff a multiplié les styles, les envies, les projets, ce qui fait que, 50 ans plus tard, sa musique est forcément plurielle. Ce copieux coffret de 3 CDs remplis jusqu’au débord, présente près de 4 heures de musiques réparties sur 43 plages. L’intelligence du tracklist est de ne pas organiser les morceaux par ordre chronologique, ni par formation, pour mieux réorganiser l’ensemble de la manière la plus harmonieuse possible, créant une œuvre nouvelle, gigantesque, protéiforme, semblant en mutation perpétuelle, nous offrant la possibilité de dévorer à nouveau ce foie incandescent et à jamais régénéré.
On y entend donc du Art Zoyd, extraits des Espaces Inquiets, Phase IV, un remix de Marathonnerre I, et des réinterprétations de deux de ses meilleures chansons : Unsex Me Here et Baboon’s Blood, dont les versions originales figuraient sur la version CD de Berlin. Zaboitzeff a énormément composé pour Art Zoyd, Hourbette et lui étant les deux maîtres-d’œuvre du projet, mais il a volontairement choisi ici de sous-représenter cette partie de carrière ô combien prolifique, privilégiant les enregistrements sans doute moins connus du public. Le coffret nous propose aussi deux morceaux excellents d’Aria Primitiva, trio formé avec Cécile Thévenot et Nadia Ratsimandresy et offrant des atmosphères électroniques syncopées, ou ambient, de toute beauté ; ainsi que six titres du projet Zaboitzeff & Crew, le crew en question étant composé de Gerda Rippel et Sandrine Rohrmoser. Le gros morceau étant en toute logique consacré à ses travaux solos. Car, l’air de rien, de façon de plus en plus confidentielle, et depuis l’inaugural Prométhée, Thierry Zaboitzeff a signé de son nom seul près d’une vingtaine d’albums. Nous redécouvrons avec beaucoup d’intérêt des extraits des excellents Dr. Zab & His Robotic Strings Orchestra (1992) ou Heartbeat (1997), d’où est issu le superbe El Amor Brujo (Live), l’un des morceaux les plus enthousiasmants du coffret.
Même si ce triple album est une compilation, il est bon de préciser qu’une grande partie des plages ont été retravaillées pour l’occasion. Entre les remakes, les remixes, les versions remasterisées, celles rejouées au piano, les versions live, les versions courtes, les longues, même l’auditeur le plus attentif de l’œuvre de Thierry Zaboitzeff aura le sentiment, légitime, de redécouvrir un travail sans cesse réinventé. Car c’est de cela qu’il s’agit, finalement. Ces 50 de musique (s) nous baladent depuis les cendres du rock progressif de la fin des années 60 jusqu’à la techno du début du XXIe siècle, des expérimentations les plus folles jusqu’à des moments de recueillement plein de réserve et d’intensité mêlées, et ce voyage, ces voyages, ne sont pas ceux qui se font d’un point A, qui serait le départ de quelque chose, à un point B, son arrivée ; non, la traversée à laquelle nous invite ici Thierry Zaboitzeff nous plonge dans l’œil du cyclone, au sein d’une spirale en mouvement dont le seul chemin envisageable, fiable, à travers ce dédale inextricable de musique (s), est celui qu’aura choisi de se tracer l’auditeur. Seul, mais joliment accompagné.
Franck Marguin

À propos de 50 ans de musique (s),
coffret rétrospective de 3 CDs de Thierry Zaboitzeff – Monstre Sonore / Thierry Zaboitzeff / WTPL-Music 
Distribution : PIAS

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Crédits videos : Hannes Klein - Explosive Egg | Crédits photos : Hannes Klein

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